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3. MÉTHODOLOGIE PROPOSÉE POUR LA RÉALISATION D’UN PROGRAMME DE TRANSFERT

3.4 Processus transversaux

3.4.2 Étude de faisabilité

Le transfert d’espèces animales requiert beaucoup d’investissements et peut occasionner des impacts sur les humains. Par conséquent, il est nécessaire de s’assurer de la réelle faisabilité d’un projet de transfert avant de l’entreprendre. Contrairement à l’évaluation des risques, l’étude de faisabilité considère les contraintes que comporte un projet, plutôt que les inconvénients potentiels qu’il peut occasionner. Il est conseillé de réaliser cette étude après l’évaluation des risques, afin que les contraintes qui seront identifiées tiennent compte des mesures prévues pour limiter les risques et des valeurs de risques résiduels obtenues.

Cette étude doit être réalisée lors de l’étape de la conception et de la planification du programme (section 3.1). Elle doit être effectuée au travers des sous-étapes 3.1.3 à 3.1.10, idéalement, au fur et à mesure de la conception du programme, car la conception du programme dépend de sa faisabilité, mais aussi, parce que sa faisabilité vis-à-vis de divers aspects influence sa conception.

L’étude doit aussi être effectuée selon l’échelle temporelle et spatiale appropriée, c’est-à-dire à long terme et en considérant le déplacement potentiel des espèces mobiles/migratrices sur un territoire (UICN, 1998).

L’étude de faisabilité doit être réalisée sur les plans écologique, social et financier. Les facteurs influençant la faisabilité d’un projet doivent être d’abord identifiés et l’ampleur de leurs impacts évaluée. Une fois les facteurs identifiés et leurs impacts évalués, les mesures devant être mises en œuvre pour assurer la faisabilité d’un projet doivent être déterminées. La faisabilité à instaurer ces mesures doit être évaluée pour effectuer ce choix, de manière qualitative ou quantitative selon des critères préétablis. Des modélisations peuvent, entre autres, être réalisées, afin de prédire les impacts engendrés par un projet de transfert sur divers facteurs (voir section 2.8).

L’étude de faisabilité se divise en trois parties :  Faisabilité écologique;

 Faisabilité sociale;  Faisabilité financière.

Faisabilité écologique

 Connaissances;  Habitat;  Climat;  Fondateurs;  Bien-être animal;  Pathologies.

Ceux-ci sont décrits en détail à la sous-section 2.25.1 de l’essai.

Faisabilité sociale

Comme expliqué à la sous-section 2.25.2, pour considérer un projet faisable sur le plan social, l’ensemble de ses implications doivent être acceptées et soutenues par les parties prenantes concernées (UICN, 1998).

Afin d’évaluer la faisabilité sociale d’un projet, il faut analyser les contextes social, culturel et politique rattachés à une espèce et à la région prévue pour son relâchement lorsque l’on envisage son transfert. Pour ce faire, « les circonstances socioéconomiques, les attitudes et valeurs des communautés, leurs motivations et leurs attentes, leurs comportements et l’évolution de ceux-ci, ainsi que les coûts et avantages prévisibles » (UICN, 2012) d’un projet de transfert doivent être étudiés lors de la planification de celui-ci. Pour recueillir ces informations, des sondages peuvent être diffusés auprès des parties prenantes pertinentes (AZA, 1992). Cette information permettra de dresser un portrait sommaire de la perception des acteurs vis-à-vis d’un projet, et ainsi d’évaluer sa faisabilité sociale. L’acquisition d’information sur l’ensemble de ces facteurs constitue par ailleurs la base pour déterminer comment un projet de transfert peut amener les parties prenantes à prendre position en sa faveur (UICN, 2012).

Lors de cette démarche, les implications relatives à un projet de transfert doivent toutefois être pleinement comprises par les collectivités locales et les intervenants pertinents au préalable pour pouvoir évaluer sa faisabilité sociale. Il faut donc informer adéquatement ces parties prenantes selon les méthodes présentées à la section 3.4.3.

Faisabilité financière

Comme expliqué à la section 2.25.3, un projet doit détenir un financement suffisant garanti pour une période de temps adéquate et flexible pour couvrir toutes les dépenses impliquées dans ce dernier.

Pour pouvoir statuer sur la faisabilité financière d’un projet, il faut d’abord évaluer l’ensemble des coûts du projet. Cette évaluation doit comprendre les coûts des activités planifiées dans le programme, ceux pour la stratégie de sortie préalablement établie et ceux pour les dommages potentiels pouvant survenir au cours

du projet (voir sections 2.20 et 2.25 pour obtenir plus de détails). Puis, il faut évaluer la possibilité de financer l’ensemble de ces dépenses en identifiant des bailleurs de fonds, des activités de financement, etc.

3.4.3 Diffusion des informations

Une diffusion efficace des informations concernant le programme de transfert auprès des diverses parties prenantes et de la communauté scientifique est fondamentale pour plusieurs raisons (voir section 2.19). Cette diffusion doit être réalisée du début à la fin d’un programme de transfert et de manière fréquente.

Tout d’abord, une stratégie de communication doit être élaborée pour le projet en tenant compte de divers facteurs (p. ex. nature, format et langues des informations diffusées), afin qu’elle soit adaptée au public ciblé et qu’elle réussisse à gagner leur attention (Kleiman, 1989; UICN, 2012). Cette stratégie de communication doit également prévoir des porte-paroles spécifiques pour le partage de certaines informations selon les circonstances (p. ex. informer des journalistes, les législateurs, les financeurs et autres « VIPs »), surtout en cas de problème (AZA, 1992).

Ensuite, les avantages et les inconvénients du programme doivent être partagés auprès des parties prenantes impliquées dès le début de celui-ci, afin de s’assurer de leur support et de permettre une prise de décision éclairée (UICN, 2012). Une liste des différentes parties prenantes pouvant être impliquées dans le cadre d’un programme de transfert animal au Québec est disponible à l’annexe 3 du présent essai. Il est donc recommandé de communiquer avec les parties prenantes qui y sont indiquées à l’échelle locale ou régionale pertinente dès la conception et la planification du projet.

La diffusion d’informations sur les aspects indiqués au tableau 3.8 auprès des diverses parties prenantes est recommandée tout au long du projet de transfert.

Pour diffuser ces informations, des rapports sur ces différents aspects doivent être élaborés et diffusés à chaque étape importante d’un projet. Ceux-ci doivent ensuite être diffusés par les plates-formes de diffusion et les processus de consultation qui auront été choisis dans la stratégie de communication préalablement établie. (UICN, 2012) Voici quelques exemples de moyens de diffusion pouvant être utilisés :

 Journaux, magazines et autres médias écrits;  Télévision, radio et autres médias audiovisuels;

 Sites web, blogues, réseaux sociaux et autres médias d’Internet;

 Présentations organisées à proximité des sites de relâchement (municipalités, écoles, etc.);  Événements sous forme de processus consultatifs;

 Mécanismes d’évaluation et de planification participatives. (UICN, 2012)

Tableau 3.8 Aspects sur lesquels des informations doivent être diffusées aux parties prenantes (compilation d’après : AZA, 1992; Estrada, 2014; NSRF, 2014).

Aspects

Espèce Plus grandes menaces envers le succès

Localisation et site de relâchement Organisations impliquées

Site clôturé ou non clôturé? Agence de délivrance des permis/organisme de surveillance

Proximité des zones urbaines Planification

Taille de la population actuelle Financement

Taille de la population transférée Préparation et entraînement des animaux (enrichissement

environnemental, soins vétérinaires; etc.)

Nombre d’individus relâchés depuis le début Transport

Nombre d’individus survivants à la reproduction artificielle Techniques de relâchement

Nombre d’individus en captivité Interventions de sauvetage après le relâchement (soins

vétérinaires, redéplacement d’animaux désorientés, etc.)

Dates des relâchements Suivis prévus

Structure sociale du groupe d’individus relâchés Résultats selon les données recueillies dans le suivi après-

relâchement (statut, abondance, localisation des individus, etc.)

Coûts par individus Estimation du succès du projet

En ce qui concerne la diffusion d’information auprès de la communauté scientifique, il est recommandé de partager plusieurs informations précises par rapport aux méthodes utilisées et aux résultats obtenus après la réalisation d’un projet de transfert. Pour ce faire, il est idéalement suggéré de publier les méthodologies utilisées et les résultats obtenus lors du projet de manière détaillée dans une revue scientifique avec les références, mais minimalement, sur un site web. (Sutherland et al., 2010)

La première publication de ces informations devrait habituellement être déposée 5 ans après le transfert. Ensuite, il est suggéré de les publier après 10 ans, 15 ans et 20 ans. En revanche, lorsque l’espèce a une longue durée de vie (p. ex. âge de reproduction au-delà de 5 ans), la première publication peut être déposée seulement 10 ans après le transfert. Également, si la population ne s’établit pas, il est recommandé de publier les résultats après 1 an d’observation. (Sutherland et al., 2010)

Le tableau 3.9 présente les aspects minimaux pour lesquels la diffusion d’informations auprès de la communauté scientifique est recommandée à la suite d’un projet de transfert.

Tableau 3.9 Aspects sur lesquels des informations doivent être publiées minimalement (compilation d’après : AZA, 1992; NSRF, 2014; Sutherland et al., 2010).

Aspects Planification :

 Espèce;

 Nombre de relâchements et délais entre chacun;

 Individus provenant de la nature? (+ localisation et histoire)

 Individus provenant d’un milieu en captivité? (+ origine et temps en captivité)

 Marquage des individus? (+ combien et types de marquage)

 Dépistage génétique?

 Localisation du relâchement.

Financement

Préparation et entraînement des animaux :

 Dépistage vétérinaire? (+ type et résultats)

 Traitements ou vaccination?

 Enrichissement environnemental prérelâchement? (+ techniques utilisées et résultats)

Transport :

 Distance de déplacement;

 Mode de transport;

 Mortalités durant la capture, la manipulation ou le transport? (+ leurs causes)

Techniques de relâchement :

 Mesures de libération en douceur? (+ niveau : doux, ferme ou mixé, et types)

 Approvisionnement supplémentaire en nourriture? (+ quantité et fréquence)

 Approvisionnement en sites de reproduction artificielle?

 Contrôle de prédateurs et de compétiteurs? (+ espèces et méthodes de contrôle)

 Contrôle sanitaire post-relâchement?

Résultats selon les données recueillies dans le suivi après-relâchement (statut, abondance, localisation des individus, etc.) Modifications de l’attitude et des connaissances des communautés humaines locales

Estimation du succès du projet