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La notion de « réception sociale » comme révélatrice du rapport environnement- environnement-sociétés

Le rapport des individus et des sociétés à l’environnement ne passe pas seulement par un lien direct, contemplatif ou actif avec ce qui entoure, mais aussi par l’action sur la nature ou par l’utilisation de la nature (ou de l’idée de nature) par les « acteurs » du territoire. L’intérêt de cet objet réside dans le rapport indirect des sociétés avec l’environnement, étudié par le truchement du jugement des choix d’action opérés et des raisons données de ces choix.

Je montre ici qu’au travers de la notion de réception sociale, il est possible de qualifier le degré d’insertion socio-territoriale d’aménagements et de dispositifs en lien avec l’environnement ou les

risques. En effet, les habitants, les riverains et les gestionnaires sont les récepteurs d’aménagements ou d’actions sur l’environnement, qui sont plus ou moins ancrés dans le tissu local. Je démontre qu’ils ont des avis « éclairés » sur les actions déployées et les raisons invoquées pour leur réalisation et qu’ils réagissent diversement aux formes de « verdissement » des planifications et des aménagements qui sont réalisés dans les espaces qu’ils pratiquent.

Pour illustrer ce propos, je distingue tout d’abord la réception de l’acceptabilité. Puis, je présente plusieurs situations d’étude de la réception sociale : la question de l’écologisation de la gestion intégrée des risques, au travers de la réception des mesures alternatives de gestion de la submersion ; les dispositifs écologiques innovants comme révélateurs d’un rapport sensible au paysage et au territoire vécu ; la gouvernance et les échelles (spatiales et temporelles) de l’action institutionnelle en matière d’environnement, dans le contexte de réforme territoriale que connaît la France (décentralisation). Pour finir, je montre que la notion d’insertion socio-territoriale permet de donner une vision territorialisée de la réception sociale de l’agir environnemental.

a. Réception vs acceptabilité

Au cours de mes plus récentes recherches, j’ai opté pour l’emploi du concept de « réception sociale » plutôt que d’acceptabilité. J’en propose tout d’abord une définition et une justification.

La triade récepteur/émetteur/signal (Figure 11), appliquée à des groupes sociaux situés dans un anthroposystème complexe offre un cadre d’analyse au décalage possible entre intentions d’un concepteur et dispositions d’un récepteur à être le réceptacle d’un signal. J’utilise cette image pour chahuter, ce qui est plus simplement présenté comme « l’acceptabilité » des projets ou des aménagements, et qui préoccupe aussi bien les personnes élues, que les financeurs et les décisionnaires.

Figure 11 : La « parabole » de la réception sociale : la triade émetteur – récepteur – signal (Source :IRD, 2018)

La notion de « réception sociale » ne sous-entend pas l’idée d’une adhésion potentielle, supposée ou attendue. Pour autant, il ne s’agit pas de la réduire à une réception, passive, comme le serait un récepteur mécanique, qui pourrait relever uniquement de la perception d’un stimuli. Au sens propre, la réception nécessite un émetteur et un récepteur, au sens « social », elle présuppose une intentionnalité, une volonté de répondre à des besoins ou à des impératifs. La comparant avec un système d’émetteur/récepteur, une réception sociale « de bonne qualité », se mesure autant à l’aune de la qualité de l’émission, de la capacité des récepteurs à percevoir, mesurer et évaluer ce qui a été émis, qu’à la qualité et à la « consistance » du signal, c’est à dire sa plus ou moins grande dégradation entre les deux points que parcourt « l’onde » (sur la Figure 11, du fait d’un nuage par exemple).

Concernant la gestion des espaces naturels, mais aussi les innovations biotechnologiques, la restauration écologique ou la gestion des risques, la notion d’acceptabilité d’un projet ou d’un dispositif « par les populations » revient fréquemment, dans la bouche des commanditaires des études et des partenaires institutionnels de la recherche. Le terme m’a d’emblée paru suspect et m’a amenée à m’interroger sur ses acceptions. J’ai donc formalisé le choix du terme de « réception sociale » de préférence à celui d’acceptation ou d’acceptabilité (Amalric et Cirelli, 2015).

Malgré l’imprécision de la notion d’acceptabilité sociale (ou grâce à ce flou), son utilisation est fréquente (Fortin, 2015) et des significations différentes lui sont assignées. Celle-ci peut parfois être un référentiel et un cadre pour l’action, comme les nombreux travaux réalisés au Canada en matière de projets d’exploitation de ressources naturelles ou d’énergies renouvelables l’ont montré (Baba et Raufflet 2014, Fortin et Fournis, 2014, Fortin et Brisson, 2015). D’autres travaux opposent l’acceptabilité à l’acceptation sociale en attribuant à cette deuxième une portée dialogique – qui encouragerait la construction entre les parties impliquées d’apprentissages communs - que la première ne possèderait pas s’agissant uniquement d’une stratégie communicationnelle (Gendron, 2014). Inversement, d’autres auteurs, dans une démarche contestataire, prêtent à l’acceptation une logique d’imposition par les pouvoirs publics de choix établis à priori sans avoir associé les habitants à la décision (Batellier, 2012). Dans ce cadre, l’acceptabilité renverrait à la dynamique sociale dans laquelle s’inscrit le projet. Cela impliquerait donc une construction collective sociale et consensuelle à un moment donné de l’histoire d’un territoire (Caron-Malenfant et Conraud, 2009). L’acceptabilité sociale serait donc un processus de négociation où s’exprime la capacité de certains groupes locaux à se faire entendre et à assurer les conditions de leur projet de territoire. C’est ce que montre également S. Depraz à propos de la notion « d’acceptance » (de l’allemand « akzeptanz »). Ce dernier la définit comme « impliquant un degré supérieur d’acceptation » et consistant « en une identification aux valeurs portées par l’objet » concerné. S’il souligne bien l’intérêt de prendre en compte les dimensions spatiales de « l’acceptance », il montre également combien la notion peut facilement, lorsqu’elle est manipulée par des institutions telles que les parcs nationaux, se fondre dans une forme d’adaptation aux volontés du public (Depraz, 2005). (…)

Au vu de ces débats, la notion « d’acceptabilité sociale » nous est apparue trop marquée par la controverse et afin de rendre lisibles les comportements collectifs et individuels, la posture retenue a été de faire référence à un processus de « réception sociale ».

(Amalric et Cirelli, 2015)

La notion d’acceptabilité fait l’objet de controverses (Fournis et Fortin, 2015 ; Barbier et Nadai, 2015) sans que la communauté scientifique n’en arrive aux mêmes conclusions. Certains auteurs montrent que « l’acceptabilité sociale » est un processus complexe où peuvent s’articuler à la fois le refus, mais également la construction de scènes de débat et les arrangements trouvés entre les différents acteurs en présence au regard du projet (Fortis et Fournis, 2014). En sus de l’influence des facteurs exogènes (Amalric et Cirelli, 2015), les travaux sur l’acceptabilité pointent également l’importance de la prise en compte de facteurs locaux, comme la perception du paysage, la valeur du foncier, les implications économiques locales des projets et, le cas échant, le sentiment de justice (ou d’injustice) et de confiance dans l’action publique (Wüstenhagen et al., 2007). Par ailleurs, les processus de consultation de la population et leur implication peuvent constituer un facteur d’augmentation de l’ancrage social des ouvrages ou aménagements « soumis » à l’acceptation.

Cependant, les efforts de formalisation de l’acceptabilité sociale comme « une catégorie discursive pour

penser, évaluer et infléchir les projets d’aménagement » (Fortis et Fournis 2013) ne parviennent pas, selon

moi, à dépasser le caractère instable et ambigu de la notion. Il me semble en effet que le chercheur se trouve alors sollicité en tant qu’expert, par les institutions ou les industriels (derrière lesquels résident des logiques de marché), « afin de rendre lisibles les comportements collectifs et individuels, voire de donner les clés pour faire accepter le changement par les publics concernés » (Amalric et Cirelli, 2015). À contrario, la notion de « réception sociale », quant à elle, est dotée d’une portée heuristique plus adaptée aux projets que j’ai été amenée à analyser (notamment ceux sur les travaux de restauration écologique de la Loire et sur l’implantation d’une zone humide artificielle en sortie de station d’épuration). Elle permet d’analyser d’une manière fine, à la fois un degré d’adhésion aux principes et aux objectifs recherchés par le projet environnemental et une remise en question des objectifs affichés du projet.

En effet, au même titre que la réception d’une opération d’urbanisme (Semmoud, 2007), les projets de ZHART prennent place au sein d’un territoire et produisent des processus de recomposition, « d’aller-retour », entre les usages et les usagers présents et le projet in situ. Un projet (et les dispositifs techniques associés, dans le cas qui nous occupe ici) n’a de sens que s’il y a appropriation locale et donc « réception active » des acteurs qui investissent les territoires avec leurs pratiques et leurs activités (Semmoud, 2007) ; les conflits environnementaux en sont parfois des révélateurs (Laslaz et al., 2014 ; Ripoll, 2005). Au contraire, la conception des dispositifs de ZHART, en tant qu’objet industriel, dont la reproduction, voire la standardisation, est possible à tout endroit laissait à penser que l’acceptabilité (sic) sociale était envisagée par l’industriel comme un processus « hors-sol », non territorialisé, uniquement associé à la qualité du dispositif de traitement.

La manière dont est souvent utilisée (brandie ?) la notion d’acceptabilité sociale me semble donc relever d’une conception trop « fixiste » d’une part (acquise une bonne fois pour toute) et sous-entendre un processus a-territorialisé d’autre part (à l’image d’un modèle de zones humides artificielles pensé pour être implanté partout dans le monde). À l’inverse, la notion de réception sociale présente l’avantage d’être un concept relativement neutre (sans parti-pris) et de permettre une approche territoriale et sensible (paysage, territoire vécu, mémoire, sentiments déterminent la réception). Par ailleurs, elle intègre également d’autres dimensions de l’action : les intentions déclinées dans les politiques publiques ou les volontés des pouvoirs locaux, ainsi que toutes les intentions des acteurs de l’action sur l’environnement (usager privé, entreprises, collectifs…).

b. Réception sociale de l’action environnementale : l’injonction des politiques publiques

Les formes de réception sociale, qui découlent de l’appropriation des espaces, sont mouvantes et transformables (en fonction des usages, des temporalités, des contextes…).

La réception sociale des modes de gestion alternatifs des risques littoraux

Dans le projet LittoSIM, j’ai étudié la réception sociale des stratégies recommandées par les pouvoirs publics pour gérer le risque de submersion sur le linéaire de côtes françaises : le retrait stratégique et la défense douce (Mineo-Kleiner, 2017 ; André, Boulet, Rey-Valette et al., 2016 ; Goeldner-Gianella et al., 2013). Dans ce dispositif participatif, les joueurs sont amenés (et parfois contraints par les règles du jeu) à adapter leur gestion de la submersion et pour certains à évoluer dans leur conception du risque, voire à apprendre des modes de faire alternatifs (exproprier ou renforcer les cordons dunaires, dépoldériser, adapter l’habitat). Le jeu sérieux élaboré au cours de ce projet s’empare ainsi des recommandations ministérielles concernant les modes de gestion du risque de submersion : remise en cause du durcissement du trait de côte et du rehaussement des digues qui sont présentées comme des solutions inadaptées à la perspective du changement climatique. La plateforme LittoSIM amène les joueurs à considérer d’autres modes de gestion et à expérimenter in vitro des modes de défense « alternatifs » (Amalric et al., 2017 ; Bécu et al., 2017).

Le suivi des ateliers au cours desquels les gestionnaires de l’Île d’Oléron ont joué a montré que la réception sociale des stratégies alternatives de gestion du risque était inégale. D’une part, les mesures de défense douce, d’adaptation de l’habitat semblaient envisageables à l’issue du jeu, et la démonstration de leur intérêt n’était pas remise en question. En ce qui concerne le recul stratégique, la réception était beaucoup plus réservée. Bien qu’effectivement « jouée » au cours de la partie, les discours pendant les débriefings montraient la très forte répugnance de toutes les catégories de gestionnaires à devoir « déplacer » des populations. Ils argumentaient également en soulignant la très forte impopularité d’une telle stratégie parmi les habitants (et électeurs) de l’Île (Amalric et Beck, 2019). La question de la réception sociale des politiques de gestion des risques rejoint celle de l’« acceptabilité sociale » du risque et donc la représentation de l’environnement qui est à la base de la conception de l’existence (ou pas) d’un risque

(Rulleau, Rey-Valette, Clément, 2016 ; Blesuis, 2014 ; Gralepois, 2008 ; Glatron, 2004). Ces deux pans me semblent particulièrement cruciaux à prendre en compte de nos jours dans la gestion territoriale des risques, tant ils permettent d’intégrer la dimension sociale, culturelle, et cognitive des risques à une approche technique et d’ingénierie.

Réception sociale de la politique climatique : concevoir l’intangible ?

De manière indirecte, la notion de la réception sociale, parce qu’elle interroge les intentions de porteurs de projets et les attentes des populations à qui le projet est destiné, renvoie à la question de la subsidiarité et des modes de gouvernance bottom-up et top-down. Sans y avoir spécifiquement travaillé, j’ai tout de même montré, à une échelle locale, les difficultés de mise en application d’outils pensés pour l’action environnementale sur le climat de manière top-down (projet ADEME-PCET et projets tutorés avec des étudiants de Master2 Pro). Les difficultés tiennent principalement au caractère abstrait des plans climat-énergie territoriaux (PCET devenus PCEAT) en particulier les recommandations ou actions concrètes à mettre en œuvre (comme dans le cas des Agendas 21 dont j’ai aussi suivi l’évaluation et la mise en œuvre dans plusieurs travaux d’étudiants). Elles peuvent aussi découler du manque de visibilité des enjeux climatiques au moment de la mise en place du PCET et de la difficulté à mobiliser les acteurs en l’absence de manifestation du phénomène. J’ai pu observer que dans un territoire « banal », où le changement climatique ne se manifeste pas (ou n’est pas identifié comme tel), la traduction dans les documents réglementaires des collectivités d’actions pour prendre en compte le climat (adaptation comme atténuation) ne se fait pas sans mal (communauté d’agglomération de Dreux, Parc Naturel Régional Loire-Anjou-Touraine) (Bertrand et Amalric, 2017). La réception sociale nécessite de la part du récepteur une capacité à recevoir, au sens de décrypter, le signal. Dans l’exemple du changement climatique, les cas d’étude ont conclu à l’absence de capacité à concevoir les effets du changement climatique, faute de manifestation tangible dans le territoire du changement.

À l’idée d’évaluer la réception sociale des projets et de leur caractère novateur ou anticipateur répond donc également l’idée qu’un projet peut être conçu et proposé par le haut, par des institutions ou des acteurs « qui savent ce qui est bon » pour les populations et qui en veulent la preuve. Le questionnement de la réception montre que les représentations (et avec elles, les valeurs, les croyances et les modes d’habiter) sont toujours plus complexes qu’il n’y paraît. Aussi, s’il me paraît dangereux d’imaginer que la consultation pourrait être la clé de tout projet (faisant ainsi de tout individu une personne idoine pour décider), il me paraît également contre-productif de penser pouvoir anticiper et présupposer les représentations, les connaissances et les attentes des populations « réceptrices ».

Réception sociale de la gouvernance environnementale

En me plaçant dans le champ de la réception sociale, je me penche donc également sur la source « émettrice » des projets et aménagements que j’étudie, la source des injonctions (une collectivité pour un PCET, un industriel pour un dispositif d’éco-ingénierie). Dans le projet de recherche INTERCO sur le

déploiement des politiques d’environnement dans les intercommunalités (mené au moment d’une des phases de la décentralisation, la mise en place des intercommunalités entre 2009 et 2011), j’ai montré que les collectivités peinaient à s’emparer de problématiques environnementales nouvelles telles que le paysage, la gestion de l’eau, le climat, tandis que d’autres compétences étaient plus facilement mises en œuvre, telle que la gestion des déchets (parfois parce que plus ancienne, souvent parce que plus technique) (Amalric et al., 2011b). J’ai aussi mis en évidence les effets territoriaux de l’intercommunalité sur la prise en compte de ces thématiques, une forme d’injonction qui agit comme un émetteur d’action publique environnementale à mettre en œuvre. L’un des résultats de la recherche a montré comment les intercommunalités s’organisent entre elles à différentes échelles (multi-niveaux), de manière plus ou moins informelle (grâce à des mutualisations par exemple) et en créant ainsi des formes de solidarités entre territoires qui redessinent la territorialité de l’action environnementale (Amalric, 2011b).

La première des compétences exercées à ce jour par les communautés (hors compétences obligatoires) est la protection et la mise en valeur de l’environnement (80 % des communautés), principalement orientée vers la gestion des ordures ménagères, avec une forte progression de la collecte sélective pour des raisons réglementaires (44 % en 1999, 70 % en 2005) (AdCF, 2009). Il y a peu de différences au niveau national entre les intercommunalités rurales et les autres concernant le champ de l’environnement (AdCF, décembre 2009). En effet, avec plus de 8 communautés sur 10 concernées, les intercommunalités rurales font presque jeu égal avec les communautés du secteur urbain pour la protection de l’environnement et du cadre de vie. Trois champs principaux voient se distinguer les communautés rurales. Dans le champ de la « lutte contre la pollution », ces communautés sont peu engagées (tandis que les communautés urbaines sont plus « naturellement » engagées dans la pollution de l’air), en revanche, la mise en place de plans de prévention des inondations concerne davantage les communautés rurales intervenant dans ce domaine (70 %). Deuxième champ, l’énergie, pour lequel une communauté rurale sur cinq mène au moins une action. Ce domaine est encore peu couvert mais il connaît une forte progression depuis 2006 environ. Plus de 60 % des communautés rurales intervenant dans ce domaine le font au titre d’une zone de développement de l’éolien. La mise en place d’un plan climat n’en concerne que 10 %. Enfin, les actions menées sur le paysage sont le principal domaine d’intervention des communautés rurales en matière de protection de l’environnement et du cadre de vie. Plus de la moitié des communautés rurales mènent une action dans ce domaine (cela concerne notamment l’aménagement des sentiers et l’entretien des rivières). Un dernier champ où le taux d’intervention est identique entre communautés rurales et urbaines, est celui de la gestion des ordures ménagères (AdCF, Décembre 2009).

(Amalric et al., 2011b)

Dans le projet INTERCO43, sans étudier stricto sensu la réception sociale, j’ai mesuré que les politiques publiques, lors de leur déploiement local, peuvent faire l’objet d’une mise en application mais aussi

d’une réticence. A posteriori, je considère que ce projet éclaire la notion de réception sociale, celle d’une politique descendante, issue de la décentralisation qui transfère les compétences environnementales aux échelons locaux (l’intercommunalité se devait alors de se saisir de ces thématiques44). Les résultats illustraient bien la manière dont les arrangements locaux conduisaient à l’application de la volonté de l’État en matière d’environnement, de manière plus ou moins efficace. L’efficacité n’était pas seulement liée à des questions de moyens (en période de restriction budgétaire), mais aussi aux compétences disponibles (personnels compétents en gestion de l’eau, gestion des paysages, qualité de l’air, climat…) et à la volonté de mutualiser les personnels ou d’homogénéiser les pratiques (savoir-être entre les administrations, habitudes de travail, tradition de coopération communale). À l’heure où la question des découpages intercommunaux se pose à nouveau45, s’assurer de la bonne qualité de la réception sociale des intentions des décideurs me semble fondamental pour mesurer l’efficacité de l’agir environnemental, en particulier du point de vue des agents des collectivités territoriales, dont la sensibilité est rarement prise en considération (la gestion alternative des risques littoraux précédemment mentionnée relève de ce même redécoupage de l’exercice des compétences dans les échelons intercommunaux).

c. Dimension territoriale de la réception sociale : insertion socio-territoriale de l’agir environnemental

Face aux décalages entre injonctions publiques, aspirations citoyennes et parfois enjeux socio-économiques défendus par les firmes privées, j’ai confronté les intentions et les réalisations, en étudiant

in vivo la réception sociale de dispositifs industriels. La dimension territoriale qu’il est possible de

donner à l’étude de la réception sociale permet de proposer une lecture en termes d’insertion socio-territoriale d’un projet dans un espace donné.

Dans le projet ZHART, j’ai ainsi étudié conjointement les projets des élus et constructeurs privés de zones de rejet végétalisées (ZRV), puis procédé à l’évaluation de l’insertion socio-territoriale des ZRV en listant des critères de l’insertion socio-territoriale d’un dispositif d’ingénierie innovant (Figure 12) (Amalric, Cirelli, Larrue, 2015).

44 Loi de réforme des collectivités territoriales, 2010.

45 Loi NOTRe portant nouvelle organisation territoriale de la République, 2015, qui recompose les intercommunalités et dont

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