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5.2 Caractérisation des sous-ensembles Céramique Détecteurs et Céramique ASIC

5.2.3 Les performances des Céramiques ASIC

Figure 5.12 – Images du banc de test permettant les mesures de gain et de bruit ENC des Céramiques ASIC - Gauche : Enceinte thermique pour la régulation à −20C dans laquelle est montée le circuit de test d’une « Céramique ASIC » 32 voies / En haut à droite : banc de test électronique connecté à un générateur de signal arbitraire / En bas à droite : Céramique ASIC montée sur son circuit de test comprenant un support mécanique avec maintien par visserie sur tige filetée et câble spécifique pour effectuer l’alimentation, le contrôle et la commande des puces ASIC.

Dans ce paragraphe sont présentées les performances, à savoir les gains et les bruits, observées sur plusieurs milliers de voies des Céramiques ASICs(4.2.4). Mon analyse s’appuie sur des mesures qui ont été effectuées sur des pièces de niveau FM (modèles de vol) grâce à un banc de test électronique très faible bruit, développé spécifiquement pour le projet ECLAIRs et majoritairement automatisé (Fig. 5.12).

Au moyen d’un générateur de signal arbitraire connecté à l’entrée VT EST du préamplifica-teur de l’ASIC, nous injectons un signal en tension, via une capacité d’injection CT EST interne à l’ASIC (de 200 fF), une charge connue en entrée (QIN), représentative d’une impulsion en énergie. Nous obtenons en sortie de chaîne d’acquisition, des spectres en tension, qui nous permettent d’en déduire le bruit total, auquel nous soustrayons le bruit connu de la chaîne d’amplification et de conversion analogique-numérique. Enfin, nous déterminons le gain et le bruit ASIC après avoir extrait les coefficients du rapport tension de sortie sur charge en entrée, et les largeurs à mi-hauteurs des spectres dont la position dépend de la charge injectée. Lors d’une première série de Céramiques ASIC, nous avons mesuré les gains et les bruits

des 32 voies pour quatre valeurs de peaking time (0,95 µs / 2,6 µs / 4,4 µs / 6,8 µs) à deux températures : +23C et −20C. Pour les modèles suivants, les cas de configurations de test ont été réduits à une seule température (température mission : −20C régulée) et à deux valeurs de peaking time (2,6 µs / 4,4 µs), qui apparaissent comme les valeurs optimales pour obtenir les performances en résolution spectrale (Fig. 5.14).

Au total, près de 8000 voies ont été mesurées et analysées, suivant la même méthode : nous avons injecté deux impulsions en entrée de la chaîne de test (comme décrit précédemment) à une fréquence de 200 Hz et avec des amplitudes de 5 et 10 mV. Pour obtenir le bruit ENC, nous avons calculé les valeurs de FWHM des deux pics (FWHM[P ic1] et FWHM[P ic2]) acquis après la conversion analogique/numérique des niveaux d’injection, puis nous en avons fait la moyenne FWHMmean (Fig. 5.13).

Le bruit de chaque voie ASIC ENCASIC s’exprime alors comme le rapport de FWHMmean sur le gain, et s’écrit ainsi :

ENCASIC = F W HMmean

2, 35 ∗ Gain ∗ e avec :

— ENCASIC (e- RMS) — FWHMmean (mV) — Gain (mV/C)

— e : charge élémentaire d’un électron (1,602.10−19 C)

— 2,35 : correspond au facteur reliant la largeur à mi-hauteur avec l’écart-type

Figure 5.13 – Signaux en entrée d’un ASIC, envoyés sur chacune de ses 32 voies, par le biais du signal VT EST : ils sont créés « sur mesure » au moyen d’un générateur arbitraire bas bruit, pour représenter des impulsions en sortie d’un détecteur CdTe. Les pics en sortie de chaîne électronique (après les différents étages électroniques ASIC + amplification externe + conversion analogique-numérique) sont illustrés ici par deux pics idéaux de même fréquence, et de niveaux d’amplitude doublés l’un par rapport à l’autre.

Le gain (tension de sortie / charge d’entrée) s’obtient en faisant le rapport de la différence des canaux des 2 pics, multipliée par le pas du CAN, avec la différence des amplitudes des 2 signaux d’entrée, multipliée par la capacité de test :

Gain (mV/fC) = VOU T QIN

= (∆CAN AU X ∗ 1 pas ADU ) ∆U ∗ CT EST

Figure 5.14 – Figure de gauche : Comparaison des mesures de gain obtenues pour deux valeurs de température +23C et −20C / Figure de droite : Comparaison des mesures du bruit ENC obtenues à ces deux valeurs de température - 160 voies de 5 Céramiques ASIC Présérie (modèles de qualification).

Nous observons sur les graphes de la figure 5.14 une moyenne des gains à +23C similaire à celle des gains mesurés à −20C, de 185±4 mV/fC. Pour ce qui est du bruit ENC, la moyenne (sur 160 voies ASIC) diminue de près de 6 % quand les mesures sont effectuées à froid, tout en maintenant un écart-type de 4 e- RMS.

La distribution de 2144 valeurs ENC mesurées sur l’ensemble des Céramiques ASICs FM de la série 1, aux deux peaking time de 2,6 µs et 4,4 µs, est montrée au travers des histogrammes de la figure 5.15. Ainsi, nous voyons que la majorité des valeurs ENC se situe autour de 62 ±6 e- rms à 4,4 µs et autour de 70 ±5 e- à 2,6 µs, avec une distribution, de largeur un peu inférieure.

Dans le cas de ces valeurs de peaking time paramétrées, nous remarquons des valeurs de bruit ASIC plus élevées au peaking time le plus bas, ce qui est conforme avec ce que j’avais pu observer en phase de prototypage, lors de mesures préalables de bruit de trois Céramiques ASIC, en fonction de huit valeurs de peaking time (Fig. 5.17).

Figure 5.15 – Histogramme des bruits ENC de 67 Céramiques ASIC modèles de vol (soit 2144 voies) aux valeurs de peaking time de l’ASIC 2,6 µs (gris) et 4,4 µs (magenta).

Figure 5.16 – Histogrammes des gains aux valeurs de peaking time de l’ASIC 2,6 µs (cyan) et 4,4 µs (bleu) pour une partie des Céramiques ASIC FM de la série 2 (3616 voies mesurées). Les histogrammes ont été normalisés selon une fonction de densité de probabilité ; la hauteur de chaque barre est donnée par le produit de la largeur de l’intervalle (barre) par le rapport du nombre de gains dans l’intervalle sur le nombre total des gains. L’addition des aires des barres de l’histogramme est égale à 1.

La figure 5.16 montre les histogrammes des gains de 3616 voies de 113 Céramiques ASICs de la série 2 aux valeurs de peaking time 4,4 µs (bleu) et 2,6 µs (cyan), avec leurs fonctions gaussiennes correspondantes.

Pour pouvoir comparer deux distributions avec le même nombre de données, j’ai dû, dans cet exemple, utiliser seulement la moitié des mesures de gain de la série 2, qui compte 226 Céramiques ASIC. En effet, les statistiques sont différentes selon le peaking time, à savoir 7232 gains à 4,4 µs contre 3616 gains à 2,6 µs pour une même phase de développement (série 2 ici), ce qui s’explique de la manière suivante : durant la série 1, nous avons rencontré un problème d’augmentation anormale du bruit ENC au cours des mesures à SAFRAN ; dans un souci de compréhension, j’ai décidé, au début de la série 2, de réaliser des mesures redondantes de gain et bruit à un même peaking time (en l’occurrence 4,4 µs), tout en maintenant la cadence de test, ce qui impliquait de ne pas faire de mesures à 2,6 µs pendant une certaine durée de la phase de série 2. C’est la raison pour laquelle les deux histogrammes présentés dans la figure 5.16 s’appuient sur 113 Céramiques ASIC plutôt que 226.

Nous pouvons observer que le coefficient de variation est très bas, respectivement de ≈ 0,021 à 4,4 µs et de ≈ 0,017 à 2,6 µs. La distribution du gain électronique des Céramiques ASIC à ces deux valeurs de peaking time et à la température de −20C, est donc très ho-mogène, assurant une faible dispersion des gains des 200 modules XRDPIX de la caméra, et permet de garantir une forte stabilité de calibration en vol.

Figure 5.17 – Bruit ENC de 3 Céramiques ASICs, avec la moyenne arithmétique de 96 valeurs (marqueurs magenta) en fonction du peaking time (8 valeurs).

En tout début de projet, j’ai réalisé une étude approfondie de la puce ASIC, d’abord seule, puis intégrée à sa céramique HTCC. Sachant le nombre très important de tests qu’il faudrait faire, et ce pendant plusieurs années, sollicitant plusieurs équipes techniques et notamment, des industriels, j’ai dû étudier la faisabilité des essais dans un temps réduit et optimal ; c’est la raison pour laquelle, après plusieurs itérations avec la société SAFRAN, et en m’appuyant sur la connaissance de ces tests de Céramiques ASIC (durée des essais avec le banc, développement spécifique d’un logiciel pour minimiser le temps, procédure encadrée et quasi-automatique,

premières performances obtenues dans toutes les configurations de peaking time), j’ai sélec-tionné, assez tôt dans la phase de présérie des modules XRDPIX, seulement quatre puis deux valeurs de peaking time sur huit programmations possibles.

J’ai alors caractérisé l’ASIC en fonction de ce paramètre majeur, puis comparé avec les simulations faites par l’équipe du CEA, pour connaître les peaking time les plus adaptés au projet ECLAIRs, en combinant un faible ENC, avec un gain suffisant et stable, et tout cela en tenant compte de la spécification forte d’homogénéité inter-voies.

Nous pouvons voir grâce à la figure 5.17 que le bruit est plus élevé à très faible peaking time. De plus, nous voyons que les deux peaking time sélectionnés pour valider les Céramiques ASICs à grande échelle, sont les meilleurs candidats pour un ENC minimal ; en effet nous retrouvons des valeurs comprises entre 50 et 68 e- RMS à 4,4 µs, ce qui est comparable aux mesures des Céramiques ASIC de vol, et entre 52 et 70 e- RMS à 2,6 µs, ce qui, dans ce cas, montre une différence, avec une gamme de valeurs légèrement plus basse. Ce bruit plus faible (Fig. 5.17) peut s’expliquer pour deux raisons : la différence de statistiques, de 96 voies ASIC mesurées durant la phase de prototypage, contre 2144 voies ASIC pendant la série 1 (Fig. 5.15), et des problèmes de bruit amené par le générateur de signal en cours de série 1, ce qui a été réglé pour la phase série suivante (série 2).

Figure 5.18 – Bruit ENC pour les 32 voies de 67 pièces Céramiques ASICs à 2 valeurs de peaking time - Figure du haut : tp = 4,4 µs / Figure du milieu : tp = 2,6 µs / Figure du bas : capacité par voie d’un substrat céramique nu.

La figure 5.18 permet d’observer une forte corrélation entre les capacités mesurées sur un substrat nu (avant le collage de la puce ASIC) et les mesures de bruit effectuées sur les Céramiques ASICs (une fois que la puce 32 voies est collée. D’ailleurs, si on soustrait les variables dépendant des détecteurs dans la formule F4.2 précédemment citée, nous voyons que l’ENCT OT AL dépend directement de la capacité équivalente de chaque voie. L’équation devient ainsi :

ENC2TOTAL = (A2/tp+ B2) × C2TOTAL

Le design est donc essentiel pour la maîtrise de la performance finale.

Figure 5.19 – Bruit ENC en fonction du gain - Graphe du haut : 7232 voies mesurées au peaking time 4,4 µs à −20C (226 Céramiques ASIC série 2) / Graphe du bas : 3616 voies

mesurées au peaking time 2,6 µs à −20C (113 Céramiques ASIC série 2).

Pour sélectionner les Céramiques ASIC, nous déterminons les voies les plus mauvaises pour éviter de les contre-coller à des Céramiques Détecteurs dont les voies les plus mauvaises en courant seraient aux mêmes positions.

Ici, la figure 5.19 montre les mesures de bruit en fonction de celles du gain ; une boîte d’acceptance (en rouge) permet d’écarter les voies dont les ENC sont supérieurs à 74 e-, ce qui reste assez tolérant, pour ne pas dégrader la valeur finale de seuil bas en énergie. Nous voyons alors que plus de 96 % des voies (parmi 7232 voies ASIC) répondent à ce critère, à tp = 4,4 µs. La même figure, mais cette fois-ci pour des Céramiques ASIC programmées au peaking time de 2,6 µs (graphe du bas), donne 90,4 % de 3616 voies à l’intérieur de la boîte. Là où nous observons des mesures de gain resserrées, avec des valeurs comprises entre 175 et 200 mV/fC à 4,4 µs, nous voyons davantage de dispersion dans les mesures de bruit, avec une groupe majoritaire s’échelonnant de 58 à 69 e- et un groupe minoritaire qui se disperse vers des plus hautes valeurs (jusqu’à 95 e- RMS). C’est donc ce paramètre clé que nous avons retenu pour sélectionner les Céramiques ASIC et écarter celles qui avaient les valeurs d’ENC les plus élevées, ou a minima pour ne pas les appairer avec des voies de Céramiques Détecteurs donc les courants seraient eux-aussi élevés.