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ORGANISATION DES POUVOIRS ET PARTAGE DE L’AUTORITÉ SUR LES TERRES ET LES FORÊTS

Index des termes Indonésiens

ORGANISATION DES POUVOIRS ET PARTAGE DE L’AUTORITÉ SUR LES TERRES ET LES FORÊTS

Depuis la mise en œuvre des lois de décentralisation 22/1999 et 25/1999, l’administration est divisée en un gouvernement central (pemerintah pusat) et des gouvernements régionaux (pemerintah daerah) de province (propinsi) ou de district (kabupaten). Le président est à la tête de la branche exécutive du gouvernement central et dirige le conseil des ministres. Les provinces et les districts ont une structure similaire mais une autorité différente.

Figure 8 : Système électoral de l’Indonésie

Les représentants des pouvoirs législatif et exécutif sont élus au suffrage universel direct (hommes et femmes de plus de 18 ans). Seuls les ministres ne sont pas élus mais nommés par le président (figure 8), de même que les chefs de sous-district (camat) qui sont nommés par le chef de district (bupati). Le pouvoir législatif est constitué de trois parlements. Au niveau national, l’assemblée consultative du peuple (Majelis Permusyarawahan Rakyat, MPR) est composée de deux chambres : le conseil représentatif du peuple (Dewan Perwakilan Rakyat, DPR) et le conseil représentatif des régions (Dewan Perwakilan Rakyat Daerah, DPRD). Le conseil représentatif du peuple (DPR) a trois fonctions principales : la promulgation des lois nationales, la gestion du budget de l’Etat et la supervision des autres chambres. Le DPR définit et promulgue des lois, débat et approuve les régulations proposées par le gouvernement central et les propositions du DPRD relevant des questions liées aux circonscriptions régionales. Avec le Président, le DPR définit le budget annuel de l’Etat, en prenant en compte les recommandations du DPRD. Le DPR a également la possibilité de remettre en cause les décisions du président ou d’autres élus du gouvernement. Aux échelons de la province et du district, deux parlements indépendants de l’assemblée nationale (MPR) promulguent les lois provinciales et du district : le conseil représentatif du peuple de la province (Dewan Perwakilan Rakyat Daerah Propinsi, DPRD propinsi) et le conseil représentatif du peuple du district (Dewan Perwakilan Rakyat Daerah Kabupaten, DPRD kabupaten). Le conseil du village (Badan Permusyawarahan Desa, BPD) a un rôle similaire au niveau

consentement tacite des villageois mais sans élection. Les fonctions du conseil de village, telles que dictées par la loi, sont de conseiller le chef du village et d’appliquer les régulations édictées par le chef du village, de manière à répondre aux besoins des villageois et à supporter leurs aspirations.

Figure 9 : Organisation du gouvernement indonésien décentralisé

Bien que le processus de décentralisation indonésien accorde le transfert de l’autorité de l’Etat central vers les régions, certains domaines restent sous contrôle du gouvernement central. Ainsi le bureau national des terres (BPN) est sous le contrôle direct du gouvernement central, il n’est pas décentralisé. Dans la figure 9, les trois cadres nommés bureau national des terres représentent trois niveaux de gestion et de délocalisation du bureau, ainsi que la hiérarchie depuis le bureau national jusqu’aux bureaux régionaux. Une des responsabilités de ce bureau est d’établir les certificats de propriété foncière et les permis d’utilisation des terres (Hak Guna Usaha, HGU). Sans son accord, les gouvernements du district ou de la province ne peuvent pas autoriser le développement de grandes plantations dans leurs circonscriptions. Selon les agents du bureau du chef du district (Kantor Bupati) et du BPN, ce permis n’est pas requis pour l’établissement de petites plantations mais est nécessaire à l’obtention d’un crédit bancaire et il est indispensable à l’autorisation des grandes plantations par le district ou la province. Ce permis apporte la preuve de la légitimité de l’acquisition de la terre par une compagnie. En effet le HGU est défini comme le droit donné à un individu ou à une entité légale représentant une entreprise agricole de cultiver des terres de l’Etat, la terre considérée reste cependant la propriété de l’Etat et reste donc sous son contrôle (Pengaturan Republik Indonesia N° 40/1996).

Le district de Bungo est subdivisé (en 2009) en 17 sous-district (kecamatan) et 124 villages (Rio). Selon la loi 32/2004, article 40, le conseil du district (DPRD kabupaten) possède des fonctions législatives, de supervision et de planification. En cas de conflit impliquant une compagnie agro-industrielle et une communauté locale, les villageois peuvent chercher assistance auprès du conseil. Ainsi les compagnies privées ont intérêt à développer de bonnes relations avec les

membres du conseil du district, en prévision d’éventuels conflits sociaux. La planification et l’aménagement du territoire sont confiés à l’agence de planification, Bappeda. Celle-ci est également en charge de la coordination entre les différents services publics du district (Dinas), de manière à atteindre les objectifs définis dans la politique du chef du district (figure 9). Les Dinas mettent en place les programmes dont ils ont la charge, sous la supervision de Bappeda et sous l’autorité de leur ministre de tutelle. Chaque district possède un comité de planification de l’aménagement du territoire responsable de la préparation d’un plan d’aménagement, de l’encadrement de sa mise en place et de la gestion de l’attribution et de l’utilisation des terres. Ce comité est constitué de représentants de Bappeda, de BPN, du dinas Forêt et du chef du district. Le comité est aussi responsable de la gestion des conflits fonciers.

L’unité administrative correspondant à une communauté locale en Indonésie est le village, dont l’organisation a été uniformisée par la loi nationale 5/1979. L’application de cette loi a provoqué la division de certaines unités communautaires coutumières dans le district de Bungo, appelées Bathin. Un bathin est composé de plusieurs hameaux partageant un territoire, une culture et une histoire. La loi 5/1979 a été révisée par la loi de décentralisation 32/2004, qui donne à chaque village, district ou province autorité sur la gestion de ses affaires internes. Cette loi renforce la précédente en permettant aux gouvernements régionaux et locaux de changer la structure administrative de leur circonscription, sous condition de ne pas entraver le développement économique. Au début de 2008, les villages ont été redéfinis dans la province de Jambi, y compris dans le district de Bungo, en une structure plus ou moins semblable à l’ancienne organisation coutumière du territoire. Les hameaux précédemment appelés ‘dusun’, ont été renommés ‘kampung’, et les villages ‘desa’ ont été renommés ‘rio’. Cette réforme, qui vise au renforcement des institutions coutumières, a induit peu de changements dans le district de Bungo où les unités administratives précédentes (desa, dusun) avaient été définies en respectant les divisions spatiales coutumières. Les villageois ont souvent interprété cette réforme comme un simple changement de nom.

Les représentants de l’autorité coutumière et religieuse participent au conseil du village, en tant que chef de la coutume (kepala adat) ou chef de la religion (kepala agama). Cette intégration des autorités traditionnelles et formelles illustre la volonté du gouvernement régional de respecter la coutume. Dans la province de Jambi, les chefs de districts sont également nommés chef de la coutume (kepala adat kabupaten), ce qui reflète cette volonté d’intégration à l’échelle de la province. Les lois coutumières sont reconnues officiellement dans le district de Bungo, et sont compilées dans le Guide des lois coutumières du district de Bungo publié par le gouvernement du district (Pemerintah Daerah Kabupaten Bungo 2000). Les lois coutumières sont respectées et considérées par les habitants du district, qui préfèrent avoir recours à elles en cas de conflit, plutôt qu’aux lois officielles. Les sanctions sont généralement moins sévères, mais pas nécessairement plus justes ou équitables. Le poids de la coutume dans la vie quotidienne est variable en fonction des villages. Il est plus important dans les villages reculés, ayant peu accès aux informations extérieures, que dans les villages où une proportion élevée des habitants travaille à l’extérieur du village. Ceci s’explique également par le fait que les règles coutumières sont impuissantes pour régler des conflits impliquant des acteurs extérieurs au village.

La loi sur la foresterie 41/1999, donne plus d’autorité de gestion des ressources naturelles aux gouvernements régionaux, y compris l’autorité de publier des autorisations d’exploitation forestière de moins de 100 ha pour les Bupati, et de moins de 1000 ha pour les Gubernur. Mais en 2002, une nouvelle loi a transformé ce droit en obligation d’assistance dans l’application des régulations définies par le ministère des Forêts et approuvées par le gouvernement central. Le décret ministériel 382/kpts-II/2004 permet aux gouvernements régionaux d’accorder des permis d’exploitation du bois sur les terres étatiques sous statut non-forestier. Il s’agit de permis d’utilisation du bois de forêts communautaires (izin pemanfaatan kayu rakyat), qui sont attribués à

100 ha. Ces permis couvrent également les terres en propriété privée. Le même décret impose aux défricheurs d’utiliser des méthodes d’exploitation durable. Mais les forestiers qui ne respectent pas cette contrainte sont rarement sanctionnés, du fait d’une faible mise en application des lois dans le pays (Obidzinski 2005a et 2005b).

La loi 10/2004 autorise les gouvernements régionaux à éditer des régulations régionales (peraturan daerah, perda) concernant la gestion des ressources naturelles, et aux chefs de village d’édicter des régulations locales (peraturan desa, perdes). Les régulations régionales et locales doivent respecter les lois du gouvernement central. Les régulations régionales sont votées soit par le conseil du district (DPRD kabupaten) et mises en application par le chef de district ou de ville (walikota), soit par le conseil de la province (DPRD propinsi) et mises en application par le gouverneur (gubernur). Les régulations locales sont votées par le conseil du village et mise en application par le chef du village. Entre 2000 et 2003 dans le district de Bungo, 17 perda ont été publiées relativement aux ressources naturelles, dont 5 sur l’exploitation minière (or, charbon et sable), 4 sur l’exploitation du bois, et 1 sur les plantations forestières (Suherman et Taher 2008). Les perdes relatives à la gestion des ressources naturelles sont encore rare. Les perdes doivent normalement être discutées avec tous les villageois avant d’être publiés, mais la participation réelle est difficile à organiser et à gérer, les chefs de village n’ont souvent ni les compétences ni l’intérêt pour organiser des processus de décision participative. Beaucoup de chefs de village ont uniquement suivi l’école primaire ou secondaire, et peu de formations à l’administration, à la prise de décision et à la communication. De fait, le processus de prise de décision perd facilement sa transparence à l’échelon local et peut se traduire par la séquestration du pouvoir par les élites locales.

Dans le district de Bungo, comme dans de nombreuses places en Indonésie, la majorité des surfaces forestières est propriété de l’Etat, malgré la longue histoire d’occupation des sols par les habitants et leur système de tenure coutumier. Selon le droit coutumier, les forêts sont un bien commun. Les terres plantées, comme les agroforêts et les plantations, sont en propriété individuelle. Les rizières et autres terres cultivées ayant été spécifiquement aménagées ou ayant été précédemment plantées, sont également en propriété individuelle. Seules les terres cultivées de manière temporaire, en particulier dans le système de riziculture itinérante, les ladangs, retombent éventuellement en propriété communautaire ou sont confiées pour une période déterminée. La loi coutumière déclare que la terre appartient à la première personne qui l’a mise en valeur par la culture ou la plantation, à l’exception éventuelle des terres coutumières réservées au ladang. Si la terre défrichée et cultivée est au bord d’une rivière, alors toute la terre depuis la parcelle jusqu’au sommet du versant, est réservée au défricheur. Personne d’autre n’est autorisé à ouvrir une parcelle dans cet espace sans l’autorisation préalable du nouveau propriétaire. Néanmoins, tant que l’espace n’est pas cultivé, tous les villageois peuvent y venir et récolter des produits forestiers, mais sans couper de bois.

L’autorité sur les terres et les forêts appartient principalement au gouvernement central, en tant que propriétaire des forêts d’Etat qui recouvrent la majorité des terres forestières du pays, et certaines terres non forestières. Les gouvernements de district et de province ont autorité sur les autres terres, sur les terres agricoles et sur les terres à autre usage. Dans la province de Jambi, et en particulier dans le district de Bungo, le système coutumier de gouvernance est reconnu par les autorités officielles, et bien représenté dans le gouvernement. Les conflits fonciers sont généralement réglés par les autorités coutumières, avec l’accord du gouvernement. Il n’est fait recours aux autorités officielles qu’en cas de conflit sur les limites entre villages ou entre districts.

LA GESTION DES FORÊTS ET DU TERRITOIRE PAR LE