• Aucun résultat trouvé

2.2.2.6   Mouvement lent des protéines et relaxation de dispersion CPMG

Les protéines peuvent adopter une grande multiplicité de conformations tridimensionnelles. Cependant, les techniques structurales permettent de détecter majoritairement l’état le plus peuplé, néanmoins il est important de souligner que d'autres éléments peuplant le paysage énergétique (même moins peuplés) peuvent aussi avoir une importance biologique (Figure 18B). La présence de tels conformères peut être identifiée s’il y a un échange conformatonnel avec la conformation principale dans certains régimes d'échange. L'échange conformationnel entre deux ou plusieurs environnements entraîne des effets importants sur les vitesses de relaxation et module la forme et la position des résonances des noyaux en échange. Il est possible d'obtenir par la mesure de ces effets, des informations sur les paramètres thermodynamiques, cinétiques et structuraux associées aux états en échange conformationnel.

Figure 18B: Illustration de l’échange conformationnel d’une protéine en deux sites. A gauche : L’état de haute énergie (excité) est plus rare que celui de basse énergie mais peut présenter des fonctions biologiques importantes. À droite : L’état de faible population n’est pas directement observable en RMN ; (A) En absence d’échange les pics sont non élargis ce qui signifie que la magnétisation est en phase, (B) en présence d’échange de l’ordre de la milliseconde, mène au déphasage du signal ce qui fait que les pics sont élargis.

Lorsqu'un spin s’échange entre deux environnements, son déplacement chimique et sa vitesse de relaxation peuvent différer dans chaque environnement.

(37)

La cinétique de l'échange est définie par les constantes de vitesse d'échange, qui sont les constantes de vitesse d'échange de l'état A vers l'état B (k1) et la réaction inverse (k2). Les fractions du système dans chaque conformation sont définies par pA et pB

  118 

respectivement :

(38)

(39)

Dans les études RMN des échanges conformationnels, on considère la vitesse d'échange ; (40) et la différence des fréquences de précession des deux

états en échange ωA et ωB ; (41).

Figure 19B: Schématisation de l’échange conformationnel, entre deux conformations A et B, dont les populations sont pA et pB, les fréquences de précession du spin I sont ΩA et ΩB.

La RMN s’avère être la technique la plus adaptée aux études dynamiques car les fréquences de résonance des spins sont extrêmement sensibles à l’environnement électronique (Figure 19B). Une modification de structure peut donc provoquer un changement des spectres. En effet, la dispersion de relaxation CPMG est une technique qui permet la caractérisation des mouvements moléculaires de l’ordre de la milliseconde. Ainsi, elle permet d’extraire les paramètres physico-chimiques et structuraux associés aux processus d’échange confomationnel, notamment dans le cas d’un échange entre un état majoritairement peuplé et ceux faiblement peuplés (population supérieure à 0,5%) 540. La séquence impulsionnelle des expériences de dispersion de relaxation est une HSQC ou TROSY à laquelle est incorporée une période de relaxation Carr-Purcell-Meiboom-Gill (CPMG) 541-542. Elle peut se décomposer en plusieurs étapes : excitation du proton, transfert de la polarisation sur l’azote, relaxation en présence de séquence CPMG, marquage des déplacements chimiques de l’azote, transfert de la polarisation sur le proton et acquisition. Pendant la relaxation CPMG, l’échange provoque une non-refocalisation de la polarisation semblable à une perte de d’aimantation transversale (Figure 20B).

  119 

Figure 20B: Schéma simplifié d’une expérience CPMG. À gauche est représenté un train d’impulsions CPMG, les pulses rf à 180° inverse la direction effective de la précession et augmentant le taux de répétitions des pulses (VCPMG); on diminue le déphase du signal et la perte de celui-ci. A droite, est représenté le profil de dispersion de relaxation à partir duquel les paramètres d’échange peuvent être extraits 543.

La vitesse de relaxation transversale observée R2eff est composée de la perte d’aimantation intrinsèque à la protéine R2 ainsi que d’une composante due à l’échange Rex. Cette dernière dépend de la différence de fréquence de précession des spins dans les deux conformations ΔωAB, de la vitesse d’échange entre les conformations kex (fréquence des changements de vitesse de précession), des populations relatives des deux conformations pA et pB (probabilité d’évoluer sous chaque déplacement chimique) ainsi que du délai τ des échos de spin du CPMG :

(42)

Lors d’une expérience de dispersion de relaxation, plusieurs spectres sont enregistrés en faisant varier le nombre d’échos de spin pendant un délai de relaxation Trelax fixe (40 ms par exemple). Plus la fréquence des échos de spin est grande, plus la probabilité d’avoir un échange pendant l’écho diminue et plus l’aimantation est refocalisée.

Les facteurs R2eff sont obtenus pour chaque pic de l’HSQC, en comparant pour chaque délai τ l’intensité du pic de l’expérience avec celle d’une mesure de référence (sans CPMG). Les courbes de dispersion de relaxations sont obtenues en reportant pour chaque pic la valeur du R2effen fonction de la fréquence des échos de spin (43).

L’ajustement des courbes obtenues pour chaque pic est réalisé avec les modèles théoriques qui permettent d’obtenir les paramètres physico-chimiques de l’échange :

i) La fonction de Meiboom 544 pour un échange rapide (kex > ΔωAB),

On obtient ainsi pour le modèle de Meiboom les paramètres (pApBΔω2, τex, R2) pour chaque résidu :

  120  (44)

ii) La fonction de Carver 545 pour un échange intermédiaire (kex = ΔωAB) et (pB, τex, |Δδ|, R2) où Δδ est la différence de déplacement chimique du noyau considéré dans les deux conformations :

) (45) (46)

(47)

(48) (49)

iii) La fonction de Tolliger 546 pour un échange lent (kex < ΔωAB):

(50)

Le calcul des R2eff correspondant à chaque pic et à chaque délai à partir des intensités grâce à la relation :

(51)

Dont le calcul d’erreur se fait suivant la relation :

(52)

Ou δe représente la valeur du bruit rms mesuré sur une boite vide du spectre de référence, ICP l’intensité du pic mesuré, TCP le temps de relaxation mesuré.

III.2.2.3 Mise en œuvre expérimentale