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La d´etection d’h´ematite dans les roches de VRR `a partir des observations orbitales a bien ´

et´e confirm´ee par les donn´ees au sol. Les concentrations en h´ematite mesur´ees `a Stoer et Highfield par CheMin exc`edent la teneur enregistr´ee dans le terrain deBlunts Point. Duluth, le forage r´ealis´e dans ce dernier, situ´e `a quelques m`etres seulement de la transition avec VRR, contient ∼4.3 wt.% d’h´ematite (Rampeet al., 2020b). Par ailleurs, des analyses chimiques r´eguli`eres ont ´et´e effectu´ees afin de documen-ter des variations possibles de composition lors de l’entr´ee du rover sur VRR, ainsi que le long de la ride. ChemCam a ´et´e particuli`erement sollicit´e du fait de sa rapidit´e d’analyse et par cons´equent du potentiel de l’instrument `a analyser un grand nombre de roches. Les premi`eres analyses chimiques r´ealis´ees par le rover avec ChemCam n’ont pas indiqu´e d’augmentation significative de la concentration en fer `a VRR, par comparaison avecBlunts Point(Frydenvanget al., 2018). La Figure 4.5 repr´esente l’abondance en fer quantifi´ee grˆace aux spectres ChemCam (algorithme MOC), en fonction de l’´el´evation de la cible. Malgr´e un relativement fort enrichissement en h´ematite pour les forages de Stoer et Highfield en comparaison de celui de Duluth (respectivement +10.4 wt.% et +4.2 wt.%), nous observons que les concentrations en fer sont globalement similaires entre les diff´erents membres. Les concentrations moyennes observ´ees `

a Duluth, Pettegrove Point, Red Jura et Grey Jura sont respectivement ´equivalentes `a 19.58 (σ=1.22) wt.%, 19.67 (σ=1.04) wt.%, 19.07 (σ=1.63) wt.%, et 19.62 (σ=1.45) wt.%.

Figure4.5 – Abondance en fer mesur´ee d’apr`es le mod`ele de quantification MOC des spectres ChemCam, dans les roches de VRR et deBlunts Point en fonction de l’altitude. Une moyenne glissante est appliqu´ee sur 150 points d’observation (´equivalents `a 15-30 cibles ou ∼10-15 jours de donn´ees) afin d’illustrer la tendance sur le long terme.

Au vu de la nature diag´en´etique de la ride, cette premi`ere observation semble favoriser un sc´enario o`u l’augmentation de la concentration en oxyde de fer est associ´ee `a une transformation isochi-mique locale de pr´ecurseurs riche en fer. Cependant l’absence de variation dans les donn´ees ChemCam `

a l’´epoque de son entr´ee sur VRR a soulev´e une interrogation. Est-ce que le mod`ele utilis´e pour quanti-fier les ´el´ements chimiques majeurs `a partir des spectres ChemCam, et plus particuli`erement le fer, est robuste pour des roches basaltiques enrichies en h´ematite comme attendu dans la ride ?

Nous savons que les r´esultats de la m´ethode de quantification des donn´ees ChemCam sont for-tement d´ependants du nombre et de la nature des ´echantillons utilis´es comme r´ef´erence pour le mod`ele MOC. En effet, tel que d´ecrit dans la section 2.4.3.1, la base de calibration originelle de ChemCam ´

etait compos´ee de seulement 66 ´echantillons consid´er´es comme repr´esentatifs de l’ensemble de la gamme de compositions chimiques attendue pour les mat´eriaux pr´esents dans le crat`ere Gale (Wiens et al., 2013). Cependant, il s’est av´er´e que le nombre limit´e de compositions chimiques rendait la quantification des ´el´ements impr´ecise pour des compositions extrˆemes ou des assemblages non repr´esent´es par ces 66 ´

echantillons. Le silicium en est un bon exemple, car il ´etait particuli`erement surestim´e dans des roches s´edimentaires riches en feldspaths alcalins car ces phases n’´etaient pas attendues en si grande abondance `

aGale (Clegget al., 2017). Cette base de calibration a dˆu ˆetre am´elior´ee, pour atteindre 408 ´echantillons de roches ign´ees et s´edimentaires (Clegget al., 2017), cette fois cens´es fournir des compositions chimiques plus repr´esentatives de la diversit´e min´eralogique observ´ee `aGale. Suivant cette mˆeme logique, l’absence de variation de l’abondance en fer des roches mesur´ee par ChemCam lors de son entr´ee sur la ride Vera Rubin pose la question de la robustesse du mod`ele de quantification pour des roches ayant une abondance en fer inhabituelle, c’est-`a-dire dont la concentration exc´ederait∼20 wt.% FeOT. La base de calibration ChemCam ne contient en effet que 14 ´echantillons (sur 408) avec une abondance en fer sup´erieure `a 20 wt.% FeOT, et seulement deux avec une abondance sup´erieure `a 50 wt.% FeOT.

Afin de r´epondre `a cette probl´ematique nous avons d´ecid´e de d´evelopper la banque de spectres LIBS de la base de calibration ChemCam avec de nouveaux ´echantillons. Cette ´etude a deux objectifs :

abondances l´eg`erement sup´erieures `a la moyenne, c’est-`a-dire dans la gamme 20-30 wt.% FeOT. Le mod`ele de quantification MOC actuel du fer des donn´ees ChemCam est potentiellement peu pr´ecis dans cette gamme de concentration. La Figure 4.6 repr´esente la pr´ediction du mod`ele PLS et ICA (les deux techniques utilis´ees par le MOC) ainsi que le MOC lui-mˆeme en fonction de la valeur certifi´ee des ´echantillons de la base de calibration ChemCam. Le poids de chaque mod`ele dans la pr´ediction finale du MOC est de 75% PLS et 25% ICA. Nous observons sur cette figure que le MOC semble sous-estimer globalement les ´echantillons poss´edant des abondances situ´ees entre 20-30 wt.% FeOT. Le mod`ele PLS pourrait ˆetre responsable de cette sous-estimation, car il pr´esente une plus faible dynamique par rapport au mod`ele ICA pour cette gamme de valeurs (Figure 4.6.a, b). En revanche il semble globalement plus pr´ecis que l’ICA pour des abondances inf´erieures `a 20 wt.% FeOT et sup´erieures `a 40 wt.%.

Figure 4.6 – Pr´ediction en fer en fonction de la concentration r´eelle des ´echantillons de la base de calibration ChemCam, pour a) la m´ethode PLS, b) la m´ethode ICA, et c) le mod`ele MOC. Ce dernier correspond aux r´esultats des m´ethodes PLS et ICA. Les ´echantillons retir´es comme jeu de test sont repr´esent´es en rouge, et les ´echantillons servant `a construire le mod`ele sont figur´es en noirs. Les r´egressions lin´eaires de ces deux jeux de donn´ees sont ´egalement repr´esent´ees (ainsi que les param`etres de ces droites) et une droite 1 :1 qui traduit la meilleure corr´elation.

2. Dans un deuxi`eme temps, nous voulons ´egalement am´eliorer la quantification pour des ´echantillons poss´edant des abondances extrˆemes en fer et correspondant par exemple `a des oxydes de fer purs. Pour ce type de composition, nous savons que le mod`ele MOC est inad´equat car il plafonne `a

∼55 wt.% FeOT sur les donn´ees martiennes. Ce seuil est notamment pr´esent sur des ´echantillons dont il est certain que leurs concentrations sont en r´ealit´e sup´erieures, comme les m´et´eorites de fer. En effet, le rover Curiosity a identifi´e 20 m´et´eorites de fer le long de ses∼23 km de parcours (Meslin et al., 2019). La confirmation m´et´eoritique de ces objets ne fait aucun doute grˆace aux donn´ees combin´ees de plusieurs instruments. L’imagerie, tout d’abord, permet parfois d’observer la pr´esence de regmaglypte sur ces objets, structure caract´eristique des m´et´eorites form´ees lors de la rentr´ee atmosph´erique. L’instrument multi-spectral MastCam montre que ces objets poss`edent des spectres lisses avec de fortes pentes de r´eflectance dans le rouge, coh´erents avec la pr´esence de fer m´etal (Wellington et al., 2018). Les spectres passifs ChemCam sont ´egalement en accord avec ces observations (Johnson et al., 2020). Les spectres LIBS ChemCam de ces cibles sont en grande majorit´e compos´es de raies appartenant au fer. Les raies du nickel sont ´egalement visibles (Meslin et al., 2019). Finalement, les tirs LIBS sur ces objets produisent des impacts brillants qui n’ont ´et´e observ´es que sur des analyses de m´et´eorites en laboratoire (Meslinet al., 2017). En revanche la quantification des spectres ChemCam par le mod`ele MOC donne des abondances en fer qui ne sont pas compatibles avec ces objets. La pr´esence de m´et´eorites mixtes (m´esosid´erites) interm´ediaires entre les m´et´eorites m´etalliques et silicat´ees (e.g., Wasson, 1985) est peu probable car les abondances en fer sont identiques pour l’ensemble des m´et´eorites analys´ees `a Gale, or les

m´et´eorites mixtes correspondent aux plus faibles fr´equences d’observation sur Terre. Que tous ces objets proviennent d’une mˆeme chute `a Gale parait statistiquement improbable.

Le but de cette ´etude est donc d’´etablir une courbe de calibration du fer, sp´ecifique pour des roches s´edimentaires basaltiques enrichies en oxyde de fer comme ce pourrait ˆetre le cas `a VRR. L’objectif est de pouvoir identifier des variations relativement subtiles de composition dans une matrice basaltique, et que cette courbe soit ´egalement applicable pour des compositions extrˆemes. Nous pourrons ainsi utiliser cette m´ethode de quantification pour raffiner les abondances en fer pour des hautes teneurs (e.g., les nodules polygonaux co-localis´es aux veines de sulfates de Jura). Afin de r´ealiser cet objectif, nous avons :

1. pr´epar´e et analys´e au LIBS des m´elanges basaltiques dop´es avec diff´erents types d’oxydes de fer afin de compl´eter la banque de calibration existante, utilis´ee par le mod`ele MOC.

2. d´evelopp´e une nouvelle m´ethode de quantification du fer fond´ee sur cette nouvelle base de calibra-tion.