1.3 Outils : Semi-groupes et m´ethodes d’interpolation
2.2.6 Percolation
Les mod`eles de percolation sont parmi les plus c´el`ebres exemples pr´esentant de la supercon- centration. Cette c´el´ebrit´e est notamment du au fait que certains mod`eles de percolation dirig´ee ont de profonds liens avec la th´eorie des matrices al´eatoires (cf. [114]).
Dans un premier temps nous allons d´efinir un mod`ele, plus simple, de percolation, ensuite nous ´enoncerons le r´esultat de superconcentration le concernant. Ce th´eor`eme a ´et´e ´etablit grˆace `a l’in´egalit´e de Talagrand1.3.6. Cependant, comme nous le mentionnerons, cet outil est insuffi- sant pour faire la d´emonstration compl`ete. Les auteurs Benjamini, Kalai, Schramm ont trouv´e une astuce (cf. [22]) pour contourner ces difficult´es techniques.
On consid`ere le r´eseau Zd et nous noterons par E l’ensemble des arˆetes de ce r´eseau. Soit alors
(Êe)eœZd une famille de variables al´eatoires positives i.i.d., celles-ci correspondent au temps de
passage ou au poids de chacune de ces arˆetes. Ces poids peuvent ˆetre vus comme mod´elisant le temps n´ecessaire `a un fluide pour passer une arˆete (que l’on pourrait assimiler `a un tuyau). Pour un chemin p reliant deux sommets du r´eseau Zdon d´efinit le temps de passage du chemin p
comme la somme des temps de passage de chaque arˆete du chemin. Le premier temps de passage
T(x, y) d’un sommet x `a un sommet y est d´efini comme le minimum des temps de passage parmi
tous les chemins reliant x `a y. Ce mod`ele de premier temps de passage en percolation `a ´et´e introduit par Hammersley et Welsh.
Etant donn´e un x œ Rd et un entier n, notons par T
n(x) le premier temps de passage T (0, [nx]),
o`u 0 repr´esente l’origine de Zd et [nx] le point du r´eseau le plus proche de nx. il existe toutes
sortes de r´esultats concernant Tn(x), par exemple :
lim
næŒ Tn(x)
n
existe et est une fonction d´eterministe de x.
Par simplicit´e de notation posons x = e1 = (1, 0, ..., 0) et notons Tn(x) par Tn. Grˆace `a des
arguments de martingales, Kesten a prouv´e que Var(Tn) Æ Cn. Bien que cela n’atteigne pas
encore l’ordre de fluctuations attendu par les physiciens (n2/3). Benjamini, Kalai et Schramm
ont am´elior´e l’estimation de Kesten, lorsque les poids sont des variables al´eatoires de Bernoulli, en d´emontrant un ph´enom`ene de superconcentration. Chatterjee `a ´etendu ce r´esultat lorsque les poids sont des variables al´eatoires gaussiennes standards [48].
Th´eor`eme 2.2.14 (Chatterjee). Consid´erons le premier temps de passage en percolation sur Zd, dØ 2. Si les poids des arˆetes peuvent ˆetre obtenues comme la loi d’une fonction lipschitzienne, uniform´ement born´ee, de variables al´eatoires gaussiennes , alors pour tout n Ø 2,
Var(Tn) Æ Cn
log n,
o`u C > 0 est une constante qui ne d´epend que de la loi des poids et de la dimension.
Tout d’abord, nous allons constater pourquoi le th´eor`eme de Talagrand ne s’applique pas directement. On suppose que la loi du poids de nos arˆetes est une fonction lipschizienne de gaus- siennes, et que cette fonction est born´ee. Autrement dit, si Êeest le poids d’une arˆete, on suppose
qu’il existe une gaussienne standard Xe et une fonction absolument continue F : R æ R telle
qu’il existe une constante K > 0 v´erifiant |FÕ| Æ K ; ainsi que des constantes 0 < a < b < Œ
telles que a Æ F(x) Æ b pour tout x. Sous ces conditions les poids s’expriment de la mani`ere sui- vante Êe= F (Xe). Pour exemple, la loi uniforme sur l’intervalle [a, b] v´erifie ce type de conditions.
Le fait que les poids des arˆetes soient uniform´ement born´es loin de z´ero et de l’infini implique que la longueur du chemin optimal entre deux sommets ne peut d´epasser un multiple de leur distance euclidienne. Cette hypoth`ese est cruciale pour utiliser l’astuce BKS (de Benjamini-Kalai- Schramm).
Appelons pI le chemin optimal entre l’origine et ne1. Avec des notations ´evidentes, ceci nous
donne que : ˆTn ˆXe = FÕ(X e)1{eœpI}. En cons´equence, . . . .ˆXˆTne . . . .L1 Æ Kpe,
o`u pe= P(e œ pI). C’est pourquoi nous devrons certainement d´emontrer que pe est petit pour
quasiment tout les sommets. Malheureusement ceci est compliqu´e `a d´emontrer directement. L’as- tuce de Benjamini-Kalai-Schramm consiste `a contourner ces difficult´es, pour cela ils introduisent un autre temps de passage ˜Tn. Celui-ci est construit de la mani`ere suivante : on choisit une boite Bde longueur k fix´ee autour de l’origine et l’on d´efinit Tnx, xœ B comme ´etant le premier temps
de passage issu de x, ensuite ˜Tn est obtenu comme ´etant la moyenne sur les points de depart x
de Tx n. Autrement dit, ˜ Tn= Card(B)1 ÿ xœB Tnx,
avec Card(B) d´esignant le cardinal des points du r´eseau Zd contenu dans B. Ce proc´ed´e de
moyenne, permet d’obtenir un objet plus r´egulier sur lequel l’in´egalit´e de Talagrand peut ˆetre appliqu´ee et l’´ecart entre Tn et ˜Tn peut-ˆetre facilement contrˆol´e.
La premi`ere tentative d’extension `a de nouveaux poids est faite par Bena¨ım et Rossignol [21]. Ils sont les premiers `a proposer une approche plus abstraite permettant de consid´erer des poids plus g´en´eraux. Ils se restreignent `a une classe de mesures de probabilit´es diteπnearly gamma∫ dans
le sens o`u ces lois de probabilit´es ont des propri´et´es de concentration proches des lois gammas. Leur article apporte des arguments novateurs en percolation : une id´ee provenant de la th´eorie du transport combin´ee avec une in´egalit´e alternative `a celle de Sobolev logarithmique ainsi qu’une in´egalit´e de Poincar´e exponentielle d´ependant de la dimension. Plus pr´ecisement, ils consid`erent leurs poids comme ´etant la mesure image de la mesure gaussienne “n par une application T ,
ensuite ils utilisent l’in´egalit´e de Falik et Samorodnisky [80] pour enfin appliquer l’in´egalit´e de Sobolev logarithmique satisfaite par la mesure gaussienne “n. L’autre point important est l’uti-
lisation du lemme suivant, s’apparentant `a une in´egalit´e de Poincar´e exponentielle, 70
Lemme 2.2.15. Soit Z une variable al´eatoire et K > 0. Supposons que pour tout |◊| Æ 2/ÔK, Var1e◊Z/22Æ K ◊ 2 4 E#e◊Z$. (2.9) Alors, P (|Z ≠ E [Z] | > t) Æ 6e≠ct/ÔK, pour tout t Ø 0, avec c > 0 une constante num´erique.
ils utilisent ce r´esultat en faisant d´ependre K de n. Grossi`erement, apr`es voir introduit le temps de passage moyen de Benjamini-Kalai et Schramm, ils appliquent le r´esultat pr´ec´edent et montre que Kn est de l’ordre de n/Ôlog n. Ils obtiennent donc une in´egalit´e de superconcentration pour
le premier temps de passage qui renforce alors, au niveau exponentiel, les travaux de Chatterjee. Le principal d´efaut de leur approche est que la conditionπnearly-gamma∫ est trop restrictive
et exclue des lois usuelles de probabilit´es.
N´eanmoins, leur approche plus abstraite a permit d’ouvrir la voie `a Damron, Hanson et Sosoe qui, dans une s´erie de plusieurs articles [66,65], clarifient les arguments de Bena¨ım et Rossignol et ´etendent leurs r´esultats. Ils montrent, dans l’article [66], que les r´esultats de Chatterjee sur la variance sont toujours valides si l’on suppose uniquement que les poids sont dans l’espace d’Orlicz
L2log L et clarifient les arguments de [21]. Dans leur deuxi`eme article, ils obtiennent une in´egalit´e
de superconcentration exponentielle, identique `a celle de Bena¨ım et Rossignol, sous la condition que les poids poss`edent un moment exponentiel. Les outils qu’ils utilisent sont essentiellement les mˆemes que ceux de [21], en revanche, au lieuπd’encoder∫leurs poids comme provenant d’une
mesure gaussienne, ils proposent un encodage `a partir de variables al´eatoires de Bernoulli qui satisfont ´egalement une in´egalit´e de Sobolev logarithmique. Cette observation accorde beaucoup plus de souplesse dans le choix des poids et permet d’´etendre consid´erablement les travaux de [21], en revanche cela induit beaucoup plus de technicit´e lors du calculs des d´eriv´ees discr`etes intervenant dans l’in´egalit´e de Sobolev logarithmique. Pour plus de d´etails sur ces mod`eles de percolation, nous renvoyons le lecteur vers l’article de survol [12].