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MONSEIGNEUR COSANDEY

Dans le document ïi II 1883 (Page 141-145)

£ T ê q n e d e I<ansanne.

La journée de dimanche 1" octobre s'ouvrait par la doulou-reuse nouvelle de la mort de Sa Grandeur Monseigneur •*

Cosandey, évêque de Lausanne, survenue ce jour même, entre 1 heure et demie et 2 heures du matin.

Cette mort si prématurée, après un épiscopat qui n'a pas atteint la durée de trois ans, est une grande calamité pour le diocèse et pour le canton de Fribourg en particulier.

Monseigneur Ghristophore Cosandey, le 69° titulaire connu de l'illustre et antique évêché de Lausanne, est né, le 16 dé-cembre 1818, à St-Sylvestre où s'était fixée sa famille origi-naire de Halten, paroisse de Tavel.

C'est aux années de sa première éducation dans son lieu natal que remonte l'origine d'une amitié d'enfance qui devait remplir toute la vie du prélat. Le vénérable supérieur général des Rédemptoristes, le Père Mauron, est aussi originaire de St-Sylvestre. Il noua dès lors avec notre évêque regretté une liaison intimé qui devait durer jusqu'à la mort.

Voici, en quelques lignes, les principales étapes de la longue et féconde carrière du dernier évêque du diocèse de Lausanne.

Mgr Cosandey fit ses études littéraires avec distinction au collège des Jésuites, à Fribourg, puis il entra au collège germanique à Eome pour y suivre les cours de philosophie et de théologie du collège romain. H y obtint le grade de docteur en ces deux facultés.

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Ordonné prêtre le 18 décembre 1841, il rentra dans sa patrie dès la fin de l'année suitante, occupa d'abord quelques mois le poste de vicaire de l'iniportante paroisse de Guin, sous le vénérable doyen Bertsehy, dont il prononçait l'orai-son funèbre il y a quelques mois. En 1843, il fut nommé cha-noine de St-Nicolas, dont il porta le titre jusqu'en 1858, et remplit quelques années les fonctions de prédicateur allemand dans notre Collégiale.

Les personnes qui assistaient à cette prédication se rap-pellent encore avec plaisir la satisfaction que leur causait l'exposé calme, lucide et substantiel de la doctrine chré-tienne dans la bouche du savant et modeste prédicateur de St-Meolas. Il ne possédait pas les qualités qui font le brillant orateur, mais il excellait dans l'art de la synthèse et savait la verser sur un même sujet avec une facilité surprenante. Du reste les qualités morales et la piété solide du prédicateur

donnaient toujours le plus grand poids à sa parole.

En 1858, la place de curé de Fribourg fut mise en élection.

Mgr Cosandey fat porté sur les listes conservatrices en op-position avec M. le chanoine Gottrau, qui l'emporta à une majorité de deux ou trois voix. Cette même année. Monsei-gneur Marilley appelait Mgr Cosandey au poste éminent de supérieur et professeur de morale au Séminaire diocésain en remplacement de M. Jendly, ancien grand-vicaire. Le véftéré défunt occupa ce poste de 1858 à 1879. C'est au Séminaire que Mgr Christophore se trouva réellement dans sa vocation et qu'il déploya toutes les ressources que la science et la vertu réunies mettaient à sa disposition. On peut affirmer, sans crainte d'être démenti, qu'il n'y a pas un seul élève du Séminaire qui n'ait gardé le souvenir de son ancien supérieur comme celui d'un prêtre réellement accompli. Bonté, pru-dence, ardeur, étude, largeur de vues, abnégation, modestie parfaite : tout cela formait un ensemble auquel bien peu de cœurs auraient pu résister.

Comme professeur, Mgr Cosandey était très bien doué. Son intelligence était vaste et lucide, son esprit parfaitement équilibré. Le travail, chez lui, ne se relâchait pas un instant.

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Toujours on trouvait sur sa table le dernier ouvrage paru sur les matières théologiques, le dernier article publié sur la question actuellement débattue. Ses honoraires disparaissaient presque en entier dans les bonnes œuvres et dans l'augmen-tation de sa belle bibliothèque.

Non content de s'être ainsi acquis des trésors d'érudition ecclésiastique, il fut le principal promoteur et bienfaiteur de l'œuvre de la bibliothèque du clergé.

En 1869, Mgr Cosandey fut appelé à Rome comme théolo-gien du Concile. Ses profondes connaissances théologiques le désignaient tout naturellement pour cette importante et dif-ficile mission. Il eut à s'occuper, comme Consulteur, des questions de discipline ecclésiastique ; mais on sait que cette partie si utile du Concile dut céder le pas aux longues dis-cussions que souleva la question de l'infaillibilité pontificale.

Vers la fin de 1869, il porta le titre de Vicaire-général ho-noraire du diocèse et secret camérier surnuméraire de Sa Sainteté.

En 1879, après la démission de Mgr Marilley, Mgr Co-sandey fut désigné comme son successeur.

Le 19 décembre 1879, il fut préconisé à Rome et sacré le 15 février 1880 par le cardinal Howard. Le mercredi 10 mars 1880, il faisait son entrée solennelle à Fribourg, au milieu d'un concours immense de population.

Il y a donc un peu plus de deux ans que retentissaient les sonneries joyeuses, les détonations des mortiers et des canons pour fêter l'entrée sur territoire fribourgeois du nouvel évêque. Tout le monde a encore présent à l'esprit le souvenir de cette journée brillante, et déjà la mort est venue accomplir son œuvre. Déjà sont glacées les mains de Celui qui, en mes-sager de paix, arrivait pour bénir... Nous n'avons de Mgr Cosandey que trois mandements : le premier sur la charge épiscopale, le second sur les œuvres de charité et le troi-sième sur la prière. Mais on reconnaît facilement son style, ses pensées et toute sa manière dans le Scutum sacerdotum, œuvre collective de tous les évêques suisses, mais dont Mgr Cosandey fut évidemment le rédacteur, Malheureument le

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temps et les forces ont fait défaut au vénérable évêque pour réaliser tout le bien qu'il avait en vue et qu'il n'aurait certes pas manqué d'accomplir. Dans le courant de cette année, il dût subir une opération douloureuse. Cependant sa santé s'était promptement remise, lorsque, il y a un mois à peine, on apprit une nouvelle maladie de Sa Grandeur : c'était une maladie de cœur qui marcha rapidement vers le dénouement fatal.

Ceux qui approchèrent de l'auguste malade furent très émus des profonds sentiments de piété avec lesquels il se préparait à sa dernière heure. Non-seulement il attendait la mort avec calme, mais elle étai,t pour lui le terme heureux auquel il aspirait. Il eut la consolation de voir à son chevet Mgr Marilley, son vénéré prédécesseur, ainsi que Monsei-gneur l'évêque de Bâle.

Les obsèques de Mgr Cosandey ont eu lieu à Fribourg le jeudi 5 octobre, au milieu d'un immense concours de popula-tion. Mgr Lâchât dirigeait la cérémonie des funéi-ailles et fut chargé de l'oraison funèbre de celui qui fut son collègue et son ami. Il développa avec beaucoup d'éloquence ces magni-fiques paroles extraites des Macchabées et fort appropriées à la circonstance : « Quomodo cecidit potens qui sahum f'aciehat populum. » Comment est-il tombé cet homme puis-sant qui faisait le salut du peuple ?

N.N. S.S. Marilley, Egger, évêque de St-Gall, Jardinier, évêque de Sion et Bagnoud, évêque de Bethléem, représen-taient l'épiscopat suisse.

La musique de Landwehr de Fribourg ouvrait la marche ; elle était suivie des écoles, du collège, des membres du clergé, accourus en grand nombre de toutes les parties du diocèse, et des évêques. Venait ensuite le corbillard, accompagné des parents, du bureau du Grand Conseil au complet, des députés présents, du Conseil d'Etat, du Tribunal cantonal, des Auto-rités des districts et du Conseil communal de Fribourg. La Gendarmerie et une compagnie d'infanterie formaient la haie dans les rues.

La tombe de Mgr Cosandey a été ouverte dans la collégiale de St-Nicolas, devant la grille du chœur.

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Sur tout le parcours dn cortège funèbre, les magasins étaient fermés, dernier hommage de respect que la population de Fribourg voulait donner au vénérable prélat que l'on accompagnait à sa dernière demeure.

La voix puissante des cloches de toutes les églises donnait à cette cérémonie un caractère imposant de grandeur.

Dans le document ïi II 1883 (Page 141-145)