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2 Matériau, méthodes expérimentales et tenue en fatigue de l’alliage de référence

4.1 Essais de fatigue à grand nombre de cycles (matériau avec défauts naturels / artificiels)

4.1.5 Modélisation de la limite de fatigue à grand nombre de cycles en présence de défauts

L’analyse de l’effet de la taille de défaut sur la limite de fatigue a montré qu’entre une taille d’environ 300 µm et 2 mm il y a une évolution de la limite de fatigue avec l’augmentation de la taille de défaut. Deux critères (basés sur une approche déterministe)

simple, se base sur la mécanique de la rupture en élasticité linéaire (LEFM) où l’on peut traiter les pores comme des fissures et relier la limite de fatigue au facteur d’intensité des contraintes de seuil (∆Kth). Le critère s’exprime selon la formulation montrée dans l’équation (4.1).

∆σ= ∆Kth

Y∙ π∙√AIRE (4.1)

Où Y indique le facteur de forme du pore (approximé comme une fissure) et donc en supposant un front de fissure semi-circulaire la valeur de Y a été choisie égale à 2/π pour simplifier la démarche.

En ce qui concerne la valeur du facteur ∆Kth, il faut prendre en compte que la fissure propage à partir d’un pore. Roy et al. [Roy et al. 2012] ont comparé des résultats de fissuration de la littérature (qui se réfèrent à des essais conduits sur des alliages d’aluminium moulés à différents rapports de charge) avec des essais conduits sur éprouvettes avec défauts naturels. Selon les auteurs, le comportement des fissures courtes peut s’exprimer correctement en considérant une valeur de ∆Keff où l’effet de fermeture a été corrigé. Le constat principal qui a été identifié est que les fissures naturelles amorcées à partir d’un pore ont le même comportement obtenu pour les fissures longues (avec correction de l’effet de fermeture). Il semble donc pertinent d’utiliser une valeur de seuil du facteur d’intensité des contraintes effectif. A partir des données de la littérature, Roy et al. [Roy et al. 2012] ont identifié une valeur du ∆Keff = 1.5 MPa∙m1/2. Le [Le 2016], dans son étude, a testé le critère LEFM pour des différents valeurs de ∆Kth en choisissant une valeur de 2.2 MPa∙m1/2 pour une rapport de charge positif qui donne une bonne corrélation avec les résultats expérimentaux présentés dans un diagramme de type Kitagawa-Takahashi. Lados [Lados 2004] dans son travail a identifié pour un rapport de charge R = 0.1 une valeur de ∆Keff = 2.75 MPa∙m1/2 pour un alliage A356 (sans traitement thermique). Dans le cadre de cette analyse nous avons comparé les différents valeurs de ∆Kth à partir des résultats de la littérature cités précédemment [Roy et al. 2012; Le 2016; Lados 2004]. Le critère LEFM a été donc simulé pour un ∆Kth = 1.5, 2.2 et 2.75 MPa∙m1/2. Les résultats des simulations avec le critère LEFM sont montrés en Figure 4.26.

Figure 4.26 : Modélisation du diagramme de Kitagawa-Takahashi (obtenu pour des défauts de surface) avec un critère de type LEFM, la limite de fatigue est exprimée en amplitude de contrainte

Le diagramme de Figure 4.26 montre que le choix d’un ∆Kth = 1.5 MPa∙m1/2 n’est pas le plus adapté, la courbe du critère LEFM est éloignée des points expérimentaux et donne un résultat très conservatif (la taille critique de défaut est inférieure à 100 µm). Le choix d’un ∆Kth plus élevé donne des résultats plus proches des points expérimentaux dans le domaine de variation de la taille entre 200 µm et 2 mm. Au-delà de 2 mm le critère arrive aussi à décrire l’évolution des points de type RC 4, mais ce domaine comporte l’incertitude sur le type de mesure effectuée pour l’estimation de la taille de défaut. Ce résultat est proche des résultats obtenus par Redik et al.[Redik et al. 2014] (cf. paragraphe 1.2.1) qui a identifié qu’une valeur de ∆Kth compris entre 2 MPa∙m1/2 et 2.8 MPa∙m1/2 décrit bien le comportement de plusieurs alliages de la famille Al-Si-Mg et Al-Si-Cu pour des fissures amorcées à partir d’un pore naturel. Cependant ce résultat n’a pas été identifié avec une loi effective contrairement à ce qui a été proposé par Roy [Roy et al. 2012; Roy et al. 2011]. Si on suppose qu’un pore est égal à une fissure, on peut négliger des facteurs qui généralement contribuent à la fermeture d’une fissure de fatigue comme la formation d’une couche d’oxyde, la rugosité de la surface de rupture ainsi que de la plasticité localisée. Effectivement, une fissure naturelle qui amorce sur un pore a une taille suffisamment petite telle qu’il n’y a pas encore du sillage plastique et le seuil de propagation est celui d’une fissure qui propage sans historique plastique. La valeur proposée dans les travaux de Lados [Lados 2004] ∆Keff=2.75 MPa∙m1/2 correspond à un seuil effectif, mais ne prend pas en compte l’effet du traitement thermique T6. Cette valeur semble plutôt pertinente étant donné qu’elle décrit bien l’évolution de la limite de fatigue pour une plage de taille de défaut comprise entre 300 µm (la valeur de la taille critique définie par le critère LEFM est de 312 µm) et 2 mm. Cependant ne prenant pas en compte l’effet du traitement thermique cette valeur peut se considérer comme indication mais ne se réfère pas à une

critère basé sur la mécanique de la rupture en élasticité linéaire ne prend en compte aucun effet de saturation de la taille de défaut (la ligne du critère sur le diagramme décroit à l’infini), qui dans le cas de cette étude semble se produire à partir d’une taille de défaut supérieure à 1 mm.

 Approche de type DSG

L’approche de type Defect Stress Gradient (DSG) a été amplement décrite dans la revue bibliographique et dans le Chapitre 3. Dans cette section on propose une modélisation du diagramme de Kitagawa-Takahashi en utilisant un critère de type DSG (dans sa formulation classique) qui peut se résumer dans les équations (4.2) - (4.4).

σeqDSG = σeqPt,MAX-a∇,def∙∇σeqPt (4.2)

σeqDSG ≤ β(N) (4.3)

∇σeqPt = σeqPt,MAXeq0

taille (4.4)

Etant donné que les données ont été produites pour un cas de chargement uniaxial on propose d’utiliser la contrainte équivalente de Crossland (qui a été validée à plusieurs reprises pour de chargement unixiaux sur des alliages d’aluminium de fonderie [Iben Houria et al. 2015; Roy et al. 2012; Roy et al. 2011; Mu et al. 2014a; Mu et al. 2014b]. Les résultats des essais de fatigue ont aussi montré que l’effet de la morphologie locale du défaut n’est pas un paramètre qui a un impact majeur sur la limite de fatigue de l’alliage A357-T6. La contrainte maximale autour du défaut sera donc calculée en supposant un défaut sphérique isolé afin de pouvoir utiliser la théorie de l’inclusion équivalente d’Eshelby (cf. paragraphe 3.5).

Les paramètres α, β et a∇,def, du modèle ont été estimés pour N = 2∙106 cycles et sont résumés en Table 4.3.

Table 4.3 : Paramètres matériau identifiées pour le critère de fatigue

α β (MPa) a∇,def (µm)

1.42 112.44 376

Le paramètre a∇,def a été estimé à partir des résultats des essais de fatigue en considérant deux essais conduits sur une éprouvette avec un défaut artificiel et une éprouvette avec défaut naturel (de type RC 2). Ce choix a été fait pour prendre en compte les deux typologies de défauts qui sont représentés dans le diagramme. Les valeurs de limite de fatigue ainsi que de taille de défaut utilisées pour estimer le paramètre a∇,def sont résumées en Table 4.4.

Table 4.4 : Essais de fatigue choisis pour estimer le paramètre a∇,def du critère DSG

Réf. Type de défaut σD 0.1ta (MPa) Taille défaut (µm) a∇,def (µm)

33-4 RC 2 37 1708 348

26-1 ARTIFICIEL (EDM) 48 665 404

Le diagramme de Kitagawa-Takahashi simulé avec le critère DSG est montré en Figure 4.27. On constate que le modèle décrit bien la zone de variation de la limite de fatigue en fonction de la taille de défaut. Le critère DSG (contrairement à une approche de type LEFM) a tendance à saturer à partir d’une taille de défaut proche de 2 mm. Cet effet est lié à l’évaluation du gradient local calculé autour du défaut. Si la taille du défaut augmente, la valeur du gradient a tendance à décroître et ceci porte le critère à saturer. La taille critique de défaut correspond à la valeur de a∇,def = 376 µm qui est plutôt cohérente avec les résultats expérimentaux (jusqu’à 2 mm). Il est important de noter que pour une taille supérieure à 2 mm il s’agit d’un domaine qui dépasse le concept de défaut et se rapproche d’un effet d’entaille, et pour lequel d’autres critères sont envisageables pour mieux décrire le comportement en fatigue.

L’approximation de la morphologie du défaut avec une sphère ne semble pas avoir impacté les résultats des simulations en montrant que, d’un point de vue globale un critère de ce type ne nécessite pas un paramètre additionnel prenant en compte la morphologie du défaut pour bien décrire l’effet de la taille de défaut sur la limite de fatigue en présence de défauts naturels.

Figure 4.27 : Modélisation du diagramme de Kitagawa-Takahashi (obtenu pour des défauts de surface) avec un critère de type DSG, la limite de fatigue est exprimée en amplitude de contrainte