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INTRODUCTION 1.1 Aspects générau

1.2.5. Modulation de la biogenèse et de l’activité des microARN

1.2.5.1. Régulation de l’expression génique des microARN

Comme tous les transcrits, l’expression des microARN et de leurs précurseurs est sujette à des régulations transcriptionnelles. Cela passe par l’activité de facteurs de transcription, de sorte que l’environnement cellulaire ou tissulaire influence grandement la biogenèse des microARN. Par exemple, le facteur de transcription P53 est capable de réguler l’expression des microARN appartenant à la famille du miR-34 [80]. De la même manière, MYC est capable de réguler l’expression des microARN impliqués dans l’apoptose et la survie cellulaire [81].

En contrepartie, les microARN peuvent aussi réguler l’expression des facteurs de transcription, de sorte que l’interaction entre ces deux entités se fait souvent sous la forme de boucles de rétroaction positive ou négative [82].

Comme nombre d’autres séquences génomiques ; les gènes codants pour les microARN sont soumis à des modifications épigénétiques. De la même manière, les microARN qui dérivent d’intron de gènes sont soumis aux régulations des gènes qui les contiennent [83].

Les modifications épigénétiques des séquences codant pour les microARN peuvent être physiologiques ou pathologiques. Par exemple, l’inhibition de l’expression de certains microARN suppresseurs de tumeurs, par divers mécanismes génétiques ou épigénétiques, mène à la surexpression de protéines oncogènes. Cela peut alors avoir une importance fonctionnelle dans le développement des individus, mais aussi dans la tumorigenèse. C’est ce qui se produit dans le cas des lymphocytes T issus de lymphomes, où le locus codant pour le microARN suppresseur de tumeur miR-203 est hyperméthylé, comparativement aux lymphocytes T de tissus sains [84]. Au contraire, l’inhibition épigénétique de microARN oncogènes ouvre les prémisses de thérapies basées sur la régulation des microARN pour traiter les cancers [85, 86].

1.2.5.2. Modulation de l’expression et de la maturation des microARN par des protéines

Certaines protéines capables de lier l’ARN peuvent influer sur la biogenèse des microARN. Par exemple, dans le noyau, la protéine Lin-28 empêche Drosha de cliver le pri-let -7. Dans le cytoplasme, elle prévient la maturation du pré-let-7 par Dicer. Lin-28 étant elle-même régulée par let-7, ce mécanisme s’inscrit donc dans une boucle de rétrocontrôle entre Lin-28 et let-7 [87].

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Un autre exemple concerne les molécules, telles que heterogeneous nuclear ribonucleoprotein A1

(hnRNPA1), capables de lier la boucle des précurseurs des microARN. Elles interagissent avec la machinerie des microARN pour favoriser ou inhiber la maturation de ceux-ci [88] ; certains microARN sont plus sensibles à ces changements que d’autres [5].

Dans d’autres cas, c’est la modification de la séquence même des prémicroARN qui influe sur leur maturation. C’est ainsi que les Adenosine deaminases acting on RNA (ADARs) empêchent l’expression du miR-142 en modifiant la séquence de son précurseur par édition [89].

Au contraire, certaines protéines dénommées terminal uridyl transferases (TUT) sont capables d’additionner un nucléotide dans les séquences des prémicroARN. Cette addition accélère leur prise en charge par la machinerie des microARN, ce qui augmente la génération de microARN matures [90].

1.2.5.3. Régulation de la durée de vie et de la dégradation des microARN

La demi-vie des microARN varie grandement selon le type cellulaire allant de 8 h et [91] jusqu’à 3 semaines dans certaines cellules quiescentes [92]. Les mécanismes qui modifient cette durée de vie régulent donc l’abondance et la fonction des microARN. Le plus décrit de ces mécanismes, le target RNA–directed miRNA degradation (TDMD) entre en jeu lorsque les microARN reconnaissent leur cible avec une grande complémentarité. Cette complémentarité parfaite ou quasi parfaite permet aux microARN de réguler leurs cibles de façon plus efficace, mais expose la partie 3’ terminale des microARN à diverses transférases et exonucléases. Ces dernières vont alors modifier ou cliver les microARN et conduire à leur dégradation [5].

1.2.5.4. Modifications et dégradation des protéines de la voie des microARN

La machinerie responsable de la production des microARN est sujette à des régulations au niveau transcriptionnel (épigénétique, facteur de transcription, régulation de l’épissage) qui modifient leur expression et leur stabilité, impactant alors la genèse des microARN [93].

Ces protéines sont aussi sujettes à des modifications post-traductionnelles qui influent sur leur fonction et la génération des microARN. Par exemple, la phosphorylation de Drosha peut influer sur sa localisation nucléaire et la maturation des précurseurs de microARN [94]. La stabilité de DGCR8 est en partie dépendante de sa phosphorylation par la kinase ERK [95] et

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son activité est modulée lorsque les lysines contenues dans son domaine de liaison aux microARN sont désacétylées par des Histone deacetylases (HDAC) [96]. Au contraire, Drosha est stabilisée par des acétylations au niveau de son domaine N-terminal [97].

De la même manière, DICER peut être stabilisée par glycosylation [98], alors que les protéines Ago sont stabilisées par hydroxylation [99] ou déstabilisées par SUMOylation [100] et leur activité est grandement influencée par leur degré de phosphorylation [101].

Toutes ces modifications influent donc sur la dynamique globale de production des microARN. Selon leur voie de génération (canonique ou non canoniques), certains microARN sont plus ou moins impactés par les modifications post-traductionnelles des protéines de la voie des microARN.

1.2.5.5. Les ARNnc qui lient les microARN

L’activité des microARN peut être modifiée lorsque ceux-ci sont liés à des ARN endogènes compétiteurs (competing endogenous RNA, ceRNA)[102]. Ainsi, certains longs ARN non codants fonctionnent comme des éponges à microARN qui les fixent les empêchent ainsi de réguler leurs cibles transcrites [103]. En contrepartie, les microARN empêchent certains longs ARNs non codants d’exercer leur fonction au sein de la cellule [104].

De la même manière, d’autres ARNs non codants comme les ARNs circulaires [105] ou des transcrits issus de pseudogènes peuvent lier certains microARN et modifier leur disponibilité dans la cellule [106, 107].

Ainsi, tous ces ARNs entrent en compétition avec les ARNm en tant que cible moléculaire, et empêchent leur régulation par les microARN. Néanmoins, la quantité de ceRNA nécessaire pour réguler effectivement l’activité des microARN reste discutée, étant donné que la plupart des données décrivant ces mécanismes ont été obtenues dans des conditions supra- physiologiques [47, 108]

À l’inverse, des fragments de microARN (semi-microARN, smiRNAs) peuvent entrer en compétition avec les microARN matures en se fixant sur les ARNm et ainsi empêcher la régulation de ces cibles [109]. De façon similaire, de petits oligonucléotides peuvent moduler la

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maturation des microARN en interagissant avec la machinerie des microARN [110]. Néanmoins, l’existence physiologique de tels mécanismes reste élusive.