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2. FACTEURS À CONSIDÉRER POUR LA RÉALISATION DE PROGRAMMES DE TRANSFERT

2.6 Cadre légal et réglementaire applicable au Canada

2.6.1 Palier fédéral

Cette sous-section présente l’encadrement législatif et réglementaire fédéral applicable, les procédures pour l’obtention d’autorisations, de licences ou de permis, ainsi que les autorités responsables en matière de transfert d’espèces animales au Canada.

Loi sur les espèces en péril (LEP)

Si le but d’un programme de transfert est de conserver une espèce, la Loi sur les espèces en péril (LEP) peut s’appliquer à l’instauration d’un programme de transfert d’une espèce reconnue pour être en situation précaire selon cette loi. La LEP a pour principal objectif d’assurer la survie des espèces sauvages et la protection du patrimoine naturel au Canada. Puisque des projets de transfert sont souvent mis en place dans des contextes impliquant des situations critiques, comme dans le cas où une espèce est en situation précaire, il est fort probable que les gestionnaires de ces projets doivent se conformer à cette loi. Ainsi, la loi prévoit diverses mesures visant à protéger les espèces en péril, entre autres par le biais de programmes de rétablissement à l’intérieur desquels des projets de transfert animal peuvent être prévus. C’est un comité composé de divers intervenants, le Comité du programme de rétablissement des espèces canadiennes en péril (RESCAPÉ), qui est responsable d’élaborer et de mettre en œuvre ces programmes. Il est donc possible, pour différentes organisations, de s’impliquer dans les activités de transferts potentiels de ces programmes. Pour l’application de cette loi, le gouvernement suit le principe selon lequel « s’il existe une menace d’atteinte grave ou irréversible à l’espèce sauvage inscrite, le manque de certitude scientifique ne doit pas être prétexte à retarder la prise de mesures efficientes pour prévenir la disparition ou sa décroissance ». (LEP) La LEP exige donc la formation d’une équipe de rétablissement et l’obligation de produire des plans de rétablissement pour chaque espèce inscrite, contrairement à la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables du palier provincial.

Il est à noter que l’habitat essentiel de l’espèce n’est pas systématiquement protégé par la loi, c’est-à-dire qu’il peut ou non être protégé selon l’avis du ministre compétent à l’égard des menaces qui pèsent sur celui-

ci. Trois ministères fédéraux ont des responsabilités au titre de la LEP, soit le ministère des Pêches et des Océans (MPO) qui est responsable des espèces aquatiques en péril, le ministère du Patrimoine canadien (PCH), via l’Agence Parcs Canada, qui est responsable des espèces en péril se trouvant dans les parcs nationaux, dans les lieux historiques nationaux ou dans d’autres aires de protection du patrimoine, et le ministère d’ECCC, qui est responsable de toutes les autres espèces en péril et de l’administration de la LEP. (Bourdages et Labelle, 2003; Loi sur les espèces en péril) Les ministres des gouvernements provinciaux et territoriaux, quant à eux, sont responsables de la conservation et de la gestion des espèces sauvages dans leur province ou leur territoire, dont la mise en œuvre des plans de rétablissement (ECCC, 2018).

Par ailleurs, il est possible de mettre en place des accords de financement entre le ministre compétent et des organisations afin d’exécuter des projets de conservation d’espèces animales, tels que des projets de transfert, en vertu de l’article 13 de la loi. Un projet de transfert de rats-kangourous d’Ord (Dipodomys ordii), réalisé par le passé en Alberta, a notamment pu bénéficier de financement découlant de cette loi pour sa mise en œuvre. (ECCC, 2018)

Par ailleurs, pour pratiquer « une activité qui profite à une espèce ou qui améliore ses chances de survie à l’état sauvage », un permis doit être délivré par le ministre en vertu du paragraphe 2 de l’article 73 de la LEP, moyennant des frais. La détention d’un permis est donc nécessaire pour la réalisation d’un programme de transfert ciblant une espèce inscrite à la LEP. Pour obtenir un permis, une demande doit être envoyée au ministre compétent. Plusieurs renseignements décrits dans le Règlement sur les permis autorisant une activité touchant une espèce sauvage inscrite doivent être contenus dans la demande. Entre autres, les renseignements doivent :

« a) […] [montrer que] toutes les solutions de rechange susceptibles de minimiser les conséquences négatives de l’activité pour l’espèce ont été envisagées et la meilleure solution retenue.

b) […] [montrer que] toutes les mesures possibles seront prises afin de minimiser les conséquences négatives de l’activité pour l’espèce, son habitat essentiel ou la résidence de ses individus.

c) […] [indiquer] les changements que l’activité risque de causer à l’espèce sauvage inscrite, à son habitat essentiel ou à la résidence de ses individus, les répercussions possibles de ces changements et l’importance de celles-ci. »

(LEP)

Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial (LPEAVSRCII)

La Convention sur le commerce international des espèces de flore et de faune en péril (CITES) a pour objectif de contrôler le commerce légal et illégal d’espèces sauvages en péril et de leurs produits dérivés (Bourdages et Labelle, 2003). Elle n’a pas pour but d’éliminer le commerce, mais plutôt de prévenir la surexploitation d’espèces en péril et le braconnage excessif (Gouvernement du Canada, 2018).

Cette convention est administrée et mise en œuvre au Canada au moyen de la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial (LPEAVSRCII). Cette loi fédérale, créée afin de renforcer la CITES, vise à contrôler le commerce international et interprovincial des espèces en péril (Bourdages et Labelle, 2003). Elle s’applique aux espèces animales et végétales suivantes :

 « les espèces figurant sur la liste de contrôle de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES);

 les espèces étrangères dont la capture, la possession et l’exportation sont interdites ou réglementées par des lois de leur pays d’origine;

 les espèces canadiennes dont la capture, la possession et l’acheminement sont réglementés par des lois provinciales ou territoriales;

 les espèces dont l’introduction dans les écosystèmes canadiens pourrait mettre en danger les espèces canadiennes. » (LPEAVSRCII)

En vertu des articles 6 et 7 de la loi, l’importation, l’exportation et l’acheminement interprovincial de ces espèces sont interdits, excepté si une licence ou un permis a été émis à cet effet (LPEAVSRCII). Ainsi, si un gestionnaire de programme de transfert souhaite, par exemple, acheminer au Québec une espèce provenant d’une autre province et visée par la loi, il doit obtenir les documents requis auparavant, soit les licences ou autorisations écrites, par le biais d’une demande envoyée au ministre d’ECCC. Ce dernier est responsable de l’application de la LPEAVSRCII. Au moment d’une importation ou d’une exportation d’une espèce depuis un autre pays, c’est l’Agence des services frontaliers du Canada qui reçoit et valide les permis de la CITES à la frontière.

Loi sur les espèces sauvages du Canada (LESC)

La Loi sur les espèces sauvages du Canada (LESC) vise à créer, gérer et protéger des réserves d’espèces sauvages afin d’y mener des activités de recherche, de conservation ou d’interprétation des espèces. Elles protègent donc des habitats essentiels pour certaines espèces, telles que des espèces en péril. (LESC) En revanche, l’article 3 du Règlement sur les réserves d’espèces sauvages (RRES) « interdit toute activité pouvant nuire aux espèces et à leur habitat, à moins de détenir un permis précisant l’activité permise ». Un permis doit donc être émis par le ministre d’ECCC afin de mettre en place un programme de transfert à l’intérieur d’une réserve inscrite à la loi. (RRES)

Loi sur les parcs nationaux du Canada (LPNC)

La Loi sur les parcs nationaux du Canada (LPNC) permet de protéger plusieurs espaces naturels à des fins de conservation et pour le bénéfice des générations présentes et futures (Bourdages et Labelle, 2003). C’est le ministre de l’Agence Parcs Canada qui est responsable de l’application de cette loi. À la différence des réserves inscrites dans la Loi sur les espèces sauvages du Canada, les parcs nationaux ne protègent

pas l’habitat d’espèces spécifiques, mais plutôt des espaces naturels sans considération particulière des espèces qui les habitent (Nature Canada, 2018).

Le Règlement sur la faune des parcs nationaux, sous-jacent, émet plusieurs interdictions en matière faunique. Il interdit notamment « de chasser, de déranger, de garder en captivité ou de détruire des animaux sauvages d’un parc ou de les enlever » et « de déranger ou de détruire les nids, repaires, tanières ou abris ou barrages de castors qui se trouvent dans un parc ». Le règlement interdit aussi de toucher, nourrir ou attirer la faune, tout comme d’introduire de la faune exotique dans un parc. (Règlement sur la faune des parcs nationaux)

En revanche, le directeur d’un parc a le pouvoir de délivrer des permis ou autorisations visant à permettre la pratique d’une activité dans le parc, s’appliquant entre autres aux activités de conservation, telles que le transfert d’espèces animales, en vertu de l’article 7 du Règlement général sur les parcs nationaux, lui aussi sous-jacent à la loi. Il est aussi possible d’obtenir une autorisation permettant « la possession d’animaux sauvages [que des personnes] sont autorisées à enlever, relocaliser ou détruire » dans un parc national (Règlement sur la faune des parcs nationaux).

Loi sur la santé des animaux (LSA)

La Loi sur la santé des animaux (LSA) vise à protéger la santé des personnes et des animaux par la lutte contre les maladies et les substances toxiques relatives aux animaux; c’est pourquoi elle peut intervenir sur les activités de transfert animal. C’est le ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire (AAC) qui est responsable de l’application de la loi. Cette loi oblige les propriétaires et les vétérinaires à déclarer la présence de maladies à déclaration obligatoire, à notification immédiate ou annuelle inscrites dans la loi. Elle interdit aussi le déplacement d’animaux atteints de maladies déclarables sans la possession d’un permis. La loi intervient aussi sur la disposition, l’importation et le transport d’animaux ou de matériel génétique par le biais de diverses exigences devant être respectées. Les propriétaires ou les personnes qui ont la possession, la responsabilité ou la charge de soins d’animaux peuvent également recevoir la visite d’inspecteurs ou d’agents d’exécution ayant comme mandat de vérifier le respect des dispositions de la loi. Ces derniers ont par ailleurs des pouvoirs concernant la disposition ou le traitement et la perquisition d’animaux. (LSA)

Le Règlement sur la santé des animaux (RSA), sous-jacent à la LSA, contient, quant à lui, des exigences par rapport à l’isolement, le confinement et l’inspection d’animaux à des fins de lutte contre les maladies. Ce règlement mentionne également les exigences en matière de déplacement et d’identification des animaux. En ce qui concerne l’importation d’animaux, les articles 11 à 14 du RSA indiquent l’obligation de détenir un permis ou un certificat pour importer un animal réglementé ou du matériel génétique, incluant le sperme, d’un animal réglementé (RSA). En vertu des articles 51 et 51.1 du RSA, un permis ou un certificat

doit aussi être détenu pour importer ou déplacer certains animaux, du sang et du sérum. Un permis ou un certificat doit également être détenu, selon l’article 53 du RSA, pour importer certains aliments pour animaux. De plus, un permis est exigé pour disséminer dans l’environnement, importer, fabriquer ou conserver tout produit vétérinaire biologique, ce qui inclut les animaux selon l’article 120.3 du RSA.

Code criminel

Les articles 444 à 447.1 du Code criminel portent sur la cruauté animale. En vertu du code, il est notamment interdit de faire souffrir inutilement, d’omettre d’accorder des soins raisonnables et de blesser des animaux. Le transfert d’animaux doit donc toujours être réalisée dans le respect de ces dispositions. Les agents de contrôle, incluant les agents de la paix, sont responsables de l’application de cette loi. (Code criminel)