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Modifications chimiques des nanotubes de carbone

Chapitre I : Introduction bibliographique

I.5. Modifications chimiques des nanotubes de carbone

I.5.1. Purification

Les échantillons de NTC bruts de synthèse contiennent en général des espèces carbonées autres que des NTC, telles que du carbone amorphe et des nanofibres de carbone mais aussi des nanoparticules métalliques. La purification des échantillons permet de s’affranchir de ces contaminants. L’élimination du catalyseur et/ou du support, sans action sur les espèces carbonées, est un cas particulier que nous préférons appeler "extraction" des NTC dans nos travaux. Un traitement de purification vise à éliminer les espèces indésirables (en modifiant au minimum les propriétés NTC, c'est-à-dire en évitant de les fonctionnaliser). Il existe une grande quantité de techniques disponibles pour purifier les échantillons de NTC. Il est possible de les regrouper en deux catégories, l’une dite par voie sèche, l’autre par voie humide. Leur efficacité varie beaucoup en fonction des échantillons traités.

Par voie sèche, la purification des NTC s’effectue par chauffage d’une poudre de NTC sous atmosphère contrôlée. Elle est souvent suivie d’un lavage acide. Dans ce cas, les auteurs utilisent la plupart du temps l’air, ou l’oxygène. Qian et al. [74] utilisent un mélange Ar/air (15 % air) à 600°C pendant 1 heure pour purifier leurs échantillons de NTC synthétisés par CCVD. L’échantillon est ensuite traité à reflux dans l’acide chlorhydrique (6N) puis rincé à l’eau distillée. Ils observent une meilleure efficacité de leur technique dans le cas de NTC préparés à partir de catalyseurs Co/W-MgO plutôt qu’à partir de catalyseurs Co/Mo-MgO (quantité importante de carbone amorphe résiduel).

Chiang et al. [96], purifient un échantillon commercial de SWNT par un traitement sous O2/Ar (5 % d’O2) pendant 1 heure. Ils font varier la température de 300 à 500°C, et à

pourcentage atomique de métal a été divisé par 10 (diminution de 1,7 à 0,17 %m.) au prix d’une perte de 57,8 % de l’échantillon.

Tobias et al. [97] purifient leurs échantillons de SWNT à l’aide de vapeur d’eau. La vapeur d’eau est introduite dans le réacteur, à 900°C pendant 4 heures, par circulation d’argon (190 mL/min) dans de l’eau chaude (98°C). L’efficacité de la technique est démontrée par des observations au MET, une faible quantité d’impuretés résiduelles est observée comparativement au produit de départ. L’analyse par spectroscopie Raman, révèle une diminution du rapport ID/G après le traitement. Aucun signe de fonctionnalisation des NTC

n’est mis en évidence, par spectroscopie Infra Rouge.

Osswald et al. [98] parviennent à éliminer complètement la bande D (spectroscopie Raman) par traitement sous air d’échantillons de DWNT. La bande D commence à diminuer en intensité à partir de 430°C, pour disparaître complètement à 510°C. Le lavage ultérieur par HCl des échantillons ainsi traités permet aussi d’éliminer une quantité accrue de métaux résiduels.

Dans le cas de la voie humide, les NTC sont traités par une solution oxydante, par exemple en présence de HNO3, H2SO4, KMnO4, K2Cr2O7 ou H2O2, ou encore d’un mélange

de ces différentes solutions.

Green et al. [99] sont parmi les premiers à avoir utilisé un traitement à base d’acide nitrique (HNO3 68 %, reflux à 140°C pendant 4h30) pour la purification d’échantillon de

MWNT. Par cette méthode ils ont pu mettre en évidence l’ouverture des NTC.

Par un chauffage à reflux dans de l’acide nitrique 70 % pendant 4 heures, Dujardin et al. [100] éliminent le carbone amorphe et les particules métalliques contaminant leurs échantillons de MWNT. Bien que l’observation au MET ne permettent pas de mettre en évidence la fonctionnalisation lors de ce traitement, celle-ci se traduit par une meilleure

affinité pour l’eau après purification. A l’aide d’une solution de H2O2 à 60°C, Feng et al.

[101] éliminent les impuretés carbonées de leurs échantillons de SWNT et MWNT. Les NTC sont ensuite maintenus dans l’acide chlorhydrique pendant 6 heures pour éliminer les particules métalliques. La structure des NTC n’est pas altérée par cette technique.

De nombreux auteurs combinent ces deux voies de purification (sèche et humide). C’est le cas de Vivekchand et al. [102] qui purifient leurs échantillons par un traitement à l’acide nitrique pendant 24 heures à 60°C suivi d’un traitement sous H2 à 1000°C pendant

2 heures. Ces étapes sont répétées deux fois. Les NTC semblent purifiés au vu des images de MET. Cependant la spectroscopie Raman montre aussi une augmentation du rapport ID/G,

probablement due à la formation de défauts structuraux dans les NTC suite aux traitements. Aucun rendement de cette méthode n’est cependant indiqué.

Des SWNT synthétisés par CCVD, subissent deux traitements de purification pour atteindre 98% de pureté [103] : l’échantillon est d’abord chauffé à reflux à 120°C pendant 12 heures dans HNO3 4N ; puis sous air à 470°C pendant 30 minutes. Un lavage à l’acide

chlorhydrique est enfin effectué pour éliminer le reste des impuretés. L’analyse par spectroscopie Raman révèle que le rapport ID/G diminue ainsi de 0,35 à moins de 0,01. L’acide

nitrique provoque habituellement la fonctionnalisation des NTC et la création de défauts à leur surface. Le fait d’obtenir une bande D de très faible intensité en spectroscopie Raman peut laisser penser que les NTC fortement fonctionnalisés et/ou comportant des défauts sont éliminés par le traitement sous air. Une analyse par spectroscopie Infra Rouge pour vérifier si l’échantillon contient des fonctions -OH et -COOH caractéristiques de l’action de HNO3

serait nécessaire.

Les rendements de ces différentes techniques sont rarement indiqués, ainsi que l’effet du traitement sur la structure des NTC (fonctionnalisation, défauts…). Toutes ces techniques

de purification illustrent bien le fait que selon le mode de synthèse de NTC et la nature du catalyseur utilisé, les impuretés vont être différentes et plus ou moins faciles à éliminer. Toutes les méthodes développées ne vont pas être applicables à tous les échantillons de NTC. Il n’y a donc pas de technique universelle, elles dépendent fortement de chaque échantillon et de sa méthode d’élaboration. Il est à noter que les températures de combustion des différentes espèces carbonées peuvent être relativement proches avec une cinétique variable, expliquant la faible sélectivité et les fortes pertes de masse lors des étapes de purification.

I.5.2. Fonctionnalisation

La fonctionnalisation des NTC modifie leur paroi externe et donc l’interface avec leur environnement. Il est ainsi possible d’accroître l’affinité pour un milieu donné et donc de faciliter la dispersion des NTC dans ce milieu. La réactivité des NTC est proche de celle du carbone en général et du graphène en particulier. Cependant les contraintes liées à la courbure ainsi qu’aux extrémités accroissent la réactivité de la surface externe du NTC.

La fonctionnalisation des DWNT permet de modifier uniquement les propriétés de la paroi externe et de conserver intacte la paroi interne, et donc la majeure partie de ses propriétés. Nous distinguons deux types de fonctionnalisation.

- Fonctionnalisation covalente :

Divers traitement oxydants (HNO3, KMnO4+H2SO4, H2O2, solution piranha (H2SO4 +

H2O2), eau régale, etc.) peuvent attaquer les extrémités ainsi que les défauts de structure à la

surface des NTC. Ils endommagent donc les NTC tout en greffant des groupements chimiques oxygénés (-OH, -COOH, etc.) qui pourront servir de point d’ancrage pour une fonctionnalisation covalente ultérieure. Cet endommagement peut être plus ou moins accentué en fonction du pouvoir oxydant et des conditions du traitement (durée, température).

De nombreux autres types de réaction peuvent permettre une fonctionnalisation covalente des NTC, comme par exemple l’halogénation (telle que la fluoration [104, 105, 106], l’hydrogénation (ponts hydrogène) [107], les cycloadditions, ou encore les additions radicalaires [108].

Figure I.7 : Exemple de fonctionnalisation de NTC par HNO3.

Une fois les NTC fonctionnalisés, il est alors envisageable de greffer sur ces fonctions des molécules pour des applications ciblées telles que la vectorisation de médicaments mais aussi le greffage de molécules fluorescentes permettant un suivi des NTC dans le vivant. La fonctionnalisation covalente des NTC modifie leurs propriétés électroniques, leurs comportements vis-à-vis des solvants ainsi que leurs propriétés mécaniques (fragilisation).

- Fonctionnalisation non-covalente :

Elle est basée sur l’adsorption (π-stacking ou autre). Cette approche est utilisée essentiellement pour la séparation des faisceaux de NTC et la préparation de suspensions de NTC, ainsi que pour la réalisation de matériaux composites. La liaison non-covalente à la surface du NTC peut se faire par différentes espèces : des polymères, des composés aromatiques, des tensioactifs ou des biomolécules [108].