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Le projet de l'Observatoire Pierre Auger [b-39] est né au début des années 1990 à l'époque où moins d'une dizaine d'événements avec une énergie supérieure à 1020 eV avaient été détectés. L'existence de ces rayons cosmiques de très haute énergie constituait un véritable mystère pour la communauté scientifique. Pour essayer de percer ce mystère, l'expérience Auger s'est fixée comme but de détecter les rayons cosmiques au delà de 1019 eV avec une grande statistique et d'avoir des données de bonne qualité (faibles erreurs systématiques) afin d'étudier en détail le spectre en énergie, la distribution des directions d'arrivée et la nature de ces particules. Le flux des rayons étant d'environ 1 particule par km² et par siècle dans cette gamme d'énergie, il faut que le détecteur couvre une surface gigantesque pour espérer détecter

quelques dizaines d'événements par an au-delà de 1020 eV. La surface totale de l'observatoire est d'environ 3000 km². Pour obtenir une couverture totale du ciel, le projet final sera composé de deux sites, un dans chaque hémisphère avec une latitude comprise entre 30 et 45 °. Pour optimiser la détection des gerbes, il faut que l'altitude du site soit à une altitude proche du maximum de développement des gerbes, ce qui correspond dans la gamme en énergie d'Auger à une altitude comprise entre 1000 et 1500 m.

Pour obtenir le maximum d'information des gerbes atmosphériques et réduire les erreurs systématiques, l'observatoire Pierre Auger est un détecteur hybride utilisant simultanément

deux techniques: les télescopes à fluorescence et un réseau de détecteurs au sol (Figure B-8). Dans le contexte des désaccords entre les expériences AGASA et HiRes,

l’utilisation de ces deux techniques pour étudier les mêmes évènements apparaît comme un outil extrêmement pertinent. La détection des gerbes atmosphériques par fluorescence impose plusieurs contraintes importantes sur le choix du site et en particulier sur le climat (la couverture nuageuse doit être la plus faible possible) et sur l'environnement (la pollution lumineuse doit être minimale).

Figure B-8 : Schéma illustrant le principe de la détection hybride de l’Observatoire Pierre Auger.

Au moment de choisir le lieu d'installation du premier site de l'observatoire Pierre Auger, la grande majorité des expériences étudiant les rayons cosmiques d'ultra haute énergie étaient situées dans l'hémisphère Nord. De plus, le centre galactique uniquement visible depuis l'hémisphère Sud constitue une source potentielle de rayons cosmiques de très haute énergie privilégiée. Le premier site construit est implanté dans l'hémisphère Sud dans la Pampa Amarilla (35 - 35.3 ° de latitude Sud) en Argentine dans la province de Mendoza près de la ville de Malargüe. L'altitude moyenne du site est d'environ 1400 m. Le site dans l'hémisphère

Lamar.

Pour instrumenter cette grande surface, le réseau de surface (SD) est composé de 1600 détecteurs Čerenkov à eau (WCD pour « Water Čerenkov Detector ») régulièrement répartis sur des couronnes hexagonales concentriques. L'espacement entre chaque détecteur est de 1500 m. Cette distance moyenne a été déterminée pour que l'efficacité de détection du SD soit saturée au-delà d'une énergie de 1019 eV. Le choix des WCD pour la détection des gerbes atmosphériques n'est pas neutre. Ce type de détecteur, déjà utilisé dans des expériences précédentes comme Haverah Park, permet d'avoir une bonne sensibilité aux événements très inclinés pour les deux raisons suivantes : la grande section efficace latérale des détecteurs et la grande sensibilité des détecteurs à effet Čerenkov aux muons. La Figure B-9 montre l'emplacement des détecteurs dans le réseau de surface. Les détecteurs du réseau de surface seront décrits en détail dans la partie B-2.4 .

Figure B-9 : Schéma du réseau de surface théorique avec les 4 bâtiments de fluorescence. Chaque point bleu désigne l'emplacement d'un détecteur du réseau de surface. Les traits roses représentent le champ le vue de chaque télescope de fluorescence.

Quatre détecteurs de fluorescence (FD) [b-31] sont installés au sommet de collines au bord du réseau dont les noms sont Los Leones, Coheico, Los Morados et Loma Amarilla. Chaque détecteur est composé de 6 télescopes couvrant chacun une portion du ciel de 30 ° en azimut et 28.6 ° en élévation au dessus du réseau de surface. Le principe des télescopes est d'observer une grande partie du ciel afin de détecter la lumière UV émise par fluorescence. La Figure B-10 montre une photographie d'un télescope. Chaque baie est constituée de :

- Une ouverture de 2.2 m de diamètre pouvant être obstruée automatiquement - Un anneau correcteur divisé en 24 secteurs augmentant l'ouverture effective - Un filtre ultraviolet (290 – 410 nm) pour améliorer le rapport signal sur bruit - Un miroir sphérique de 3.5 m * 3.5 m avec une focale de 1.7 m

- Une caméra composée de 20 * 22 petits photomultiplicateurs hexagonaux placée au foyer du miroir.

- Une électronique locale de traitement des données

La détection par fluorescence exige des conditions extérieures très strictes (uniquement les nuits claires et sans lune), de ce fait la détection hybride par les deux types de détecteurs ne concerne qu'en moyenne 10 % des événements du réseau de surface seul.

Figure B-10 : Photographies du détecteur de fluorescence Los Leones et d’un de ces télescopes.

L'étalonnage des détecteurs de fluorescence est une étape cruciale dans la reconstruction de l'énergie des gerbes atmosphériques. Deux procédures complémentaires [b-36] ont été mises en place:

- Un étalonnage absolu effectué une fois par an avec une source de lumière d'intensité connue homogène et stable travaillant à plusieurs longueurs d’onde. La source en forme de tambour de 1.5 m de diamètre est placée à l'entrée de chaque télescope.

- Un étalonnage relatif effectué toutes les nuits avec des sources de lumière réparties sur chaque télescope. Cet étalonnage permet de surveiller la stabilité des PM de chaque caméra.

En plus de l'étalonnage de chaque caméra, l'atmosphère est surveillée en permanence grâces à des stations météorologiques (mesure de température, humidité, vitesse et direction du vent), des caméras infrarouges (mesure la couverture nuageuse), des campagnes de radiosondages à l'aide de ballons-sondes (mesure des profils d'atmosphères) et des tirs de LIDAR (mesure des concentrations des aérosols, poussières, nuages…) [b-37]. Depuis juillet 2003, les équipements installés dans le bâtiment CLF (« Central Laser Facility » [b-38]) permettent de surveiller l'atmosphère à l'aide d'un laser YAG (longueur d'onde 355 nm). Plusieurs tirs verticaux et inclinés sont menés chaque nuit et génèrent des événements FD marqués « CLF » dont on peut comparer la direction et l'énergie avec les vraies valeurs du laser. De plus une petite fraction du signal laser est injectée via une fibre optique dans le détecteur de surface CELESTE. Ceci permet de tester la présence d'éventuels décalages en

B-2.4 Description détaillée d'un détecteur du réseau de