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PARTIE 3 : VERS UNE APPROCHE SPECIFIQUE-PATIENT

1.1 Objectifs 136

Chapitre 3 : Analyse de l’activité ventriculaire gauche

Le comportement ventriculaire gauche est complexe et ses signaux caractéristiques (pression ventriculaire, déformation…) sont souvent difficiles à interpréter car ils varient notablement d’un individu à l’autre. Cette observation se vérifie particulièrement dans les cas de dysfonctionnement cardiaque. En effet, les pathologies ventriculaires sont diverses : les zones affectées diffèrent d’un patient à l’autre, la présence d’une désynchronisation de l’activité électrique des deux ventricules ou des perturbations de la propagation intraventriculaire peuvent être observées dans certains cas. Ce chapitre est divisé en deux paragraphes principaux. L’objectif du premier est de montrer que les simulations de la pression ventriculaire obtenues avec le modèle sont réalistes. L’objectif du second est de proposer un outil d’aide à l’interprétation des déformations du myocarde à partir d’un modèle adapté.

1 Étude de la pression ventriculaire

1.1 Objectifs

En pratique, la pression artérielle est couramment mesurée pour le diagnostic de certaines pathologies, telles que l’hypertension. Les pressions systolique et diastolique peuvent être obtenues de manière simple et donnent de bonnes indications sur l’état hémodynamique. La pression ventriculaire reste le marqueur le plus fidèle de l’état physiopathologique de l’activité mécanique cardiaque du patient. En effet, des informations sur l’activité du myocarde sont contenues dans la forme de l’onde pression (pression maximum, durée, …). Cependant l’acquisition de la pression ventriculaire n’est possible qu’avec des méthodes invasives, souvent dites sanglantes, ce qui rend son utilisation impossible dans le contexte clinique quotidien.

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L’objectif de cette étude est de montrer qu’il est possible, avec le modèle de ventricule développé, d’obtenir des simulations qui reproduisent les formes des pressions ventriculaires expérimentales. Cette partie contribue donc à compléter la validation du modèle et à montrer son intérêt par rapport à un modèle simple de type élastance. Des expérimentations animales ont été menées de manière à acquérir les pressions intraventriculaires sur trois porcs et pour différents niveaux de postcharge (Lavigne

2001). Le protocole est décrit dans la partie 2. En analysant les courbes, nous avons pu observer que

les ondes de pressions ventriculaires expérimentales ont une morphologie particulière caractérisée par la largeur de la courbe. Il est donc interessant de vérifier si le modèle est capable de reproduire la forme de ces courbes en utilisant l’algorithme d’identification. Celui-ci est également appliqué aux signaux acquis avec différents niveaux de postcharge. En effet, dans nos données, les valeurs exactes des pressions appliquées à l’aorte, pour simuler les variations de postcharge, ne sont pas disponibles. L’étape d’identification peut donc aider à quantifier ces variations effectuées lors du protocole expérimental.

1.2 Méthodes

Le modèle de ventricule incluant la description localisée du comportement du myocarde est utilisé pour l’étude de la pression ventriculaire. La contraction de l’oreillette est négligée pour simplifier l’identification ; ainsi la précharge est représentée directement par une source d’effort Se (Figure 74). La valeur de celle-ci est fixée comme étant égale aux pressions diastoliques observées et est égale à 10 mmHg pour les porcs 1 et 3 et à 6 mmHg pour le porc 2. La postcharge est modélisée comme une portion de vaisseau par ses propriétés capacitives, résistives et inertielles. Les valeurs de ces paramètres sont extraites de la littérature (Takata 1997, McInnis 1985, Heldt 2002). La dimension du ventricule étudié ne peut être déterminée dans ce cas car aucune échographie n’a été réalisée. Le demi petit axe a et le demi grand axe b sont fixés à partir de valeurs moyennes mesurées sur des sujets adultes sains : a = 2 cm et b = 4.8 cm.

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Figure 74 : Modèle Bond Graph utilisé pour la simulation.

On sait que les paramètres électriques sont particulièrement influents sur les déformations du myocarde. Il est donc intéressant de pouvoir déterminer leurs valeurs à l’aide de l’algorithme d’identification. Afin de faciliter cette démarche, le modèle de Beeler-Reuter (1977) n’est pas utilisé dans cette partie. La concentration en calcium est modélisée de manière élémentaire par un sinus tronqué. Celui-ci est défini par son amplitude K et sa demi-période T (Figure 75). Même si l’utilisation d’un sinus est très simplificatrice par rapport à la morphologie du [Ca2+], le temps d’activation T peut mieux refléter la dynamique calcique au niveau tissulaire. Chaque segment de paroi est donc associé à un sinus tronqué pour lequel les paramètres d’amplitude K et de demi-période T sont identifiés.

Figure 75 : Approximation de la forme de la concentration en calcium

L’activation de la concentration en calcium (début du sinus tronqué) est effectuée à la fin de la période de dépolarisation rapide (UDP), qui détermine l’activation électrique de chaque segment. L’identification de ce paramètre est donc nécessaire. De manière à rendre cohérents le modèle de concentration calcique et le modèle de l’état électrique de la cellule (automate cellulaire), on considère que la durée de l’onde de calcium est égale à la durée du potentiel d’action (Figure 76). Les périodes réfractaire absolue (ARP) et réfractaire relative (RRP) sont alors reliées à la demi-période du sinus tronqué T par les relations :

ARP = 0.75 T ( 94 )

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Ainsi en déterminant T par l’identification, on fixe directement les périodes ARP et RRP et tous les paramètres électriques sont définis. Les activités électrique et mécanique sont caractérisées par trois temps que l’on peut définir de la manière suivante :

!

TAE : Temps d’Activation Electrique. •

!

TAM : Temps d’Activation Mécanique. •

!

TPM : Temps correspondant au Pic de l’activité Mécanique.

A B

Figure 76 : Lien entre les activités électrique et mécanique : au niveau tissulaire (A) et au niveau de l’organe (B). Les temps

!

TAE,

!

TAM,

!

TPM correspondent respectivement à l’activation électrique,

l’activation mécanique et au pic d’activité mécanique.

Enfin, au niveau hydraulique, les valeurs des résistances doivent également être déterminées. La phase de remplissage rapide (onde E) correspond à une résistance faible alors que la systole et la seconde phase de remplissage se rapportent à des résistances plus élevées. Ainsi, une loi empirique de variation de la résistance hydraulique de chaque segment a été proposée :

!

R = Rmax

!

0 " t < t1

!

R = ( Rmax" Rmin) cosn(# 2 t " t1 t2 " t1) + Rmin ! t1 " t < t2 ! R = Rmin ! t2 " t < t3 !

R = ( Rmax" Rmin) sinn(# 2

t " t3

t4 " t3) + Rmin

!

t3 " t < t4

Le paramètre t1 correspond à la période de systole et se définit, pour chaque segment, par

!

t1 = TPM. Les paramètres t2 et t3 sont les temps de transition ; ils sont fixés a priori (voir Annexe C). Enfin, le paramètre t4 est défini comme la durée du cycle cardiaque. L’ECG étant disponible, t4 est défini

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spécifiquement pour chaque patient. Les paramètres

!

Rmin et

!

Rmax traduisent l’aptitude du ventricule à se remplir et à éjecter. Ils sont déterminés à l’aide de l’algorithme d’identification. De manière à simplifier le processus, les résistances sont supposées égales pour chacune des couches. Enfin le réseau d’automates cellulaires est activé directement en commençant par le segment septum équatorial (Figure 16 de la Partie 2, Chapitre 1). La contraction auriculaire est négligée ici.

On peut récapituler les paramètres à déterminer par la méthode d’identification :

• Pour l’activation électrique, le paramètre UDP doit être défini pour chacun des 12 segments. • Pour la concentration en calcium, les paramètres d’amplitude K et de demi-période T doivent

être définis pour les couches basale, équatoriale et apicale. • Pour la résistance hydraulique, les paramètres

!

Rmin et

!

Rmax doivent être déterminés pour chacune des trois couches.

Un algorithme évolutionnaire a été employé pour l’identification des paramètres. Le code génétique de chaque individu est constitué par un vecteur de 21 paramètres P = [UDP1,…, UDP12, Kb, Km ,Ka, Tb, Tm, Ta, Rmin,b, Rmin,e, Rmin,a, Rmax,b, Rmax,e, Rmax,a]. Une population de 250 individus a été définie et le nombre de générations a été limité à 25.

L’identification est menée dans deux cas distincts. La recherche de paramètres est tout d’abord testée sur les pressions ventriculaires acquises auprès de trois porcs différents ; ce qui correspond à l’étude en condition stationnaire. Ensuite, l’étude est effectuée sur les pressions acquises sur un porc avec des conditions de postcharges différentes. Dans ce cas, la résistance de sortie est considérée comme un paramètre à identifier. Le nombre de paramètres à déterminer s’élève donc à 22 pour cette étude.