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La méthode de luminescence optiquement stimulée est basée sur l’existence de la radioactivité naturelle. Les radioéléments présents dans les matériaux étudiés, principalement le potassium, l’uranium et le thorium comportent des isotopes naturellement radioactifs qui vont donner lieu à des désintégrations spontanées en émettant des rayonnements ionisants et des particules énergétiques présentant différents pouvoirs de pénétration dans la matière.

Figure II-4 : Représentation schématique des bandes d’énergie d’un cristal parfait (a) et réel (b)

L’interprétation physique du phénomène de luminescence est basée sur la « théorie des bandes » (Figure II-4). L’interaction du rayonnement ionisant avec la matière consiste à fournir aux électrons une quantité d’énergie suffisante pour conduire à l’ionisation des atomes. L’énergie cédée aux électrons permet leur transition de la bande de valence vers la bande de conduction. Dans un cristal idéal, c’est-à-dire sans défauts, ces électrons perdraient assez rapidement leur énergie d’excitation et reviendraient à l’état initial, dans la bande de valence. Néanmoins, dans un cristal réel les électrons seront temporairement emprisonnés par des défauts du cristal. Dans cette étude, l’intérêt est focalisé sur des défauts du cristal de quartz.

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Défauts dans un cristal du quartz

La structure cristalline du quartz, constitué de silicium et d’oxygène, consiste en un réseau tridimensionnel de tétraèdres SiO4. Il peut présenter plusieurs types de défauts (Figure II-5). Les imperfections responsables de l’existence de la luminescence sont des défauts de type ponctuel qu’on divise dans deux groupes : des défauts intrinsèques correspondant aux changements d’arrangement dans le cadre de réseau cristallin et des défauts extrinsèques liés à la présence d’impuretés extérieures.

Figure II-5 : Représentation schématique des principaux défauts ponctuels du quartz (d’après Götze et al., 2001, cité par Duttine, 2005)

Les défauts intrinsèques correspondent à des lacunes atomiques dans le réseau cristallin (lacune d’oxygène ou de silicium), à une présence d’atome en position interstitielle (par exemple la présence des atomes qui s’insèrent dans les espaces vides du cristal ou la présence d’un oxygène supplémentaire conduisant à la formation d’une liaison peroxyde) ou à un déplacement d’un atome du squelette cristallin vers une position interstitielle. Ce dernier type de défaut est dû à la rupture d’une liaison Si-O sous l’action de rayonnements ionisants ou lors d’une élévation importante de la température.

Les défauts extrinsèques sont associés à la présence d’impuretés en substitution ou en position interstitielle. Les substitutions d’atomes sans modification du réseau cristallin doivent satisfaire une condition de la compensation des charges électriques. Lors de la formation du quartz, le silicium (Si4+) peut être remplacé par des ions de

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même charge formelle tels que le germanium (Ge4+) et le titane (Ti4+) pour former les défauts notés respectivement [GeO4]0 et [TiO4]0, mais aussi par l’aluminium (Al3+) ou le fer (Fe3+). L’insertion de ces deux dernières impuretés dans le réseau à la place du silicium nécessite la présence d’un ion monovalent (M+) en position interstitielle pour assurer la neutralité électrique ; les défauts correspondants sont notés [AlO4/M+]0 et [FeO4/M+]0, où M+ peut être H+, Na+, Li+ ou exceptionnellement K+. Le silicium peut être également remplacé par quatre ions H+ ce qui conduit à une création de défaut « hydrogarnet », noté [H4O4]0.

Le concept de « centres-pièges »

L’irradiation d’un cristal par le rayonnement ionisant qui conduit aux transitions d’électrons de la bande de valence vers la bande de conduction, comme décrit ci-dessus, entraîne des nombreuses modifications au niveau des défauts ponctuels. Le défaut qui a la capacité de capturer, mais aussi relâcher le porteur de charge représente un « centre-piège ». On distingue deux groupes de centres-centre-pièges (Figure II-6) : des centres donneurs capables de fournir un électron et des centres accepteurs d’électrons contenant un « trou », une lacune d’électron. Le défaut où les porteurs de charge de signe opposée peuvent être capturés, est nommé un « centre de recombinaison ».

Figure II-6 : Représentation schématique des centres à électron (e-) et à trou (h+) créés après irradiation du quartz à température ambiante (Duttine, 2005)

29 La nature des centres-pièges a un rapport avec le caractère des défauts de cristal du quartz. Les centres accepteurs sont associés aux trois types de défauts cristallins. Le centre à électron noté [SiO3]+ correspond à une lacune d’oxygène. L’électron peut aussi être capturé au niveau du silicium ce qui conduit à la formation du centre noté [SiO4/Li+]0 où le lithium est placé en position interstitielle et fonctionne en tant qu’un compensateur de charge. De même principe, les atomes en substitution du silicium, Ge4+

et Ti4+, peuvent également capturer un électron. L’excès de charge est ici compensé par la présence d’un ion monovalent M+ (Li+, Na+ ou H+) en position interstitielle.

Les centres donneurs, ou centres à trou, sont liés aux quatre types de défauts de cristal. Le centre peroxy, noté [SiO5]- est créé à partir du défaut intrinsèque, qui constitue la liaison peroxyde, par rupture d’une liaison Si-O lorsque le quartz est chauffé à haute température (plus de 600°C). Le centre NBOHC noté [SiO4]+ peut se former à partir d’un défaut de type Si-OH ou à partir de la liaison peroxyde par rupture de la liaison O-O. Le centre aluminium, noté [AlO4]0 ou [AlO4/h+]0 a pour précurseurs les défauts de type [AlO4/M+]0, où M+ = Li+, Na+ ou H+. Le centre [H4O4]+ ou [H3O4]0, associé avec quatre ou trois protons, se forme au lieu d’une lacune de silicium.

Le processus de capture d’électrons par les centres-pièges est cumulatif ; le nombre d’électrons capturés est proportionnel à la durée d’exposition de la matière au rayonnement ionisant.

Phénomène de luminescence

La quantité d’énergie nécessaire pour libérer les électrons et les trous piégés (énergie d’activation) dépend de la nature des centres-pièges concernés. La probabilité d’éviction de l’électron [λ, exprimé en en s-1] est décrite par une équation suivante :

λ= s exp(-E/kT) (Équation 1)

où s [en s-1] correspond au facteur de fréquence de piège donné, E à l’énergie d’activation [en J] exprimant la différence d’énergie entre la bande de conduction et le niveau du piège, k à la constante de Boltzmann [k = 1.38×10-23 J.K-1] et T à la température [en K]. Pour un piège donné, plus la différence d’énergie qui sépare une bande de conduction et le piège est grande, plus la probabilité que l’électron effectuera une transition est faible.

Une situation qui permet aux électrons d’acquérir suffisamment d’énergie pour quitter le piège et parvenir à la bande de conduction est une excitation optique ou

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thermique. Par conséquent, les électrons et les trous, remis en mouvement dans le cristal, peuvent être à nouveau capturés par d’autres centres-pièges ou se recombiner avec des trous piégés au niveau de centres de recombinaison. Si la recombinaison s’est déroulée dans un centre dit « luminescent », l’énergie libérée par l’électron descendant du niveau d’énergie supérieure au niveau d’énergie plus bas se traduit par une émission de lumière : la luminescence.

Bien que ce modèle simple décrivant un piège et un centre de recombinaison permet de comprendre les aspects principaux de la production de luminescence, la réalité du matériau semble beaucoup plus complexe. Le phénomène de luminescence du quartz, avec une bande d’émission caractéristique à 380 nm dans la région ultraviolet, est un résultat d’une réponse complexe à l’irradiation, l’éclairement et la chauffe. Certains auteurs ont élaboré des modèles décrivant des phénomènes de compétition entre pièges à l’origine de comportements observés en TL et OSL (Mc Keever & Chen, 1997). Le modèle le plus récemment proposé par Bailey (Bailey, 2001) comporte cinq pièges et quatre centres de recombinaison pour expliquer l’ensemble des phénomènes-types observés en TL et OSL.