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Partie II Développement de méthodes d’analyse

CHAPITRE 4 Quantification sans marquage pour la recherche de biomarqueurs

B. Quantification MS1 : l’extraction des courants d’ions

B.3. Paramètres influençant la quantification

Comme décrit précédemment, le choix du laboratoire s’est porté sur le logiciel Skyline pour la quantification de protéines sans marquage.

Skyline extrait l’intensité des x premiers isotopes (définis par l’utilisateur) au cours du temps. La fenêtre d’extraction est calculée selon la résolution de l’instrument et correspond à deux fois la largeur à mi-hauteur (cf. figure 88). L’utilisateur peut ensuite visualiser une trace chromatographique pour l’ensemble des isotopes de chaque peptide obtenu. Un isotopic dot product (idotp) est calculé, permettant ainsi de comparer la distribution observée à la distribution attendue (score de 0 à 1, 1 représentant la plus forte corrélation).

Figure 88

Schéma représentant le mode de fonctionnement de Skyline pour l'extraction des courants d’ions

Skyline repère un composé d'intérêt à un certain temps de rétention (A), extrait les trois premiers isotopes sur une certaine fenêtre de temps de rétention (B), puis calcule la somme des intensités de chaque extraction pour chaque isotope sur le temps de rétention défini (C) afin d’obtenir une trace chromatographique des trois premiers isotopes du peptide considéré.

La particularité de l’extraction de Skyline réside dans l’utilisation de librairies spectrales. Ces dernières sont obtenues lors de l’assignation des spectres par les moteurs de recherche, par exemple Mascot. L’ensemble des spectres des ions identifiés est rassemblé dans une librairie, et les redondances sont conservées. Ainsi, pour chaque analyse, une fenêtre de temps est établie selon des critères définis par

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l’utilisateur, par exemple ± 3 min, autour du temps de rétention auquel le peptide a été sélectionné pour la MS/MS. Cette fenêtre est ensuite associée au rapport masse/charge (m/z) du peptide considéré afin de détecter le pic à intégrer. Cette technique permet par ailleurs de rechercher le pic à intégrer dans les analyses où le peptide n’a pas été identifié (cf. figure 89). Il est important de noter ici que Skyline ne réalise pas de réalignement en temps de rétention, contrairement à d’autres logiciels tels que MaxQuant.

Figure 89

Étapes consécutives de la quantification sans marquage lors de l'utilisation de Skyline

Une fois analysés, les spectres MS/MS sont identifiés et une librairie spectrale est créée. Cette dernière est ensuite utilisée pour cibler l’extraction des courants d’ions de la MS.

Afin d’étudier l’influence de différents paramètres sur les résultats obtenus, et notamment sur les moyennes et médianes des coefficients de variation, 4 réplicats issus des 12 réplicats réalisés précédemment ont été comparés.

Dans un premier temps, la variation de la quantification entre les quatre réplicats a été évaluée sur trois niveaux : isotopique, peptidique et protéique. La figure 90 montre les résultats obtenus. Les valeurs de médiane et de moyenne sont sensiblement améliorées lorsque la quantification est réalisée au niveau

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protéique. Ce constat peut s’expliquer par le fait que les peptides les moins abondants et les plus faibles en intensité sont ceux qui présentent en général une variation plus élevée. Par contre, du fait de leur faible abondance, leur impact sur la quantification de la protéine est faible.

Figure 90

Coefficients de variation moyen et médian obtenus pour chaque niveau de quantification, isotopique, peptidique et protéique

Dans le cas présent, la quantification au niveau protéique a été réalisée en sommant l’intensité de l’ensemble des peptides identifiés pour les protéines considérées. Plusieurs facteurs peuvent expliquer un coefficient de variation élevé pour un peptide donné :

 erreur du logiciel d’extraction (extraction du mauvais pic ou mauvaise intégration) ;

 présence d’une interférence au même temps de rétention et à la même masse ;

 instabilité du peptide du fait de modifications post-traductionnelles, de la nature hydrophile ou hydrophobe de celui-ci.

Afin d’améliorer les résultats obtenus, plusieurs filtres peptidiques permettant de limiter le nombre de peptides à forte variation ont été testés :

suppression des peptides avec un isotope dot product < 0,9 afin de s’assurer une qualité

d’identification et d’intégration : le pic intégré est correct et il n’y a pas d’interférence ;

 suppression des peptides à méthionine pour s’affranchir des problèmes liés à l’oxydation ;

 suppression des peptides à cystéine (carbamidométhylation).

Les résultats obtenus sont présentés sous forme de boîtes à moustaches dans la figure 91. La médiane et la moyenne des coefficients de variation sont très faiblement améliorées si les peptides à méthionine ne sont pas considérés. De plus, cela occasionne la suppression de 30 % des peptides quantifiés. Lors de la suppression des peptides à méthionine et à cystéine, les résultats sont en revanche nettement améliorés. Mais, une diminution de 62 % de peptides quantifiés est observée. Dans le cas de ces

18,3 16,4 13,7 7,6 7,1 6,5 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20

Isotopes Peptides Protéines

Co e ff ic ie n t d e v ar iation (% ) Moyenne Médiane

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analyses, il apparaît donc peu judicieux de supprimer les peptides modifiés. En effet, les résultats sont très faiblement améliorés alors que beaucoup de peptides sont supprimés.

Le filtre sur l’idotp permet quant à lui d’améliorer de façon non négligeable les résultats, tout en ne diminuant pas de manière excessive le nombre de peptides identifiés (20 % en moins).

L’idotp permet ici d’associer un score à la qualité de l’intégration et est donc particulièrement bien adapté pour filtrer les grandes séries de données. Cependant, un bémol est à évoquer. En effet, dans le cadre de la recherche de biomarqueurs, les protéines les plus intéressantes restent celles qui sont absentes dans une condition et présentes dans l’autre. Le filtre sur les idotp éliminera l’ensemble des peptides de ces protéines car il y a peu de chance que l’intégration du bruit de fond corrèle avec les rapports isotopiques théoriques.

Figure 91

Boîtes à moustaches montrant la variation de quantification sur les peptides entre les 4 injections d'un échantillon de microparticules plasmatiques suivant différents filtres : sans les peptides à méthionine, sans les peptides à cystéine, sans les peptides avec un idotp < 0,9

Les valeurs médianes sont indiquées dans l’encadré rouge et les valeurs moyennes, dans l’encadré mauve.

C. Conclusions

Les techniques de quantification des protéines sans marquage connaissent aujourd’hui un succès croissant, de par leur simplicité de mise en œuvre et leur faible coût. Cependant, chacune des deux techniques présentées au cours de ce chapitre possède des inconvénients qui nécessitent une étape de validation des différences de quantité mises en évidence entre chaque échantillon. Des techniques de quantification basées sur le mode d’acquisition DIA (data independant analysis) émergent aujourd’hui. Elles présentent le grand avantage de s’affranchir des problèmes relatifs à la DDA.

Dans le cadre de la recherche de biomarqueurs, la quantification sans marquage doit être considérée comme une étape préliminaire permettant d’émettre des hypothèses et doit impérativement être suivie d’une étape de validation par des méthodes plus ciblées telles que la SRM ou encore la cytométrie en flux.