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Origine des fonctions optiques des matériaux

1.2 Propriétés optiques

1.2.3 Origine des fonctions optiques des matériaux

Trois processus physiques de base déterminent les propriétés optiques intrinsèques d’un matériau : les vibrations de réseau, les transitions électroniques et les porteurs de charges libres. Cependant, le processus dominant dépend du matériau et de la région spectrale considérée.

1.2.3.1 Vibrations de réseau

Un ensemble non linéaire de n atomes (n "vibrateurs") possède 3n degrés de liberté vibrationnels (3 translations et 3 rotations d’ensemble). Dans les solides cristallins, on peut définir une cellule unité, ré-pétée indéfiniment par translation, lacellule primitive du cristal. Son homologue dans l’espace réciproque,

la première zone de Brillouin (ZB), concentre les 3N modes fondamentaux du solide sur des courbes de

dispersion ω = ω(−k ), −k étant le vecteur d’onde des phonons.

Si la cellule primitive possède n atomes, la ZB comportera 3n vibrations de réseau appelées phonons. Trois d’entre elles seront des vibrations acoustiques (ondes de pression soniques, notées “A”), les autres des vibrations optiques (ondes de position qui peuvent se coupler aux radiations lumineuses, notées “O”). Dans le premier cas, les vibrations d’atomes voisins sont en phase alors qu’elles sont en opposition de phase dans le second. Selon que les vibrations se font parallèlement ( “L”) ou perpendiculairement (“T”) à l’axe de propagation, les branches de dispersion sont respectivement longitudinales (LA/LO) ou trans-versales (TA/TO).

Aux températures usuelles, seuls les phonons acoustiques sont excités thermiquement car les pho-nons optiques sont typiquement de fréquences plus hautes. Ainsi les modes acoustiques jouent un rôle dominant dans les propriétés thermiques et élastiques d’un matériau.

Les modes optiques vont quant à eux intervenir dans les propriétés électroniques et optiques du ma-tériau. Il en existe trois types :

– les modes actifs en infrarouge (IR), – les modes actifs en spectroscopie Raman, – les modes optiquement inactifs.

Les modes optiques d’un cristal peuvent être répartis entre des modes actifs en IR et en Raman. Les pre-miers sont en général positionnés entre 100 et 1000 cm−1et correspondent aux modes qui absorbent la lumière à travers l’interaction entre le champ électrique de la lumière et le moment dipolaire du cristal. Les modes actifs en Raman (causés par les phonons qui modulent la polarisabilité du cristal pour in-duire un moment dipolaire) absorbent faiblement la lumière à travers un mécanisme inélastique et sont observés avec une lumière intense (laser). Les modes optiquement inactifs n’ont pas de moment dipo-laire permanent ou induit et n’interagissent donc pas avec la lumière. Expérimentalement, ces modes sont

1.2. PROPRIÉTÉS OPTIQUES 15 observables par spectroscopie IR ou Raman, de même que par diffusion de neutrons ou de rayons X.

Les symétries du cristal réduisent le nombre de vibrations de réseau uniques (introduction de dégéné-rescences vibrationnelles). Une analyse par la théorie des groupes permet de déterminer le nombre de modes

optiques de chaque type pour un matériau idéal.

En augmentant le désordre structurel (non stoechiométrie, défauts, composition variable), les modes optiques s’élargissent et des modes additionnels apparaissent. Par exemple, les modes optiques d’un ma-tériau amorphe comme le verre sont très élargis comparés à ceux d’un monocristal.

Les contributions de vibrations de réseau à la fonction diélectrique d’un matériau s’effectuent au ni-veau de la permittivité de champ statique (ou constante diélectrique statique).

1.2.3.2 Transitions électroniques Origine des bandes interdites

Les électrons d’un cristal sont localisés dans des bandes d’énergie séparés par des domaines d’énergie où l’on ne peut trouver aucune orbitale électronique : de telles régions sont appeléesbandes interdites. Elles

résultent de l’interaction des ondes associées aux électrons de conduction avec les ions du cristal.

Dans un solide, la largeur de bande interdite ougap (Eg) correspond à la différence énergétique entre le sommet de la bande de valence (EV) et le bas de la bande de conduction (EC) de la structure de bandes du matériau Eg= EC− EV.

Le tableau 1.5 présente quelques valeurs de gaps pour des semi-conducteurs communs à température ambiante.

Semiconducteur InSb InAs Ge Si GaAs GaP ZnSe GaN Eg(eV ) 0,18 0,36 0,67 1,11 1,43 2,26 2,70 3,40

TAB. 1.5 – Gaps de semiconducteurs communs, à 300K

Processus d’absorption directe et indirecte

Tous les matériaux ne sont pas aptes à répondre à une excitation par une émission (ou une absorption) de photons. En ce qui concerne la probabilité d’un électron à se recombiner avec un trou par transition radiative, les semi-conducteurs peuvent être classés en deux catégories :

– les matériaux dits à “saut de bande direct” ou à “gap direct” ou encoreà transition interbande de type direct

– les matériaux dits à “saut de bande indirect” ou à “gap indirect” ou encoreà transition interbande de type indirect

FIG. 1.6 – Structure de bandes d’un semi-conducteur à transition interbande de type : (a) direct (b) indirect (adapté de [52])

Dans les semi-conducteurs à saut de bande direct, l’énergie minimum de la bande de conduction coïncide avec le maximum de la bande de valence dans le plan énergie-impulsion (Figure 1.6(a)). Une transition optique directe (verticale) a lieu sans changement significatif de la quantité de mouvement, car le photon absorbé a un très petit vecteur d’onde. Le seuil de fréquence ωg pour l’absorption par transition directe détermine la bande interdite Eg= ~ωg.

Par contre, dans les semi-conducteurs à saut de bande indirect, le maximum d’énergie de la bande de valence ne correspond pas au minimum d’énergie de la bande de conduction (Figure 1.6(b)). Or, dans le processus d’émission ou d’absorption d’un photon, la quantité de mouvement totale du cristal doit être conservée. Une transition optique indirecte impose alors la participation d’un phonon d’impulsion kc

pour la conservation de quantité de mouvement. Le seuil d’absorption pour la transition indirecte entre les extrema des bandes a lieu à ~ω = Eg+ ~Ω, où Ω est la fréquence du phonon de réseau émis ou absorbé. Le spectre du coefficient d’absorption total (Eq. 1.8) du matériau permet de déterminer son type de transition optique. La méthode consiste à soustraire la partie constante à basse énergie du spectre du co-efficient d’absorption total α = f(E) : on obtient le spectre du coco-efficient d’absorption interbande αinter

en fonction de l’énergie E. Dans la région de la limite d’absorption, les dépendances en énergie des coeffi-cients d’absorption interbande sont données par la théorie : [59]

– pour une transition optique directe :

αinterE = Ad(E − Eg,d)1/2 (1.11)

– pour une transition optique indirecte :

αinterE = Ai(E − Eg,i)2 (1.12)

où Eg,d et Eg,i représentent les largeurs de bande interdite, Ad et Ai sont des paramètres caracté-ristiques indépendants de l’énergie, pour les transitions directe et indirecte respectivement. D’après les

1.2. PROPRIÉTÉS OPTIQUES 17 équations (1.11) et (1.12), les quantités (αinterE)2et (αinterE)1/2dépendent linéairement de l’énergie au voisinage de la limite d’absorption. Ainsi les valeurs des gaps peuvent être obtenues en extrapolant ces graphiques à l’axe des abscisses.

1.2.3.3 Porteurs de charges libres

De même que les électrons dans les métaux, ou que les électrons ou les trous dans les semi-conducteurs, les porteurs de charge libres (FCC, free charge carriers) affectent également les propriétés optiques des

maté-riaux. Pour les isolants ou les semi-conducteurs à large bande interdite avec un faible nombre de porteurs libres à température ambiante (faible conductivité), l’effet des porteurs libres sur l’absorption optique est faible. Pour des non métaux, la concentration en porteurs libres augmente avec la température ainsi même un isolant a une conductivité mesurable (et une absorption de porteurs libres) à très haute température.