2. Les solutions pour les jeunes : entre évolution de l’offre classique et émergence de nouvelles
2.4. Quelle politique publique du logement des jeunes ? 72
2.4.1. Organisation des institutions vis-‐à-‐vis du logement des jeunes 72
logement des jeunes
La question de la jeunesse et du logement et les compétences qui y sont liées sont malheureusement divisées et sous divisées en une multitude d’institutions publiques qui rendent l’organisation assez opaque. Fait aggravant cette situation, l’organisation peut différer au niveau local en fonction d’un territoire donné. Cette organisation est la spécificité de l’administration française, constituée de manière très hiérarchique, des grandes lignes politiques à l’échelle nationale à l’application directe sur le terrain au niveau local.
En partant du haut de l’échelle, au niveau étatique, après avoir rencontré le Pôle parc public et politiques sociales du logement du serviceHabitat, construction, ville durable, l’on m’a indiqué que les services de l’état liés au logement étaient une « toile d’araignée » qui s’est compliquée davantage depuis la création du gouvernement Edouard Philippe. En effet depuis la création de ce gouvernement, deux ministères peuvent répondre à la problématique du logement, le Ministère dela cohésion des territoires et le Ministère de la transition écologique et solidaire. Toutefois considérant le caractère très récent de ce gouvernement, nous traiterons ici de l’organisation sous le dernier gouvernement. Le ministère du logement et de l’égalité des territoires correspond à l’échelon le plus élevé dans la hiérarchie, qui annonce les grandes lignes politiques à travers la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature, qui elle-‐même s’organise autour de deux directions, dont la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages. En revanche, la partie hébergement relève d’un ministère totalement différent, celui des solidarités et de la santé, dirigé par la Direction générale de la cohésion sociale.
Toujours au niveau étatique, mais à l’échelle régionale, décentralisée la partie logement est une compétence de la Direction Régionale de l’Environnement de l’Aménagement et du Logement (DREAL), elle-‐même rattachée à la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP). Ensuite, la Direction Régionale de la Jeunesse, des Sports et de la Cohésion Sociale (DRJDCS) gère la partie hébergement et est ainsi rattachée à la Direction générale de la cohésion sociale. Entre ces deux directions, la Direction Interministérielle à l’Hébergement et l’Accès au Logement est censée
jouer la transversalité entre la DHUP et la DRJDCS. Cette direction est chargée « d’assurer la coordination et le suivi de la mise en œuvre des priorités de l’Etat en matière d’hébergement et d’accès au logement des personnes sans-‐abri ou mal logées. ». Enfin, à l’échelon le plus local au niveau de l’Etat, la Direction Départementale des Territoires et la Direction Départementale de la Cohésion Sociale constituent les deux derniers maillons de l’Etat sur la partie territoriale. On s’aperçoit ainsi que les rôles sont très répartis en fonction des directions avec une distinction entre le logement et l’hébergement. Vis-‐à-‐vis de la jeunesse, l’état a créé le comité interministériel de la jeunesse en 2012, publiant un rapport chaque année sur l’état de la jeunesse présentant des mesures pour une politique de la jeunesse. 119
La région Rhône-‐Alpes, avant la fusion avec la région Auvergnea été investie dans le financement du logement, et précisément dans la problématique logement jeunes en travaillant sur le conventionnement de logements privés avec l’agence nationale de l’habitat (Anah), mais cette période est révolue, la région se focalisant aujourd’hui sur l’aide à la rénovation énergétique
Au niveau intercommunal, l’exemple de la métropole lyonnaise est particulier car elle a récupéré les compétences du département du Rhône, lui permettant d’agir plus directement sur la jeunesse et en évitant un échelon territorial supplémentaire tout en bénéficiant d’une vision plus globale. En effet la Métropole disposait autrefois comme compétence uniquement la partie production neuve/réhabilitation, la gestion du parc privé et l’instance de l’unité de gestion des réservations au sein de la direction de l’habitat et du logement. Depuis, la métropole a récupéré du département les compétences la prévention des expulsions, l’accompagnement social des logements et le Plan Local d’Action pour le Logement et l’Hébergement des Personnes Défavorisées (PLALHPD), qui était porté par le Conseil Général en direct et l’Etat était seulement associé. Sur l’aspect « publics prioritaires », la Métropole a récupéré des compétences clés liées à la jeunesse, comme l’enfance, la direction de la santé, le développement social, et les handicapés. 120 Selon Karine Zimmerli-‐BoccacioChargée de
mission « Accès au logement des publics prioritaires », ces compétences récupérées permettent « plus de transversalité en rapport avec l’habitat-‐logement ». Toutefois cette nouvelle répartitiondes compétences est très récente et n’a pas encore porté ses fruits.
Ainsi le cas lyonnais est particulier, avec une métropole disposant d’un panel de compétences extrêmement riche, la région pratiquement totalement désengagée de la question du logement, mais pas uniquement, la région ayant réorienté ses priorités et ne finance plus un certains nombres de domaines liées à l’urbain (culture, environnement) ainsi qu’à la jeunesse (soutien à l’autonomie, bourse aux étudiants, aides à la mobilité, santé, accès au restaurant universitaire…)121.
119Cf entretien DREAL -‐ Annexes 120Cf entretien Métropole
121 DEBAT, Jean-‐François. Budget 2017 – Qui va payer la facture ? socialistesetdemocrates-‐auvergnerhonealpes.fr [en ligne],
15 décembre 2016. Communiqué de presse, disponible sur <http://www.socialistesetdemocrates-‐ auvergnerhonealpes.fr/budget-‐2017-‐qui-‐va-‐payer-‐la-‐facture/> [Consulté le 9 juin 2017]
En termes de compétences, à titre de rappel, c’est l’Etat qui énonce les grandes lignes, les politiques nationales de logement et dote les collectivités territoriales d’une enveloppe pour l’application de ces politiques. Le secteur communal et intercommunal, lui se charge du financement, de l’attribution des aides et de la mise en place des plans locaux de l’habitat et d’urbanisme. Ils se reposent sur les aides de l’Etat mais rassemblent également des financements.
Ainsi, comment s’organisent ces différentes institutions vis-‐à-‐vis de la question du logement des jeunes ? Il existe en effet un certain nombre d’instances dans lesquelles beaucoup d’acteurs sont réunis. La métropole organise et pilote la plupart de ces instances de discussions. Par exemple, la métropole traite de l’habitat spécifique réunissant tous les acteurs et où chacun vient proposer en fonction des opportunités qu’ils auraient trouvées ou que la métropole possède pour faire de l’habitat spécifique. Sur d’autres thématiques liées aux populations prioritaires, la métropole, dans le cadre du PLALHPD, met en place des rencontres entre acteurs sur des territoires afin qu’ils se connaissent et qu’ils connaissent les missions des uns ou des autres. C’est le cas notamment de la santé psychique, où lamétropole a mis en place une instance de rencontres entre les bailleurs, les travailleurs sociaux et hôpitaux pour qu’ils s’échangent sur leurs missions.
Sur le logement des jeunes, des groupes de travail, des comités techniques sur le logement des jeunes à l’échelle de la métropole sont mis en place, travaillant sur les besoins et l’offre qui pourraient correspondre. La métropole réunit à la fois des collectivités territoriales, des bailleurssociaux mais également un certain nombre d’associations dont le rôle primordial sera détaillé dans les prochaines pages. Ainsi, la métropole, à défaut d’agir directement sur le terrain avec les jeunes, apporte essentiellement son appui technique. Les MOUS (Maîtrise d’œuvre Urbaine et Sociale) sont confiés aux différentes associations (CCLAJ UHRAJ et AILOJ) qui accompagnent la Métropole dans cette démarche en signant des conventions fixant des objectifs à atteindre sur l’offre d’habitat mais aussi sur l’accueil, l’information et l’orientation à l’échelle de la métropole en s’assurant que tous les territoires sont couverts. 122
Le PLALHPD, ou le Plan local d’Action pour le Logement et l’Hébergement des Personnes Défavorisées a donné lieu à une redéfinition des publics « prioritaires » prenant en compte au total douze catégories de populations, comme par exemple les victimes de violences, personnes handicapées, les ménages menacés d’exclusion, les jeunes en rupture familiale… Le plan, qui s’est achevé récemment, articule la politique publique de la Métropole en matière de logement adapté pour les populations « prioritaires » à travers 19 fiches actions pilotées par la Métropole. Ce plan a été réalisé, sous le pilotage de la métropole et en partenariat avec la DDCS mais surtout avec les associations spécialisées présentes sur le territoire lyonnais. Elles ont été sollicitées sur la nature des besoins et de la demande dans leurs publics.123
L’Etat, lui a un rôle plus mesuré, plus politique, mais c’est bien l’Etat qui a lancé le plan priorité jeunessequi avait pour mission de venir créer des synergies, au travers des segmentations des politiques, créer de la transversalité, créer des démarches collectives communes, une vision
122Cf entretien Métropole -‐ Annexe 123Cf entretien Métropole -‐ Annexe
d’ensemble. Ce plan avait une déclinaison au début à l’échelle nationale et s’est ensuite décliné à l’échelle locale en 2014, l’objectif étant de mettre en place des actions un peu pérennes à travers les spécificités locales. Le plan priorité jeunesse a un volet logement, mais aussi un volet emploi, éducation, culture, justice, santé... Il est interministériel et rattaché à Matignon et porté par la DRJDCS. Or, la DREAL a également déjà animé des ateliers, rassemblant un certain nombre d’acteurs locaux, tels que la CAF, la CDC, l’Uhraj, Action Logement, les bailleurs, des associations afin de faire émerger un certain nombre d’actions. Ce séminaire avait lieu chaque année depuis 2014 au niveau régional mais depuis la fusion Auvergne-‐Rhône-‐Alpes ce séminaire n’a pas été reconduit.
Ainsi, le partage des compétences est complexe, et il est difficile d’avoir une politique cohérente claire et forte pour le logement des jeunes quand le partage de cette thématique est divisée et sous divisée en plusieurs ministères, directions régionales et départementales.