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Nombre de cours donnés, proportion des professeurs dégrevés et raisons d’être principales

dégrèvements (année universitaire 2002-2003)

Dans cette quatrième partie, nous présentons d’abord le nombre de cours donnés par les professeurs; nous poursuivons ensuite en décrivant la proportion des professeurs ayant obtenu un ou des dégrèvements d’enseignement pour consacrer plus de temps à d’autres tâches et nous dégageons les principales raisons pour lesquelles ces dégrèvements ont été accordés. Nous analysons enfin la variation observée chez les professeurs quant au nombre d’heures consacrées à la prestation de cours, selon le type d’établissement, le domaine d’enseignement et de recherche, le sexe et l’étape de la carrière.

Entre autres choses, l’enquête de 1991 a permis d’identifier deux phénomènes : 1) les professeurs assuraient, en moyenne, sur une base annuelle, 3,25 cours et non 4 cours comme le veut la charge nominale d’enseignement; 2) plus de 40 % des professeurs avaient obtenu, durant l’année universitaire 1990-1991, au moins un dégrèvement d’enseignement pour se consacrer à d’autres tâches. Ces données n’ont jamais été contestées. Elles ont

suscité cependant de l’émoi tant au sein du monde universitaire qu’au gouvernement et chez ceux qui portent une attention particulière aux affaires universitaires. Certains semblaient alors découvrir que la tâche réelle d’enseignement était moins importante que la tâche nominale mais, surtout, qu’elle était, à la suite principalement de dégrèvements, fortement modulée, c’est-à-dire d’importance variée selon les professeurs.

Pourtant, ces données n’auraient pas dû surprendre. Le nombre de cours donnés par les professeurs pendant une année est d’abord fixé par des conventions collectives ou par des traditions des établissements et des facultés. Dans certains systèmes universitaires, plus de cours sont donnés par les professeurs dans les établissements moins développés en

matière de 2e et 3e cycle et de recherche; dans d’autres, plus de cours sont aussi

donnés par les professeurs chaque année dans certains domaines, comme les arts, les humanités, les sciences sociales, etc., alors que moins de cours sont donnés par les professeurs en sciences médicales, en sciences pures et en sciences appliquées. Mais les pratiques ne sont pas partout les mêmes : dans d’autres systèmes universitaires, des conventions collectives, des ententes bipartites, des contrats de travail ou des traditions, depuis longtemps établies, fixent de la même manière la charge nominale de cours des professeurs, indépendamment de l’état de développement des établissements et du domaine d’enseignement et de recherche. Ces divers choix se basent sur des traditions habituellement bien établies. En fait, au cours d’une année universitaire, les professeurs sont soumis à des normes préétablies quant au nombre de cours qu’ils doivent donner, mais peuvent être dégrevés, par la suite, d’une partie de ces cours, soit ex-officio, soit sur demande, pour se consacrer davantage à d’autres tâches. Le nombre de cours est donc fixé par des conventions collectives ou par des règles d’établissements ou facultaires en grande partie imposées aux professeurs, qui peuvent cependant, dans plusieurs universités, rapporter, d’une session à l’autre et même d’une année à l’autre, certains cours, mais qui ont tout de même à assurer à moyen terme une tâche fixe d’enseignement. C’est d’ailleurs, à notre connaissance, la seule contrainte qui est imposée directement aux professeurs dans la définition de leur charge de travail, seuls quelques doyens et gestionnaires institutionnels échappant complètement à l’exigence annuelle d’enseignement. C’est dire que la tâche d’enseignement des professeurs est fortement modulée et que cette modulation, contrairement à ce que l’on entend souvent dire, est de nature organisationnelle, c’est-à-dire non fixée par les professeurs, mais régie par des conventions collectives et des règles d’établissements. Le professeur reste naturellement libre de prendre ou non un dégrèvement et, sa tâche d’enseignement remplie, de consacrer

Dans le questionnaire de 2003, les professeurs étaient appelés à indiquer directement le nombre d’heures qu’ils consacraient à leur prestation d’enseignement, à chacune des trois sessions de l’année universitaire 2002-2003. Il nous a suffi d’additionner les données colligées pour obtenir le nombre d’heures par année ayant été consacrées par les professeurs à la prestation de cours et de diviser ces heures par trois pour obtenir le nombre de cours.

Le Tableau 5.5 présente les données colligées au sujet du nombre de cours donnés et du nombre de professeurs dégrevés en 2002-2003. Il permet aussi de comparer ces données avec celles rapportées lors de l’étude de 1991. Durant l’année universitaire 2002-2003, les professeurs ont assuré, en moyenne, 3,25 cours (N = 903). Nous avons déjà expliqué, en introduction à ce chapitre, la raison d’être de ce faible N. De plus, si l’on analyse, à l’aide du Tableau 5.2, la distribution des professeurs quant au nombre de cours donnés, on découvre que 27 % seulement des professeurs disent avoir donné quatre cours, alors que 13,4 % disent avoir fait cinq cours et 9 %, six cours, soit le maximum attendu le modèle retenu. À l’autre extrémité, 11 % des professeurs disent avoir donné seulement un cours, 17,5 %, deux cours, et 22 %, trois cours. C’est dire comment le nombre de cours donnés est modulé. Il est de plus probable que cette moyenne aurait fléchi légèrement si notre échantillon avait inclus les directeurs de département.

Ce sont aussi 38 % des professeurs qui ont dit avoir obtenu un dégrèvement d’enseignement au cours de l’année universitaire 2002-2003. Si l’on ajoute à ces dégrèvements ceux qui n’ont pas été comptabilisés à cause de l’absence dans notre échantillon des directeurs de département, on peut estimer grosso modo que plus de 40 % des professeurs, comme en 1990-1991, ont obtenu au moins un dégrèvement d’enseignement pour se consacrer avec plus d’intensité à une ou plusieurs autres tâches. Si l’on tient compte du fait que 7 à 8 % approximativement des professeurs sont en année sabbatique, c’est probablement moins de 50 % et peut-être même moins de 45 % des professeurs des universités québécoises qui ont, chaque année, une tâche réelle d’enseignement de même importance que la tâche nominale ou théorique d’enseignement prévue par leur établissement : quatre cours, cinq cours, six cours. En somme, à douze ans d’intervalle (1991-2003), il ne semble y avoir que peu de différences quant au nombre de cours donnés par les professeurs et quant à la proportion de ceux-ci qui ont obtenu un dégrèvement d’enseignement pour mieux se consacrer à d’autres tâches.

TABLEAU 5.5

Nombre de cours donnés par les professeurs des universités québécoises et % des professeurs dégrevés d’enseignement

(1989-1990 et 1990-1991 et 2002-2003) Années universitaires 1989-1990 1990-1991 Année universitaire 2002-2003

Nombre de cours* 3,25 cours 3,25 cours

% des professeurs ayant obtenu au moins un dégrèvement** 41,2 37,8***

Source : Bertrand et al., op. cit., p. 138 et 144. * N = 903

** N = 1273

*** Comme signalé dans l’Annexe A, les directeurs de département n’ont pas participé à l’enquête de 2003. Ils sont au nombre de 350 dans l’ensemble du réseau universitaire québécois et ils auraient dû constituer une centaine de personnes de plus dans l’échantillon. Les directeurs de département sont habituellement dégrevés d’une partie de leur enseignement. Si on ajoute ces 100 professeurs, la proportion des professeurs dégrevés est sans doute aussi élevé qu’en 1989-1990 et 1990-1991.

TABLEAU 5.6

Distribution en % des professeurs des universités québécoises quant au nombre de cours donnés (2002-2003)

Nombre de cours 1 cours 2 cours 3 cours 4 cours 5 cours 6 cours

Distribution en %des professeurs 11,0 17,5 22,1 26,7 13,4 9,2

L’enquête de 2003 a permis de connaître les raisons pour lesquelles les professeurs ont obtenu un ou des dégrèvements d’enseignement. Les professeurs avaient cependant la possibilité d’identifier une ou plusieurs raisons. Comme le montre le Tableau 5.7, 38 % des professeurs dégrevés estiment l’avoir été pour occuper des postes administratifs (cette donnée exclut les directeurs de département) et 41 %, pour faire de la recherche. Seulement 8,5 % des professeurs dégrevés disent avoir obtenu un ou des dégrèvements pour faire de l’encadrement. Ce sont 13 % des professeurs qui disent avoir été dégrevés d’enseignement dans le cadre de leur intégration à titre de nouveau professeur et 2,5 % dans un processus de préretraite. Enfin, 8,7 % des professeurs ont dit avoir été dégrevés à la fois pour faire de la recherche et occuper des postes administratifs et 6,4 %, à la fois pour faire de la recherche et assurer l’encadrement des étudiants des 2e

et 3e cycles.

Les critiques qui ont tendance à concevoir le travail professoral en fonction de la tâche d’enseignement déplorent à l’occasion qu’autant de professeurs puissent obtenir des dégrèvements, réduisant ainsi le nombre de cours donnés par des professeurs réguliers. Nous avons déjà signalé, pour notre part, que les professeurs dégrevés avaient une charge de travail plus lourde (47 heures) que leurs collègues non dégrevés (44,6 heures). L’importance des dégrèvements d’enseignement pourrait s’expliquer d’abord par la grande diversité des tâches et des activités des professeurs et par la difficulté de ceux-ci à les mener à bien toutes en même temps. En somme, les dégrèvements d’enseignement pourraient être une conséquence d’une charge lourde, complexe et composée de tâches que les professeurs ne parviennent pas toujours à intégrer facilement ou même à articuler de façon efficiente. Ce serait aussi une réponse aux pressions du milieu pour obtenir de plus en plus de services variés de l’université et des professeurs. Mais ce serait aussi une des résultantes d’un ensemble de décisions prises à travers l’histoire, jumelée à une organisation du travail originale qui accorde aux professeurs une grande marge d’autonomie dans le temps qu’ils consacrent à leur travail et dans le choix de leurs tâches. C’est d’ailleurs cette organisation du travail qui engendre, au sein du monde universitaire, une répartition souvent inéquitable du travail, mais qui suscite aussi, en moyenne, on ne peut l’oublier, de longues semaines de travail et une bonne productivité. Chose certaine, les professeurs disposent d’un temps limité de travail. Les obliger à investir davantage dans l’enseignement, en augmentant la tâche nominale ou en réduisant le nombre de dégrèvements, pourrait les amener, en tant que groupe, non pas à travailler plus, mais à se délester d’autres tâches. Le système actuel d’organisation de leur travail leur permet de le faire. Ainsi, pour être pratique, toute suggestion d’accroître la tâche nominale ou de réduire les dégrèvements doit être jumelée à une proposition précise visant à réduire l’importance d’autres tâches. À moins de remettre en question l’organisation actuelle du travail.

Dans la quatrième partie de ce chapitre, nous avons étudié le nombre moyen de cours donnés par les professeurs et la proportion de ceux-ci qui ont obtenu un ou des dégrèvements d’enseignement au cours de l’année universitaire 2002-2003. Avant d’aborder un autre sujet, il nous apparaît utile d’analyser le nombre de cours que les professeurs disent avoir donné en 2002-2003, selon le type d’établissement, le domaine d’enseignement et de recherche, le sexe et l’étape de la carrière. Le Tableau 5.8 présente les données colligées à ce sujet. Il est d’abord démontré qu’il existe des variations quant au nombre de cours que les professeurs donnent, selon le type d’établissement auquel ils se rattachent : en effet, les professeurs des établissements principalement de

2e et 3e cycle donnent moins de cours sur une base annuelle (en moyenne 3 cours)

que leurs collègues des autres établissements moins développés en matière de 2e et

3e cycle (en moyenne 3,7 cours) (F = -6,24 et p < 0,0001). Il est établi aussi que les professeurs en arts donnent plus de cours (3,7) que leurs collègues en médecine (2,7) et en sciences pures (2,8) (Test de Scheffé : 2 # 6,11). Enfin, il n’est pas démontré de différence quant au nombre de cours que les professeurs donnent, selon qu’ils sont du sexe masculin ou féminin ou qu’ils sont au début, au cœur ou à la fin de leur carrière.

TABLEAU 5.7

Pourcentage des professeurs des universités québécoises dégrevés d’enseignement, selon les motifs invoqués (2002-2003)

Motifs invoqués % des professeurs dégrevés % de l’ensemble des professeurs Un seul motif 1. Recherche/Création

2. Encadrement des étudiants aux 2e et 3e cycles 3. Tâches administratives

4. Services à la collectivité

5. Intégration à titre de nouveaux professeurs 6. Activités syndicales ou associatives 7. Responsabilité familiale (trois cas) 8. Préretraite 41,2 8,5 38,2 * 6,0 12,9 2,3 0,6 2,5 15,3 3,2 14,3* 2,2 4,8 0,1 0,1 Deux motifs

1. Recherche/Création et encadrement des étudiants de 2e et 3e cycle

TABLEAU 5.8

Nombre de cours donnés par les professeurs des universités québécoises, selon le type d’établissement, le domaine d’enseignement et de recherche,

le sexe et l’étape de la carrière (2002-2003)

Nombre de cours 1. TYPE D’ÉTABLISSEMENT A. ÉTAT DE DÉVELOPPEMENT (F = -6,24 p < 0,0001) 1. De 2e et 3e cycle 3,0 2. Autres 3,7

B. LANGUE PRINCIPALE D’ENSEIGNEMENT (F = 0,12 p = 0,9083)

1. Français 3,2

2. Anglais 3,3

2. DOMAINE D’ENSEIGNEMENT ET DE RECHERCHE

(F = 4,36 p < 0,0001) 1. Administration 3,6 2. Arts 3,7 3. Droit 3,3 4. Éducation 3,5 5. Lettres 3,4 6. Médecine 2,7 7. Paramédical 3,3 8. Périmédical 3,1 9. Sciences appliquées 3,3 10. Sciences humaines 3,2 11. Sciences pures 2,8 TEST DE SCHEFFÉ = 2 # 6, 10 3. SEXE (F = 2,06 p = 0,0404) 1. Femme 3,2 2. Homme 3,3 4. ÉTAPE DE LA CARRIÈRE (F = 0,22 p = 0,8033 1. 6 ans et moins 3,2

2. Plus de 6 ans moins de 25 ans 3,3

3. 25 ans et plus 3,2