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Organisation des modalités épistémiques en fonction du degré de certitude exprimé

3 Organisation des modalités liées au possible sous forme de réseau

3.2 Organisation des modalités épistémiques

3.2.1 Organisation des modalités épistémiques en fonction du degré de certitude exprimé

Pour commencer, nous proposons de confirmer l’organisation « linéaire » des cinq modalités que l’on interprète généralement sous forme de continuum, à l’aide des tests linguistiques suivants82 :

En prenant X et Y deux modalités épistémiques distinctes, les résultats suivants nous permettent de valider degré de certitude exprimé par Y > degré de certitude exprimé par X :

1 – C’est X et même Y / *C’est Y et même X 2 – C’est X, mais pas Y / *C’est Y, mais pas X

3 – C’est Y, ou seulement X ? / *C’est X, ou seulement Y ?

A – Test : quasi-certain et probable

1 – C’est probable et même certain / *C’est certain et même probable 2 – C’est probable, mais pas certain / *C’est certain, mais pas probable

3 – C’est certain, ou seulement probable ? / *C’est probable, ou seulement certain ? Ces tests nous permettent de conclure que le degré de certitude exprimé par quasi-certain, (marqué ici par l’expression c’est certain), est plus fort que celui exprimé par probable : quasi-certain > probable.

Divers énoncés de notre échantillon d’exemples extraits de la base textuelle Frantext confirment ces emplois dans la langue :

1. César, c’est probable, mais ce n’est pas sûr.

2. - Ce n’est pas sûr, fit Joseph, mais c’est quand même probable.

3. C’était probable, mais non certain, car même avant qu’elle ne le présente à Sarah, Nil se rendait souvent à Bruxelles, visiter deux de ses amis qui n’apparaissent pas dans ce récit mais pour qui il nourrissait une vive affection : un sage taoïste et un milliardaire.

4. Malgré l’imprécision de l’iconographie romantique /elle n’avait pas son Degas/, qui rend difficiles les comparaisons, il est probable et même

82 Ces tests font référence à la valeur de même proposée dans (Ducrot, 1984)

certain qu’on pique aujourd’hui les pointes mieux et plus nettement qu’à leurs glorieux débuts.

B – Test : probable et possible

1 – C’est possible et même probable / *C’est probable et même possible 2 – C’est possible, mais pas probable / *C’est probable, mais pas possible

3 – C’est probable, ou seulement possible? / *C’est possible, ou seulement probable?

Ces tests nous permettent de conclure que le degré de certitude exprimé par probable est plus fort que celui exprimé par possible : probable > possible.

Divers énoncés de notre échantillon d’exemples extraits de la base textuelle Frantext confirment ces emplois dans la langue :

1. Il est possible et probable même que 150 millions d’années ne représentent qu’une fraction très faible de ce temps.

2. A-t-il lu sérieusement le livre enfin publié, l’a-t-il compris, je veux dire, en a-t-il dégagé les cinq propositions essentielles et les a-t-il approuvées ? C’est possible, probable même si l’on veut.

3. Il est possible et même probable, que le nombre de rencontres moléculaires ne suffit pas pour déterminer le problème, et que la proportion des chocs efficaces dépend de la configuration moléculaire au moment du choc, de l’état des molécules […]

4. Il est possible – et je crois même qu’il est probable – que nous soyons à la veille d’événements militaires très importants et peut-être décisifs.

5. Cette attaque vous semblait-elle probable, ou seulement possible ?

C – Test : possible et improbable

Entre les modalités possible et improbable, les tests linguistiques s’avèrent moins concluants :

1 – *C’est possible et même improbable / *C’est improbable et même possible 2 – ?C’est possible, mais pas improbable / ?C’est improbable, mais pas possible

3 – *C’est improbable, ou seulement possible? / *C’est possible, ou seulement improbable?

Il est moins évident de mettre en relation les modalités possible et improbable à l’aide de ces tests car les modalités possible et improbable n’expriment pas la même orientation. Alors que la modalité possible exprime le fait que la situation a des chances de s’actualiser dans le monde référentiel, la modalité improbable exprime le fait que la situation a des chances de ne pas s’actualiser. Entre les deux modalités, on a donc un changement de polarité, ce qui explique la difficulté rencontrée avec ces tests qui permettent de comparer un degré de certitude exprimé par des modalités de même orientation.

Nous posons ici comme hypothèse intuitive le fait que le degré de certitude exprimé par la modalité improbable est plus fort que celui exprimé par la modalité possible : possible < improbable. Nous confirmerons cette intuition à l’aide d’un test linguistique, dans la suite de notre étude.

D – Test : improbable et impossible

1 – C’est improbable et même impossible / *C’est impossible et même improbable 2 – C’est improbable, mais pas impossible / *C’est impossible, mais pas improbable 3 – C’est impossible, ou seulement improbable? / *C’est improbable, ou seulement impossible?

Ces tests nous permettent de conclure que le degré de certitude exprimé par impossible est plus fort que celui exprimé par improbable : impossible > improbable.

Divers énoncés de notre échantillon d’exemples extraits de la base textuelle Frantext confirment ces emplois dans la langue :

1. Bref, il n’est pas médicalement impossible, mais il est tout à fait improbable que, dans les six contacts que vous venez d’avoir avec cette femme, vous ayez contracté le bacille qui, quelques jours avant ces contacts, n’était pas décelé sur les organes génitaux.

2. Mais on voit l’aléa de ces pronostics, qui ne font aucune part aux accidents /une collision, quoique improbable, n’est pas absolument impossible/ et qui reposent sur une connaissance encore imparfaite des processus nucléaires et des propriétés des étoiles comme le soleil.

Des tests linguistiques qui précèdent, nous pouvons conclure à l’organisation linéaire suivante :

quasi-certain > probable > possible < improbable <impossible