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Le courant d'obscurité, même à très basse température, contient des événements en forme de « train d’impulsions » (ou « burst »). Le but de cette partie est de montrer que ces trains d'impulsions peuvent provenir de phénomènes physiques tels que le passage de rayons cosmiques dans le verre de l'enveloppe du PM. L'effet des rayons cosmiques a été mesuré sur un PM de 8 pouces (XP1806 n°816).

Figure A-26 : Schéma de principe de l’expérience sur l’influence des rayons cosmiques sur le PM de type XP1806. Le schéma n’est pas à l’échelle.

La Figure A-26 montre un schéma de principe de l’expérience sur l’influence des rayons cosmiques. Deux scintillateurs plastiques sont placés en dessus et en dessous du PM à caractériser et servent à sélectionner les muons qui traversent le PM. Les deux scintillateurs sont distants d'environ 1 m. La taille du scintillateur du haut est de 40*40*4 cm3 tandis que celui du bas a une dimension de 10*10*1 cm3. Une plaque de plomb de 1 cm d'épaisseur a été positionnée entre les 2 scintillateurs pour éliminer les particules de faible énergie. Pour chaque coïncidence entre les deux scintillateurs, la réponse du PM est enregistrée avec un ADC. La Figure A-27 montre un histogramme de la charge des signaux des PM (la fenêtre d'intégration est de 100 ns). La charge déposée par un rayon cosmique est piquée vers 15 photoélectrons avec une moyenne d'environ 30 photoélectrons. Des événements ont même été mesurés avec une charge supérieure à 200 photoélectrons.

Un rayon cosmique créé par effet Čerenkov dans le verre du PM environ 400 photons par cm dans un domaine de longueur d'onde compris entre 300 et 600 nm [a-64]. Avec une épaisseur moyenne de verre d'environ 3 mm et une efficacité quantique autour de 25 %, le nombre de photoélectrons créés est de l’ordre de 30. Ce nombre moyen de photoélectrons créés par effet Čerenkov dans le verre de la fenêtre d’entrée est en très bon accord avec celui mesuré précédemment dans le premier pic du train d’impulsions.

Figure A-27 : Histogramme de la charge du premier pic du train d’impulsions (fenêtre d’intégration de 100 ns) exprimée en photoélectron de la réponse aux muons cosmiques du PM de type XP1806 (déclenchement par la coïncidence de deux scintillateurs).

Pour étudier les caractéristiques (distribution temporelle, en amplitude et en nombre) des trains d’impulsions, 30000 traces ont été enregistrées sur une durée de 30 µs avec un oscilloscope numérique (Tektronix TDS500) déclenché par la coïncidence des deux scintillateurs. La Figure A-28 montre des exemples de traces typiques. Dans la majorité des cas, les traces sont composées d'un pic à plusieurs photoélectrons (en moyenne 30) suivi d'un certain nombre d'impulsions secondaires dont la charge moyenne est celle du photoélectron unique.

Figure A-28 : Réponse des PM au passage des rayons cosmiques. Copie d'écran d'oscilloscope de 4 traces typiques. En bleu, signaux logiques (seuil de 0.3 pe) et en noir signaux analogiques. La base de temps est de 10 µs par division et le calibre est de 100 mV pour la voie analogique. La fluctuation de la ligne de base

Les deux graphes de la Figure A-29 montrent la distribution temporelle et celle du nombre d’impulsions secondaires dans une trace de 30 µs. En plus de l'impulsion principale, il y a en moyenne 5 pics secondaires dans une fenêtre de 30 µs au dessus d'un seuil en amplitude de 0.3 photoélectron. Dans certains cas, un rayon cosmique peut être responsable de plus de 25 impulsions secondaires dans une fenêtre de 30 µs. La distribution d'arrivée des impulsions secondaires suit une loi de décroissance avec plusieurs constantes de temps : une d'environ 2.9 ± 0.3 µs et une plus lente d'environ 13.5 ± 1.0 µs. L’origine de ces impulsions secondaires n’est pas totalement établie : elles peuvent provenir de la désexcitation du verre de l'enveloppe du PM par fluorescence ou l’excitation de niveaux « métastables » de la photocathode [a-9][a-63][a-64]. Le pic vers 6.5 µs dans la distribution temporelle des impulsions secondaires a pour origine les post impulsions de type II (voir partie A-4.5.1 ).

Figure A-29 : Distribution temporelle (gauche) et du nombre (droite) des impulsions secondaires dans une fenêtre de 30 µs après le pic principal. (Déclenchement de l’oscilloscope numérique (« multi hit») par la coïncidence des deux scintillateurs).

Dans cette expérience, le taux de comptage des coïncidences entre les deux scintillateurs est d'environ 1.6 coups par seconde (cps) pour une ouverture angulaire de notre dispositif de 53°. Comme le flux des rayons cosmiques suit une loi en cos²θ en fonction de l’angle zénithal θ, on trouve en première approximation un taux d'environ 4.5 cps pour tout l’angle solide. D'après les données du "Particule Physics Booklet" [a-65], le taux de rayons cosmiques traversant une surface horizontale est de 130 coups par m² et par seconde pour les muons atmosphériques et de 180 coups par m² et par seconde en prenant en compte toutes les particules (électrons + muons), ce qui donne respectivement un taux de 5.2 cps et de 7.2 cps pour une surface d'environ 400 cm² (surface de photocathode). Le taux de comptage des coïncidences entre les 2 scintillateurs se rapproche beaucoup de celui des muons. Ce résultat peut se comprendre car l’expérience est réalisée dans un bâtiment et avec une plaque de plomb (absorption des électrons). En ajoutant la contribution des impulsions secondaires, c’est-à-dire en comptant l’ensemble des impulsions du train, on trouve que la contribution des rayons cosmiques au « talon » de bruit de fond est d’environ 23 cps au dessus d'un seuil en amplitude de 0.3 pe.

On a mesuré précédemment que pour le XP1806, le taux de comptage des grandes impulsions est d’environ 21 cps au dessus d’un seuil de 5 pe (voir partie A-4.2.1 ). Ceci semble montrer que les rayons cosmiques ne sont responsables que d’environ un quart des grandes impulsions du bruit de fond.

Pour étudier l’origine des 16 Hz de grandes impulsions non liées aux rayons cosmiques, des acquisitions de traces de bruit de fond sont réalisés au dessus d'un seuil en amplitude de 5 photoélectrons. Les résultats sont présentés dans la Figure A-30 (courbes de couleur rouge). La distribution temporelle des impulsions secondaires après un pic principal ayant une amplitude supérieure à 5 pe a exactement la même forme que celle des impulsions secondaires dues au passage des rayons cosmiques. Par contre, les impulsions secondaires sont légèrement plus nombreuses pour le bruit de fond que dans le cas du passage d'un rayon cosmique. Ceci semble indiquer que c’est le même phénomène physique qui est responsable de tous les trains d’impulsions du bruit de fond. Ces trains d’impulsion peuvent aussi être initiés par exemple par les électrons provenant de la décroissance β du potassium 40 ou des autres éléments radioactifs (voir partie A-4.2.4 ). L’absence de rafales avec la LED semble montrer que les impulsions secondaires ne proviennent par de l’excitation de la photocathode par les photons Čerenkov.

Figure A-30 : XP1806 n°816 : distribution temporelle (gauche) et du nombre (droite) d’impulsions secondaires dans une trace de 30 µs avec différents types de déclenchement : auto déclenché sur le bruit de fond en noir avec un seuil de 5 photoélectrons, avec la coïncidence des deux scintillateurs en rouge et avec une LED avec un éclairement de 10 photoélectrons en vert pour mesurer les post impulsions (voir partie A-4.5.1 ). Les différentes composantes sont normalisées pour avoir le même nombre de coups dans les histogrammes.

Pour valider les résultats sur la réponse du PM aux rayons cosmiques, un autre PM avec une géométrie complètement différente a été testé dans les mêmes conditions. Les tests ont été faits sur le PM XP4512 [a-66] de Photonis de 5 pouces de diamètre avec une géométrie plan-concave. L'enveloppe du PM est réalisée en verre identique à celui utilisé sur le XP1806. Les deux graphes de la Figure A-31 montrent la distribution temporelle des impulsions secondaires ainsi que celle de leur nombre dans une trace de 30 µs. Les deux constantes de décroissance de la distribution des temps d'arrivée sont d’environ 3.3 µs et d’environ 15.5 µs. Ces valeurs sont très proches de celles mesurés avec le PM XP1806. Le nombre d'impulsions secondaires dans le bruit de fond est d'environ 6.5 au dessus d'un seuil de 0.4 pe. Bien que la surface de photocathode soit plus faible, le nombre d'impulsions secondaires est plus important que dans le cas du XP1806. Ceci peut s'expliquer par le fait que la fenêtre d'entrée du PM en verre est beaucoup plus épaisse.

Figure A-31 : XP4512 (PM de 5 pouces avec une fenêtre d’entrée de forme plan-concave) : distribution temporelle (gauche) et du nombre (droite) des impulsions secondaires avec différents types de déclenchement : auto déclenché avec un seuil de 5 photoélectrons sur le bruit de fond en noir, avec une LED avec un éclairement en photoélectron unique en vert.

En résumé, la réponse des PM aux rayons cosmiques est composée de deux parties : une impulsion de 30 photoélectrons en moyenne dont la cause semble être l'émission Čerenkov dans le verre du PM. Le taux de comptage des grandes impulsions est en accord avec le flux de rayons cosmiques (entre 5 et 10 cps pour un PM de 8 pouces). Cette grande impulsion est suivie par une série de pics en photoélectron unique. L’origine des impulsions secondaires des trains d’impulsions n’est pas encore totalement déterminée. Les rayons cosmiques sont responsables d'environ une vingtaine de coups par seconde avec un seuil de 0.3 pe du « talon » de bruit à basse température dans le cas du XP1806. Plus de trois quarts des trains d’impulsions présents dans le bruit de fond ne sont pas liés aux rayons cosmiques, ils peuvent être attribuer par exemple à la décroissance des éléments radioactifs du verre (en particulier la décroissance β du potassium 40). Pour réduire la contribution des rayons cosmiques, la seule possibilité serait d’avoir une fenêtre amincie. Pour vérifier cette assertion, une petite expérience doit être montée dans un futur proche avec un plus petit PM (Photonis XP33KO) ayant une fenêtre amincie et une galette de verre de 1 cm d'épaisseur optiquement couplée à la fenêtre d'entrée du PM. Cette expérience permettra de quantifier l'influence des rayons cosmiques en fonction de l'épaisseur de verre

A-4.2.4 Effet de la radioactivité contenue dans le verre des