• Aucun résultat trouvé

La notion de conflit

Dans le document Harcèlement au travail (Page 117-121)

,

1. Définition

Le conflit peut être défini comme un antagonisme, une opposition de sentiments d'opinions entre des personnes ou des groupes.

Le conflit est une construction de la réalité dans laquelle les parties:

a) nourrissent des buts ou des objectifs opposés, b) ont des intérêts ou des besoins opposés, c) défendent des valeurs contradictoires,

d) poursuivent un même but incompatible, par exemple veulent s'approprier la même chose,

e) poursuivent un même objectif, mais ne sont pas d'accord sur la manière de le réaliser.

Le conflit interpersonnel peut être considéré comme «un événement joué par des acteurs interdépendants poursuivant des buts différents ou

5 Ruben TOUZARD, La médiation et la résolution des conflits, PUF 1977, p. t55.

LA MÉDIATION DANS LES CONFLITS INTERPERSONNELS 115

se percevant comme tels»6. 11 peut exister entre deux personnes ou entre une personne et un groupe ou entre deux groupes.

2. Source et objets du conflit

Nos différences, quelles qu'elles soient, sont source de conflit. La gestion de celui-ci est d'autant plus difficile dans un contexte de stress ou de forte compétitivité, situations qui se rencontrent fréquemment dans la vie professionnelle.

Le conflit peut porter sur les données (consister en un problème d'information, d'évaluation ou d'interprétation différente).

Il peut concerner les valeurs (critères différents d'évaluation, d'idéologie, etc.), les intérêts (compétitivité), les relations (communica-tion déficiente, mauvaises percep(communica-tions) et les structures (déséquilibre des pouvoirs)1.

3. Universalité du conflit

«Les conflits se retrouvent dans toutes les sphères de l'activité humaine»8.

Alors que le conflit a souvent eu une connotation négative, «la conception moderne des conflits préconise la nécessité du conflit comme un élément de la qualité de vie de l'organisatioD»9.

L'existence du conflit est la conséquence inévitable du fait que les individus sont différents. C'est de la confrontation que naissent les changements. Une société sans affrontement serait totalement figée et dans l'incapacité de se remettre en question et par conséquent d'évoluer.

«Même si les situations de conflit sont coûteuses et douloureuses pour une entreprise, tout le monde s'accorde à reconnaître leur utilité. A l'origine, il y a une nécessité de changement; un ancien système de fonctionnement doit être détruit pour en reconstruire un autre. Un conflit est source de renouvellement et de réorganisation en obligeant à

6 LEVESQUE, p. 43.

7 LEVESQUE, p. 46.

8 LEVESQUE, p. 41.

9 LEVESQUE, p. 43.

116 Francine COURVOISIER

se remettre en question et à fonctionner sous des fonnes nouvelles. Il permet de mobiliser les énergies et de rassembler les personnes, de modifier les alliances, de sortir de la complexité, et surtout d'apporter un peu d'animation et de nouveauté dans des contextes professionnels trop routiniers 10.» Dans cette optique, le conflit ne doit être ni évité ni supprimé, mais plutôt géré avec efficacité. «La reconnaissance du conflit est le premier pas vers une gestion efficace de celui-cill.» En effet, un conflit appréhendé et géré est source de changement et occasion de dépassement. C'est dans cette perspective que se situe la médiation. En d'autres termes, ,da médiation veut mettre en lumière l',<opportunité» du conflil»12.

4. Différentes attitudes face au conflit

Face à un conflit, il existe différentes attitudes possibles qui vont de l'évitement ou de la fuite à l'usage de la violence.

Pour certains, tout vaut mieux que de reconnaître l'existence d'un conflit. Ils font comme si celui-ci n'existait pas, vraisemblablement soit par peur de la confrontation, soit par stratégie pour gagner du temps ou encore pour regrouper leurs forces avant.de réagir.

D'autres encore, tout en reconnaissant l'existence d'un conflit, en minimisent l'importance ou ne font rien. Ils ont tendance à calmer, à harmoniser. Or à ne pas affronter le conflit, on ne règle rien et le conflit a de fortes chances de dégénérer et de s'amplifier et de conduire à une somatisation.

Au sein des entreprises, les attitudes les plus courantes restent encore la fuite et l'évitement. «Les conflits s'étendent et dégénèrent sans réso-lution parce que nos systèmes éducatifs nous ont appris à en avoir peur.

On veut à tout prix communiquer, même s'il s'agit d'un faux dialogue, pour éviter la violence ouverte que l'on craint de ne pas savoir juguler.

On n'affirme pas ses positions, on échappe dans une pseudo-acceptation,

10 Marie-France HIRIGOYEN. Malaise dans le travail, Harcèlement mornl, Démêler le vrai du faux, Syros, Paris 2001, p. 19.

11 LEVESQUE, p. 44.

12 Annie BABU in: Médiation familiale, Regards croisés et perspectives, ouvrage collectif, Erès 1997, p. 53.

LA MÉDIATION DANS LES CONFLITS INTERPERSONNELS 117

quitte à passer son point de vue de manière insidieuse»13. Dans ce cas, il existe le risque d'un passage à des procédés de harcèlement moral.

Une autre forme d'évitement du conflit consiste à le détourner en invoquant d'autres causes, par exemple le stress, le travail. On désigne un bouc émissaire, ce qui permet de ne pas affronter le conflit réel.

A l'inverse, certains ont tendance à réagir par l'escalade en combat-tant, en exagérant le conflit et en l'exacerbant, ce qui leur permet de régler toutes sortes de comptes. Le conflit est abordé dans une perspec-tive de gagnant-perdant. Il n'est pas géré avec l'autre mais à son détri-ment, dans le but d'être le vainqueur.

Il peut y avoir des bénéfices à la persistance du conflit. Par exem-ple, en cas de divorce, les procédures contentieuses interminables n'ont souvent pas d'autre enjeu que de permettre la continuation du lien.

Mieux vaut une relation conflictuelle que pas de relation du tout.

Les attitudes décrites ci-dessus se retrouvent lorsque le conflit n'a pas été géré sur le mode de la concertation.

Une autre attitude, que préconise la médiation, est d'entrer dans le conflit de manière respectueuse et ouverte, ce qui aboutira vraisembla-blement à une régulation efficace de ce dernier. En favorisant une ambiance de coopération et une communication directe entre les parties, la médiation a précisément pour objectif de permettre aux individus de ne pas éviter les conflits et de traiter leurs divergences sans pour autant rompre leurs liens de manière définitive. Par l'élaboration de problèmes communs à régler, il s'agit de trouver une solution avec l'autre mais pas contre lui.

5. Modes de régulation des conflits

Entre la non-reconnaissance du conflit et son évitement, d'une part, et l'utilisation de la force et de la violence, d'autre part, il existe des modes de régulation des conflits que l'on peut regrouper en deux caté-gories distinctes selon qu'ils font appel aux ressources de personnes extérieures au conflit ou qu'ils s'en remettent aux ressources mêmes des protagonistes.

Ainsi l'arbitrage, l'autorité administrative, légale ou judiciaire font partie de la première catégorie. Ici la résolution du conflit appartient à

13 HIRIGOYEN. p. 20.

118 Francine COURVOISIER

l'arbitre, au juge, à l'autorité administrative qui ont le devoir de trancher dans un sens ou un autre. La décision n'appartient plus aux protagonistes.

La discussion non officielle, la négociation directe ou par représen-tants auxquels les parties délèguent le pouvoir de les représenter et la médiation laissent par contre aux parties la gestion de leurs conflits. Les liers éventuels n'ont ici aucun pouvoir quant à la solution du litige.

Celle-ci est laissée à la seule appréciation des parties elles-mêmes dans les limites du cadre légal.

Dans le document Harcèlement au travail (Page 117-121)