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2.2.6 – Des phénomènes d'eutrophisation

Dans le document ETAT DES LIEUX "MER ET LITTORAL" (Page 180-183)

Le phénomène d'eutrophisation résulte d'un enrichissement du milieu en éléments nutritifs.

Sur le littoral, il traduit par un développement important d’algues, appelé bloom, Selon les conditions, il se manifeste :

• soit par le développement de macro-algues, principalement des ulves : c'est le phénomène de marées vertes rencontrées principalement sur les côtes bretonnes mais également en Centre-Atlantique et en Basse-Normandie.

• soit par le développement d'algues microscopiques, le phytoplancton, provoquant des eaux colorées, avec un éventuel risque de toxicité. Certaines algues flagellées libèrent ainsi des toxines qui, même à des concentrations peu élevées, peuvent être néfastes l’homme, notamment au travers de la consommation de coquillages infestés, les coquillages se nourrissant essentiellement de phytoplancton. Les proliférations d’algues microscopiques sont localisées des Flandres au bassin d’Arcachon et dans les lagunes de Méditerranée.

Si des conditions naturelles peuvent les provoquer, les blooms algals résultent essentiellement des apports excessifs d’azote et de phosphore en mer dus aux activités humaines.

Toutefois, pour provoquer un développement massif d’algues, ces apport doit être associé à un bon éclairement, un faible brassage et un confinement des masses d’eau. Le phénomène se rencontre ainsi essentiellement dans les baies semi-fermées, les estuaires et les lagunes méditerranéennes.

Le conséquent cadrage législatif communautaire et international sur le sujet de l’eutrophisation littorale traduit l’importance du phénomène, tant par sa présence que par la difficulté d’agir pour le réduire.

Depuis 1991, plusieurs directives européennes et conventions internationales couvrent ainsi la thématique de l’eutrophisation littorale, ce qui souligne la nécessité de prendre en charge le phénomène en vue d’une mise en cohérence inter-directives, tant sur les actions à mener que sur les résultats à rapporter à la Commission.

La directive Nitrates

La directive européenne 91/676/CEE, dite directive Nitrates, a pour objectif de réduire la pollution des eaux par les nitrates d’origine agricole. En France, elle se traduit par la définition de territoires (les "zones vulnérables") où sont imposées des pratiques agricoles particulières pour limiter les risques de pollution (les "programmes d'actions"). Ces territoires et ces programmes d’action font régulièrement l’objet d’actualisations.

Ces zones ont été révisées en 2012 sur la base des résultats de concentrations des eaux souterraines et superficielles observés en 2010-2011 et des données sur l'état de l'eutrophisation des eaux littorales et marines.

Aujourd’hui, environ 55 % de la surface agricole de la France est classée en zone vulnérable : cela correspond aux régions où l’activité agricole est la plus importante. La révision des zones vulnérables s’est traduite par le classement de 1 440 communes supplémentaires aux quelque 18 400 communes déjà concernées, essentiellement localisées dans les bassins Adour-Garonne, Loire-Bretagne, Rhône-Méditerranée et Seine-Normandie. 617 communes ont été déclassées au vu de l’amélioration ponctuelle de la qualité des eaux superficielles et souterraines traduisant les efforts réalisés par les agriculteurs dans la maîtrise des pollutions azotées. Ces communes déclassées sont essentiellement localisées dans les bassins Adour-Garonne et Artois-Picardie.

Parallèlement sont poursuivies les actions de réduction de l'utilisation du phosphore, qui contribue également à la multiplication des végétaux aquatiques et des algues indésirables comme les cyanobactéries. Les sources d’émissions de phosphore sont diverses : domestiques, industrielles ou agricoles. Les apports de phosphore issus de détergents sont loin d’être négligeables et l’utilisation de détergents sans phosphate constitue une action à la source efficace pour lutter contre l’eutrophisation.

Les fabricants de détergents pour lave-linges ont augmenté progressivement sur le marché français la part des lessives sans phosphate. Mais les phosphates continuent à entrer dans la composition des détergents textiles à usage industriel et dans la composition des détergents pour lave-vaisselle à hauteur de 20 000 tonnes par an au total. Un certain nombre de stations d'épuration des eaux usées traite le phosphore.

Chapitre 2 – La protection des milieux, des ressources, des équilibres biologiques et écologiques ainsi que la préservation des sites, des paysages et du patrimoine

La directive-cadre sur l'eau

L’eutrophisation littorale est traitée dans la directive-cadre sur l'eau (DCE – cf. chapitre 2.1.1) au travers des éléments de qualité "blooms de macro-algues" et du paramètre "bloom" pour le phytoplancton ainsi qu’au travers des éléments de qualité physico-chimiques. Par ailleurs, l'un des objectifs de la DCE, outre le bon état des masses d'eau, est l'atteinte des objectifs des zones protégées dont font parties les zones vulnérables identifiées au titre de la directive Nitrates, directive qui fait partie intégrante de la DCE.

En ce qui concerne les macro-algues, entre l’estuaire de la Seine et l’Île de Ré, 18 secteurs, sur les 63 étudiés entre 2005 et 2010 sont dans un état médiocre ou mauvais. Ils sont majoritairement situés en Bretagne mais également sur la Côte Fleurie dans le Calvados. De nombreuses actions ont été entreprises en Bretagne (cf. encadré page suivante). Elles ont permis de faire diminuer significativement les concentrations en nitrates des cours d’eau qui restent cependant encore trop élevées pour limiter les marées vertes.

Pour le phytoplancton, sur la période 2007-2012, 95 des 116 masses d’eau étudiées sur l’ensemble du littoral sont dans un bon ou très bon état. Onze sont dans un état moyen. Elles sont situées sur le littoral du Nord – Pas-de- Calais, à proximité des fleuves, comme la Seine ou la Vilaine, et dans les lagunes. Enfin, 10 masses d’eau dans un état médiocre ou mauvais : elles situées en baie de Somme et dans les lagunes méditerranéennes. D’après un suivi spécifique au Languedoc-Roussillon, la situation n’est pas bonne pour un certain nombre de lagunes. Les importantes réflexions et travaux mis en œuvre sur les bassins versants depuis plusieurs années ont tout de même permis de faire diminuer de manière significative la part des eaux de mauvaise qualité

Évolution de la qualité des eaux lagunaires du Languedoc-Roussillon concernant le phytoplancton

La directive-cadre stratégie pour le milieu marin

Dans le cadre de la directive-cadre stratégie pour le milieu marin (DCSMM – cf. chapitre 2.1.2), le phénomène d'eutrophisation littoral est appréhendé au travers du descripteur 5 (D5) du bon état écologique.

Dans la décision de la Commission européenne du 1er septembre 2010 (2010/477/UE), ce descripteur est ainsi libellé : "l’eutrophisation d’origine humaine, en particulier pour ce qui est de ses effets néfastes, tels que l’appauvrissement de la biodiversité, la dégradation des écosystèmes, la prolifération d’algues toxiques et la désoxygénation des eaux de fond, est réduite au minimum.".

Le bon état au titre de la DCSMM est très largement inspiré, tant du bon état au titre de la DCE dans la limite du premier mille nautique à partir de la ligne de base avec une extension de cette approche vers le large, que des travaux menés dans le cadre de la convention OSPAR (voir ci-dessous).

Dans le cadre des conventions de mers régionales

La convention OSPAR pour la protection de l’Atlantique Nord-Est (1992) fixe un objectif de réduction de 50% des apports de nutriments au littoral entre 1985 et 1995 ou le plus tôt possible.

D'après le bilan de santé OSPAR (2010), l'eutrophisation présentait toutefois en 2010 encore un problème, notamment dans les régions des côtes françaises, et l'objectif d'un milieu marin exempt d'eutrophisation en 2010 n'a été que partiellement atteint.

Si les réductions des rejets de phosphore dépassent l'objectif OSPAR de diminution de 50% par rapport à 1985, le problème principal est celui des rejets d'azote, en particulier ceux provenant de l'agriculture. Les effets positifs des mesures de réduction peuvent prendre des dizaines d'années à se manifester en mer compte tenu de la diffusion progressive des nutriments dans le sol et les sédiments. Les efforts doivent donc se poursuivre, et l'objectif de réduction des apports de 50%

par rapport à 1985 perdure.

Par ailleurs, la stratégie MED POL de surveillance continue de l’eutrophisation, dans le cadre de la convention de Barcelone pour la protection de la Méditerranée (1976), vise la réduction du phénomène sur trois typologies de sites en Méditerranée, à savoir les zones côtières affectées, les zones d’activités aquacoles intensives et les lagunes côtières exposées à la menace d’eutrophisation.

Plan de lutte contre les algues vertes en Bretagne

Pour lutter contre les phénomènes marées majoritairement présents en Bretagne, un plan d'action de lutte contre les algues vertes a été adopté le 5 février 2010 pour la région Bretagne. Ses objectifs sont les suivants :

1 – Dès 2010 – 2011

Assurer une gestion irréprochable des algues vertes :

• en améliorant le ramassage des algues vertes et leur évacuation vers des plateformes de compostage,

• en renforçant la sécurité sanitaire des personnes et la salubrité du littoral.

Engager des actions pour réduire les flux de nitrates :

• en s’assurant de la bonne conformité des installations d’assainissement collectives et individuelles,

• en mettant en place dans toutes les baies algues vertes un socle commun de mesures à destination des exploitants agricoles pour mieux appliquer la réglementation existante sur les nitrates existante,

• en engageant sur les deux baies pilotes de Saint-Brieuc et de Lannion des actions préventives adaptées aux spécificités locales (actions vers les agriculteurs, les collectivités, les industriels et les particuliers), puis en les généralisant ensuite aux six autres baies concernées.

2 – A échéance 2015

Obtenir une réduction des flux de nitrates de 30 à 40% au moins dans ces huit baies, comme prévu au titre du SDAGE et dans les conclusions du Grenelle de la Mer.

La réduction des flux de nitrates sera obtenue par la combinaison d'un meilleur contrôle de la réglementation, de l'extension des zones naturelles (objectif indicatif de 20% sur la baie pilote de Saint-Brieuc), du développement de la méthanisation et de l'évolution des systèmes de production vers des systèmes à très faibles fuites de nitrates.

Pour répondre à ces objectifs, le plan de lutte contre les algues vertes comprend trois volets :

• un volet portant sur l'amélioration des connaissances et la prévention des risques, en constituant un groupement de recherche national et en préparant des recommandations à destination du public et des travailleurs chargés de la collecte et du traitement des algues.

• un volet relatif aux actions curatives : amélioration du ramassage et développement des capacités de traitement des algues échouées.

• un volet préventif comprenant les actions à mettre en œuvre pour limiter les flux d'azote vers les côtes. Ce volet comprend l’amélioration des techniques de traitement des effluents des eaux usées générées par les activités industrielles ou agricoles ainsi que les collectivités locales, l’aménagement du territoire et le changement des pratiques agricoles.

Ce plan mis en œuvre sur 5 ans s'appuie sur un accompagnement financier important (134 M€) de la part de l'État, des collectivités territoriales, de l'agence de l'eau Loire-Bretagne et de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe).

3 – Mise en œuvre

Sur l'amélioration des connaissances

Les recherches portent sur les facteurs de croissance et de prolifération des algues vertes, les relations entre bassins versants et écosystèmes côtiers, les nouvelles technologies de récolte, les valorisations envisageables. Un rapport conjoint des ministères de l'Écologie et de l'Agriculture a dressé en mars 2012 un bilan des connaissances scientifiques sur les causes de prolifération de macro-algues vertes.

Sur le volet curatif

Le plan de lutte contre les algues vertes s'est concrétisé en Bretagne par la construction de trois unités de traitement des algues et la systématisation du ramassage sur les plages.

Sur le volet préventif

Les actions ont porté sur la réduction des quantités d'azote utilisée et des transferts, avec le renforcement de la réglementation nitrates, la signature de projets de territoires sur les huit baies à algues vertes et la mise en place d'un suivi des reliquats d'azote.

Ce suivi des reliquats d'azote a porté en 2012 sur près de 7000 analyses concernant 2385 exploitants agricoles, ainsi que sur des parcelles de référence suivies sur plusieurs années.

Chapitre 2 – La protection des milieux, des ressources, des équilibres biologiques et écologiques ainsi que la préservation des sites, des paysages et du patrimoine

Dans le document ETAT DES LIEUX "MER ET LITTORAL" (Page 180-183)