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II. ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE

5.2 Fonctions et substrats de mTORC1

5.2.1 Généralités

Les fonctions que le complexe active dépendent de l’état et des besoins des cellules et c’est ainsi que le complexe mTORC1 permet la synthèse protéique lorsque le niveau d’acides aminés est suffisant. Lorsque ce niveau est réduit, mTORC1 est inhibé, ce qui entraîne l’activation des voies qui régulent l’autophagie et permet d’augmenter le niveau d’acide aminé. Dans ces conditions d’abondance énergétique, mTORC1 participe également au stockage de cette énergie en étant impliquée dans la production d’acides gras qui permettront aux cellules de trouver des réserves énergétiques en cas de carence. Toutes ces fonctions permettent à mTOR de contrôler l’homéostasie énergétique de la cellule. mTORC1 participe donc directement ou indirectement à de nombreuses fonctions biologiques dépendantes de cette énergie allant du métabolisme à la défense immunitaire.

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5.2.2 La synthèse protéique

a) S6K1 et 4E-BP1

Deux des substrats connus de mTORC1, impliqués dans les processus d’initiation de la traduction protéique, eIF4E-binding protein 1 (4E-BP1) et S6 kinase 1 (S6K1) s’associent à RAPTOR au niveau d’un motif TOS (TOR signaling) (Nojima J. et al, 2003) hautement conservé dans la partie N-terminale de S6K1 et C-terminale de 4E-BP1. La séquence consensus est de la forme F-(D/E)- (F/I/L/M)-(D/E)-(L/I) (Oshiro N et al, 2007). mTORC1 est recruté par le facteur d’initiation de la traduction eIF3 au niveau des ARN non transcrits pour phosphoryler S6K1 et 4E-BP1.

Dans sa forme non phosphorylée, 4E-BP1 agit comme un régulateur négatif de la traduction en se fixant sur le facteur d’initiation eIF4E (Ma XM et Blenis J, 2009). mTORC1 actif provoque la phosphorylation séquentielle de 4E-BP1 (Schéma 32) : Dans un premier temps les phosphorylations des Thr 37 et Thr 46, montrées in vitro comme des étapes nécessaires, permettent ensuite la phosphorylation de la Thr 70 puis Ser 65 (Gingras AC et al, 2001). Ainsi, phosphorylée P-4E-BP1 se détache et libère le facteur d’initiation de la traduction eIF4E.

Schéma 32 : Phosphorylation séquentielle de 4E-BP1 par mTOR (Hay et Sonenberg, Genes & Development 2004)

eIF4E peut alors recruter un autre facteur de l’initiation de la traduction eIF4G à l’extrémité 5’ de la plupart des ARN messagers (Ma XM et Blenis J, 2009).

La kinase mTORC1 phosphoryle également S6K1 sur de nombreux sites dont la thréonine 412, située dans un motif hydrophobe proche du site catalytique, qui est étroitement liée à l’activité de la kinase (Weng QP et al, 1998). En retour, S6K1 s’associe et phosphoryle de nombreuses protéines impliquées dans la traduction telles que le facteur d’élongation eIF4B qui permet l’augmentation de l’activité de l’hélicase eIF4A afin d’améliorer l’accessibilité des régions 5’UTR de nombreux ARN messagers. Le facteur d’élongation eEF2K, SKAR (également nommé POLDIP3), NCBP1 ou encore la sous unité ribosomique S6 sont également activés par S6K1. Ensemble, les phosphorylations de S6K1 et 4E-BP1 par mTORC1 permettent donc de former un complexe contrôlant l’initiation de la traduction et son élongation (Schéma 33).

89 Schéma 33 : Les substrats de mTORC1 participent à l’initiation de la traduction et son élongation (Schéma adapté à partir

de Sabatini et al., Nature reviews Molecular Cell Biology, 2010)

b) HIF1α

HIF1 et mTORC1 partagent des fonctions biologiques communes : HIF1 augmente l’expression des gènes qui entrent dans la glycolyse et le transport du glucose afin de maintenir le niveau d’énergie lorsque la respiration cellulaire est réduite. A l’inverse l’inhibition de mTOR par la Rapamycine réduit l’expression de gènes impliqués dans la glycolyse (Düvel K. et al, 2010). En contrôlant l’expression ou l’activité de HIF1α, le complexe mTORC1 contrôle donc le programme de transcription qui permet aux cellules de maintenir leur état dans des conditions de manque d’oxygène. Dans des lignées cancéreuses où mTORC1 est fortement actif, l’expression de HIF1α est élevée, ceci suggère l’implication de mTORC1 dans son expression (Brugarolas JB. et al, 2003) cela implique 4E-BP1 ainsi que le facteur eIF4E (Düvel K. et al, 2010).

Dans le neutrophile, HIF1 régule les fonctions antibactériennes, la production des protéases et des peptides antimicrobiens contenus dans les granules (Perssonnaux C. et al, 2005). Il contribue en outre à prolonger la survie des neutrophiles en condition d’hypoxie en inhibant l’apoptose des cellules (Walmsley SR. et al, 2005). Il serait ainsi important d’évaluer la contribution de mTOR dans ces activités contrôlées par HIF1.

c) STAT3

mTORC1 reconnait STAT3 via le motif TOS se trouvant reconnu par RAPTOR (Inoki K et al, 2005). mTOR le phosphoryle et active le facteur de transcription STAT3 au niveau de la Ser-727 (Yokogami K et al, 2000). STAT3 est souvent retrouvée activée durant les infections virales, par exemple le virus de l’hépatite C entraine l’augmentation d’expression et l’activation de STAT3 dans les monocytes, macrophages et cellules dendritiques par l’intermédiaire de l’IL6 (Tacke RS et al, 2011), or l’activation de STAT3 est également un facteur de mauvais pronostique car il a la capacité de promouvoir des oncogènes tumoraux. Ainsi, mTORC1 devrait également jouer un rôle important durant les infections virales.

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5.2.3 La synthèse des ribosomes

La biosynthèse des ribosomes met en jeu les ARN polymérases I, II et III impliquées respectivement dans la synthèse des ARN ribosomaux, la transcription des gènes codants pour les protéines ribosomales et la synthèse de l’ARN 5S.

La synthèse des ARN ribosomaux, constituants essentiels des ribosomes, est régulée par la disponibilité des nutriments comme les acides aminés et en particulier la leucine. Cet acide aminé joue un rôle central dans l’activation de mTORC1 (Xu G et al, 2001). Trois éléments sont essentiels à la mise en place de l’ARN polymérase I et sont phosphorylés par les substrats de mTORC1: TIF- 1A, SL1 et UBF (Schéma 34).

Schéma 34 : L’initiation de la transcription des ARN ribosomaux est contrôlée par mTORC1 (Mayer C. et Grummt I. Oncogene 2006)

5.2.4 L’autophagie

mTORC1 est également capable d’inhiber les processus d’autophagie par lesquels les cellules dégradent des protéines (microautophagie) et organelles (macroautophagie) endommagés ou redondants. A l’inverse l’inhibition de mTORC1, notamment par le retrait des acides aminés du milieu et l’action de la Rapamycine induit l’autophagie.

Par analogie aux événements observés chez S. Cerevisiae, chez les mammifères l’autophagie est régulée par un complexe protéique formé d’ATG13, ULK1 et FIP200. En absence de glucose l’AMPK inhibe mTORC1 et enclenche l’autophagie en activant directement ULK1 via deux phosphorylations sur les sérines 317 et 777 (Kim J et al, 2011). A l’inverse en présence de glucose, l’AMPK est inactivée et cesse d’inhiber mTORC1, RAPTOR interagit alors directement avec ULK1 (Hosokawa T et al, 2009) et mTOR phosphoryle directement sur la sérine 757 empêchant toute autre phosphorylation secondaire. L’autophagie est alors inhibée (Schéma 35) (Kim J et al, 2011).

91 Schéma 35 : Modèle proposé expliquant la régulation de phosphorylation d’ULK1 et de l’autophagie par mTORC1 (Kim et

al., Nat Cell Biol 2011)

5.2.5 La synthèse lipidique

Le complexe mTORC1 joue un rôle central dans la biosynthèse des lipides. En effet, la Rapamycine réduit l’activité de la Lipin 1, SREBPS et du récepteur PPAR, tous trois impliqués dans l’adipogénèse (Kim JE et Chen J, 2004). mTORC1 induit la phosphorylation de la Lipin 1 au niveau des Ser-106 et la Ser-472 ce qui entraîne alors son exclusion du noyau. A l’inverse, lorsque mTORC1 est inhibé, Lipin 1 s’accumule dans le noyau et entraîne l’association de SREBPs à la matrice nucléaire ce qui l’empêche d’activer ses gènes cibles impliqués dans la biosynthèse des lipides (Peterson TR et al. 2011) (Schéma 36). L’augmentation de la biosynthèse de lipides est souvent un marqueur de prolifération des cellules cancéreuses, étant donné la contribution de mTORC1 dans cette biosynthèse lipidique, il pourrait avoir un possible rôle dans l’initiation des tumeurs.

Schéma 36 : Modèle proposé pour la régulation de l’activité transcriptionnelle de SREBP par mTORC1/Lipin1 (Peterson TR et al. Cell 2011)

92 Le complexe mTORC1 est également impliqué dans le stockage énergétique par l’intermédiaire des tissus adipeux. En effet, le complexe module l’expression et l’activité de PPARγ, récepteur nucléaire qui contrôle l’expression de gènes requis pour la synthèse d’acides gras. Cependant le mode d’action n’est que partiellement élucidé, d’un côté l’axe mTORC1-4EBP1 est impliqué dans la régulation de la traduction de PPARγ (Le Bacquer O et al, 2007) et de l’autre côté Kim et al. ont soulevé la possibilité que mTORC1 pourrait contribuer à l’activation de PPARγ par l’intermédiaire de SREBP1 qui a été montré comme augmentant la production endogène du ligand de PPARγ (Kim JE et Chen J, 2004).