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Des normes sanitaires drastiques

Dans le document RAPPORT D’INFORMATION (Page 59-63)

B. L’INCINÉRATION : UN TABOU À LEVER

2. Des normes sanitaires drastiques

et 2004, de sorte que la moitié des tonnages incinérés le sont dans des installations de plus de 20 ans. A contrario, les installations les plus récentes sont capables de traiter des quantités de déchets plus importantes que par le passé ;

3) par des installations anciennes orientées vers la valorisation thermique, alors que les installations récentes ont favorisé la valorisation électrique.

proximité d’unités d’incinérations d’ordres ménagères (UIOM) d’ancienne génération (cf. infra).

S’il n’appartient pas à votre rapporteur de rétablir la chronique complète des événements ayant conduit à ternir l’image de l’incinération, à tout le moins peut-il souligner le trouble durable que l’affaire des

« dioxines » a suscité dans l’opinion, et qu’illustre encore la différence de perception dont ce mode de traitement fait l’objet entre la France et l’étranger. Ainsi :

1) en Allemagne, des oppositions locales à la création d’incinérateurs se manifestent mais il existe un consensus entre les grands groupes politiques et les associations aux termes duquel l’incinération est perçue comme un bon élément de la politique énergétique. Dès 2005, le ministre vert de l’environnement, Jürgen Tritten, a rendu publiques toutes les expertises permettant de dissiper les doutes sur les conséquences sanitaires de l’incinération ;

2) en Suède, les représentants du Riksdag rencontrés à Stockholm ont confirmé à votre mission que l’incinération ne faisait plus débat depuis qu’une concertation nationale avait permis de lever les incertitudes quant à ses retombées sanitaires ;

3) en Belgique, la mesure en continu des dioxines a considérablement atténué les oppositions à l’incinération.

b) Une adaptation des normes et des technologies minimisant l’impact sanitaire des équipements récents

Devant la persistance de discours alarmistes sur les effets de l’incinération sur la santé publique, votre rapporteur a jugé nécessaire de rappeler en quoi les réglementations actuelles garantissaient la maîtrise de l’impact sanitaire des installations et dans quelles mesures les expertises les plus récentes confirmaient ce diagnostic.

Ainsi que le rappelle le Plan d’actions déchets 2009-2011, les usines d’incinération sont désormais réglementées par l’arrêté ministériel du 20 septembre 2002 relatif aux installations d’incinération et de co-incinération des déchets non dangereux et aux installations incinérant des déchets d’activités de soins à risques infectieux1. Cet arrêté prévoit :

1) des mesures strictes pour traiter les fumées des usines d’incinération2 ;

1 Texte pris pour transposer en droit national la directive européenne du 4 décembre 2000 relative à l’incinération des déchets.

2 Les gaz issus de la combustion de déchets doivent être portés à 850°C pendant deux secondes pour détruire les polluants organiques et font l’objet d’une filtration et d’un traitement. Par ailleurs, des traitements des fumées performants, à plusieurs étages, sont installés dans tous les incinérateurs. Différents procédés sont utilisés : lavage des fumées, filtre, charbon actif…

L’ensemble de ces techniques permet de traiter avec efficacité différents types de polluants :

2) des valeurs limites d’émissions des gaz dans l’atmosphère pour les principaux polluants, traduisant les dispositions des directives européennes (cf. tableau)1 ;

3) un suivi de la présence éventuelle des dioxines et des métaux lourds dans l’environnement des installations. Ce suivi, unique en Europe, consiste, pour chaque exploitant, à mettre en œuvre un programme de surveillance de l’impact de l’installation, dont les résultats font l’objet d’un rapport annuel et sont présentés aux commissions locales d’information et de surveillance (CLIS).

Concentrations moyennes journalières avant traitement de fumées, et valeurs maximales d’émission selon les directives de 1989 et de 2000

Avant traitement Directive 89/369/EEC

Directive 2000/76/EC Polluant

mg/Nm3 mg/Nm3 mg/Nm3

Poussières 4 000 30 10

HCl 750 50 10

HF 5 – 10 2 1

SO2 250 300 50

CO < 50 100 50

TOC < 10 20 10

NOx 400 - 200

Hg 0,5 0,2 0,05

Cd

Tl 2 (Cd) 0,2 (Cd) 0,05

Source : Association des Cités et Régions pour le recyclage et la gestion durable des ressources, Déchets municipaux en Europe. Vers une société européenne du recyclage

Enfin, en tant qu’installation classée pour la protection de l’environnement, toute demande d’exploitation d’incinérateur doit être

particules (qui souvent portent les métaux lourds), gaz divers, micro-polluants organiques comme les dioxines.

1 Sur ce point, votre mission relève que certains contempteurs de l’incinération dénoncent le nombre insuffisant des substances contrôlées à la sortie des cheminées. Selon le groupe TIRU,

« Les émissions contrôlées au niveau de la cheminée en continu sont les poussières, le monoxyde de carbone, l’acide chlorhydrique, l’acide sulfurique, les oxydes d’azote et le carbone organique total et par prélèvement ponctuel pour les dioxines et les métaux lourds. Bientôt les dioxines feront l’objet d’un prélèvement en continu. Toutes les substances chimiques ne peuvent pas être mesurées mais comme l’a précisé le Professeur Narbonne qui a été le premier à alerter sur les dioxines en France, contrôler les dioxines qui sont les composés les plus toxiques et les plus stables est un bon indicateur de l’ensemble des substances qui pourraient concerner l’exposition humaine ».

précédée d’une évaluation des risques sur la santé des populations (ERS) portant sur l’ensemble des rejets de l’installation et estimant leur impact sur la santé des populations riveraines.

Au total, plusieurs personnalités auditionnées par votre mission ont insisté sur le caractère drastique de ces normes. Selon les représentants du groupe TIRU, « Non seulement les normes sanitaires (françaises) sont comparables (aux autres normes européennes) mais la France est maintenant en avance en matière de surveillance et de contrôle. La France est le seul pays à avoir prévu dans sa réglementation une surveillance de l’impact dans l’environnement autour de l’usine. Elle sera également la seule, avec la Belgique, à imposer le prélèvement en continu des dioxines sur toutes les usines ».

Dans le même esprit, les représentants du groupe CNIM confirment que « les standards français en termes d’incinération sont tout à fait comparables à ceux des autres pays européens ». Ils indiquent, en outre, que le projet européen de directive sur les émissions industrielles ne prévoit pas, à ce stade, de durcir les valeurs d’émissions fixées par la directive sur l’incinération, et que la volonté de la Commission serait plutôt d’aligner l’ensemble des normes d’émissions industrielles sur les standards très élevés applicables aux UIOM.

La sévérisation des normes applicables et la mise en conformité des installations ont permis de diminuer considérablement les quantités de polluants émis par les incinérateurs. Ainsi, de 1995 à 2006, « les émissions de dioxines par les incinérateurs d’ordures ménagères ont été divisées par un facteur supérieur à 100, passant de 1090 grammes en 1995 à 8,5 grammes en 2006, alors même que la quantité de déchets incinérés a augmenté au cours de la même période.

« Parallèlement, les émissions de métaux ont également fortement diminué. Les émissions de mercure ont, par exemple, été divisées par 7 depuis 1995, grâce à l’amélioration du traitement des fumées des incinérateurs, mais aussi parce que les ordures ménagères contiennent désormais moins de mercure. En 1995, les émissions de mercure par les incinérateurs d’ordures ménagères représentaient 37 % des émissions totales de mercure dans l’atmosphère. Aujourd’hui, elles ne représentent plus que 9 % de ces émissions, soit 0,7 tonne. (Enfin), les émissions de plomb par les incinérateurs sont estimées à 5 tonnes en 2006 (soit 4 % des émissions totales) contre 72 tonnes en 1995 »1.

Corrélativement à cette diminution des émissions, l’impact sanitaire des installations de nouvelle génération a été considérablement réduit :

1) en France, les enquêtes épidémiologiques conduites par l’InVS ont abouti à la conclusion que, compte tenu des nouvelles normes, les installations

1 Plan d’action déchets 2009-2011.

récentes ne présentaient pas de risques significatifs pour la santé1. Ce constat a, au demeurant, conduit l’institut à recommander la réorientation de l’effort de recherche sur « d’autres sources de pollutions industrielles moins réglementées »2 ;

2) en Allemagne, le ministère de l’environnement indiquait, dès 2005, que « l’incinération des déchets n’est plus du tout significative en matière d’émissions de dioxines, de poussières et de métaux lourds »3 ;

3) au Royaume-Uni, l’agence de protection de la santé établissait, dans un rapport « Municipal Solid Waste Incineration » de novembre 2005, que « les études épidémiologiques et d’évaluation des risques sanitaires montrent le faible impact des émissions des incinérateurs d’ordures ménagères aux nouvelles normes européennes »4.

Au total, votre rapporteur constate que la maîtrise des impacts sanitaires des nouvelles installations d’incinération a été rigoureusement démontrée. Le soupçon qui pèse encore sur ce mode de traitement dans l’opinion apparaît donc d’autant plus irrationnel que, dans le même temps, d’autres risques potentiels associés à des équipements de grande consommation sont ignorés. Ainsi de certaines chaudières à bois qui, selon le professeur Jean-François Narbonne, émettent proportionnellement davantage de particules que les UIOM5, et n’en bénéficient pas moins d’incitations fiscales fondées sur leurs prétendues vertus environnementales…

Dans le document RAPPORT D’INFORMATION (Page 59-63)