2. Les solutions pour les jeunes : entre évolution de l’offre classique et émergence de nouvelles
2.1. Panorama de l’offre classique 44
2.1.3. L’offre en logement spécifique 48
Ainsi, la jeunesse est extrêmement représentée dans les nombreuses structures dédiées non seulement aux étudiants, mais également aux jeunes travailleurs en mobilité, ou en réinsertion. Tout d’abord, distinguons l’accompagnement social comme dispositif et l’hébergement. En effet, les structures spécialisées pour les populations vulnérables ne sont pas les mêmes que les structures basées sur l’emploi ou les études. De plus, cette offre n’est pas nouvelle, elle existe depuis de nombreuses années.
Les résidences étudiantes existent depuis la fin de la première guerre mondiale, à l’initiative de l’association générale des étudiants (devenue l’UNEF), soutenu et entrepris par le ministre du front Populaire, Jean Zay79. Dans les années 1950-‐1960, avec la démocratisation de l’enseignement
supérieur, des milliers de chambres universitaires sont construites. La plupart des résidences universitaires en France sont gérées par les Centres Régionaux des Œuvres Universitaires et Scolaires ou CROUS, qui sont des établissements publics à caractère administratif. Les résidences étudiantes CROUS sont considérées comme du logement social et l’attribution s’effectue comme une attribution de logement social classique, en fonction des critères sociaux et familiaux. Aujourd’hui le CROUS dispose de 29 établissements et de 170 864 logements Crous disponibles à la rentrée 2016. 3659 logements sont construits en 2015, pour 3153 en prévision, alors que 2406 chambres ont été réhabilitées pour 3056 réhabilitations prévues en 2016.80 Pour le Crous, aujourd’hui les étudiants
boursiers constituent la priorité absolue des attributions, au vu de la pénurie de logements étudiants sur le territoire lyonnais.
Toutefois les résidences sociales se sont beaucoup dégradées depuis leur construction et de nombreux plans de réhabilitation ont été entrepris, avec notamment une diversification des typologies proposées, avec un développement récent de nouvelles offres, du T1 bis au T2, ou à la cohabitation entre étudiants de lieux communs tandis que chacun conserve sa chambre de 9m² personnelle. Cette construction massive et cette diversification de l’offre est un outil pour essayer de contrer l’offre de logement privée ou de la colocation que nous aborderons prochainement. Ainsi le logement étudiant type CROUS est une offre ancienne, qui a mal vieilli et qui a été dépassé par les évolutions du marché, et de nombreuses grandes villes françaises, comme Lyon, se sont retrouvées déficitaires, c’est pourquoi l’Etat, a lancé le plan 40 000 pour construire 40 000 logements étudiants durant le quinquennat de François Hollande, dont la moitié en île de France. Le bilan de ce plan ambitieux était très positif, avec 50% des objectifs atteints fin 2015. Au niveau local dans la Région Rhône-‐Alpes, après avoir rencontré la Direction Régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement, ce plan bien qu’il n’ait pas rempli tous les objectifs établis a réussi à créer une dynamique de construction allant vers les objectifs de ce plan. L’académie de Lyon était très en
79Le logement étudiant, histoire et enjeux actuels, journée d’étude organisée par l’association des Anciens de l’UNEF en
liaison avec l’UNEF et avec le concours du GERME et de la Cité des Mémoires Etudiantes, les anciens de l’unef, mai 2016, 155p
80Les Crous, le Cnous : qui sommes-‐nous ?, etudiant.gouv.fr [en ligne], 11 janvier 2016. Disponible sur :
retard en termes de résidence étudiante, la dynamique de construction a permis de créer une gouvernance et de rassembler les différents acteurs autour de la même table.
Cette carte illustre les résidences étudiantes présentes sur le territoire de la commune de Lyon. Résidences privées, Crous, résidences de grandes écoles, campus et foyers universitaires. Nous pouvons constater comme nous l’avons évoqué précédemment que les résidences étudiantes sont principalement localisées dans le 3e et 7e arrondissement de Lyon, avec notamment une part non
négligeable de résidence étudiante dans le 5e arrondissement (ouest lyonnais) et dans le 8e
arrondissement (est lyonnais) correspondant aux implantations des différentes universités lyonnaises.
Les résidences sociales existent depuis longtemps et sont de différents types. Premièrement, il faut distinguer les foyers de jeunes travailleurs (FJT), et les foyers de travailleurs migrants (FTM) ou foyers Sonacotra, qui sont certes aujourd’hui regroupée sous l’appellation « résidence sociale » mais n’ont pas la même origine.
Les de foyers de type Sonacotra et Adoma sont en effet différents des FJT. Premièrement, bien qu’ils rassemblent une majorité de jeune, ceci ne constitue pas un critère d’admission contrairement aux FJT et étaient destinés aux travailleurs migrants, tout récemment arrivés sur le territoire français. Tout commence en 1956 avec la création à Paris de la société nationale de construction de logements pour les travailleurs algériens, créée afin de régler problème de l'habitat insalubre des migrants originaires d'Algérie, dénombrant à peu près 150 000 individus Algérien (actifs ou non) sur tout le territoire Français. Sonacotral devient ensuite Sonacotra, élargissant à tous les travailleurs migrants. Le capital de cette société était détenu par des acteurs publics (État, SNI…) chargée de construire et gérer un grand nombre d'habitats à vocation sociale en construisant notamment des résidences sociales, foyers d’hébergements, et foyers de travailleurs migrants (FTM). En 2007, Sonacotra devient Adoma et gère aujourd’hui 450 établissements dans toute la France, ce qui représentait en 2004, 70 454 lits.81
La fondation Aralis est la transposition de l’initiative FTM et Sonacotra sur le territoire lyonnais ouvert en 1904 et compte aujourd’hui 140 places, et possède deux centres d’hébergement, le premier historique, à Debourg dans le 7e arrondissement, un autre plus récent dans le 3e
arrondissement et deux autres à Villeurbanne.
L’origine des FJT remonte aux « Maisons sociales » créées dès 1894, mais l’appellation « FJT » est créée aux lendemains de la seconde guerre mondiale, avec la création du tout premier Foyer de Jeunes Travailleurs à Tours en 1955. A l’époque, l’organisme gestionnaire des FJT était l’association Jeunesse Ouvrière Chrétienne Française, association fondée en 1925 et comme aujourd’hui, œuvraient au logement des jeunes travailleurs en mobilité de moins de 30 ans au démarrage de leur vie professionnelle. En 1955, les FJT sont regroupés en une association dénommée « Union nationale des foyers de jeunes travailleurs » devenue en 2006 l'Union nationale pour l'habitat des jeunes (UNHAJ)82. A Lyon, le premier FJT né en 1928, de l’initiative de l’association « Maison d’Accueil du
81 Site officiel Adoma
Jeune Ouvrier » (MAJO) qui avait pour les mêmes objectifs d’hébergement de la jeunesse en insertion professionnelle que les autres établissements de type FJT en France. C’est en 1970 que la MAJO Moulin à Vent s’inscrit dans la définition des FJT, un foyer de jeune travailleur. L’UNHAJ, tête de réseau d’association nationale, se décline régionalement, avec l’Union Régionale pour l’Habitat des Jeunes (UHRAJ) qui gère aujourd’hui 70 foyers à l’échelle de la région Auvergne-‐Rhône-‐Alpes et 13 dans la Métropole Lyonnaise. L’UHRAJ se définit comme une association tête de réseau, c'est-‐à-‐ dire qui regroupe et fédère des organismes qui gèrent des foyers de Jeunes travailleurs83. Les FJT, ou
leurs déclinaisons avant cette appellation, avaient pour vocation l’hébergement des jeunes uniquement, mais cette approche a depuis évoluée et s’est orientée vers un accompagnement socio-‐ éducatif. Ainsi les FJT ne sont pas uniquement une structure d’hébergement, mais également un dispositif d’accompagnement social et d’aide à l’insertion. 84
L’Union Nationale de l’Habitat Jeunes, regroupe tous les FJT de France mais également les services logements d’Information d’Accueil Orientation (SIAO), qui ont été créés par une circulaire en septembre 2000 mais « consacré juridiquement » par la loi ALUR et qui intègre donc la loi l’existence d’un SIAO dans chaque département. La plupart des FJT de Lyon et sa métropole sont anciennes et souffrent d’une mauvaise réputation, notamment dans la mixité des populations, la qualité des bâtiments et l’aspect du vivre ensemble. Romain Ferrez, chargé de développement territorial à FJT et en cherchant « un équilibre sur l’accueil des populations en difficultés et des autonomes ». L’objectif de mixité sociale est recherché pour pouvoir mettre en place des projets collectifs où les jeunes peuvent s’y impliquer, avec une visée pédagogique. « Il faut donc éviter que certaines structures n’accueillent que des jeunes prioritaires ou que des jeunes étudiants ou que des autonomes ». L’importance de ces résidences réside dans le projet social, en offrant de manière temporaire des logements adaptés aux besoins des résidents dans leur accession à l’autonomie et à l’indépendance. Enfin, l’hébergement est plus compliqué, car il relève souvent de l’urgence logement. De nombreux centres sont spécialisés pour l’accueil et l’hébergement d’urgence. Le 115 est le numéro d’appel d’urgence en cas de situation de vulnérabilité et en raison de fragilité de lien social lié au logement et à l’hébergement. En 2011, 17% des demandes au 115 concernaient des jeunes âgés de 18 à 24 ans, chiffre qui gonflerait certainement si une tranche d’âge plus large était prise pour les jeunes.85
71% des personnes contactant le 115 sont des personnes seules, mais le 115 n’ont pu répondre positivement qu’à la moitié des demandes, faute notamment de places disponibles. Une personne isolée, jeune ou non appelant le 115 sera majoritairement hébergé dans des structures d’hébergement d’urgence (73%) alors que l’hébergement à l’hôtel constitue une solution davantage mobilisée pour les personnes en famille (60% des familles sont hébergées à l’hôtel). Les solutions
83 Cf entretien UHRAJ – Annexe 84 Site officiel MAJO Moulin à Vent
85Les jeunes et le 115, quelles réponses ? Fédération des acteurs de la solidarité, federationsolidarité.org [en
ligne] 27 octobre 2012. Disponible sur <http://www.federationsolidarite.org/publications-fnars/f-le-magazine-de-
d’hébergements proposées sont notamment le SAMU Social, les nombreux Centres d’Hébergement et de Réinsertion Sociale (CHRS) existant sur le territoire, les Centres d’Hébergement d’Urgence (CHU), les foyers éducatifs de type S.L.E.A. Sur le territoire lyonnais, nous avons la Maison de la Veille Sociale (MVS) qui centralise grâce à une convention avec le Préfet toutes les demandes d’hébergement sur le territoire lyonnais. En effet à Lyon tous les jeunes appelant le 115 sont automatiquement redirigés vers la Maison de la Veille Sociale86 qui les réoriente ensuite vers les
différentes solutions d’hébergement d’urgence.
A Lyon, l’Orée AJD est une association qui se spécialise dans l’accueil d’urgence des jeunes de 18 à 24 ans pour une durée maximum de 3 mois ou plus en fonction des situations. Toutes les structures d’hébergements d’urgence et particulièrement l’orée AJD ne se limitent pas uniquement à l’hébergement. La plupart des structures propose un accompagnement social personnalisé, mais aussi la possibilité de faire office de boîte aux lettres et de dépôt d’affaires personnelles. L’accueil se fait de jour et de nuit, avec des permanences d’accueil. Les dossiers sont établis puis examinés pour déterminer quel jeune sera gardé en hébergement d’urgence et quel jeune sera réorienté vers d’autres structures plus appropriées. La durée d’hébergement reste limitée, et les jeunes savent qu’ils sont là pour une courte durée, mais nombreux jeunes extrêmement vulnérables (femmes enceintes, jeunes délinquants en situation de danger pour leur vie) peuvent rester exceptionnellement plus longtemps. On accompagne également les jeunes dans le projet social et professionnel en les aidants à réaliser leurs démarches administratives pour pouvoir constituer des demandes auprès d’organismes publics (logement social, FJT…). L’orée AJD reçoit un agrément de l’Etat à travers la Direction Régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJDCS) et dispose de trois structures spécialisées de type CHRS.
Ainsi ces structures d’hébergement d’urgence représentent des solutions de courte durée uniquement, qui peuvent répondre à un besoin de jeunes, qu’il soit d’urgence ou temporaire, mais cette offre a évolué et de nombreuses autres structures similaires sont apparues depuis ces dernières années. 86Cf entretien Orée AJD