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La grande fresque d'Éphésiens 1-3 efface tout doute concernant la place de l'Église dans la mission de Dieu. À l'image de la rédemption des Gentils, Dieu avait depuis toujours en vue la création de l'Église; un peuple de toutes langues, de toutes tribus, de toutes races uni par l'Esprit pour former

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un seul corps. Il ne nous faut pas adopter un point de vue réductionniste quant à la place de l'Église dans la mission de Dieu. Toutefois, il est nécessaire de séparer la mission de Dieu de la participation de l'Église à celle-ci. Cette dernière n'englobe pas la mission de Dieu. Tennent tient à affirmer que « central to a biblical vision of God's mission is that God does, in fact, work in and

through His church and that is central, not ancillary, to His mission. Indeed, the church is the only

community Jesus Christ has specifically instituted to reflect the Trinity and to participate in His mission in the world... biblical missiology must be built firmly on the foundation of Trinitarian theology... it must be simultaneously God centered and church focused327. »

Le fait que dans la missio Dei l'Église n'est plus l'acteur principal de la mission est loin de faire en sorte qu'elle est dépourvue de toute raison d'être. En fait, l'Église se situe là où elle a toujours été, c'est à dire participante à la mission de Dieu328. Il n'en a jamais été autrement sauf pour ceux qui

ont voulu imaginer que c'était le cas. Le mandat, « Comme mon Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie » inscrit ainsi l'Église dans une succession de mouvements qui tire son origine en Dieu lui-même et qui ne laisse planer aucun doute sur le bien-fondé de la place de l'Église dans la mission de Dieu. Sa participation se fond dans l'ensemble de l'oeuvre de Dieu, ce qui lui confère une place très particulière : « Based on the sending of one divine Person by another in the doctrine of the Trinity, the idea of missionary formation and practice came to be related to the church's participation in the activity of divine sending into the world329. »

Dans cette optique, l'Église est appelée à servir le monde en regardant le Père qui est le seul Dieu de l'histoire et en acceptant le cours de celle-ci comme le contexte à partir duquel elle doit opérer. Pour ce faire, elle s'appuie sur le Saint-Esprit afin d'être guidée dans sa contribution à la mission de Dieu dans le monde. Suivant le but de Dieu, elle participe à la réconciliation de toutes choses en Christ.

327 T. C. Tennent, Invitation to World Missions..., p. 58-59.

328 Selon Bassham, c'est à partir des années 1960 que « Participation in God's Mission to the World Became the Key to Defining the Function, Reality, and Validity of the Church Existence. » R. C. Bassham, « Seeking a Deeper... », p. 332.

121 Conclusion

En 2003, cinquante ans après Willingen330, la revue International Review of Mission a consacré un numéro à la missio Dei. On traçait alors un grand tableau de l'évolution de cette théologie. Des théologiens des quatre coins du globe reconnaissaient, comme le souligne Matthey dans l'éditorial du numéro, que la missio Dei ne s'était pas avérée seulement un remède à la crise de la mission, mais qu'elle avait servi à réviser complètement ses fondements : une mission enracinée « in much wider context of God's action for humanity331. »

L'un des effets positifs de la missio Dei, et cela en dépit qu'elle a dans les années 1970 créé une division au sein des Églises, est le fait qu'elle représente le centre de la réflexion missiologique de la plupart des grandes familles d'Églises. Par le fait même, la missio Dei a créé une plateforme théologique qui permet le dialogue.

Si l'évolution de l'architecture théologique de la missio Dei est indéniable, Matthey a aussi constaté qu'il s'est développé, au fil des cinquante dernières années, une certaine confusion autour du nouveau paradigme. La missio Dei s'est vite transformée en concept fourre-tout. Pour certains, la

missio Dei est devenue une espèce de logo derrière lequel se cachent les mêmes attitudes et les

mêmes motivations qui caractérisaient les paradigmes précédents. Pour d'autres, ils ont tellement élargi le domaine de l'oeuvre de Dieu qu'ils se sont mis à proposer une divinité qui témoigne d'elle- même dans les autres religions, ce qui a eu pour effet de contrer les revendications absolues du christianisme.

Hormis le problème des interprétations et des appropriations du concept, il ne faut pas dénier que certaines composantes théologiques de la missio Dei représentent, comme l'a souligné Matthey, des défis pour lesquels il faudra consacrer encore plusieurs travaux. De plus, les articulations les plus savantes de cette théologie de la mission devront être claires, si nous voulons que la missio

Dei puisse continuer à éclairer l'avenir de la mission.

330 Le thème de la conférence était « ''Missio Dei'' God's Mission Today ».

331 Jacques, Matthey, « Missio Dei Revisited: Willingen 1952-2002 », International Review of Mission, 92/367 (2003), p. 464.

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Si dans certains cercles on semble être timide à utiliser le terme missio Dei332, il n'en demeure pas moins qu'il est aujourd'hui le paradigme de référence de la plupart des missiologues évangéliques : « it seems now that the reference to a trinitarian and God-based approach to mission appears meaningful also to evangelical mission theologians and even the Pentecostals333 ».

La situation du MPEFQ semble toutefois différer de la tendance générale. Un simple regard sur les curriculums des écoles théologiques révèle que non seulement la missiologie est une grande négligée dans le domaine des études théologiques, mais aussi que les contenus des cours sur la mission en rapport avec la missio Dei sont peu nombreux. La mission dans ce milieu demeure significativement enracinée dans l'évangélisation et l'implantation de l'Église334.

Suivant l'évaluation de Matthey, il y a un autre effet positif de la mise en place de la missio Dei : la contextualisation. À ses dires, la missio Dei a offert aux Églises nationales des différentes régions du monde un cadre théologique de la mission avec lequel chacun a pu contextualiser l'expression de sa foi à partir de ses défis et de ses enjeux sans que soit remise en doute leur participation à l'avancement du Royaume de Dieu.

Une perspective plus large du travail de Dieu que celle proposée par le paradigme de la croissance de l'Église – conversion et plantation d'Église – incite chaque Église à investiguer son milieu, son contexte, de manière à mener plus adéquatement sa participation à la mission de Dieu.

332 Dans l'affirmation d'Iguassu de 1999 qui représente 160 praticiens, missiologues et dirigeants d'Églises évangéliques de 53 pays du monde, on retrouve la référence à une théologie trinitaire de la mission sans pour autant que l'on fasse allusion au terme missio Dei. Voir W. D. Taylor, Global Missiology for the 21st Century... Sans qu'il semble y avoir une telle tendance dans la littérature, Engelsviken avait quand même remarqué le fait : « The concept of missio Dei has not been so frequently used in missiological writings in recent years, yet we may observe that the matter itself is clearly present. ». T. Engelsviken, « Missio Dei... », p. 490.

333 Jacques Matthey, « God's Mission Today: Summary and Conclusions », International Review of Mission, 92/367 (2003), p. 581.

334 Le cours « Introduction à l'Église et sa mission » offert par le Séminaire baptiste évangélique du Québec (SEMBEQ) en fait bonne foi. http://www.sembeq.qc.ca/coursmagistrauxavenir.html (consulté le 28 août 2014). L'institut de théologie pour la francophonie (ITF), la dernière venue dans l'éducation théologique ainsi que l'École théologique évangélique de Montréal (ETEM-IBVIE) ont introduit des cours de missiologie dans leur curriculum. L'Institut biblique du Québec est le seul à offrir un certificat en mission, mais les liens avec la missio Dei ne semblent pas apparents.

123 Chapitre trois : La contextualisation

Dans les deux chapitres précédents, nous avons proposé pour le MPEFQ l'abandon de la théologie de la croissance au profit de l'adoption de la missio Dei comme théologie de la mission. L'impact d'un tel virage serait d'ouvrir le MPEFQ à des horizons de réflexions et de pratiques plus larges qui, d'après nous, sont nécessaires pour accroître sa participation à la mission de Dieu et au rayonnement de l'Évangile au Québec.

Pour compléter notre mise en place des cadres théologiques nécessaires de cette thèse, nous voulons ajouter à la critique de la TCE et à la proposition de la missio Dei comme théologie de la mission, ce troisième chapitre qui portera sur la contextualisation.

Le terme « contextualisation » est apparu pour la première fois335 en 1972 dans un rapport du

Theological Education Fund336 intitulé Ministry in Context. Devant l'évidence de la progression

de l'Évangile dans le monde et la présence des multiples changements que cela entrainait, les auteurs du rapport cherchaient à réfléchir sur la question de l'éducation théologique et plus particulièrement celle qui était dispensée par les institutions théologiques à travers le Tiers-Monde. Le cursus théologique, proposaient-ils, devait tenir compte de la réalité des différents contextes : « Their aspiration was to seek forms of theological expression deeply rooted in local culture and to develop structures for education and ministry appropriate to third world missiological situations337. »

Dès 1978, le concept était largement répandu et il fut inscrit dans le lexique missiologique. On affirmera alors que la contextualisation « is concerned primarily and fundamentally with the

335 En admettant que la « contextualisation » fut superficiellement appliquée de la part des missionnaires catholiques du XVIIe siècle, Ukpong croit que le principe de la contextualisation se retrouve néanmoins dans l'instruction de 1659

Ad Extoros. Justin S. Ukpong, « Contextualisation: a Historical Survey », AFER, 29/5 (1987), p. 280.

336 « The Theological Education Fund (TEF) was launched by the International Missionary Council (IMC) at its Ghana assembly in 1957-58. The new TEF was also given its first ("advance") mandate, which resulted in the extending of funds, textbooks, and library facilities to certain theological schools in the Third World. » Hesselgrave, David J. et Edward Rommen, Contextualization: Meanings, Methods, and Models, Grand Rapids, Mich., Baker Book House, 1989, p. 28.

337 Larry J. McKinney, « Evangelical Theological Education: Implementing Our Own Agenda », texte présenté le 20 août 2003 pour le compte de l'International Consultation for Theological Educators High Wycombe, UK.

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mission of the church338. » Shoki Coe est l'un de ceux qui a contribué à son intégration : « Coe contributed both conceptually and procedurally to missiology in the formulation of contextualization, offering a model that moved significantly beyond indigenization, which often simply placed indigenous individuals into the institutional and presuppositional forms of an alien Western culture339. »

Aujourd'hui, le concept est communément accepté dans tous les cercles missiologiques de toutes les traditions. Ses fondements semblent bien assurés comme le démontre sa multiple présence au sein de plusieurs catégories missiologiques à commencer par l'étude des textes bibliques eux- mêmes : « the term contextualization was quite recently minted, the activity of expressing and embodying the gospel in context sensitive ways has characterized the Christian mission from the very beginning...The New Testament itself bears witness to this process340 ». Plusieurs livres ainsi

que des thèmes bibliques sont étudiés en tenant compte de leur contextualisation341. De même, on

est tout autant sensible à la contextualisation des textes théologiques du christianisme primitif342. Dans les pratiques actuelles, la contextualisation est appliquée en milieu urbain343, en milieu

338 F. Ross Kinsler, « Mission and Context: The Current Debate about Contextualization », Evangelical Mission

Quaterly, 14/1 (1978), p. 23.

339 Ray Wheeler, « The Legacy of Shoki Coe », International Bulletin of Missionary Research, 26/2 (2002), p. 79. 340 Dean E. Flemming, Contextualization in the New Testament: Patterns for Theology and Mission, Downers Grove, Ill., InterVarsity Press, 2005, p. 15.

341 Leslie N. Pollard, « Paul: Principles for Leadership and Contextualization », dans Servants & friends, Berrien Springs, Michigan, Andrews University Press, 2014, p. 309-321; Kevin Salisbury, « Paul's First Letter to Timothy: an Example of Missional Contextualization », Colloquium, 44/1 (2012), p. 78-101; Klyne Snodgrass, « Stories With Prophetic Intent: the Contextualization of Jesus' Parables », dans Christoph Stenschke, R. Zimmermann et Gabi Kern,

Hermeneutik der Gleichnisse Jesu: Methodische Neuansätze zum Verstehen urchristlicher Parabeltexte, Tübingen,

Mohr Siebeck, 2008, p. 150-164; Rollin Gene Grams, « Contextualisation, Intertextuality, and Paul's Soteriology »,

Transformation, 23/1(2006), p. 3-16; David K. Strong, « The Jerusalem Council: Some Implications for

Contextualization: Acts 15:1-35 », dans Mission in Acts, Maryknoll, NY, Orbis Books, 2004, p. 196-208; Shawn B. Redford, « The Contextualization and Translation of Christianity: Acts 9:1-9; 22:3-33; 26:2-23 », dans Mission in

Acts, Maryknoll, NY, Orbis Books, 2004, p. 283-296; Richard Bauckham, The Gospels for All Christians: Rethinking the Gospel Audiences, Grand Rapids, Mich., W.B. Eerdmans, 1998; Dean E. Flemming, Contextualization in the New Testament: Patterns for Theology and Mission, Downers Grove, Ill., InterVarsity Press, 2005.

342Chris Thomas, « Donatism and The Contextualisation of Christology: a Cautionary Tale », dans Studia patristica, 70 (2013), Leuven Paris Walpole, Mass, Peeters, p. 365-369.

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ethnique344 et à des questions culturelles particulières345. Aussi, chaque grande famille d'Églises cherche pour elle-même à la définir346. Ces quelques exemples suffisent pour convenir que la contextualisation est bel et bien une catégorie missiologique importante en soi. Toutefois, ce n'est pas sans heurts qu'elle a fait son chemin. Encore aujourd'hui, on a parfois l'impression de se buter à un monstre théologique car il y a beaucoup de confusion à la définir : « there is still a great deal of confusion about what it means and how it should be practiced347. »

344 Eric Moeller, « Social Stratification, Power, and Contextualization: A Perspective From Latino Theology », Missio

apostolica, 20/2 (2012), p. 230-238; J. L. Alexander Jr., Native American Pentecost: Praxis, Contextualization, Transformation, Cleveland, Tenn, Cherohala Press, 2012; Seung Min Hong, « Korean Contextualization: a Brief

Examination », Evangelical Missions Quarterly, 47/2 (2011), p. 206-212; Rhodian G. Munyenyembe, Christianity

and Socio-Cultural Issues: The Charismatic Movement and Contextualization in Malawi, Mzuzu, Malawi, Mzuni

Press, 2011; David M. Johnstone, « Czarist Missionary Contact With Central Asia: Models Of Contextualization? »,

International Bulletin of Missionary Research, 31/2 (2007), p. 66-70; Chengmian Wang, Contextualization of Christianity in China: an Evaluation in Modern Perspective, Sankt Augustin; Nettetal, Institut Monumenta Serica;

Steyler Verlag (coll. Collectanea serica), 2007; Patrick Desplat, « The Articulation of Religious Identities and their Boundaries in Ethiopia: Labeling Difference and Processes of Contextualization in Islam », Journal of Religion in

Africa, 35/4 (2005), p. 482-505.

345 Scott W. Sunquist, « Biblical and Cultural Perspectives on Sexuality: Contextualisation in Time and Space »,

Journal of African Christian Thought, 16/2 (2013), p. 30-34; Scott N. Callaham, « Saving God's face: a Chinese

Contextualization of Salvation Through Honor and Shame », Journal of the Evangelical Theological Society, 56/4 (2013), p. 897-899; Aisha Geissinger, « "Umn al-Dardāʼ Sat in Tashahhud Like a Man": Towards the Historical Contextualization of a Portrayal of Female Religious Authority », Muslim World, 103/3 (2013), p. 305-319; Robert W. Blunt, « Oracles, Trauma, and the Limits of Contextualization: Naming the Witch in Contemporary Kenya »,

Journal of Religion in Africa, 43/3 (2013), p. 329-349; David J. Hesselgrave, « Sensitivity in Preaching Wrath and

Judgment: Contextualization of Roland Allen's "Full Gospel" for Japanese Buddhists », Trinity Journal, 33/2 (2012), p. 235-245; Kenneth Nehrbass, « Dealing With Disaster: Critical Contextualization of Misfortune in an Animistic Setting », Missiology, 39/4 (2011), p. 459-471; Brian M. Howell, « Multiculturalism, Immigration and the North American Church: Rethinking Contextualization », Missiology, 39/1 (2011), p. 79-85; Alan B. Howell, « Through the Kaleidoscope: Animism, Contextualization, and the Atonement », International Journal of Frontier Missiology, 26/3 (2009), p. 135-142; Tsu-kung Chuang, « Contextualization of Chinese Muslims: a Case Study of Muslims in Quanzhou, Fujeng », CGST Journal, 45 (2008), p. 63-72; LeAnn Snow Flesher, « A Word About... From the Bottom Up: the Role of Contextualization in Theological Education », Review & Expositor, 105/4 (2008), p. 559-564; Tito Parades, « Short-Term Missions: What Can Be Rescued, What Can Be Criticized, and the Challenge of Contextualization », Journal of Latin American Theology, 2/2 (2007), p. 249-259; Min-Ho Song,« Contextualization and Discipleship: Closing the Gap Between Theory and Practice », Evangelical Review of Theology, 30/3 (2006), p. 249-263.

346 Edward Rommen, Come and See: an Eastern Orthodox Perspective on Contextualization, Pasadena, Calif, William Carey Library, 2013; Gilles Vidal, « La contextualisation de la théologie protestante comme lieu de changement du christianisme en Océanie », Archives de sciences sociales des religions, 57/157 (2012), p. 157-177; Doug Hanson, « Contextualization Strategies: the Anglican Church Reaches New Guinea (1849-1900) », Melanesian Journal of

Theology, 26/2 (2010), p. 6-18; Albert Pero Jr. (2006), « Contextualization for Ministry and the Lutheran Heritage »,

Currents in Theology and Mission, 33/5, p. 379-387;

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Depuis les années 1980, malgré les quelques suspicions que lui inspirait la contextualisation dû principalement au fait que le concept provient du milieu œcuménique, la missiologie évangélique l'a intégrée348 : « Evangelicals have recognized the importance of contextualization since the Lausanne Congress349. » Le terme est néanmoins utilisé avec circonspection. Nous reviendrons un peu plus loin dans ce chapitre sur la position du mouvement évangélique et des appréhensions qui existent au sein de ce mouvement sur le sujet. Pour l'instant, voici comment notre chapitre sera divisé.

Il comportera six sections, dont la première définira brièvement le contexte dans lequel le concept s'est développé au sein de la missiologie au XXe siècle. Cette première partie du travail nous semble

importante pour dégager une bonne compréhension de la contextualisation. Ensuite, nous tenterons d'en donner une définition. Dans la troisième section, nous essaierons de comprendre la position évangélique par rapport à celle-ci à partir tout particulièrement de ses présupposés. Dans la quatrième et la cinquième section, nous porterons une attention particulière aux questions importantes qui soulèvent des difficultés posées par la contextualisation à propos la question herméneutique et épistémologique. En dernier lieu, nous examinerons les différents modèles, puis nous présenterons ceux que nous adopterons dans la deuxième partie de la thèse aux fins de l'essai pour la contextualisation du MPEFQ en contexte québécois.

1. Revue de littérature

La littérature sur la contextualisation est abondante et comme nous l'avons évoqué, les sujets qui y sont associés sont nombreux. Puisque notre thèse ne porte pas sur la contextualisation en soi, et que nous n'y consacrons qu'un chapitre, nous nous en tiendrons aux écrits théologiques de base que l'on retrouve en missiologie catholique et évangélique. Le texte de Bevans Models of

Contextual Theology demeure le classique dans l'élaboration des modèles. Les six modèles qu'il a

créés et dont nous ferons sommairement la présentation représentent une taxonomie fort utile. Le

348 Trois publications, toutes en 1978, démontrent bien que la contextualisation a bel et bien fait son entrée dans le juron missiologique évangélique. D'abord, l'Evangelical Missions Quarterly a consacré un numéro complet à la contextualisation. Le terme fit son entrée dans les documents de Lausanne et tout particulièrement dans le rapport de

Willowbank. Finalement, Charles Taber a créé la revue Gospel and Context.

349 Lars Dahle, Margunn Serigstad Dahle et Knud Jørgensen, The Lausanne Movement: a Range of Perspectives, (coll. Regnum Edinburgh centenary series volume 22), Eugene, Wipf et Stock Publishers, 2014, p. 168-169.

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texte de Schreiter Constructing Local Theologies est aussi un ouvrage important. S'il se concentre particulièrement sur un modèle anthropologique, les contours qu'il trace du travail de contextualisation sont d'une utilité de premier ordre.

Les principaux ouvrages issus des milieux missiologiques évangéliques nous ont fait constater une grande réserve à propos de la contextualisation350. Comme nous le verrons plus loin, le Mouvement de Lausanne donne le ton à cet effet. Cette réserve nous apparaît paradoxale si l'on tient compte du fait que la plus grande partie du mouvement souscrit encore aujourd'hui à la théologie de la croissance de l'Église qui, à notre avis, est une théologie contextualisée. Comme nous l'avons démontré au chapitre un, elle est enracinée dans la réalité socio-économique états-unienne de la croissance de la deuxième partie du XXe siècle qui s'inspire de la culture entrepreneurialle. Dans les trois cents articles et plus que nous avons répertoriés sur le sujet351, nous avons retenu

ceux qui couvraient les questions de base. À travers ces articles, nous avons essayé de suivre le dialogue sur le propos depuis 1975. Par la lecture de ces textes, nous avons remarqué deux choses.