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La notion de handicap s’est élaborée tout au long du vingtième siècle. Si les travaux en faveur d’un modèle social du handicap ont permis de faire entrer le rôle de l’environnement dans la constitution du handicap, le terme renvoie d’abord à une catégorie administrative que deux événements contribuent à faire émerger : l’industrialisation, qui oblige les gouvernements

94 Cette notion est développée dans cette partie, au chapitre 3.1.2 : “Le langage du handicap”, p.122.

successifs à légiférer pour la protection des travailleurs et la Première Guerre mondiale, qui génère un nombre important de personnes blessées et mutilées. La loi du 9 avril 1898, relative à l’indemnisation des accidents du travail95, crée un régime spécial de responsabilité. Le salarié victime d'un accident du travail peut alors demander une réparation, sans avoir à prouver la faute de son employeur. Une nouvelle responsabilité collective est également engagée par les préjudices subis par les mutilés de guerre (CARAGLIO, 2017 : 5). Le terme

« handicap » est pour la première fois intégré dans un texte officiel par la loi du 23 novembre 195796 avec l’expression « travailleur handicapé », mais c’est avec la loi d’orientation en faveur des personnes handicapées du 30 juin 197597 que la notion s’ancre réellement en tant que concept de solidarité et d’assistance (HAMONET, 2010 : 7). Bien que la loi de 1975 constitue le socle fondateur de la notion de « handicap » pendant trois décennies en France, elle ne contribue pourtant pas à la définir (RAVAUD, VILLE, 2010 : 210). La première définition légale apparaît en 2005, par la loi du 11 février :

« Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant »98.

La prise en compte de l’environnement dans la notion de handicap révèle une évolution du regard sur le handicap, non plus perçu uniquement comme un attribut de la personne, mais comme un ensemble de situations, créées notamment par l’environnement social. Dans cette perspective, la réduction du handicap requiert une action sociale. La pleine participation à la citoyenneté des personnes handicapées impose une responsabilité sociale collective afin de mettre en œuvre les changements environnementaux. En intégrant l’environnement dans sa définition du handicap, la loi de février 2005 oriente les actions politiques en faveur d’un modèle social du handicap, développé dans la Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF) en 2001 par l’organisation mondiale de la santé (OMS), qui succède à la Classification internationale du handicap : déficiences, incapacités, désavantages (CIH), publiée en 1980 (ROUSSEL, 1999 : 7). Le modèle social, qui s’oppose au modèle biomédical, place le handicap dans une approche environnementale et non plus dans une approche individuelle. Si la CIH a permis de proposer une nouvelle

95 https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000692875&categorieLien=cid

96 https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000880746&categorieLien=cid

97 https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000333976

98 https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000809647

réflexion sur la notion de handicap, en incluant le rôle de l’environnement dans la classification, la CIF fait entrer la notion de participation et d’activité, qui « concernent tous les domaines de la vie humaine » (OMS, 2007 : 3). Dans cette perspective, il s’agit non plus de porter l’accent sur la solidarité et sur l’action publique, mais d’insister sur les droits de la personne. L’étude de l’évolution des modèles du handicap permet de comprendre les ancrages scientifiques et théoriques des deux classifications successives internationales du handicap.

3.1.1 L’individu  et  la  société  :  l’évolution  des  modèles  du  handicap   au  niveau  international  

En 1997, Marcia Rioux propose une typologie des modèles médical (ou individuel) et social du handicap, qui permet de rendre compte des oppositions entre ces deux modèles.

MODELE INDIVIDUEL MODELE SOCIAL

Le handicap comme pathologie individuelle Le handicap comme pathologie sociale

Deux variantes Deux variantes

Approche biomédicale : curative Approche environnementale : accessibilisation Approche réadaptative : fonctionnelle Approche politique : droits de l’homme

Tableau 1 : Typologie des modèles de handicap par Marcia Rioux

Chacun des modèles propose deux variantes. Selon le modèle individuel, les causes du handicap sont liées aux caractéristiques personnelles. L’approche biomédicale se concentre sur le diagnostic d’une maladie ou d’un trouble. Elle vise à guérir, réduire ou éradiquer la déficience en cause : la personne est sourde et nécessite d’être appareillée ou implantée ; l’approche réadaptative se focalise elle sur l’incapacité, la limitation d’activité : la personne ne peut pas entendre, une rééducation orthophonique en lien avec un appareillage est nécessaire. Dans le modèle social, le handicap est perçu comme une pathologie non plus individuelle, mais sociale. Les causes sont liées aux barrières physiques ou socioculturelles qui font obstacle à la participation sociale et la citoyenneté des personnes. L’apprentissage de la langue des signes – par la mise en place de modèles éducatifs bilingues à destination des élèves sourds, et l’accessibilité dans les services notamment – fait partie des moyens permettant de briser les obstacles à la participation sociale et la citoyenneté des personnes.

Dans ce modèle, deux approches se distinguent et sont complémentaires. L’approche environnementale pose ainsi le handicap en terme d’aménagement de l’environnement et de mise en accessibilité : les services (banque, poste, mairie…) sont inaccessibles aux sourds ; la présence d’interprètes en langue des signes, de codeurs LPC ou d’une transcription écrite peut permettre l’accessibilité. L’approche politique pointe quant à elle les inégalités en termes de

droits de l’homme et du citoyen : les sourds doivent pouvoir jouir d’une pleine participation citoyenne.

Cette typologie des approches, médicale, fonctionnelle, environnementale et politique, rend compte de la diversité des orientations de traitement du handicap, qui dans une volonté de compréhension du handicap, suppose une prise en compte de chacune de ces approches, individuelles et sociales, et non plus uniquement d’une seule de ces approches.

Synthétisée par Rioux (1997), et portée notamment par les travaux de Minaire (1976) en France, qui définit le handicap en tant que handicap de situation, et plus tard les travaux de Fougeyrollas au Québec99, qui propose une position de compromis en définissant la situation de handicap plutôt que le handicap de situation, l’approche sociale du handicap se développe dans les années quatre-vingts et trouve un soutien et une légitimation de la part de l’ONU (BARRAL, 2007 : 238). Jusque dans les années soixante-dix, les recommandations de l’ONU visent principalement la réadaptation et le soin des personnes handicapées. Dans les années soixante-dix, la notion de droits fondamentaux des personnes handicapées commence à être plus largement admise sur le plan international et l’ONU adopte en 1975 la Déclaration sur les droits des personnes handicapées100, qui définit des normes pour une égalité de traitement et l’accès à des services permettant d’accélérer l’insertion sociale des personnes handicapées101. Parallèlement, l’organisation mondiale pour la santé commande dès les années soixante-dix des travaux pour une classification des « conséquences invalidantes des maladies ». Les travaux de Wood aboutiront en 1980 à la classification internationale des handicaps, qui rend compte pour la première fois des conséquences sociales des déficiences par l’introduction de la notion de désavantage social.

3.1.1.1 1980   -­‐   International   Classification   of   Impairments,   Disabilities   and   Handicaps    

Traduite en français sous le nom Classification internationale des handicaps : déficiences, incapacités, désavantages en 1988, la CIH (1980) fait une place aux conséquences sociales des déficiences et incapacités et met en évidence le volet non médical de la question du handicap (RAVAUD, 1999 : 67). Les conséquences de la Seconde Guerre Mondiale amènent à la création de nouveaux instruments d’enregistrement de l’état de santé des populations. À

99 Fougeyrollas définit la situation de handicap comme « une limitation des habitudes de vie d’un individu découlant d’une interaction entre des facteurs personnels (déficiences, incapacités) et les facteurs environnementaux agissant comme facilitateurs ou obstacles » (cité dans RAVAUD, 1999 : 72).

100 http://www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=A/RES/3447%20(XXX)

101 http://www.un.org/fr/rights/overview/themes/handicap.shtml

cette période, « la Classification internationale des maladies [CIM] s’avère en effet insuffisante à rendre compte des problèmes de santé chroniques et des incapacités fonctionnelles liées aux séquelles de maladie, aux maladies d’étiologie encore inconnue, aux accidents, au vieillissement » (BARRAL, 2007 : 234). Dans les années soixante-dix, l’organisation mondiale de la santé commande des travaux pour que soient établies une définition et une classification des « conséquences invalidantes des maladies », fournissant un langage uniformisé et normalisé pour rendre compte des conséquences du handicap. La CIH se construit autour de trois niveaux d’expérience du handicap : la déficience, l’incapacité, le désavantage :

Figure 2 : Schéma de Wood pour la classification internationale des handicaps – 1980

La déficience, auparavant appelée infirmité, est identifiée par une atteinte, une « perte de substance ou une altération physiologique, anatomique ou mentale, provisoire ou définitive : elle peut donc se situer au niveau intellectuel, verbal, comportemental ou sensoriel, moteur ou viscéral » (EBERSOLD, 1997 : 18). Elle correspond à l’aspect lésionnel ou médical du handicap, peut être provisoire ou définitive et n’implique pas forcément que l’individu soit considéré comme malade. À partir de cette classification on a catégorisé les sourds en tant qu’handicapés, moins en tant que malades qu’en tant que porteurs d’un organe déficient.

L’incapacité, qui remplace la notion d’invalidité constitue le deuxième niveau. Elle est définie comme toute réduction, partielle ou totale, de la capacité à accomplir une activité d’une façon considérée comme « normale » pour un être humain (JOVER, 2014 : 12).

L’incapacité résulte d’une déficience, elle objective les perturbations qui en résultent. Ce niveau constitue l’aspect fonctionnel du handicap. Une déficience auditive peut être responsable d’une incapacité à entendre, parler et plus tard communiquer sous la forme orale-vocale. La notion d’activité normale n’est pas définie dans cette classification et peut faire l’objet d’une interprétation plus ou moins aléatoire. Dans le cas de la surdité, les orientations des modèles individuel et social donnent à voir par exemple les interprétations diverses de la notion d’activité normale de communication. Dans une visée anthropologique

Maladie Déficience Incapacité Désavantage

Extériorisation Objectivation Socialisation

1 2 3

Handicap Situation

intrinsèque

andic

de la surdité, la langue des signes permet une activité normale de communication quand la visée déficitaire préconise compensation et rééducation orale-vocale (à travers l’appareillage).

Le troisième niveau du handicap, le désavantage, correspond au handicap à proprement parler. Il résulte de l’un des deux niveaux supérieurs : une déficience ou une incapacité qui

« limite ou interdit l’accomplissement d’un rôle normal en rapport avec son âge, son sexe, compte tenu des facteurs sociaux et culturels qui lui sont propres. Ce niveau constitue l’aspect situationnel du handicap. » (JOVER, 2014 : 12) Le handicap peut alors porter sur l’indépendance interactionnelle dont la limitation implique la dépendance à une tierce personne. C’est dans ce cadre que l’on considère par exemple le recours aux interprètes français - langue des signes française comme « aides humaines » dans la prise en charge de la surdité en France au nom du droit à la compensation, présent dans les textes de la loi de 2005 pour le handicap.

« En France, cette classification reçoit un accueil particulièrement favorable, ce qui s’explique par le fait que le découpage conceptuel et l’enchaînement causal qu’elle propose confirment (en sa qualité de norme internationale) l’organisation de nos politiques publiques de santé et d’action sociale et notre système institutionnel de prise en charge des personnes handicapées, fondé en premier lieu sur l’identification diagnostique de la déficience : le champ hospitalier et médical se chargeant du traitement de la déficience, le champ médico-social et son équipement institutionnel traitant la rééducation des incapacités, le système de compensation (allocation aux adultes handicapés, allocation d’éducation spéciale) constituant la réponse au désavantage social » (BARRAL, 2007 : 235).

Dans le contexte de la surdité, ce découpage conceptuel et l’enchaînement causal qui en découle rappellent la filière de soin mise en place dans le cadre du dépistage néonatal de surdité : le champ hospitalier et médical se chargeant du traitement de la déficience de surdité par la systématisation du dépistage en maternité et l’implantation cochléaire rendue quasiment systématique à l’annonce d’un diagnostic de surdité102 ; le champ médico-social et son équipement institutionnel traitant la rééducation des incapacités, par une prise en charge immédiate après l’annonce du diagnostic et par l’intervention d’orthophonistes, psychologues, éducateurs spécialisés ; le système de compensation proposé par les systèmes d’évaluation des MDPH constituant la réponse au désavantage social103. « C’est également sur la base de la CIH, dans la même logique diagnostique et médicale, qu’est établi en 1993, le guide-barème des déficiences, permettant de déterminer les taux d’invalidité et d’éligibilité aux prestations

102 Cf. chapitre 3.2.2.2 : “Filière de soin de la surdité ”, p.138.

103 Cf. chapitre 3.2 : “Prise en charge et gestion administrative du handicap”, p.127.

sociales » (BARRAL, 2007 : 235). Ce guide-barème des déficiences consiste à évaluer les conditions permettant d’accorder ou non à une personne une ou des prestations104.  

Si, avec l’introduction du « désavantage social », la CIH entend substituer au classique modèle curatif, un modèle réadaptatif qui abandonne l’idéal de guérison pour une mobilisation des capacités restantes de l’individu (RAVAUD, 1999 : 67), le modèle individuel (ou médical) est malgré tout encore omniprésent. En effet, le schéma de Wood repris par l’OMS induit une relation linéaire de cause à effet entre les déficiences et les désavantages.

La maladie ou le trouble conduit à la déficience, qui produit l’incapacité, révélant le désavantage social. L’expérience négative des personnes est expliquée par leurs attributs personnels. Dans son article De la CIH à la CIF (2003), Franck Jamet synthétise la prégnance de l’orientation biomédicale de la CIH. Dans ce modèle :

Seule la maladie [ou le trouble] engendre le handicap (ROUSSEL, 1999) ;

Même si des recommandations sont faites pour que les trois dimensions qui composent le handicap ne soient pas prises dans une relation causale, sa conception, sa représentation l’induit (Ibid.) ;

Les dimensions qui décrivent le handicap sont toutes fortement liées à la personne (BARRAL, 1999) ;

Ce sont les manques qui qualifient la personne handicapée par une approche défectologique (JAMET, 2003);

Les éléments qui permettent d’appréhender le désavantage sont très peu développés en comparaison aux pages entières dédiées à la déficience (ROUSSEL, 1999) ;

Les références à l’environnement dans lequel la personne handicapée se trouve sont généralement absentes (Ibid.).

Les principales critiques portent précisément sur le lien de causalité « qui met au compte des seules caractéristiques déficitaires de la personne la “responsabilité” du désavantage social qu’elle subit. Corollairement, il est reproché à la classification son insuffisante prise en compte du rôle de l’environnement » (BARRAL, 2007 : 236). La perspective sociopolitique, pourtant introduite par la notion de désavantage social dans le processus du handicap, est également jugée insuffisante.

La CIH définit en effet un lexique nouveau dans le domaine du handicap, par l’entrée de notions telles que la déficience, l’incapacité, le désavantage, permettant selon les auteurs de

104 Cf. chapitre 3.2.1.1 : “Le guide-barème pour l’évaluation des déficiences”, p.133.

fournir « un cadre conceptuel », dont les concepts doivent être définis « indépendamment d’une langue particulière », la CIH ayant pour vocation un « langage uniforme » dans le champ de la santé. Les auteurs mettent néanmoins en garde contre l’utilisation des significations du sens commun dans une langue particulière, qui induit des possibles confusions. En 1998, une journée d’étude consacrée eux enjeux de la CIF est organisée par le CTNERHI (Centre technique national d’études et de recherches sur les handicaps et les inadaptations), alors centre collaborateur de l’OMS. L’objectif est d’apporter de nouveaux éléments de réflexion en vue d’une révision de la CIH, qui aboutira en 2001 à la création de la CIF. La pertinence des choix conceptuels de la CIH-2 – le nom provisoire de la CIF – est analysée par Christian Rossignol (1999), qui y démontre l’absence de « concepts conformes à la définition à laquelle elle se réfère ». Le concept d’activité, associé au fonctionnement, qui doivent servir de socle à la nouvelle classification, sont ainsi analysés :

Définition : l’activité est la nature et l’étendue du fonctionnement au niveau de la personne. Les activités peuvent être limitées en nature, durée et qualité. (ROSSGNOL, 1999)

Selon l’analyse de Rossignol, dans cette phrase, nature et étendue sont des modalités qui ne définissent pas ce qu’est l’activité. Pas plus d’ailleurs que le fait d’écrire : « les activités peuvent être limitées en nature, durée et qualité » ne définit ce qu’est une activité. Ces éléments ne font pas partie pour lui de l’analyse, « qui se réduit donc à la proposition suivante : “l’activité est le fonctionnement au niveau de la personne” » (ROSSIGNOL, 1999 : 46). L’analyse mentionne que cette définition n’énonce ni les propriétés communes aux catégories de la classification des activités, ni ne définit un concept. Rossignol pointe également l’absence de signification précise du terme fonctionnement, qui n’est pas non plus défini et est utilisé selon les auteurs de la proposition de révision de la CIH comme

« le terme générique pour englober les aspects neutres des dimensions de la ICIDH [en français CIH] » (Ibid.) Autrement dit « l’activité est définie comme une “dimension du fonctionnement” et le fonctionnement comme le terme générique englobant les “dimensions”

du fonctionnement, c’est-à-dire de façon tautologique » (Ibid.).

La révision de la classification, davantage orientée sur l’interaction entre l’individu et l’environnement, et définissant les nouveaux concepts du handicap, est engagée. Le handicap ne doit pas être défini par les caractéristiques individuelles des personnes, mais plutôt par l’ensemble des limitations physiques ou socioculturelles faisant obstacle à la citoyenneté des personnes handicapées. En ce qui concerne les mises en garde avancées par Rossignol

concernant l’absence de définition des concepts de la classification, nous verrons que ces recommandations ont été prises en compte de manière parcellaire dans l’élaboration de la CIF.

3.1.1.2 2001  -­‐  International  Classification  of  Functioning  Disability  and  Health   En 1995, l’OMS engage un processus de révision de la CIH, afin que la nouvelle classification rende davantage compte, non seulement du rôle de l’environnement, mais également « de l’expérience humaine face à un problème de santé, dans sa complexité individuelle et sociale » (BARRAL, 2007 : 240).Le handicap devient une question publique et une affaire collective et ne relève plus uniquement de spécialistes de la santé. Contrairement à la CIH, élaborée à partir des travaux d’experts institués du handicap (presque exclusivement des médecins), l’élaboration de la CIF fait intervenir divers acteurs du champ du handicap.

Les personnes handicapées elles-mêmes sont sollicitées, de même que des éducateurs, sociologues, représentants associatifs, dans la rédaction de cette nouvelle version. La CIF fait entrer le concept du handicap dans un paradigme interactionniste entre la personne et l’environnement. Dans l’introduction à la CIF, la santé est distinguée à travers deux composantes : les domaines de la santé tels que la vision, l’audition, la marche, l’apprentissage et la mémoire ; et les domaines connexes de la santé, comme la mobilité, l’éducation, les interactions en société. Les frontières entre ces deux composantes restent difficiles à appréhender et le texte n’apporte pas d’indication quant aux limites de chacune des composantes. Une des nouveautés de cette classification concerne également les personnes représentées par la CIF :

« Un malentendu largement répandu consiste à penser que la CIF ne concerne que les personnes handicapées : en fait elle concerne tout un chacun. Les états de santé et les états connexes de la santé, à quelque pathologie qu’ils se réfèrent, peuvent être décrits au moyen de la CIF. En d’autres termes, la CIF est d’application universelle » (OMS, 2007 : 7).

Les auteurs de la classification écartent l’idée d’une attention spéciale portée aux personnes dites handicapées, au profit d’une attention universelle portée à tous (CHAPIREAU, 2001 : 43).

La CIF est constituée de deux parties, comprenant chacune deux composantes:

La CIF est constituée de deux parties, comprenant chacune deux composantes: