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Pathologies liées au vieillissement et la « fragilité » de la personne âgée

Traitements médicamenteux et personnes âgées

I – GENERALITES SUR LES PERSONNES AGEES

A. Pathologies liées au vieillissement et la « fragilité » de la personne âgée

Les personnes âgées sont, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), les personnes de plus de 65 ans et, selon une définition sociale plus commune, celles de plus de 60 ans, âge de cessation habituel des activités professionnelles. On parle de « 3ème âge » jusqu’à 75 ans et de « 4ème âge » ou de « grande vieillesse » après 75 ans.

Les scientifiques ont proposé trois théories majeures pour expliquer le phénomène du vieillissement. La première théorie est propre à l’évolution de notre espèce : nos gènes sont sujets à des mutations qui provoquent des dysfonctionnements. L’accumulation de ces mutations aboutirait au processus de vieillissement. La seconde théorie concerne également notre capital génétique. Au cours des divisions cellulaires, les chromosomes se divisent et leurs extrémités, les télomères, se délitent au fur et à mesure. Lorsqu’ils sont détruits, les cellules ne se divisent plus mais vieillissent et meurent. La troisième théorie repose sur l’action des radicaux libres, éléments chimiques à fort pouvoir oxydant. En attaquant les protéines et en dénaturant l’ADN des cellules, ils participent à la perturbation de l’expression des gènes et à la désorganisation du métabolisme cellulaire. Le stress oxydatif serait ainsi à l’origine du vieillissement physiologique et de nombreuses maladies comme le cancer, les maladies cardiovasculaires et neuro-dégénératives.

Le vieillissement, qui se manifeste certes différemment d’un individu à l’autre, se traduit généralement par un déclin progressif de la plupart des systèmes et organes majeurs de l’organisme humain et une baisse des capacités d’adaptation physiologiques [2]. Il en résulte une dégradation de l’état de santé et une perte

d’autonomie qui limitent l’aptitude à exercer les activités quotidiennes et à participer à la vie familiale et communautaire.

En règle générale, on observe :

 Au niveau du système nerveux central et des organes sensoriels :

- Une dégénérescence neuronale et myélinique qui entraine des troubles de l’équilibre, de la perception, une baisse de la mémoire et de la vigilance, une déstructuration du sommeil et des maladies neuro-dégénératives ;

- Une augmentation de la perméabilité de la barrière hémato encéphalique ;

- Une sensibilité plus grande de certains récepteurs cérébraux ;

- Une sensibilité plus faible des récepteurs de la soif ;

- Une baisse de la vue (due à l’opacification du cristallin et la réduction de l’amplitude d’accommodation), de l’odorat, du goût et de l’audition.

 Au niveau vasculaire :

Une augmentation de la rigidité de la média des artères qui induit une baisse de la capacité vasomotrice.

 Au niveau du système nerveux autonome :

- Une sensibilité particulière à l’hypotension orthostatique par altération des barorécepteurs du système végétatif ;

- Une réduction de la sensibilité des récepteurs adrénergiques ;

 Au niveau du tube digestif :

- Des troubles de la déglutition ;

- Une réduction de l’acidité gastrique (achlorydrie), de la vidange gastrique, de la surface de résorption digestive, et de la vascularisation gastrique (par diminution du débit sanguin splanchnique) ;

- Un ralentissement du péristaltisme de l’œsophage (dysphagie) et gastro-intestinal.

 Au niveau cardiaque :

- Une perte des cellules nodales cardiaques ;

- Une baisse des capacités d’adaptation du cœur à l’effort.  Au niveau musculaire et squelettique :

- Une diminution de la masse et du tonus musculaires (sarcopénie, dénutrition, instabilité posturale) et de la masse osseuse (ostéopénie, ostéoporose, amincissement des cartilages) ;

- Une augmentation de la masse grasse et une diminution de la masse maigre ;

- Une hypoprotidémie ;

- In fine, une dénutrition.

 Au niveau hépatique :

- Une diminution des réactions d’oxydoréduction utilisant les iso enzymes du cytochrome P450 ;

- Une modification des réactions de conjugaison ;

- Une diminution de la clairance hépatique due à une diminution du flux sanguin hépatique ;

 Au niveau rénal :

- Une diminution régulière du débit de filtration glomérulaire ;

- Une réduction du nombre de néphrons fonctionnels ;

- Une diminution de la masse rénale et du flux sanguin rénal de 1% tous les ans après 40 ans (lors du vieillissement rénal normal) ;

- In fine, une diminution de la fonction rénale.

 Au niveau de l’hydratation :

- Une baisse relative de la volémie ;

- Une augmentation du phénomène d’évaporation cutanée à cause d’une diminution de l’activité des glandes sébacées et sudoripares qui sécrètent un film gras protecteur pour la peau ;

- Une diminution de l’eau totale (90% du corps d’un bébé est constitué d’eau alors qu’un homme de 70 ans n’en a plus que 70%).

 Au niveau de la peau :

- Les cellules de l’épiderme et du derme perdent leur capacité à se multiplier et à se régénérer ;

- La synthèse des fibres de collagène et d’élastine diminue en quantité et en qualité, la cohésion cellulaire s’amoindrit ;

- La peau s’amincit, se ride et perd de son élasticité.

L’ensemble de ces phénomènes font que les personnes âgées développent des affections cardiovasculaires, bucco-dentaires, ophtalmologiques, respiratoires, digestives et ostéo-articulaires. Elles ont aussi une plus grande vulnérabilité par rapport aux maladies infectieuses, une réduction des aptitudes physiologiques au stress et au changement d’environnement, une augmentation du risque de développer un cancer ou des pathologies d’ordre neuropsychiatrique (troubles cognitifs, troubles mnésiques, démence vasculaire, dépression, anxiété, maladie d’Alzheimer, maladie de Parkinson) et une augmentation du risque du « phénomène de cascade » aboutissant à une grande détérioration de l’état de santé général.

Il y a un siècle, l’on mourrait plus jeune (l’espérance de vie était d’environ 45 ans en 1900), mais l’on mourait aussi plus vite : il y avait très peu de maladies chroniques invalidantes. Elles sont désormais nombreuses et l’on peut vivre longtemps avec l’une d’entre elles. Étant en partie liées à l’environnement, aux conditions de travail, à la « compétition sociale » moderne, aux modes de vie (suralimentation, tabac, alcool, manque d’exercice), ces pathologies apparaissent tardivement et ne se déclarent qu’au bout de plusieurs décennies. L’allongement de la durée de vie s’accompagne donc d’un allongement de la durée de vie avec une maladie chronique. « Le fait de sauver des vies humaines autrefois perdues a paradoxalement pour résultat de multiplier les éventualités d’une intervention médicale. Souvent, la survie obtenue sera celle d’êtres fragiles que la lutte biologique naturelle n’aurait épargnés, et qui seront au long des années de gros consommateurs de soins. A la limite, on ne préserve plus la vie qu’en prolongeant la maladie » [3]. Aussi, le progrès des moyens d’analyse et d’investigation fabrique des malades, en ce sens qu’on décèle des maladies chez des individus qui auraient été autrefois considérés comme bien portants.

L’âge n’est pas que porteur d’un processus de vieillissement biologique, mais aussi, de difficultés psychologiques et sociales des individus. Plus la personne vieillit, plus sa perception négative de son état de santé augmente. En cumulant les années de vie, les individus deviennent plus « fragiles » psychiquement et émotivement et perdent peu à peu leurs capacités d’adaptation à l’environnement. « Monter les escaliers,

traverser la route, n’est pas toujours facile pour une personne âgée ; physiquement, mais, aussi, et surtout, psychologiquement » et cela les oblige à recourir fréquemment