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II. LES DIFFÉRENTS MODÈLES THÉORIQUES POUR LE CALCUL DE LA CAPACITÉ DE

2. COMPARAISON DES MODÈLES

2.1 Comparaison générale de la structure des modèles Modèle empirique vs de bilan de masse

empirique vs de bilan de masse

En premier lieu, il est intéressant de comparer de façon plus globale, les différentes approches utilisées afin de déterminer la capacité de support en P d’un plan d’eau. En effet, le modèle de Carignan aborde le calcul de la capacité de support en adoptant une approche empirique, qui consiste à ne retenir que les paramètres dans les calculs qui influencent le plus les apports en P dans un lac de villégiature. À l’inverse, les calculs selon l’approche de bilan de masse, utilisée par Dillon et ses successeurs, se doivent d’être les plus exhaustifs possibles, en incluant toutes les sources d’apports en P naturelles et artificielles du bassin versant. La logique d’une approche de bilan de masse consiste donc à reproduire le plus fidèlement possible le parcours du phosphore dans le bassin versant du lac. Cela repose sur des prédictions, car bien qu’il soit possible de mesurer la concentration de P présente dans un lac, il est très difficile de relativiser les apports des différentes sources. Il est possible de vérifier la validité des prédictions sur ces apports relatifs en se fiant au degré de corrélation entre la concentration totale en P

prédite par le modèle et celle qu’il est possible de mesurer dans le plan d’eau directement.

Ainsi, le modèle empirique de Carignan a l’avantage de permettre une prédiction des concentrations naturelle et totale en P d’un lac, à l’aide seulement d’un minimum de paramètres, comme la concentration de COD au lac et le nombre d’habitations présentes dans un rayon de 100 m sur son bassin versant. Ce modèle est plus facile à utiliser, demandant une diversité de données minimale. Les modèles de bilan de masse demandent quant à eux une connaissance du territoire approfondie et sont plus complexes à faire fonctionner, impliquant de nombreuses variables. Ces modèles nécessitent d’avoir des informations précises sur l’exportation moyenne en phosphore attribuée aux différentes pratiques présentes dans le bassin versant et aussi de connaître la rétention du P par les sols. De plus, le cycle interne du phosphore à l’intérieur du plan d’eau se doit d’être connu, afin de pouvoir prédire la rétention du P par lac ainsi que le relargage du P qui peut être effectué depuis les sédiments. Bref, les modèles de bilan de masse impliquent un nombre maximum de paramètres, ce qui augmente leur risque d’imprécision lors de la prédiction de l’apport total en P.

« Ce que dit M. Carignan aussi c’est que les méthodes de Dillon, c’est extrêmement complexe. Cela prend une connaissance du territoire, épouvantable. Alors, il dit, mon modèle à moi j’ai juste deux choses à mesurer (…) » (Assel, 2007).

Malgré tout, la simplification des calculs par le modèle empirique pour la prédiction de la concentration totale en P d’un lac ne semble pas comporter que des avantages. En effet, le désavantage majeur d’une simplification des calculs se fait sentir pour les lacs en mauvaises postures où des actions correctrices doivent être appliquées dans le bassin versant. En effet, la procédure est plus simple grâce au modèle empirique,

gravité et l’ampleur du problème. Par contre, ce modèle nous permet seulement d’évaluer l’impact total des apports en P sur le plan d’eau et ne permet pas de relativiser l’impact des différentes sources.

C’est pourquoi, les modèles de bilan de masse trouvent toutes leurs utilités dans un deuxième temps, lorsqu’il est temps de passer à l’action et de cibler des actions correctrices précises à entreprendre dans le bassin versant d’un lac qui est menacé d’eutrophisation accélérée et qui a dépassé sa capacité de support. En effet, les modèles de bilan de masse ont l’avantage de permettre d’évaluer la contribution relative de chacune des sources en phosphore présentes dans un bassin versant et de déterminer qu’elles sont parmi ces dernières, les principales responsables du problème d’eutrophisation du plan d’eau. Des actions afin d’améliorer la situation peuvent ensuite être entreprises, étant justifiées par un calcul.

« Le problème du modèle empirique c’est que si moi, comme gestionnaire, le MDDEP comme gestionnaire, le MRNF (…) on a besoin de décortiquer l’apport en P, on a besoin de savoir ça vient d’où l’apport en P. (...) il faut absolument d’autres outils comme le bilan de masse, qui me permettent de dire, ce sont les eaux de ruissellement qui sont problématiques, ce sont les installations septiques... Ça me permet de décortiquer, de pointer c’est quoi ma problématique et de donner les mesures correctrices à effectuer. » (Dufour, 2008).

Ainsi, les gestionnaires et responsables de l’aménagement du territoire ont besoin d’un outil qui leur permet de cibler les actions correctrices à entreprendre, spécifiques à chaque bassin versant sur leur territoire. Le modèle empirique de Carignan ne permet pas de tirer ces conclusions, d’autant plus qu’il est conçu pour les bassins versants ayant comme seule source humaine de phosphore les habitations reliées à des installations septiques. Cela a une importance capitale quand on sait que les problématiques d’apports en phosphore peuvent être multiples (apports ponctuels et diffus) et provenir de plusieurs sources dans un même bassin versant.

« Les apports ponctuels, M. Carignan par exemple, je ne peux pas les mettre dans son modèle. Dr Carignan considère tout apport anthropique comme étant une habitation, un bâtiment sur une superficie. (...) Tout le monde s’entend pour l’utilité de fonctionner avec un modèle de bilan de masse (...) On met beaucoup d’énergie sur les installations septiques, mais on se rend compte que ce n’est peut-être pas une problématique aussi aiguë que l’on pensait. Il y a peut-être beaucoup plus à s’inquiéter justement des eaux de ruissellement, de l’érosion, des apports

ponctuels qu’on n’est pas capable de quantifier. (...) On se rend compte que c’est peut-être

ailleurs nos problèmes… Les chemins, les engrais. C’est peut-être autre chose que juste les installations septiques... Essayer de comprendre la migration dans le sol, oui c’est sûrement une source, mais c’est peut-être bien moindre que ce qu’on pensait initialement. » (Dufour, 2008).

Exemples de sources ponctuelles en P dans un bassin versant

o Rejets d’eaux usées des stations d’épuration o Déversement d’un égout pluvial

o Piscicultures, golfs, hôtels, industries

Exemples de sources diffuses en P dans un bassin versant

o Installations septiques

o Engrais et fertilisants (terres agricoles, golfs) o Érosion et ruissellement

o Déboisement

o Agriculture

Sources : (Carignan 2006a; Fournier, 2007).

Ainsi, le modèle de Carignan ne permet pas, contrairement aux modèles de bilan de masse (DMM, LAKECAP et MRNQ), d’établir un impact différent selon la source et ainsi de cibler des actions correctrices à effectuer dans le bassin versant. Ainsi, dans le cas où la capacité de support d’un lac est calculée comme étant dépassée à l’aide de ce modèle, une analyse du bassin versant se doit obligatoirement d’être effectuée, dans un deuxième temps, afin de cibler les sources en phosphore ainsi que leur importance

2.2

Comparaison des variables utilisées pour le calcul des apports