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N OTIONS DE SPHÈRE PUBLIQUE , SPHÈRE PRIVÉE ET INTIMITÉ

Ces deux thématiques et leur interpénétration ont été développés dans le mémoire pour l’obtention du diplôme supérieur en travail social de Devaure (2007) intitulé « De l’homosexualité à l’intimité : quel positionnement pour l’assistant social polyvalent de secteur ? ». Ainsi, ce chapitre se référera essentiellement à ce travail.

B.5.1

Définitions

Sphère publique

Cain (cité par Devaure, 2007, p.34) explique que, dans un contexte de travail (par exemple, les réunions et les séances), la relation d’une personne avec une autre est considérée comme publique par opposition à celle privée qui a lieu chez soi, en famille, puisqu’on peut considérer « comme public

« ce qui est commun, à l’usage de tous, accessible à tous (…) » ».

Sphère privée

La sphère privée, toujours selon Cain (citée par Devaure, 2007, p.35), fait référence à « ce qui concerne quelqu’un dans sa personne même, dans sa vie personnelle, intime (vie privée) ». Puis, Devaure (2007, p.35) ajoute que « le privé ne concerne pas le public, se fait sans témoins, en dehors d’un cadre officiel ». Enfin, il termine en précisant que « la vie privée, c’est la vie conjugale, la vie domestique, la vie familiale, la vie affective, la vie intérieure, morale, spirituelle, vie de l’esprit, vie religieuse ».

B-23 Intimité

L’intimité appartient à la vie privée, aux relations personnelles proches, familiales ainsi qu’à ce qui est intérieur, profond et secret. Sztalryd (cité par Devaure, 2007, p.42) résume cette notion en notant que « l’intimité décrit la vie intérieure profonde, la nature essentielle de quelqu’un. C’est ce qui reste généralement caché sous les apparences impénétrables à l’observation externe, parfois même à l’analyse du sujet. ». L’intimité concerne également la vie sentimentale et sexuelle.

De plus, Devaure (2007, p.43) écrit que « Être intime avec quelqu’un, (…) c’est se mettre à nu, dévoiler sa personnalité profonde et ses états d’âme, exposer (…) ses douloureuses vulnérabilités. ».

B.5.2

Au quotidien

Devaure (2007, p. 36) affirme que les sphères publiques et privées s’interpénètrent tout au long de la journée. Il parle de « privatisation de l’espace public » et de « publicisation de l’espace privé ». Pour appuyer cette idée, il met en avant ce qu’il nomme « l’extension des contrôles étatiques » sur l’éducation, la santé ainsi que celle des moyens de communications et d’information qui favorisent l’émergence du privé et même de l’intime dans le public. Par ailleurs, il invoque le désir croissant de chacun de pouvoir s’épanouir et être de plus en plus soi-même. Pour cette raison, l’équilibre à trouver entre être soi-même, donc dévoiler parfois des domaines de sa vie privée voire intime et jouer un rôle social dans la vie publique est de plus en plus difficile à atteindre, le personnel s’infiltrant de plus en plus dans le collectif. Devaure (2007, p.37) prend ensuite l’exemple du lieu de travail sur lequel « il est possible d’évoquer sa vie privée (…) à certaines personnes, dans un certain contexte. ».

Une pratique particulière dans les entreprises a été étudiée par Monjaret (2001) : celle de la place et du sens de la fête sur le lieu de travail. Au travers de cet article, l’auteur montre que sphères privée et publique s’entremêlent sur le lieu de travail et que cet état de fait ne doit rien au hasard. Bien au contraire, cet enchevêtrement fait partie intégrante d’une nouvelle façon de manager le personnel d’entreprise pour mieux le contrôler et pour réguler les relations sociales entre employés. Parmi les rituels inscrits dans la culture de l’entreprise se trouvent ceux consistant à fêter les mariages, les naissances, les morts ou encore la Sainte Catherine qui célèbre le célibat d’une femme ayant atteint l’âge de 25 ans. Le simple fait d’intégrer ces événements privés dans la sphère publique de l’entreprise rend confuse la limite entre ces deux mondes. De plus, comme les fêtes ont pour finalité

B-24 de permettre à chaque employé de dévoiler des aspects de sa personnalité, celui ou celle qui ne participe pas à ces célébrations risque de se trouver marginalisé, isolé voir exclu ; sa non-adhésion pouvant être interprétée comme une opposition ou un mécontentement concernant les normes institutionnelles.

B.5.3

Pour la professionnelle homosexuelle

Selon les définitions préalables, l’orientation sexuelle d’une personne, et en conséquence sa vie affective, amoureuse et sexuelle, font partie de sa vie privée et intime. De l’autre côté, dans le domaine du public, se trouve ses relations professionnelles. L’homosexualité n’étant pas acceptée par tous et donnant encore lieu à des agressions lesbophobes (voir chapitre B.3.2) en ce qui concerne les femmes lesbiennes, la question se pose naturellement de savoir ce que toute assistante sociale ose ou non apporter de sa vie privée, personnelle et intime, sur son lieu de travail afin de pouvoir être elle-même, c’est-à-dire ne pas avoir à se censurer ni à mentir sur qui elle est vraiment. À ce sujet, Castañeda (1999, p.84) rappelle que, aujourd’hui, le terme « closet » décrit la situation d’une personne qui n’a pas révélé son orientation sexuelle. A l’origine, il désignait un endroit fermé et privé en opposition à un espace public. L’expression actuelle « to come out of the closet » (« sortir du placard », en français) signifie donc assumer pleinement son homosexualité c’est-à-dire tant dans la sphère privée que publique.

L’article de Monjaret (2001) nous a évidemment questionnées en ce qui concerne le coming out de l’assistante sociale lesbienne sur son lieu de travail. Celle-ci peut effectivement se trouver confrontée à un véritable dilemme et avoir le sentiment de devoir choisir entre soit risquer d’être victime de lesbophobie si elle se dévoile et participe aux fêtes de l’entreprise qui nécessitent d’être hors du placard soit risquer d’être mise à l’écart si elle tait sa vie privée et fuit ces rituels.

B-25

B.6 L’ HOMOSEXUALITÉ

B.6.1

Introduction

Nous avons choisi de cibler notre recherche sur les conséquences professionnelles pour une assistante sociale d’être homosexuelle. Afin de mieux comprendre le possible parcours d’une femme lesbienne et ses réalités quotidiennes dans le contexte de son travail, il est nécessaire d’approfondir la question de l’homosexualité.

B.6.2

Définition

L’homosexualité est « le désir d’avoir des relations physiques intimes avec une personne de son propre sexe » (Hite, 2000, p.505), « se dit de l'orientation sexuelle qui pousse un sujet appartenant à un sexe à l'attirance sexuelle pour un sujet du même sexe. »3 ou encore c’est l’ « attirance émotionnelle et/ou sexuelle entre deux personnes du même sexe »4. Le terme « homosexuel » est apparu en 1869 et celui

« hétérosexuel » en 1892.

B.6.3

Différences entre l’homosexualité féminine et l’homosexualité masculine

Comme le précise Castañeda (1999, p.17), « d’un point de vue historique, sociologique, politique et psychologique, (…) l’expérience homosexuelle est profondément différente pour les hommes et les femmes. ». En effet, le fait que nos sociétés occidentales évoluent selon un système patriarcal depuis des générations implique que le vécu des femmes diverge de celui des hommes, « du fait de l’existence d’un système d’oppression spécifique des hommes sur les femmes » (Falquet, 2006). De son côté, Revillard (2002, p.175) confirme que « à travers les expériences subjectives de souffrance et d’isolement apparaît en creux le traitement social de l’homosexualité, qui diffère selon les sexes. ». Elle explique ainsi (p.176) que « alors que les hommes sont confrontés à l’omniprésence des représentations négatives de l’homosexualité masculine (…), le principal problème rencontré par les femmes est l’invisibilité lesbienne. ».

3 Dictionnaire sexuel : http://www.dictionnaire-sexuel.com/definition-h.html (consulté le 27.12.2010)

4Dicodunet : http://www.dicodunet.com/definitions/culture/homosexualite.htm (consulté le 27.12.2010)

B-26 Pour cette raison principale, qui sera davantage développée dans la partie consacrée à la lesbophobie (chapitre B.8), le sujet de notre recherche portera exclusivement sur les assistantes sociales lesbiennes. La suite de cet exposé théorique sera consacrée uniquement à la femme homosexuelle.