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Obtenir tous les numéros quand on jette un dé

Chapitre 17. Quelques exemples de simulations

2. Jets de pièces et dés en tout genre

2.5 Obtenir tous les numéros quand on jette un dé

 C’est une question que l’on peut se poser naturellement : combien de fois faut-il en moyenne lancer un dé pour obtenir les 6 numéros possibles au moins une fois20 ?

Six coups au minimum sont nécessaires, si l’on a de la chance… mais il est possible au moins en théorie de poursuivre indéfiniment les lancers...

 Écrivons pour commencer un programme, pour à la fois voir la succession des résultats et le nombre de coups nécessaires à obtenir toutes les faces du dé.

On peut par exemple procéder de la façon suivante. Tout d’abord, une liste l de 6 éléments est initialisée à 0. Lorsqu’un numéro sort, par exemple le 2, on met la valeur 1 dans l[2]. On s’arrête lorsqu’il n’y a plus que des 1 dans l – et donc lorsque le produit de ses éléments fait 1.

Parallèlement au travail précédent, on mémorise dans une liste rr les résultats successifs du jet du dé.

20 Ou bien combien faut-il acheter de tablettes de chocolat Poulain pour avoir les 10 images d’une collection complète. Dans un cadre général, c’est ce que l’on appelle un problème de collection.

On obtient par exemple les résultats suivants :

Cette fonction étant écrite, on peut en proposer l’analyse dans une page Tableur & listes.

Dans la zone grisée de la colonne A, on rentre =collec(6). Cette colonne peut être appelée a.

Enfin dans la cellule B1, on saisit alors =dim(a) et on stocke le résultat dans une variable r. On peut alors observer les différents résultats obtenus.

On peut alors observer ce qui se passe et selon les expériences réalisées, voir varier le nombre de lancers nécessaires pour obtenir tous les numéros du dé.

Évidemment, il est souhaitable en capturant les données de garder la trace de tous les résultats obtenus. En utilisant le procédé habituel, on capture les différentes valeurs de r dans la colonne C :

dans B1, on met dim(a)+rand()/10^8 ;

on capture r égale à la valeur précédente dans la colonne C ;

dans la zone grisée de la colonne D, on saisit =int(C[]) pour neutraliser l’effet de rand(), on nomme alors d la colonne D.

Enfin, on peut demander en E1 le calcul de la moyenne de la colonne D et son nombre d’éléments en E2.

Il semble qu’en moyenne il faille entre 14 et 15 coups pour qu’en jetant un dé, on ait obtenu tous les résultats possibles. On peut faire une étude statistique plus détaillée, soit avec des histogrammes ou encore avec des boîtes à moustaches.

Remarquons que dans un cas, il a fallu attendre jusqu’à 72 lancers de dé pour qu’apparaissent les 6 numéros : c’est la plus grande valeur qu’on observe sur la boîte à moustaches précédente !

Étude théorique

Tentons de modéliser cette situation. Une série de lancers peut être représentée par une liste ordonnée d’entiers compris entre 0 et 6, comme par exemple :

(4,4,3,6,6,4,5,1,4,5,

2

,2,2,2,5,…)

Notons que cette liste peut être poursuivie indéfiniment.

Si l’on observe l’exemple précédent, on a obtenu tous les numéros du dé en 11 lancers, à l’apparition du premier 2, représenté en grand dans la liste.

Appelons X la variable aléatoire réelle égale au nombre de lancers nécessaires pour obtenir pour la première fois au moins une fois chaque face. X est susceptible de prendre pour valeurs tous les entiers naturels supérieurs ou égaux à 621. Sur l’exemple précédent, X prend la valeur 11.

Nous nous proposons de déterminer la loi de X.

Nous commencerons par nous intéresser à l’événement X  n, que nous noterons An, où n est un entier supérieur ou égal à 6.

Quelle est la probabilité de An ?

Quand l’événement An est réalisé, cela signifie qu’on a obtenu tous les numéros du dé au bout du ne lancer, pas nécessairement pour la première fois au rang n mais certainement à un rang k  n.

Ainsi pour la série qui nous a servi d’exemple précédemment où X prend la valeur 11, les événements A15 par exemple ou A20 sont réalisés, car au bout de 15 ou 20 lancers, on a bien obtenu tous les numéros du dé.

Raisonnons par événement contraire.

L’événement An signifie qu’au cours des n lancers, il manque au moins un numéro, c’est-à-dire qu’il manque le 1, ou le 2, ou le 3, ou le 4, ou le 5 ou le 622.

Pour un lancer, cette probabilité vaut 5

6 et donc pour les n lancers indépendants, elle vaut 5 6

  

 

n

. Six termes de ce type figurent dans la formule de Poincaré, pour chacun des six numéros possibles.

21 Mais pas moins !

22 Ou inclusif car plusieurs numéros peuvent manquer… mais pas tous !

23 Qui donne la probabilité de la réunion d’un nombre fini d’événements.

On aura aussi besoin de p B

inBjn

pour i j qui n’est autre que la probabilité que les deux

On poursuit sur la même lancée avec :

6 15

pour les intersections des événements quatre à quatre ;

6 6

pour les intersections des événements cinq à cinq ;

1 terme égal à 0 pour l’intersection des 6 événements… car au cours des n lancers, obligatoirement un numéro est sorti.

La formule de Poincaré permet alors d’écrire :

 

1 2 ... 6

Nous sommes maintenant en mesure de déterminer la loi de X. En effet, on peut écrire :

Xn

 

Xn

 

X n 1

Conservons les mêmes notations. Un lancer particulier peut être représenté par une liste ordonnée d’entiers compris entre 1 et 6, comme par exemple :

(1,3,2,4,5,1,2,3,5,6,3,6,…).

Sur cet exemple, on a obtenu tous les numéros du dé en 10 lancers : tous les numéros de 1 à 5 sur les 9 premiers lancers, puis le 6 au dixième lancer.

Dénombrons les séquences de 10 lancers donnant les 6 numéros du dé et se terminant par un 6.

Or donc, il n’y a qu’une façon de choisir le 6 en 10e place.

Pour les 10 – 1 = 9 premières places, on peut associer à un tirage particulier une surjection de l’ensemble E = {1,2,3,4,5,6,7,8,9} sur l’ensemble F = {1,2,3,4,5} : l’image de i E est le résultat obtenu par le dé au ie lancer.

C’est bien une surjection car chaque numéro autre que 6 doit être obtenu au moins une fois dans les 9 premiers tirages. Inversement, toute surjection de E sur F définit clairement un tirage. Par exemple celle qui correspond à notre tirage de référence serait la surjection suivante :

1 {1,2,3,4,5,6,7,8,9} sur l’ensemble {1,2,3,4,5} : soit S

 

9,5 , que nous savons dénombrer dans l’annexe de ce chapitre.

Pour des raisons évidentes de symétrie, il y en a autant qui se terminent par 5, ou 4, ou 3, ou 2, ou 1.

Le nombre de tirages qui donnent tous les numéros du dé en 10 lancers est égal à 6 S(9,5). Comme il existe 610 résultats possibles, tous équiprobables, lorsqu’on jette le dé 10 fois, on en déduit que :

   

En procédant de la même façon, dénombrons d’abord toutes les listes se terminant au ne lancer par 6, et ayant vu dans les n – 1 premiers lancers tous les numéros de 1 à 5 : pour les mêmes raisons que précédemment, il y en a autant que de surjections de {1,2,...,n–1} sur l’ensemble {1,2,3,4,5}, soit

1,5

S n .

La probabilité que les 6 numéros sortent en n lancers exactement est donc

   

1

On retrouve bien la formule précédente, sans doute de façon plus simple, car :

 

1 1 1 1 1 1 1 1 1 1

1 1 1

5 5 5 5

5 4 3 2 1

1,5 1 2 3 4 5 5 4 10 3 10 2 5 1

6 6 6

n n n n n

n n n n n

n n n

S n

       

       

                  

On peut maintenant faire apparaître dans le tableur les probabilités d’obtenir tous les numéros en k lancers, à partir de k = 6 :

On observe un maximum pour n = 11. La probabilité décroît très vite, pour être quasiment nulle à partir de n = 40.

On a fait figurer dans la cellule E1 le calcul d’une valeur approchée de l’espérance mathématique de X pour les valeurs affichées dans le tableur (sur notre exemple de 6 à 100) : on trouve environ 14,7.

Faisons le calcul exact de cette espérance à partir des formules que nous avons établies. On sait que c’est la somme de la série suivante :

 

1 1 1 1 1

Petite parenthèse pour mener le calcul précédent à son terme… on sait que :

0

donc par dérivation (c’est possible pour les séries entières) :

 

L’espérance mathématique de X vaut :

 

comme le montre l’écran suivant :

Signalons enfin qu’il existe une autre façon, plus rapide, d’aborder le problème du calcul de cette espérance. La variable aléatoire X, égale au nombre de lancers nécessaires pour faire apparaître les 6 faces du dé, peut s’écrire sous la forme :

Pour X2, tout revient à attendre la sortie d’un résultat différent du premier, résultat qui, même si on ne le connaît pas a priori a cependant une probabilité de 5

6. En termes de loi, on peut considérer que X2

est une loi de Pascal dans laquelle la probabilité de succès est égale à 5 p 6.

On sait que l’espérance d’une telle loi, qui est aussi le temps d’attente du succès, est de 1 6

5 p . On peut poursuivre un raisonnement analogue pour les autres lois.

Avec X3, on attend l’apparition d’un résultat différent des deux premiers : c’est de nouveau une loi de Pascal avec une probabilité de succès égale à 4

6. L’espérance de X3 est donc 6 4. Etc. jusqu’à X6 dont l’espérance est 6.

D’après la linéarité de l’espérance :

   

1

 

2

 

6

Résultat très précisément égal à celui que nous avons obtenu plus haut !