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Améliorations comportementales et modifications cérébrales et endocrines induites par l’expérience sexuelle

C) Dans les autres modèles animaux

II. Modifications cérébrales induites par l’expérience sexuelle

1) Modifications de la mPOA induites par l’expérience sexuelle

Plusieurs études ont décrit des modifications moléculaires induites par l’expérience sexuelle dans la mPOA de rat. Dans les six études présentées ci-dessous, l’expérience sexuelle est induite par des expositions multiples pendant plusieurs semaines à une femelle réceptive. Le premier paragraphe de cette partie traite des différences d’expression protéique détectées en condition basale entre des mâles naïfs ou sexuellement expérimentés. Le deuxième paragraphe s’intéresse aux différences qui existent entre des mâles naïfs et sexuellement expérimentés en ce qui concerne les modifications transitoires induites par l’accouplement.

- Modifications à long terme de la mPOA

Dans une première étude, les niveaux d’expression des récepteurs de l’ocytocine, neuropeptide connu pour son action facilitatrice sur le comportement sexuel (Gil et al. 2011) (chapitre 2, partie II-H) ont été détectés par RT-qPCR et par Western blot réalisés à partir de mPAO de rats naïfs et sexuellement expérimentés (Gil et al. 2013). Les rats sexuellement expérimentés présentent une augmentation des niveaux d’expression des récepteurs de l’ocytocine et de leurs ARNm dans la mPOA (Figure 39).

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Une autre étude réalisée par Dominguez et al. (2006a) a caractérisé les niveaux d’expression de nNOS. Cette enzyme est responsable de la synthèse de NO, un neuromédiateur gazeux connu pour son action activatrice de la libération de dopamine dans la mPOA et son action facilitatrice du comportement sexuel (chapitre 2, partie II-H). Les rats sexuellement expérimentés présentent une augmentation du nombre de cellules nNOS-immuno-réactives ainsi qu’une augmentation du niveau global d’expression de nNOS détectée par Western blot (Dominguez et al. 2006a) (Figure 40).

Figure 40 : Les rats sexuellement expérimentés possèdent davantage de cellules nNOS ainsi que des niveaux d’expression plus élevés de nNOS dans la mPOA (Dominguez et al. 2006a)

(A) Nombre de cellules nNOS détectées dans la mPOA par IHC et micrographie représentative de l’IHC. (B) Estimation du niveau total d’expression de la nNOS par Western blot.

Figure 39 : Les rats sexuellement expérimentés présentent une augmentation des niveaux d’expression des récepteurs de l’ocytocine dans la mPOA (Gil et al. 2013)

Les niveaux d’expression des récepteurs de l’ocytocine (OTR), estimés par Western blot, sont augmentés dans la mPOA de rats sexuellement expérimentés.

B

A

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Enfin, une étude réalisée par Nutsch et al. (2016) s’est intéressée à l’influence de l’expérience sexuelle sur l’expression des récepteurs D2. Ces récepteurs localisés dans la mPOA régulent positivement le comportement sexuel et les réflexes génitaux puisque l’injection systémique d’un antagoniste retarde la première montée et diminue le nombre de montées et d’éjaculations chez le rat (Pfaus et Phillips, 1989) (chapitre 2, partie II-A). Cette étude indique qu’un rat sexuellement expérimenté possède davantage de cellules D2 immuno-réactives dans la mPOA qu’un rat naïf (Figure 41).

Ainsi, il apparait que la mPOA est le siège de modifications protéiques qui ne semblent pas être restreintes à un seul système de neurotransmission comme le montre l’augmentation des niveaux de protéines associées aux systèmes ocytocinergiques, nitrergiques et dopaminergiques.

- Modifications transitoires de la mPOA induites par l’accouplement et potentialisées par l’expérience sexuelle

Un certain nombre de modifications moléculaires sont observables uniquement durant un court intervalle de temps après un accouplement. Cela est notamment le cas de phosphorylations de protéines ou encore d’expression de gènes d’activation précoce. Les rats sexuellement expérimentés sacrifiés 80 minutes après l’éjaculation possèdent davantage de cellules c-Fos immuno-réactives que des rats naïfs sacrifiés dans les mêmes conditions après leur première éjaculation (Lumley et Hull, 1999) (Figure 42). Ainsi, de façon similaire à la souris, l’expérience sexuelle augmente l’immuno-réactivité c-Fos, interprétée comme un index de l’activation de la mPOA. Cela est confirmé par des études s’intéressant à l’activité enzymatique de la cytochrome oxydase, enzyme limitante du métabolisme oxydatif qui indiquent que les rats sexuellement expérimentés présentent une augmentation de l’activité métabolique basale de la mPOA (Sakata et al. 2002).

Figure 41 : Les rats sexuellement expérimentés possèdent davantage de cellules D2 immuno-réactives dans la mPOA (Nutsch et al. 2016)

La quantification du nombre de cellules D2 immuno-réactives indique que les mâles sexuellement expérimentés présentent davantage de cellules D2 immuno-réactives que des mâles naïfs.

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Figure 42 : Les rats sexuellement expérimentés possèdent davantage de cellule c-Fos immuno-réactives dans la mPOA (Lumley et Hull, 1999)

(A) Micrographie représentative et (B) quantification de l’IHC détectant c-Fos dans la mPOA d’animaux naïfs et sexuellement expérimentés sacrifiés 80 minutes après l’éjaculation. Les rats sexuellement expérimentés possèdent davantage de cellules c-Fos, interprété comme un index de l’activation de la mPOA.

Une autre étude a comparé la mPOA de rats naïfs et de rats sexuellement expérimentés, sacrifiés 2h après l’éjaculation (Robison et al. 2017). Les niveaux d’expression de deux enzymes, les hème-oxygénase 1 et 2 (HO-1 et HO-2), ont été estimés par Western blot (Figure 43). Ces enzymes sont capables de synthétiser du monoxyde de carbone (CO) dont le rôle dans la régulation des fonctions hypothalamiques est encore loin d’être élucidé (Mancuso et al. 2010). Cependant, la participation du CO au contrôle des fonctions de reproduction est soutenue par sa capacité à stimuler la libération de GnRH in vitro (Errico et al. 2010). Il apparait ainsi que les mâles sexuellement expérimentés possèdent des niveaux de HO-1 et HO-2 plus élevés dans la mPOA que des mâles naïfs.

Figure 43 : Les rats sexuellement expérimentés présentent une augmentation des niveaux d’expression de HO-1 et HO-2 dans la mPOA (Lumley et Hull 1999)

Estimation par Western blot du niveau d’expression des enzymes HO-1 et HO-2 (hème-oxygénase 1 et 2), catalysant la formation de monoxyde de carbone (CO). Les mâles sexuellement expérimentés, sacrifiés 2h après l’éjaculation, présentent des niveaux d’expression supérieurs aux mâles naïfs.

A

U.A.

B

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Enfin, dans une étude réalisée par McHenry et al. (2012a), des rats naïfs et sexuellement expérimentés sont sacrifiés 2 heures après éjaculation et les niveaux de la forme phosphorylée de DARP32 (p-DARP32) sont estimés par Western blot dans la mPOA (Figure 44). Cette protéine est connue pour être activée suite à la stimulation de récepteurs dopaminergiques de type D1, la plupart du temps via des mécanismes PKA-dépendants. Les mâles sexuellement expérimentés présentent une augmentation de la forme phosphorylée de DARP32.

Ainsi, la mPOA, connue pour être activée lors de l’accouplement, apparait potentialisée par l’expérience sexuelle comme l’indique l’augmentation des niveaux de c-Fos, d’enzymes HO et des voies de signalisation en aval des récepteurs dopaminergiques D1. De plus, l’expérience sexuelle induit une augmentation des niveaux d’expressions des récepteurs AR chez la souris et des récepteurs de l’ocytocine, de la nNOS et des récepteurs D2 chez le rat. Ces différentes molécules, appartenant à des systèmes de neurotransmission différents, ont pour point commun de faciliter l’expression du comportement sexuel.

D’autres modifications cérébrales localisées dans des régions différentes de la mPOA ont également été reportées comme étant associées à l’expérience sexuelle.

Figure 44 : Les rats sexuellement expérimentés possèdent des niveaux plus importants de p-DARP32 dans la mPOA (McHenry et al. 2012)

Les mâles sexuellement expérimentés possèdent des niveaux plus importants de forme phosphorylée p-DARP32 (protéine intracellulaire phosphorylée suite à l’activation des récepteurs dopaminergiques D1) estimés par Western blot 2 heures après l’éjaculation.

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