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II. ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE

5.9 mTOR dans les neutrophiles

L’arrivée de cellules pro-inflammatoires au site infectieux est une étape importante pour l’élimination des agents pathogènes. Plusieurs études ont montré la capacité de la Rapamycine à interférer avec la réponse immunitaire anti-bactérienne. Elle diminue la résistance des souris Balb/c à Pseudomonas aeruginosa (Foldenauer ME et al, 2013), augmente la sévérité d’un choc septique lié à l’activation excessive des TLRs ou encore diminue la survie des souris exposées au LPS (Schmitz CJ et al, 2008).

5.9.1 La synthèse protéique : Modulation de la réponse inflammatoire

Les neutrophiles matures ont initialement été décrits pour avoir une faible capacité transcriptionnelle, mais de nouvelles fonctions leurs sont constamment découvertes notamment la capacité à synthétiser des protéines spécifiques après une stimulation appropriée. Ces phénomènes de synthèse rapide de protéines se font en réponse à une stimulation des neutrophiles notamment dans un contexte d’inflammation (Scapini P et al, 2000). L’activation de la transcription dans les neutrophiles implique le NF-κB qui transloque depuis le cytoplasme vers le noyau après stimulation des neutrophiles. Le NF-κB lie de nombreux promoteurs et régule la transcription de gènes spécifiques dans un contexte inflammatoire (McDonald PP et al 1997). Ainsi, Lorne et al, montrent que la production d’anion superoxyde via l’interaction directe de la xanthine oxydase avec le TLR4 induit une augmentation de l’activation du NF-κB. Il en résulte une augmentation de la production de cytokines pro-inflammatoires telles que le TNF-α ou MIP-2 (Lorne E et al, 2008). La Rapamycine est en outre en mesure de bloquer la synthèse d’IL6 et de TNF par les neutrophiles stimulés par le LPS, agoniste du TLR4 (Lorne E. et al, 2009). Schmitz et al (Schmitz CJ et al, 2008) décrivent un nouveau mécanisme où mTOR est physiquement associé à l’adaptateur MyD88 en aval de nombreux TLR et entraîne l’activation des facteurs de transcription IRF-5 et IRF-7. Ces facteurs contrôlent respectivement l’activation des gènes codant pour des cytokines pro-inflammatoires et l’IFN-α.

Le neutrophile a également la capacité de stocker des ARNm précédemment transcrits afin d’initier une traduction rapide après leur activation lors d’une inflammation. On peut citer l’exemple de la traduction de l’IL6R du neutrophile, qui est induite par PAF de manière sensible à la Rapamycine mais pas aux inhibiteurs de la transcription (Lindemann SW et al, 2004). Yost CC et al ont également pu mettre en évidence que le neutrophile était capable d’induire une traduction rapide de l’ARNm du récepteur de l’acide rétinoïque suite à la stimulation des cellules par PAF. Cette traduction est contrôlée par la protéine mTOR comme le démontrent leurs expériences basées sur la Rapamycine et l’inhibiteur de la traduction cycloheximide (Yost CC et al, 2004). Ce récepteur de l’acide rétinoïque est en outre capable de moduler le niveau de transcription en se liant à des régions

106 promotrices de gènes et portant la séquence RARE (Retinoic acid response elements). Le gène codant pour l’IL8 est une de ses cibles (Yost CC et al, 2004).

5.9.2 mTOR et NADPH oxydase

Plusieurs éléments attestent que les FRO peuvent agir comme des seconds messagers dans la signalisation intracellulaire en fonction de la concentration, du temps auquel la cellule y est exposée et le type cellulaire considéré. Les réponses à cette exposition sont variées pouvant aller d’un impact sur la prolifération ou croissance cellulaire jusqu’à la nécrose. Plusieurs travaux ont déjà mis en évidence le fait que ces FRO seraient capables de moduler l’état d’activation de mTORC1 sans pour autant clairement définir s’ils entrainent l’activation ou l’inhibition du complexe.

Li M. et al, ont pu suggérer, dans les lignées MEF, qu’une exposition brève à de faibles concentrations de H2O2 était capable d’induire l’activation de mTORC1 via l’activation de la PI-3K,

AKT, PLD1 et de manière indépendante de TSC2. Ils ont ensuite montré qu’un traitement à de fortes concentrations inhibe l’activité de mTORC1 via l’activation de la phosphatase 2A et l’AMPK (Li M et al, 2010). Ces résultats peuvent ainsi suggérer que les FRO produits par la NOX2 des neutrophiles pourraient moduler l’activation de mTOR des cellules avoisinantes PN inclus : Au site d’inflammation, les fortes concentrations de FRO produites par les PN pourraient inhiber mTORC1 des cellules exposées non tuées tandis qu’à distance du site d’inflammation la diminution de la concentration des FRO du fait de leur diffusion activerait à l’inverse la protéine mTOR des cellules exposées à distance. Ainsi, des travaux ont pu mettre en évidence que l’effet de la Rapamycine était diminué en présence de FRO (Neklesa TK, PNAS 2008). Bien que peu d’études n’ont permis d’identifier un lien direct entre les FRO produites par la NOX2 du neutrophile et mTOR, les travaux de Cavaliere F, et al réalisés dans les oligodendrocytes proposent un modèle où les FRO produites par la NOX2 exprimée par ces cellules neuronales entraîneraient l’activation de mTORC1 via l’activation de l’axe PI-3K/AKT et ERK1/2 (Cavaliere F et al, 2013). Les travaux de Nayak BK, proposent quant à eux le fait que les FRO produits par les NADPH oxydases dépendantes de p22phox (NOX1, 2, 3, 4) permettent de stabiliser le complexe mTORC2. Ceci a pour conséquence de promouvoir les fonctions associées à mTORC2 comme l’activation de mTORC1 et donc d’induire la traduction de nombreux gènes tels que HIF1α (Nayak BK et al, 2013).

La kinase mTOR est en outre impliquée dans la phosphorylation de nombreux effecteurs et contrôle la synthèse de nombreuses protéines. Bien qu’aucun élément ne suggère jusque-là que la kinase pourrait participer à l’activation de NOX2 du neutrophile, des travaux ont mis en évidence un rôle important de la kinase dans d’autres isoformes tels que NOX4 au niveau des podocytes : L’activation de mTORC1 entraîne l’augmentation l’expression des NOX4 et la production de FRO

107 (Eid AA et al, 2013). On serait donc en présence d’une boucle d’amplification où mTORC1 serait capable d’augmenter la production de FRO des NADPH oxydases et pourrait être activé par les FRO de ces mêmes NADPH oxydases.

5.9.3 Chimiotactisme

Le chimiotactisme du neutrophile est une fonction détaillée dans le chapitre 1. Cependant, l’implication de mTORC1 et mTORC2 dans cette fonction essentielle des neutrophiles dépend du stimulant. En effet, Gomez-Cambronero et al, ont pu montrer que de faibles concentrations de Rapamycine de l’ordre du nanomolaire sont capables d’inhiber ce chimiotactisme des neutrophiles induit par le GM-CSF et l’IL8 en inhibant le remodelage du réseau d’actine induit par le GM-CSF. Le FK506, qui neutralise l’effet de la Rapamycine en rentrant en compétition avec FKBP12, neutralise l’effet inhibant de la Rapamycine sur le chimiotactisme du PN induit par le GM-CSF (Gomez-Cambronero J, 2003). A l’inverse, Liu et al, montrent que mTORC1 ne régulerait pas le chimiotactisme des PN induit par le fMLP. L’implication de mTORC2 a pu être identifié sur la base de la déplétion de RICTOR dans les lignées PLB-985 (Liu L et a, 2010). Le complexe mTORC2 s’est également montré capable de réguler la myosine via l’activation de l’adenylyl cyclase 9 et l’AMPc consécutive à l’activation des cPKC (Liu L et a, 2010).

5.9.4 La phagocytose

La phagocytose est un processus par lequel les cellules immunitaires, principalement neutrophiles et macrophages, englobent des particules solides pour former le phagosome afin de procéder à leur élimination. Malgré le fait la phagocytose requiert la polymérisation de l’actine qui elle-même fait participer mTOR, aucun élément dans la littérature n’atteste jusque-là d’une relation entre mTOR et les étapes précoces de la phagocytose. Néanmoins, concernant l’étape finale de la phagocytose qui consiste à la fission du phagosome et la libération de son contenu digéré, Krajcovic et al, un ralentissement de cette étape suite à l’inhibition pharmacologique de l’activité de mTOR ainsi que sa déplétion par siRNA ou shRNA (Krajcovic M et al, 2013).

5.9.5 L’autophagie dans les neutrophiles

L’autophagie a été récemment décrite comme un nouveau mécanisme antimicrobien du neutrophile (Jones SA et al, 2013). Les pathogènes y sont dégradés par la machinerie lysosomiale. L’inhibition de mTOR par la Rapamycine permet d’induire l’autophagie.

Les neutrophiles infectés contiennent de multiples corps vésiculaires qui sont formés par les voies de l’autophagie et sont capables de fusionner avec les phagosomes contenant les pathogènes (Griffiths G et Mayorga L, 2007). L’autophagie est un processus sensible aux bactéries ou aux toxines. En effet, le LPS est capable d’induire l’autophagie dans les macrophages et d’augmenter la

108 localisation des mycobacterium dans l’autophagosome via l’activation du TLR4 (Xu Y et al, 2007). Les pathogènes phagocytés sont parfois capables de sortir du phagosome et de se retrouver dans le cytoplasme. Ils peuvent alors être ubiquitinés et reconnus par la machinerie dite « xenogaphy » c’est à dire une autophagie des pathogènes intracellulaires au travers du recrutement de la p62 (aussi nommée SQSTM1) et de LC3 (Nakagawa I et al, 2009).

De récentes études ont révélé que l’activité autophagique était nécessaire pour le piégeage extracellulaire des pathogènes (NET). En effet, Remijsen et al, ont montré que l’inhibition de l’autophagie empêchait la formation des NET par les PN et les entrainait vers les voies d’apoptose (Remijsen Q et al, 2011). En accord avec cela, Asako I et McCarty OJT décrivent que l’inhibition de mTOR par la Rapamycine contribue à la génération de la NETose induite par fMLP dans le PN via l’activation de l’autophagie (Itakura A. et McCarty OJ, 2013). Cependant, peu d’éléments sont connus quant au mécanisme par lequel l’autophagie participe aux NETs. Néanmoins, les travaux Alison MM. et collaborateurs contredisent cela et montrent que l’inhibition de mTOR par la Rapamycine ainsi que la Torin 1 réduit la formation de NET des neutrophiles. Ils suggèrent alors que mTOR a la capacité d’activer les NET de manière indépendante de l’autophagie mais plutôt via l’augmentation de l’expression de HIF-1 (Alison MM. et al, 2012).

5.9.6 La dégranulation

Bien que le fait que mTOR soit impliqué dans le remodelage du réseau d’actine, actuellement, il n’y a pas de preuve d’une implication de mTOR dans les processus de dégranulation du neutrophile. D’autres cellules telles que les mastocytes sont également capables de dégranuler leur contenu selon des mécanismes similaires à ceux présents dans les neutrophiles. Cependant Kim et al, ont pu montrer que l’utilisation de la Rapamycine n’affecte pas la dégranulation des mastocytes induite par la stimulation du récepteur FCRI (Kim MS, J Immunol 2008).