• Aucun résultat trouvé

II. LES DIFFÉRENTS MODÈLES THÉORIQUES POUR LE CALCUL DE LA CAPACITÉ DE

1. DESCRIPTION DES MODÈLES

1.3 Modèle de Dillon modifié par la municipalité de Muskoka (DMM) (Gartner Lee Limited, 2005)

1.5.2 Particularités du modèle empirique de Richard Carignan

Structure du modèle

Modèle de type empirique

Méthodologie

CALCUL DU BUDGET EN PHOSPHORE

• Concentration naturelle en P d’un plan d’eau (apports naturels)

Une innovation majeure qu’amène le « modèle de Carignan » pour la région des Laurentides est qu’une relation étroite fut découverte entre la concentration de carbone organique dissout (COD) présente dans un plan d’eau et la concentration en phosphore naturelle de ce dernier. Ainsi, selon ce chercheur, la concentration de COD présent dans un plan d’eau, n’est pas vraiment affectée par les différentes utilisations humaines présentes dans le bassin versant, mais plutôt par des paramètres naturels et hydrologiques tels que la quantité de milieux humides, la pente du terrain et le taux de renouvellement du lac.

« Le carbone organique dissous, c’est ce qui donne la couleur brune qu’on voit souvent dans les ruisseaux et dans les lacs. On se rend compte que la concentration en carbone organique dissous dépend surtout justement de l’abondance des milieux humides dans le bassin versant, mais dépend aussi de quelques autres propriétés : de la pente du bassin versant, du rapport de drainage, de la taille du bassin versant par rapport à la taille du lac. » (Carignan, 2006b)

COD : concentration de COD prédit (mg/L)

mhum : milieux humides (km2)

vol : volume du lac (m3)

pente : pente moyenne du bassin versant AB : aire du bassin versant (km2)

AL : aire du lac (km2)

Figure 11 : Formule développée afin de prédire la concentration de COD d’un plan d’eau, relation avec les autres variables (Carignan, 2006b)

Ainsi, l’humain ne génère pas de COD additionnel à un plan d’eau, contrairement au phosphore qui peut provenir de sources naturelles et humaines. La concentration de COD d’un lac est donc principalement dictée par le milieu naturel de son bassin versant, selon les recherches du Dr Carignan.

« (…) l’étude du Dr Carignan (…) sa grande découverte au fond, c’est de dire, si je mesure le COD dans un lac, c’est un petit peu la marque de la nature en dehors des effets anthropiques, c’est-à-dire que le COD, à condition d’exclure ce qui est agricole, mais dans les Laurentides on a pas d’agriculture, est représentatif de ce qu’apporte le milieu naturel, tandis que la mesure du P intègre plus d’éléments, alors si j’ai un grand écart entre le COD et le P pour le Dr Carignan c’est l’indice qu’il y a un débalancement qui est en train de se faire. » (Assel, 2007).

Suite au constat d’une forte corrélation entre les concentrations de COD et le P présent dans un plan d’eau et que la provenance du COD était principalement naturelle, ce chercheur émet donc l’hypothèse qu’il est possible de déterminer la concentration naturelle en P qu’un lac devrait avoir en l’absence de perturbations humaines dans son bassin versant, selon une formule toute simple ne faisant intervenir comme seul paramètre le COD.

Voici la formule en termes simplifiés (Assel, 2008) :

[PT] naturelle = A [COD]

Apports en P d’un plan d’eau (concentration totale en P prédite)

Une autre démarche du « modèle de Carignan » consiste à réduire la prédiction de la concentration en P totale d’un lac à deux variables seulement, soit le nombre d’habitations présentes dans un rayon de 100 m du lac et la concentration de COD mesurée, représentative de la quantité de milieux humides du bassin versant. En effet, le Dr Carignan a remarqué que ces deux variables étaient les principales responsables de la concentration totale de P retrouvée dans un lac. Il est important de mentionner que cette relation fut établie seulement pour les lacs ayant comme seule source de P anthropique dans leur bassin versant les habitations (excluant les apports agricoles, urbains, etc.). Le modèle de Carignan est donc un modèle empirique, ne tenant compte que des variables ayant la plus grande influence sur la concentration de phosphore totale prédite d’un plan d’eau. Cette approche empirique est la première de ce genre à être utilisée pour la détermination de la capacité de support d’un lac et la prédiction des apports en phosphore en provenance de l’utilisation du sol à l’intérieur d’un bassin versant. En effet, les modèles élaborés dans le passé sont du type « bilan de masse », dont l’objectif est de tenir compte de façon exhaustive de toutes les sources en P présentes dans le bassin versant d’un plan d’eau dans le calcul des apports.

« Lorsque l’on tente de prédire le phosphore que l’on retrouve dans les lacs à partir des propriétés des bassins versants, ne survivent que deux propriétés : le carbone organique dissous (...) et la quantité de constructions ou d’habitations que l’on voit dans le bassin versant, plus précisément dans un rayon de cent mètres du lac. Deux propriétés. Et là, les modèles deviennent extrêmement précis. » (Carignan, 2006b).

Les formules suivantes furent donc développées afin de prédire la concentration de P total contenu dans un lac subissant les impacts de la villégiature (Carignan, 2006b) :

1) PT = 1,4 COD + 46 817 (constr100 / vol)

R2 = 0,93; n=26

2) Log (PT) = 2,3 + 0,17 log [(constr100 / vol) + 0,092 log[(humid+0,01/vol)] – 0,11 log(τ)

R2 = 0,84; n=27

constr100 = nombre d’habitations à moins de 100 m de la rive

vol = volume du lac (m3)

humid = milieux humides (km2)

τ = temps de séjour

Ainsi, le Dr Carignan a obtenu un coefficient de corrélation de 0,93, entre les valeurs de phosphore total prédites (en fonction du nombre d’habitations situées à moins de 100 m de la rive du lac par unité de volume et la concentration de COD mesurée dans le plan d’eau) et celles mesurées sur le terrain, pour 26 lacs de villégiature situés dans les Laurentides.

« Donc, il y a deux variables qui expliquent le P dans les lacs, il y a en a une qui dépend de l’homme, c’est le nombre d’habitations puis il y en a une qui est complètement indépendante de l’homme, c’est la teneur en carbone organique dissous » (Carignan, 2007)

De plus, la conclusion générale de cette étude montre que qualitativement, entre ces deux paramètres, 70 % du phosphore retrouvé dans les lacs des Laurentides est expliqué par des causes naturelles, représentées par la quantité de COD présente au plan d’eau, ainsi que 30 % est dû à des causes humaines, définies par la présence d’habitations à moins de 100 m des rives des lacs (Carignan, 2006b).

De plus, ce chercheur a développé une deuxième formule, qui est construite à partir des données sur la quantité de milieux humides du bassin versant, le nombre de constructions à moins de 100 m du lac, le temps de séjour de la masse d’eau dans le lac ainsi que le volume du lac. Ces variables intégrées à la formule arrivent à prédire 84 % du P que l’on mesure dans les lacs des Laurentides (voir encadré précédent).

DÉTERMINATION DE LA CAPACITÉ DE SUPPORT

Tout comme le modèle de capacité de support de DMM, ce modèle suggère de calculer le seuil maximal en P à partir de la concentration naturelle en phosphore prédite pour le lac (BG+ X %). Par contre, le Dr Carignan suggère plutôt d’utiliser un critère alternatif d’augmentation de 10 % de la concentration naturelle comme maximum permissible, qui serait, selon lui, plus adapté à la situation des lacs des Laurentides. L’explication de cette valeur sera exposée en détail dans la section 2 de ce chapitre.