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Introduction

La mise en forme des polymères se fait pour T >> Tg pour les amorphes, et T > Tf pour les semi-cristallins. Deux phénomènes sont propres aux polymères fondus :

- Le glissement de chaînes les unes par rapport aux autres pendant l’écoulement de la matière est dépendant de la taille des unités de répétition.

- La masse molaire des macromolécules Mw influence le comportement viscoélastique (la rhéo-logie) du polymère fondu144.

Si on trace le logarithme de la viscosité newtonienne η0 en fonction du logarithme de la masse molaire Mw d’un polymère, on observe un changement de pente et donc un changement de compor-tement à la masse molaire critique Mc dû à l’apparition d’enchevêtrements (Figure I.34). Cette masse est reliée à la masse entre enchevêtrements Me par la relation : Mc ≈ 2Me. Si la masse d’une chaîne est inférieure à Mc, les chaînes non enchevêtrées sont uniquement gênées dans leur mouvement par leurs voisines. Les propriétés rhéologiques d’une chaîne vont donc être fortement modifiées par les enchevêtrements.

Figure I.34 : Variation de ln(η0) en fonction de ln(Mw) pour différents polymères. La masse molaire critique Mc est représentée par ● 144.

De nombreuses études expérimentales ont montré que les chaînes adoptent deux modèles d’écoulement suivant la longueur de leurs chaînes :

- Le modèle de « Rouse » selon lequel les chaînes non enchevêtrées (Mw<Mc) vont suivre le modèle de l’écoulement libre ;

- Le modèle de reptation (modèle de « De Gennes ») dans lequel l’interprétation des propriétés viscoélastiques d’un polymère de haute masse molaire (Mw>Mc), passe par la prise en compte de la notion d’enchevêtrement.

Modèle de Rouse

Ce modèle correspond à un écoulement de chaînes libres dans le cas de chaînes courtes à faible masse molaire145. Il peut être décrit de la façon suivante : une macromolécule est segmentée en plusieurs sous-chaînes et chaque extrémité est représentée par une perle qui est reliée à ses voi-sines par des ressorts comme illustré Figure I.35 :

Figure I.35 : Chaîne de Rouse composée de Nr perles connectées pas des ressorts146.

Les ressorts sont soumis à des frictions qui sont concentrées aux points de jonction. Dans ce modèle, la chaîne a la liberté de se déplacer dans toutes les directions, elle doit être assez longue pour être considérée comme gaussienne et les interactions entre les parties de la chaîne représentées par

des ressorts sont négligées. Les forces exercées sur chaque sous-chaîne sont : une force d’élasticité due aux deux ressorts adjacents , une force de frottement visqueux et une force aléatoire146.

La force résultante sur chaque sous-chaîne est perpendiculaire à la chaîne conduisant à N modes coopératifs ayant chacun un temps de relaxation τ.Le temps de relaxation le plus long, appelé temps de Rouse décrit le temps mis par la chaîne pour se déplacer de Rg. τRouse représente donc le mouvement de la chaîne dans son ensemble :

τ

Rouse

=

3𝜋²𝑘𝜁𝑁²𝑏²

𝐵𝑇 (3)

avec 𝜁 le coefficient de friction globale de la chaîne, kB la constante de Boltzmann et T la température. N est le nombre de segments (et donc de monomères) ; 𝑁 = 𝑀𝑀𝑤

0 avec Mw, la masse molaire massique du polymère et M0, la masse molaire d’un monomère. Enfin, b est la longueur de Kuhn qui ne dépend que de la nature chimique de la chaîne.

Il est intéressant de remarquer que ce temps caractéristique est inversement proportionnel à la température (τRouse α T-1), ce qui traduit le fait que plus la température est élevée, plus la mobilité des chaînes macromoléculaires sera grande et plus le temps de relaxation sera court. De plus, il est proportionnel au carré de la masse molaire de la chaîne (τRouse α Mw2), ce qui explique que plus la chaîne est longue et plus elle met de temps à se déplacer de la distance Rg.

Modèle de de Gennes : mouvements de reptation

Dans le cas des très longues chaînes de polymère, le modèle généralement admis est celui de la reptation. Introduit par P.-G. de Gennes147, ce modèle décrit la mobilité des chaînes macromolécu-laires au-delà de la masse molaire critique Mc. Pour tenir compte du réseau permanent d’enchevêtre-ments entre les chaînes macromoléculaires qui sont dans l’impossibilité de se mouvoir librement, celles-ci sont considérées comme enfermées dans un tube de diamètre dc, formé par les autres chaînes enchevêtrées (Figure I.36). Dans le modèle de De Gennes, la chaîne a donc un mouvement brownien dans un réseau fixe. La chaîne ne peut sortir du tube que par les bouts ; des portions du tube apparaissent et disparaissent au fur et à mesure que la chaîne bouge. Ces mouvements sont analogues à la locomotion des serpents d’où le terme « reptation »144,148,149.

Au bout d’un certain temps de relaxation τrep, la chaîne renouvelle entièrement son tube. Ainsi τrep est le temps nécessaire à la chaîne pour sortir complètement de son tube initial et donc pour perdre totalement la mémoire de sa conformation initiale. Il est défini par :

τ

rep

=

𝜋²𝑘𝜁𝑁3𝑏4

𝐵𝑇𝑑𝑐2

(4)

avec 𝜁 le coefficient de friction global de la chaîne, kB la constante de Boltzmann, T la température, N le nombre de segments, b est la longueur de Kuhn et dc le diamètre du tube qui correspond aussi à la distance moyenne entre enchevêtrements.

Le temps de relaxation τrep dit de « reptation », varie en N3 ce qui traduit le fait que plus un objet est grand, plus le nombre d’enchevêtrements par chaînes sera important et donc, plus il aura du mal à se mouvoir. Comme dans le modèle de Rouse, le temps de relaxation est inversement propor-tionnel à la température. Ainsi, une température élevée engendre une mobilité de chaînes macromo-léculaires plus grande, donc un temps de relaxation plus court et vice versa ; c’est ce qu’on appelle la relation d’équivalence temps - température.

Doi et Edwards149 ont complété les travaux de De Gennes en décrivant l’évolution du dépla-cement de la chaîne le long du tube par la moyenne quadratique du dépladépla-cement de la chaîne ϕn(t). Cette théorie statistique a mis en évidence plusieurs échelles de temps décrivant les mouvements de la chaîne. Ainsi, les auteurs ont décrit les mouvements très locaux de portions de chaînes aux temps très courts, à un mouvement de la chaîne dans son ensemble au temps plus long.

Pour des temps inférieurs au temps de relaxation de Rouse, les chaînes ne sentent pas les contraintes du réseau et donc de son tube. De ce fait, elles se comportent comme des chaînes libres décrites par le modèle de Rouse (partie I.C.2.b.ii). Ces mouvements ne se font que sur une petite lon-gueur comparable à la distance entre deux enchevêtrements. Ensuite, pour des temps plus longs, la chaîne commence à sentir le confinement du tube. La chaîne commence à pouvoir bouger dans son ensemble, par les bouts, le long du tube qui reste fixe. Enfin, pour des temps supérieurs au temps de reptation, la chaîne sort de son tube initial et un nouveau tube est créé.

Bien évidemment, tous ces phénomènes sont aussi dépendants de la température à travers la relation suivante :

𝜑𝑛(𝑡, 𝑇) ∝ (𝑇𝑡)𝛾 (5) Avec l’exposant γ qui change en fonction de l’échelle de temps considérée.

Le modèle de Rouse est suffisant pour décrire le comportement viscoélastique des polymères dont la masse est inférieure à la masse critique Mc, ou, des polymères de plus grandes masses aux temps courts (<τRouse). Au-delà de la masse critique Mc, le modèle de Rouse n’est plus valable et il est nécessaire d’utiliser le modèle de reptation. Ces deux approches ont une dépendance différente vis-à-vis de la masse molaire du polymère.

Application du frittage aux polymères