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Molécules dipolaires dans un champ électrique

Dans le document Physique Statistique et Gaz Parfaits (Page 168-173)

4.7 Gaz parfait diélectrique sous champ électrique

4.7.3 Molécules dipolaires dans un champ électrique

La diélectricité à l’échelle microscopique peut avoir différentes origines. Dans tous les cas, le champ électrique appliqué provoque un déplacement des charges, de sorte que le centre de gravité des charges positives ne coïncide plus avec le centre de gravité des charges négatives. Le système devient porteur d’un moment dipolaire induit porté par la droite liant les deux centres de gravité. On en a vu un exemple au paragraphe précédent. En voici un autre.

Dans le système étudié ici, il n’est plus question d’anions et de cations. On consi-dère un système d’atomes ou de molécules électriquement neutres. Le moment dipolaire est dû à une déformation des nuages électroniques : les noyaux sont attirés par la plaque chargée négativement, et les nuages électroniques par la plaque char-gée positivement. Chaque molécule devient porteuse d’un moment dipolaire, et le moment dipolaire total est la somme des moments dipolaires individuels.

Certaines molécules, comme H2O ou H Cl, portent un moment dipolaire

per-manent. Même en l’absence de champ, les deux centres de gravité de coïncident pas.

Lorsqu’on applique le champ, d’une part un moment dipolaire induit vient s’ajouter au permanent (déformation des nuages électroniques), d’autre part le moment dipo-laire résultant (permanent et induit) a tendance à s’aligner à la direction du champ. Il y a donc perturbation des degrés de liberté de rotation de la molécule. Les degrés de liberté de vibration sont en toute rigueur également perturbés (modification des niveaux d’énergie électroniques) mais nous n’en tiendront pas compte dans l’étude. Les degrés de liberté de translation par contre ne sont pas du tout perturbés par la présence du champ : les molécules restent électriquement neutres et ne présentent aucune attirance vers l’une ou l’autre des plaques chargées.

On considère un gaz parfait monoconstituant constitué de N molécules indépen-dantes que l’on plonge dans un champ électrique uniforme orienté suivant un axe Oz. Les conditions de travail (T , V , D, N constants) conduisent tout naturellement à travailler dans l’ensemble statistique de fonction caractéristique ΦM(T, V, D, N) :

ΦM(T, V, D, N) = E − T S − D M = F − D M = −kT ln ΔM(T, V, D, N) avec ΔM(T, V, D, N) =

M

Q(T, V, M, N) e+D M/kT et dΦM = −S dT − p dV − M dD + μ dN

Que l’on travaille à M ou à D constant, les molécules sont indépendantes. Dans la limite classique (voir paragraphe 2.2.2), on a avec les notations du paragraphe 1.4.8 :

− à M constant : Q(T, V, M, N) = q(T, V, M)N N!

− à D constant : ΔM(T, V, D, N) = δM(T, V, D)N

Le plus simple est de travailler à D constant. Le problème revient à calculer la fonction de partition δM(T, V, D) relative à une molécule. Deux phénomènes inter-viennent :

– Le moment dipolaire permanent de la molécule a tendance à s’aligner avec le champ électrique appliqué D. L’énergie emmagasinée par un dipôle de moment

dipolaire μ0 dans un champ D vaut (θ est l’angle entre μ0 et D) : −μ0 · D = −μ0Dcos θ

– Un moment dipolaire induit μi apparaît. En champ faible, celui-ci est propor-tionnel à D : μi= α D. Le coefficient α est une propriété de la molécule appelée

polarisabilité. Le travail nécessaire pour créer ce moment induit vaut :

 D

0 −μi(D) dD =  D

0 −α D dD = −α D2 2

La somme des deux contributions est appelée énergie potentielle rotationnelle :

UR(μ, D) = UR(θ, D) = −μ0Dcos θ − α D2 2

Pour calculer δM(T, V, D), on somme sur tous les vecteurs μ = μ0+ μipossibles :

δM(T, V, D) =

q(T, V ) e−UR(μ, D)/kT

Cette somme est en fait une intégrale : toutes les orientations de μ sont permises :

δM(T, V, D) =  0  π 0 q(T, V ) expμ0Dcos θ + 12 α D2 kT sin θ dθ

On trouve, en remarquant que δM0 (T, V ) = δM(T, V, 0) est égal à 4π q(T, V ) :

δM(T, V, D) = δ0 M(T, V )sinh y y e α D2/2kT avec y = μ0D kT et donc ΔM(T, V, D, N) = δ0M(T, V )N N! sinh y y N eN α D2/2kT puis ΦM(T, V, D, N) = Φ0 M(T, V, N) − N α D2 2 − NkT lnsinh y y avec Φ0 M(T, V, N) = −kT lnδM0 (T, V )N N!

On en déduit par dérivations toutes les propriétés thermodynamiques du système. Nous nous limiterons au calcul du moment dipolaire, de l’entropie et de la capacité thermique à V et D constants. La fonction Φ0

M(T, V, N) sera supposée connue. Ses contributions à l’entropie, à l’énergie interne et à la capacité thermique seront notées

Moment dipolaire. De dΦM = −S dT − p dV − M dD + μ dN on déduit : M = − ΦM ∂D  T,V,N

= Nα D+ μ0L(y) avec L(y) = coth y − 1 y

L est la fonction de Langevin. Son graphe est représenté figure 4.8. On en déduit

la permittivité ε du milieu : D = E + P ε0 = D ε + M ε0V = D1 ε + N α ε0V + N μ20 ε0V L(y) y  1 ε = 1 − ρ ε0  α+ μ2 0L(y) y  avec ρ= N V et y= μ0D k T L

Fig. 4.8 – Fonction de Langevin L(y) = coth y − 1

y Étudions les deux cas extrêmes.

– En champ fort ou à basse température, L(y) tend vers 1. On obtient alors

¯μ ≈ α D + μ0. Tous les moments sont alignés à D. La rotation est bloquée. – Sous faible champ ou à haute température, y est petit. On peut dans ces

condi-tions utiliser les développements limités : sinh y y ≈ 1 + y2 6 et L(y) ≈ y 3 y3 45 Le moment dipolaire moyen par molécule devient :

¯μ = α D + μ0L(y) ≈ α D + μ20D 3kT

Le premier terme est le moment dipolaire induit. On peut vérifier que le deuxième correspond à une moyenne de la composante parallèle à D du

mo-ment dipolaire permanent μ0, dans une situation où l’orientation de celui-ci est aléatoire : "π

0 "0cos θ) eμ0D cos θ/kT sin θ dθ π

0 eμ0D cos θ/kT sin θ dθ =

μ20D

3kT

Conclusion : à haute température ou sous faible champ, les rotateurs sont libres ; les orientations des moments dipolaires permanents sont distribués aléa-toirement.

Entropie et capacité thermique.

Fig. 4.9 – Milieux diélectriques : capacité thermique L’entropie est obtenue par dérivation par rapport à T :

S = − ΦM ∂T  V,D,N = S0− NkyL(y) − lnsinh y y 

On vérifie facilement que S est toujours inférieure à S0 : le champ électrique limite la liberté de mouvement de rotation des dipôles, et il y a diminution d’entropie.

Pour la capacité thermique CVD, il faut exprimer le potentiel thermodynamique

E− D M en fonction de (T, V, D, N).[7] On trouve (figure 4.9) :

E− D M = ΦM + T S = Φ0 M + T S0N α D2 2 − Nμ0DL(y) CVD = − (E − DM) ∂T  V,D,N = C0 VD+ Nk1 − y2 sinh2y 

7Pour CVM, on exprime E en fonction de (T, V, M, N ) ; pour CpM, on exprime E + p V en fonction de(T, p, M, N) ; pour CpD, on exprime H = E + p V − D M en fonction de (T, p, D, N ).

Les gaz parfaits quantiques

5.1 Les différents cas pratiques

On a vu (paragraphe 3.3.1) que le modèle haute température est valable si

ρΛ3  1, avec Λ = h/2π m kT . Cette condition est vérifiée dans la plupart des cas pratiques. On étudie ici deux systèmes de particules matérielles pour lesquels le modèle haute température n’est plus utilisable.

L’hélium est particulier pour deux raisons :

– c’est un atome de faible masse (3He : A= 3, 4He : A= 4) ;

– c’est un gaz rare : les interactions entre atomes sont extrêmement faibles. Les interactions sont si faibles que l’on peut considérer le gaz comme quasiment parfait jusqu’à l’état liquide. Les densités valent ρ ≈ 1, 60 1028 atomes par m3 pour3He, et ρ≈ 2, 26 1028 atomes par m3 pour4He. Moyennant quoi, la condition

ρΛ3(T )  1 s’écrit T 6 K pour les deux isotopes (voir équation 3.2). Sachant que les températures de liquéfaction valent 3,2 K (3He) et 4,2 K (4He), le modèle classique décrit au paragraphe 3.3.1 ne convient plus à basse température, les effets quantiques devenant de plus en plus importants au fur et à mesure que la température décroît. À noter que, bien que faibles, les interactions classiques à l’état liquide existent. Les résultats ne pourront donc être que qualitatifs.

Autre propriété à prendre en compte : le spin. L’hélium 3 est un atome de spin 1/2 (c’est donc un fermion) alors que l’hélium 4 est un atome de spin nul (c’est donc un boson). A basse température, les deux isotopes auront des comportements radicalement différents.

L’électron : dans les métaux dits normaux, le système constitué des électrons

de conduction peut être considéré comme un gaz parfait. C’est le modèle du gaz d’électrons libres de Fermi. Les principales caractéristiques de ce gaz :

– très faible masse de la particule (m≈ 10−30kg), spin 1/2; – haute densité du gaz (ρ≈ 3 1028e/m3).

La condition ρΛ3(T )  1 s’écrit ici T 50 000 K. Jusqu’à la fusion du métal, la température sera considérée comme très basse : le gaz d’électrons est dit dégénéré.

Il existe également des gaz purement quantiques, constitués de particules imma-térielles (particules de masse nulle comme les photons ou de phonons). Ce type de gaz, au traitement particulier, a fait l’objet des paragraphes 2.4 et 2.5.

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