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1. Introduction 143

3.4. Modélisation sans mouvement des grains

Dans un premier temps, on cherche à voir dans quelle mesure le modèle permet d’estimer les hétérogénéités de composition et de taille de structures lorsque le mouvement des grains est négligé. On prend donc en compte le mouvement du liquide dû à la convection thermo-solutale et au retrait, ainsi que le mouvement des germes avec le liquide. Ceci correspond au Cas 3. Afin de mettre en évidence l’impact des deux phénomènes { l’origine de la convection du liquide sur la formation des hétérogénéités, on décompose les phénomènes : dans le Cas 1, seul le retrait est pris en compte et dans le Cas 2, seule la convection thermo-solutale induit le transport du liquide.

On constate que la physique prise en compte pour le transport de la phase liquide a un effet sur la thermique au centre dans le lingot. On donne Figure 4- 26 (a-b-c) la carte de température autour du liquidus (égale à 636,83°C à la composition nominale) pour les Cas 1 à 3. Les lignes en rouge indiquent la position du liquidus et du solidus (caractérisés respectivement par gs=0 et gs=1). On constate que le refroidissement est plus important au centre du lingot dans la zone totalement liquide lorsque la convection naturelle est prise en compte. Le liquidus est donc dans ce cas plus haut. La thermique aux fortes fractions solides et dans la phase entièrement solide n’est pas contre pas impactée par le transport de la phase liquide.

On comprend mieux l’effet de la convection naturelle et du retrait sur le refroidissement en regardant l’effet de ces deux phénomènes sur l’écoulement. On donne Figure 4- 26 (d-e-f) la carte et les lignes de courant de la vitesse intrinsèque du liquide (relativement à la vitesse de coulée), ainsi que la position du liquidus et du solidus, et ceci pour les Cas 1, Cas 2 et Cas 3.

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(a) Cas 1 (b)Cas 2 (c) Cas 3

[ ]

T C

(d)Cas 1 (e) Cas 2 (f) Cas 3

Figure 4- 26 : (a-b-c) Cartes de température autour du liquidus et (c-d-e) Cartes et lignes de courant (en noir) de la vitesse intrinsèque du liquide (relativement à la vitesse de coulée, en m/s) pour les Cas 1, Cas 2 et Cas 3. La position des liquidus et solidus est indiquée par les lignes rouges.

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Lorsque seul le retrait est pris en compte (Cas 1), l’écoulement est contrôlé par l’appel du liquide vers les zones de fortes fractions solides. Les lignes de courant sont donc dirigées vers l’extérieur dans la zone pâteuse (Figure 4- 26-d). L’écoulement est approximativement vertical dans la zone totalement liquide mais la vitesse du liquide devient supérieure à la vitesse de coulée de façon { alimenter la zone pâteuse. L’intensité de l’écoulement induit par le retrait reste cependant trop faible pour impacter la thermique dans le lingot (les vitesses intrinsèques de la phase liquide relativement à la vitesse de coulée sont au maximum de l’ordre de 0,15mm.s-1).

De plus, l’écoulement n’étant presque pas impacté par le retrait dans la zone liquide, le mouvement des germes ne l’est pas non plus. La densité de chaque classe est égale { sa densité nominale jusqu’{ la zone de germination. Le système peut donc être assimilé { un système fermé et la densité finale de grains à une abscisse donnée ne dépend que de la surfusion maximale atteinte à cette abscisse. Celle-ci est donnée Figure 4- 27 pour les trois premiers cas. La taille finale de grains dans le Cas 1 est très proche de celle obtenue sans aucun phénomène de transport (autre que la diffusion thermique), et varie de près de 700μm an centre { 350μm près de la paroi (Figure 4- 28-a).

L’effet de l’écoulement induit par le retrait sur les macroségrégations est plus important et une ségrégation négative apparait au centre, comme on peut le voir Figure 4- 28-b. En effet, comme le retrait induit un transport du liquide approximativement dirigé vers les fractions solides croissantes, le liquide plus riche que le solide qu’il entoure se déplace vers les parois du lingot : le centre s’appauvrit en soluté. On donne Figure 4- 29 la carte de ségrégation relative en soluté pour les trois premiers cas. On peut donc voir Figure 4- 29-a la zone de formation des ségrégations dans le Cas 1.

Figure 4- 27 : Profil de surfusion maximale (en valeur absolue) dans les Cas 1, Cas 2 et Cas 3 (en traits fins) et interpolation par un polynôme de degré 6 (en traits épais).

Dans le Cas 2, la convection thermo-solutale induit un écoulement dans le sens horaire dans le système, plus précisément dans la zone totalement liquide (Figure 4- 26-e). Le sens de l’écoulement dans ce cas ne pouvait être estimé a priori. Le métal liquide, en se refroidissant près de la paroi, devient plus dense et descend vers le centre du lingot, ce qui induit bien un écoulement dans le sens horaire. Cependant, dans cette zone, le métal tend également à s’enrichir du fait du rejet de soluté lors de la solidification, ce qui l’allège. L’effet solutal a alors tendance { inverser le sens de l’écoulement. On constate donc que l’effet thermique est

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L’enrichissement en soluté dans le bain liquide est négligeable donc l’écoulement induit par la convection naturelle a un très faible impact sur les macroségrégations, comme on peut le constater Figure 4- 29-b. Le profil final de ségrégation relative est dans ce cas proche de 0 sur toute l’épaisseur (Figure 4- 28-b). L’écoulement induit par la convection naturelle a par contre un impact sur la formation des structures car il modifie le refroidissement. Le métal est rapidement refroidi en haut du lingot puis la température est presque uniforme dans le liquide et dans le haut de la zone pâteuse (Figure 4- 26-b). La vitesse de refroidissement est donc moins importante dans la zone de germination que dans le Cas 1. Ce résultat seul mènerait à la conclusion que la surfusion maximale atteinte est plus faible dans le Cas 2 que dans le Cas 1 sur toute l’épaisseur. Or on constate que ce raisonnement n’est pas vérifié au centre du lingot (Figure 4- 27). Un autre phénomène rentre en jeu : le mouvement des germes. Le brassage dans la zone liquide modifie profondément la densité en germes dans cette zone. Les germes sont en effet entrainés par le liquide vers la paroi, puis sont en partie activés en longeant la zone de germination vers le centre. Au centre du lingot, la distribution en taille des germes est donc totalement modifiée : seuls les germes trop petits pour être activés près de la paroi atteignent le centre. La compétition entre germination et croissance est alors modifiée et on constate que la surfusion augmente (Figure 4- 27). La taille finale de grains reste toutefois supérieure { celle obtenue dans le Cas 1 sur toute l’épaisseur, comme on le Figure 4- 28-a.

(a) (b)

Figure 4- 28 : (a) Profil de diamètre de grain et (b) profil de composition relative en soluté, dans les Cas 1, Cas 2 et Cas 3 ainsi que les résultats expérimentaux.

Enfin, dans le Cas 3, les deux phénomènes induisant la convection de la phase liquide sont pris en compte. On peut alors constater que le retrait est le moteur de la formation des hétérogénéités de composition tandis que c’est la convection naturelle qui explique en grande partie les hétérogénéités de tailles de structures. En effet, la convection naturelle contrôle l’écoulement dans la zone totalement liquide donc elle contrôle le refroidissement et la distribution locale en taille des germes dans la zone de germination. On peut constater Figure 4- 27 que le profil de surfusion maximale obtenu pour le Cas 3 est proche de celui obtenu pour le Cas 2. Il en va de même pour le profil de taille de grains (Figure 4- 28-a). Cependant, nous avons vu que l’écoulement induit par la convection naturelle a un effet très faible sur la

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formation des ségrégations. Le retrait, contrôlant l’écoulement dans la zone pâteuse, induit au contraire la formation de macroségrégations. La carte de ségrégation obtenue dans le Cas 3 est donc très proche de celle obtenue dans le Cas 1 (Figure 4- 29), ce qui se retrouve dans les profils de ségrégation finale Figure 4- 28-b.

(a) Cas 1 (b)Cas 2 (c) Cas 3

0 0 [ .%] m C C C wt

Figure 4- 29 : Carte de composition relative en soluté et position des liquidus et solidus (en rouge) pour (a) Cas 1, (b) Cas 2 et (c) Cas 3.

La Figure 4- 28 permet également de comparer les profils de taille de grains et de composition obtenus par le modèle { ceux obtenus par l’expérience dans le cas de l’alliage affiné. On constate qu’aucun des trois cas présentés ici ne permet de prédire ne serait-ce que qualitativement les résultats expérimentaux. La taille des grains est largement surestimée et l’augmentation de la taille des structures au centre du lingot n’est pas retrouvée par l’expérience. A l’inverse, l’intensité des macroségrégations est sous-estimée, même si la ségrégation centrale négative est retrouvée par le calcul.