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9. LA FRÉQUENTATION ET LA NON-FRÉQUENTATION DES

9.3 Perception des services et de ceux qui les fréquentent

Certains interviewés ont discuté de leur connaissance des services destinés aux jeunes, mais peu ont affirmé en connaître. Un jeune entre 15 et 19 ans et un entre 25 et 29 ans disent connaître quelques organismes. Plusieurs parmi les 20-24 ans (11) considèrent qu’ils connaissent très peu ou pas du tout les services qui s’offrent à eux. Toutefois, une jeune femme précise qu’elle connaît les principaux organismes d’aide à l’emploi et que ça lui suffit. Deux interviewés ont expliqué pourquoi, d’après eux, ils connaissent peu ou pas du tout différents organismes. Un n’en ressent pas le besoin, mais il cherche quand il perçoit qu’il aimerait avoir un coup de main. Un autre croit que les intervenants se déplacent peu dans les écoles.

Certains interviewés ont exprimé leur perception par rapport à des types d’organismes et aux jeunes qui les fréquentent.

Un interviewé décrit ainsi certains organismes :

« Les organismes puis tout ça, c’est du pareil au même. […] C’est comme aller en thérapie ou en désintox, c’est tous la même affaire. T’arrives là-bas, puis tout ce que tu fais c’est du ménage puis tu te fais juste dire les mêmes affaires à toutes les fois. […] Tu t’en vas six mois en désintox puis tu te fais dire [des] histoires différentes. Tous les gens donnent des histoires différentes, mais les histoires différentes ont toutes des comparaisons [sic]. Les comparaisons deviennent toutes des stéréotypes puis les stéréotypes deviennent des généralités communes. Les généralités communes, ben, y’en a pas beaucoup. Fait que c’est toute la même affaire. Si tu sais ça à la base, t’as plus besoin d’en savoir plus. » (25AL2NG1)

Un autre jeune homme a évoqué ses représentations plus négatives des formes d’aide en santé mentale et des ressources d’hébergement (évoqués dans les chapitres précédents). Toutefois, il reconnaît que divers types de thérapies peuvent aider certaines personnes. Il déplore aussi que ce ne soit plus le même type de jeunes qui fréquentent l’organisme où il se rend régulièrement :

« Même ici [nom d’un organisme] je viens mais ça me fait chier des fois. J’aime pas le monde pantoute. Moi, j’ai commencé à venir ici puis on avait des repas. C’était du monde de la rue qui était ici. Asteure c’est plus de même pantoute là. C’est deux genres de monde qui profitent, tu sais. Y’en a gros qui ont les moyens de vivre en masse puis qui font juste profiter de la place. C’est rendu une garderie pour enfants. Quand j’arrive ici, le monde est tout le temps comme : "Ah ! Il est dans rue". J’ai pour mon dire que j’ai tout le temps connu des punks ici, du monde qui était dans la rue puis qui avait de besoin. Là, c’est tout le temps des petits cons, des petits "yos". Q. Puis c’était quel type de monde, par rapport à avant, c’était quoi qui était mieux ?

C’était ma famille, ma famille de rue. À cause des petits cons comme ça, nous, on a plus de repas. Ils venaient, ils prenaient des grosses assiettes, mangeaient trois, quatre bouchées, c’est pas bon, ils le crissaient dans la poubelle. Un moment donné, ils ont pu eu assez d’argent pour payer de la bouffe. […] Les jeunes sont caves. Je trouve que y’a pas assez de règles, y’a pas assez de maintenance. On n’a plus d’écouteurs maintenant sur les ordinateurs. [On] ne peut plus écouter de musique parce qu’ils se font voler des affaires. Moi, je l’utilise à son 100 % l’organisation. Eux, ils font juste venir ici, foutre la merde. J’en ai vu prendre des manteaux et les jeter aux poubelles trois heures plus tard là. » (51BXING1)

Il croit qu’il y a de nombreux services, mais qu’ils sont mal organisés en raison du manque de fonds.

La perception d’un autre jeune homme envers les gens fréquentant des organismes d’aide en emploi influence son impression de ces mêmes organismes : « Quand je vois le monde rentrer ici avec la misère du monde-là, je veux pas me retrouver comme ça » (1BL1NG1).

Quelques-uns ont présenté des opinions plutôt négatives des organismes en raison de certains aspects des services. Ainsi, dans les ressources en emploi, un jeune homme pense que ce sont surtout des liens mercantiles qui s’y établissent, car les jeunes doivent payer pour recevoir des services (18AR2NG2). Un interviewé, ayant eu recours à des services en santé mentale, passe certaines remarques sur d’autres organismes venant en aide aux jeunes (53BL2NG2). D’après lui, les services d’orientation par exemple, peuvent être très longs à recevoir, ce qui peut en décourager plusieurs. Ceux qui fréquentent les services d’aide à l’emploi semblent être surtout des gens qui ont décroché ou qui sont en période de remise en question. Aussi, les conseillers ne sont pas toujours formés pour répondre à des questions spécifiques, comme les changements de programme d’études.

On retrouve certains interviewés qui ont modifié leur opinion. Une jeune femme parle ainsi de son ancienne perception des organismes d’aide à l’emploi qui a changé au moment où elle a décidé de les consulter:

« Moi, avant, j’avais peur. J’me disais "Ah ben là, si une autre personne me voyait faire ça". […] Moi avant, j’me disais" : Si t’es pas capable d’en chercher par toi-même, ça va pas ben là". Mais c’est quelque chose que je jugeais. Mais maintenant, j’ai pas à juger parce que si moi aussi j’en ai besoin, ben je vais y aller. J’étais opposée parce que j’connais du monde qui travaillait là-dedans. Tu sais encore des jugements… Quand tu connais quelqu’un qui travaille, des fois, t’oses pas. Mais là vu que je suis hors- région, j’ai plus confiance. Je connais personne, fait que je peux me libérer, je peux faire ce que je veux puis je vais en parler. […] Dans ma tête, c’était ça là, c’était relié comme à l’aide sociale. Moi j’associais ça à ça. […] Sauf que j’osais pas, parce que par chez nous, plus ou moins 10 000 habitants, on se connait là. C’est plus facile de juger. Mais on n’a pas à juger, on est de même. » (32BL2NF2)

Un interviewé qui dit avoir finalement accepté de se tourner vers différentes ressources d’aide avait une opinion très négative des organismes d’aide aux personnes démunies. Il se plaignait que la nourriture n’était pas bonne ou que les gens qui y travaillaient ne le faisaient que pour l’argent. Il dit qu’il voulait « échapper » aux organismes. Cependant, sa perception s’est modifiée et il se dit heureux d’avoir pu en profiter (30BC3OG1).

Un jeune homme dit « adorer » les organismes jeunesse. Par contre, il apporte certaines remarques à leur sujet. Pour lui, il existe beaucoup d’organismes, mais il en manque pour certaines questions spécifiques. Il ne précise toutefois pas lesquelles. Il croit que les organismes sont en train de dépérir en raison de la mauvaise gestion gouvernementale ; ils ne reçoivent pas assez d’aide financière. Il est aussi difficile, d’après lui, pour les intervenants de mettre une barrière entre l’amitié et le lien professionnel dans leurs relations avec les jeunes. Ça l’ennuie de savoir que les intervenants sont payés pour l’écouter. Il observe aussi un certain paradoxe :

« Tu vois les intervenants qui ont fait leurs études puis c’est pour s’occuper des jeunes. En même temps, t’as des jeunes qui veulent juste être tout seuls puis plus entendre parler du monde extérieur, parce qu’on s’entend que quand t’entends parler le monde extérieur, c’est jamais en bien. » (19BC2NG1)

Certains disent ne pas avoir d’opinion sur les organismes d’aide en tout genre soit parce qu’ils les jugent méconnus, soit parce qu’ils se disent tout simplement indifférents. Un autre jeune homme affirme qu’il n’a aucune opinion sur la plupart des services, mais il estime beaucoup l’organisme jeunesse qu’il fréquente. Il s’y sent compris, car il peut y rencontrer des gens comme lui et des intervenants et utiliser les services de dépannage alimentaire (47BL2NG1).

Les interviewés qui, au moment de la rencontre, travaillaient dans une entreprise d’intégration sociale en soulignent des aspects positifs et négatifs. Ils apprécient, entre autres, le type d’emploi occupé, le fun avec les autres, le fait d’avoir une expérience en

emploi, les nouvelles connaissances acquises. Mais, le peu de variété dans les tâches et le manque de communication entre les employés sont négativement soulignés.