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Chapitre introductif

2. Forêts, Climat et Albédo : état de l’art

2.2. Observation et modélisation de l’albédo

2.2.2. Modélisation de l’albédo de surface

L’étude des surfaces et de ses propriétés est de plus en plus basée sur l’observation satellitaire qui fournit des données de manière régulière, permettant d’accéder à tout point des surfaces terrestres et permettant de reconstruire les évolutions historiques de ces propriétés. Cependant les produits satellitaires, seuls, ne permettent pas de prédire l’évolution future de l'albédo de surface et son impact sur le climat. Une alternative est d'utiliser des modèles de surface (LSM), couplés à des GCM, qui sont aujourd'hui capables de représenter l'évolution des flux d'énergie, d'eau et de carbone à la surface, et ce à l'échelle d'un paysage (> 100m) et à l'échelles mondiale, et sur des périodes temporelles qui peuvent aller de quelques heures à plusieurs centaines d'années. Depuis le début des années 70, un grand nombre de modèles LSM ont été développés par la communauté scientifique. Ces modèles ont considérablement évolué afin de permettre une description de plus en plus précise des différents processus biogéochimiques et biophysiques. Ainsi la plupart des modèles LSM, implémentés dans des modèles atmosphériques de prévision numérique du temps (modèles NWP, « Numerical Weather Prediction ») et de climat (modèles GCM, « Global Climate Model »), représentent aujourd’hui les processus suivants, de façon plus ou moins explicite : la photosynthèse,

les flux de carbone associés, les transferts d’eau et de chaleur dans les différentes couches du sol, l’évolution de la biomasse de la végétation et de sa phénologie, etc. (Boone et al., 2017). Concernant l’albédo de surface, différentes stratégies sont employées dans les LSM.

a) Modèles de transfert radiatif

La difficulté à modéliser l'évolution de l'albédo des surfaces végétalisées réside dans la caractérisation du chemin parcouru par le rayonnement solaire dans la canopée. Le comportement du rayonnement (réflexion, absorption, transmission) dans la végétation peut être étudié à l'aide de la physique du transfert radiatif. Toutefois les interactions entre le rayonnement et la végétation vont dépendre de l’échelle spatiale à laquelle on se place (canopée ou feuille). En effet, à l’échelle spatiale de la feuille, la quantité de lumière réfléchie, absorbée ou transmise va dépendre principalement des propriétés biochimiques de la feuille, et notamment dans le domaine spectral où la photosynthèse est active (PAR). Depuis les années 1960, différents modèles plus ou moins complexes cherchent à modéliser le comportement du rayonnement à l’échelle de la feuille. On mentionnera de manière non exhaustive les modèles LEAFMOD (Ganapol et al., 1998), LIBERTY (Dawson et al., 1998) et SLOP (Maier et al., 1999). En 1990, Jacquemoud et al. présentaient la première version du modèle PROSPECT. Ce modèle, largement repris par toute la communauté scientifique, est un modèle de couches dans lequel l’estimation de la fraction de lumière absorbée et réfléchie/transmise par la feuille repose sur sa structure interne et sa composition biochimique. Le comportement de la lumière (diffusion/absorption) est estimé dans le domaine du visible (0.4 m - 0.7 m) et de l'infrarouge proche (0.7 m-2 m). Dans sa première version, le modèle reposait sur trois paramètres d’entrée : le nombre de couches de la feuille, la teneur en chlorophylle et la teneur en eau. Depuis, de nouvelles variables telles que la teneur en matière sèche ont été ajoutées dans les versions plus récentes (Jacquemoud et al., 2000 ; Feret et al., 2008). La contribution relative de ces quatre variables à la transmittance est montrée dans la Figure I-13. Dans le domaine spectral d’action de la photosynthèse (PAR) [0.4-0.7 m], la teneur en chlorophylle est le principal facteur contrôlant le comportement du rayonnement à l’échelle de la feuille (Figure I-13). Toutefois, l’estimation de la réflectivité à l’échelle de la feuille implique de connaître la quantité de rayonnement incident arrivant jusqu’à cette feuille. Pour ce faire, le cheminement du rayonnement solaire dans la canopée doit être modélisé. De nombreux modèles, plus ou moins réalistes, ont été développés.

Figure I-13: Contribution des concentrations de chlorophylle (en vert), de la teneur en eau (en bleu), de la teneur en matière sèche (en marron) et de la structure de la feuille (en rouge) à la transmittance des feuilles simulée par PROSPECT (Jacquemoud et al., 2002). La courbe en noir en trait plein est la somme des contributions, la ligne verticale noir en pointillés indique la limite entre le PAR (0.4-0.7 m) et l'infrarouge proche (0.7-2 m).

Dans la canopée, les modèles de transfert radiatif les plus simples (modèles « big-leaf ») assimilent la canopée à un milieu homogène où la totalité des éléments de la canopée (feuilles) ont la même réponse physiologique. Ainsi dans les modèles « big-leaf », la canopée est assimilée à une unique et grande feuille (Sellers et al., 1996 ; Dickinson et al., 1998). Cependant, Ross (1981) mettait en évidence qu’à l’échelle de la canopée le cheminement du rayonnement solaire dépend de l’architecture de la canopée. A partir de cette période de nombreux modèles de représentation du comportement du rayonnement dans la canopée, plus réalistes, ont été développés (Verstraete et al., 1990 ; Otterman, 1990 ; Qin, 1993, Roujean, 1996, etc...). L’un des premiers modèles de restitution de la réflectance de la canopée à s’appuyer sur ces variables biophysiques est le modèle SAIL (Verhoef, 1984 ; Verhoef, 1985). Le modèle SAIL permet de simuler l’albédo d’un milieu turbide (la canopée) à partir du LAI, d’une fonction de distribution de l’orientation des feuilles et des conditions d’illumination et d’observation (Verhoef, 1984). Ces types de modèles à couche unique ont été grandement étudiés et utilisés dans les modèles climatiques car ils nécessitent un faible nombre de paramètres. Sur les cultures, ces modèles sont intéressants pour la simulation de l’albédo à l’échelle spatiale de la canopée. Cependant, les prairies et les forêts sont des environnements souvent plus complexes et caractérisés par une forte hétérogénéité de densité foliaire et une grande diversité des espèces végétales (Dolman et al., 2003). Dans les forêts, les propriétés des feuilles vont varier selon leur position et surtout selon la profondeur à laquelle elles se situent, la quantité de lumière arrivant à la feuille diminuant de manière non linéaire selon le profil vertical (Ni et al., 1997 ;

Roujean et al., 1999). A partir des années 2000, des modèles multicouches ont donc été développés afin d’estimer correctement le cheminement et les interactions des photons dans la végétation (Hanan, 2001 ; Haverd et al., 2012 ; Carrer et al., 2013 ; Yuan et al., 2014 ; Naudts et al., 2015 ; McGrath et al., 2016, etc…). Ces modèles de transfert radiatif sont constitués de plusieurs couches empilées, chacune d’elles présentant ses propres caractéristiques, ce qui permet de représenter les différentes strates dans les forêts. Finalement, afin de représenter les paysages hétérogènes de manière plus réaliste, des modèles 3D ont été développés (Gastellu-Etchegorry et al., 1996 ; North, 1996 ; Gastellu-Etchegorry et al., 2004 ; Kobayashi et Iwabushi, 2008). Dans le modèle DART par exemple (Gastellu-Etchegorry et al., 2007), les paysages arborés sont décrits de manière très pointue à partir de différents paramètres architecturaux (position des arbres, hauteur et diamètre du tronc, dimension et formes du houppier). Toutefois, du fait d’une dépendance à un nombre de variables trop grand et d’un temps de calcul trop important, ces modèles 3D ne peuvent être utilisés dans les LSM pour de l’estimation à grande échelle.

b) Estimation de l’albédo de surface dans les modèles de surface (LSM)

Aujourd’hui, dans les LSM, l’albédo de surface est estimé depuis l’échelle de la canopée et à partir de modèles de transfert radiatif 1D ou d’approches paramétriques (Loew et al., 2014). Les différentes représentations de la végétation dans les LSM pour le calcul de la fraction de rayonnement solaire réfléchie par la surface peuvent être classées en trois grandes catégories, schématisées dans la Figure I-14, que l’on nommera dans cette thèse par les termes suivants : « composite », « unicouche », « multicouche ».

Figure I-14 : Schémas conceptuels des trois grands types de représentation de la végétation dans les modèles LSM (« Land Surface Model ») pour l’estimation de l’albédo de surface.

JSBACH (« Jena Scheme of Biosphere-Atmosphere Coupling in Hamburg ») est le modèle des surfaces terrestres du modèle MPI-ESM (« Max Planck Institute – Earth System Model »). Couplé au modèle de circulation atmosphérique ECHAM6, il permet de représenter les échanges d’eau, d’énergie et de carbone à l’interface surface-atmosphère (Vamborg et al., 2011). Concernant le calcul de l’albédo de surface, JSBACH s’appuie sur une représentation dite « composite » dans laquelle les albédos spectraux (dans le VIS et le NIR) sont calculés séparément mais selon une même équation (Vamborg et al., 2011). Une approche classique de division du paysage (point de grille du LSM) en types de végétation (PFTs, « Plant Functional Types ») est utilisée. En l'absence de neige, pour chaque PFT, 𝑖, l’albédo de surface est défini par l’équation suivante :

𝛼𝑖= 𝑓

𝑐𝑎𝑛𝑜𝑝𝑖 𝛼𝑐𝑎𝑛𝑜𝑝𝑖 + (1 − 𝑓𝑐𝑎𝑛𝑜𝑝𝑖 ) 𝛼𝑠𝑜𝑙𝑖 Eq. I-5

où, 𝛼𝑖 est l’albédo de surface du PFT 𝑖, 𝛼𝑐𝑎𝑛𝑜𝑝𝑖 l’albédo de la canopée (partie feuillue) du PFT, 𝛼𝑠𝑜𝑙𝑖

l’albédo du sol dans le paysage et 𝑓𝑐𝑎𝑛𝑜𝑝𝑖 la fraction du PFT couverte par de la végétation (Vamborg et

al., 2011).

Les variables 𝛼𝑐𝑎𝑛𝑜𝑝𝑖 et 𝛼𝑠𝑜𝑙𝑖 permettant d’estimer l’albédo de surface sont des valeurs

prescrites constantes dans le temps. A l’inverse, la variable 𝑓𝑐𝑎𝑛𝑜𝑝𝑖 est définie comme suit:

𝑓𝑐𝑎𝑛𝑜𝑝𝑖 = 𝑉𝑚𝑎𝑥 (1 − 𝑒−0.5 𝐿𝐴𝐼𝑖) Eq. I-6

où, 𝑉𝑚𝑎𝑥 est la fraction du paysage (point de grille du LSM) couverte par de la végétation et 𝐿𝐴𝐼𝑖 la

surface en feuille par surface au sol (LAI) du PFT 𝑖 qui évolue dans le temps.

D’autres modèles utilisant une représentation « composite » de la végétation existent (voir Tableau I-5), comme par exemple ORCHIDEE (« Organizing Carbon and Hydrology in Dynamic Ecosystems ») dans sa version de base, dite « trunk » (Krienner et al., 2005). ORCHIDEE est le modèle de surface continentale du GCM développé par l’Institut Pierre Simon Laplace (IPSL), dont la version actuelle est l’IPSL-CM6. La représentation de l’albédo de surface dans ORCHIDEE est identique à JSBACH, exception faite des valeurs d’albédo de la canopée et du sol prescrites (Loew et al., 2014). Le modèle ISBA (« Interactions entre le Sol, la Biosphère, et l'Atmosphère »), développé par le Centre National de Recherches Météorologiques (CNRM), dans sa version de base (Noilhan et Planton (1989)) ainsi que le modèle JULES (« Joint UK Land Environment Simulator ») dans sa version « all- band » (Best, 2009 ; Best et al., 2011) sont également basés sur une représentation « composite » de la végétation. Toutefois, comparée à ORCHIDEE et JSBACH, la modélisation de la fraction du PFT couverte par de la végétation (𝑓𝑐𝑎𝑛𝑜𝑝𝑖 ) varie légèrement comme indiqué dans Eq. I-7. De plus dans

ISBA, sur les couverts forestiers et zones herbacées, la fraction du PFT couverte par de la végétation (𝑓𝑐𝑎𝑛𝑜𝑝𝑖 ) est statique dans le temps.

𝑓𝑐𝑎𝑛𝑜𝑝𝑖 = 1 − 𝑒−𝜏 𝐿𝐴𝐼𝑖 Eq. I-7

où, τ égal à 0.5 dans le modèle ORCHIDEE et égal à 0.6 dans le modèle ISBA (pour les cultures).

Dans cette représentation classique de la végétation (forme « composite »), si l’on considère un paysage forestier composé d’un unique PFT (ex : forêt de feuillus), l’albédo de surface est une combinaison d’une fraction moyenne de rayonnement solaire réfléchie par le sol et d’une fraction moyenne de rayonnement solaire réfléchie par la canopée. Ces deux albédos sont statiques dans le temps mais l’albédo de surface peut, lui, évoluer dans le temps et dans l’espace en fonction du cycle phénologique, au travers d’un LAI dynamique (Vamborg et al., 2011). Outre le fait que les albédos du sol et de la végétation sont statiques dans le temps, cette représentation « composite » simplifiée s’appuie sur la notion d’albédo BHR, dit « white-sky », et ne prend pas en compte les variations diurnes de l’albédo de surface. Comme nous l’avons vu Section 2.2.1, en conditions naturelles, l’albédo de surface (albédo « blue-sky ») peut changer au cours d’une journée. Cela est dû à la dépendance de l’albédo DHR, également appelé albédo « black-sky », à l’angle du rayonnement solaire incident. Afin d’estimer de manière réaliste la fraction de rayonnement solaire réfléchie par la surface, des modèles LSM (voir Tableau I-5) calculent de manière séparée l’albédo de surface en conditions parfaites d’éclairement direct (albédo « black-sky ») et l’albédo de surface en conditions parfaites d’éclairement diffus (albédo « white-sky »). Par la suite ces deux albédos sont pondérés par une fraction de rayonnement diffus afin d’estimer l’albédo de surface en conditions réelles d’illumination (Best, 2009 ; Best et al., 2011 ; Oleson et al., 2013, Carrer et al., 2013).

Tableau I-5 : Etat de l’art sur la manière de calculer l’albédo de surface dans les LSM couramment utilisés par la communauté scientifique. Le type renseigne sur le mode de représentation de la végétation utilisé pour le calcul de l’albédo de surface. Les trois types sont présentés dans la Figure I-14. Le tableau permet également de mettre en évidence si une représentation séparée de l’albédo dans le visible et dans le proche infra-rouge et si une distinction entre rayonnement direct et diffus est faite.

Modèle Type Spectral Diffus/Direct Référence

CLM4.5 2 Oui Oui Oleson et al., 2013

ISBA-trunk 1 Oui Non Noilhan et Planton (1989)

ISBA-MEB 2-3 Oui Oui Boone et al., 2017

Carrer et al., 2013

JULES-« all-band » 1 Non Non Best, 2009 Best et al., 2011

JULES-« spectral » 2 Oui Oui Best, 2009

Best et al., 2011

ORCHIDEE-trunk 1 Non Non Krienner et al., 2005

ORCHIDEE-CAN 3 Oui Oui Naudts et al., 2015

McGrath et al., 2016

Le modèle JULES, dans sa version « spectral-band », prend en compte ces deux conditions d’éclairement solaire (direct et diffus) afin d’estimer l’albédo de surface (Best, 2009 ; Best et al., 2011). Ce LSM, qui utilise un modèle de transfert radiatif dans une canopée s’apparentant à une couche (Tableau I-5), s’appuie sur une approximation du modèle à deux flux développé par Sellers (1985). Une solution analytique du modèle de Sellers (1985) est donnée pour chacune des deux conditions d’éclairement (Best, 2009). Ces deux solutions utilisent des valeurs de coefficient de diffusion multiple des feuilles et de coefficient de réflexion des feuilles qui sont prescrites dans JULES par type de végétation (PFT) et par bande spectrale (VIS et NIR). Dans cette version de JULES, tout comme dans la version « all-band », l’albédo du sol sous-jacent à la canopée reste prescrit. De la même manière que pour JULES, le modèle CLM4.5 (« Community Land Model »), qui est le LSM utilisé par le CESM (« Community Earth System Model »), emploie l’approximation de Sellers (1985) pour estimer l’albédo de surface (Oleson et al., 2013). Toutefois à la différence de JULES, le modèle CLM4.5 prend en compte à la fois les coefficients de diffusion multiple et de réflexion des feuilles mais également des tiges dans le VIS et dans le NIR pour chaque PFT (Oleson et al., 2013). De plus dans le modèle CLM4.5, l’albédo du sol est une fonction de sa couleur et de son humidité superficielle comme décrit par Bonan (1996) pour le LSM du NCAR (« National Center for Atmospheric Research »).

La forme prise par ces représentation (« composite » ou « unicouche ») s’appuie souvent sur l’hypothèse d’une canopée homogène où les feuilles sont distribuées de manière aléatoire et uniforme et où les tiges et les branches sont très souvent négligées (Loew et al., 2014). Dans ces conditions, la probabilité qu’un rayon solaire arrive au sol, avec un angle 𝜃, sans interaction avec les feuilles est exprimé au travers de la notion de probabilité de trouée (𝑃𝑔𝑎𝑝(𝜃)) qui suit une loi

statistique de Poisson (Eq. I-8) :

𝑃𝑔𝑎𝑝(𝜃) = 𝑒

− 𝐺(𝜃)cos (𝜃)𝐿𝐴𝐼 Eq. I-8

Dans le cas où une distribution sphérique de l’orientation des feuilles est considérée, 𝐺(𝜃) est assimilé à la valeur 0.5, valeur que l’on retrouve souvent pour les calculs de l’albédo de surface dans les LSM utilisant une représentation « composite » de la végétation. Cette représentation de la probabilité de trouée est une bonne approximation pour les couverts homogènes (Loew et al., 2014). Toutefois pour les couverts non uniformes (ex : forêts et zones herbacées), une telle représentation est source de surestimation de la fraction de rayonnement non réfléchie par la surface (Pinty et al., 2004 ; Pinty et al., 2006 ; Chen et al., 2008). Afin de limiter cette erreur une variable, 𝛺(𝜃), a été introduite. Cette variable, communément appelée facteur de groupage ou « clumping index » (Nilson, 1971 ; Chen et al., 1997), cherche à représenter le regroupement des éléments de la végétation (notion 3D) dans les LSM 1D et ainsi à diminuer la fraction de rayonnement absorbée par la canopée. Dans cette représentation non uniforme de la végétation, la probabilité de trouée est définie de la manière suivante :

𝑃𝑔𝑎𝑝(𝜃) = 𝑒

− 𝐺(𝜃) 𝛺(𝜃) cos (𝜃)𝐿𝐴𝐼 Eq. I-9

Afin de représenter la végétation de manière plus réaliste, le modèle ISBA a récemment connu des améliorations. Une collaboration entre le consortium HIRLAM (High-Resolution Limited Area Model) et Météo-France a notamment permis le développement de ISBA-MEB (« Multi Energy Balance »). Il est à noter qu’actuellement l’extension MEB n'a été validée que sur les couverts forestiers. Dans MEB, une canopée « unicouche » explicite au-dessus d’un sol permet de représenter la végétation (Boone et al., 2017). Toutefois, pour l’estimation des flux de rayonnement solaire à la surface, MEB utilise en arrière-plan le modèle de transfert radiatif multicouche (CANOPUS) développé par Carrer et al. (2013). Le schéma de transfert radiatif CANOPUS a initialement été développé afin d’améliorer la représentation de la photosynthèse dans ISBA-A-gs (Calvet et al., 1998 ; Gibelin et al., 2006). Tout comme le schéma de transfert radiatif utilisé dans JULES-« spectral- band » et CLM4.5, le modèle multicouche CANOPUS permet de prendre en compte les deux types de conditions d’éclairement solaire (direct et diffus) afin d’estimer l’albédo de surface. En sus, le schéma CANOPUS permet de représenter les canopées hétérogènes grâce à l’utilisation de la variable 𝛺(𝜃) et de la discrétisation de la canopée en dix couches empilées. En entrée du modèle, l’albédo du sol et de la canopée dans le VIS et dans le NIR sont nécessaires (Boone et al., 2017). Les valeurs actuellement utilisées sont des valeurs prescrites, statiques dans le temps. Une seule valeur d’albédo de la canopée dans le VIS et d’albédo de la canopée dans le NIR est donnée par PFT. L’albédo du sol, lui, est estimé en fonction de sa texture et de la décomposition de la matière organique dans le sol (Irons et al., 1988). Ainsi une valeur statique d’albédo du sol est calculée par point de grille. En fin de

compte dans le modèle MEB, la fraction de rayonnement solaire réfléchie par une surface, sans couvert neigeux, est exprimée de la manière suivante (Le Moigne, 2017) :

𝛼 = 1 − 𝐴𝑏𝑠 𝐶𝑎𝑛𝑜𝑝𝑒𝑒 − [ 𝑇 (1 − 𝛼𝑠𝑜𝑙(1 − 𝛼𝑐𝑎𝑛𝑜𝑝(1 − 𝑇)))] Eq. I-10

où, 𝛼 est l’albédo de surface, 𝐴𝑏𝑠 𝐶𝑎𝑛𝑜𝑝𝑒𝑒 la somme des radiations absorbées à chaque niveau de la canopée du schéma CANOPUS et [ 𝑇 (1 − 𝛼𝑠𝑜𝑙(1 − 𝛼𝑐𝑎𝑛𝑜𝑝(1 − 𝑇)))] la fraction de rayonnement

solaire absorbée par le sol (Boone et al., 2017), avec T la fraction de rayonnement solaire incident transmise à travers la canopée, jusqu’au sol, estimée par le schéma multicouche CANOPUS. Dans CANOPUS, la transmittance (𝑇), équivalent de la notion de probabilité de trouée (𝑃𝑔𝑎𝑝), est calculée

en conditions d’éclairement direct (Eq. I-11) et d’éclairement diffus (Eq. I-12) et pondérée par une fraction de rayonnement diffus.

𝑇𝑑𝑖𝑟(𝜃) = 𝑒

− 𝐺(𝜃) 𝑏𝑑𝑖𝑟(𝜃) 𝛺𝑑𝑖𝑟(𝜃) 𝐿𝐴𝐼cos (𝜃) Eq. I-11

𝑇𝑑𝑖𝑓= 𝑒− 𝑏𝑑𝑖𝑓 𝛺𝑑𝑖𝑓 𝐿𝐴𝐼 Eq. I-12

Finalement, dans le modèle MEB, alors que les flux de rayonnement infrarouge, de chaleur sensible, de vapeur d’eau (etc.) sont calculés à partir d’une végétation « unicouche », les flux de rayonnement solaire sont estimés à partir d’une représentation multicouche de la canopée (Boone et al., 2017). Dès lors, le bilan d’énergie est estimé à partir de niveaux de représentation différents ce qui peut générer des erreurs dans la fermeture du bilan énergétique. Dans le modèle de surface ORCHIDEE-CAN (« ORCHIDEE-CANopy »), l’utilisation d’un schéma de transfert radiatif multicouche pour le calcul de la fraction de rayonnement solaire se justifie par le fait que le LSM utilise cette représentation pour l’estimation de l’ensemble des flux se produisant dans, ou au travers de, la canopée (Naudts et al., 2015 ; McGrath et al., 2016). Le schéma de transfert radiatif multicouche d’ORCHIDEE-CAN utilise le schéma « unicouche » développé par Pinty et al. (2006) mais étendu à plusieurs niveaux. Le modèle développé par Pinty et al. (2006) représente l’albédo de surface en considérant trois catégories de comportement du rayonnement à la surface des zones végétalisées. La première représente le cheminement des rayons solaires n’interagissant pas avec la végétation. Ces rayons sont directement transmis puis réfléchis par le sol vers l’atmosphère. La deuxième catégorie représente, à l’inverse, les rayons n’arrivant jamais jusqu’au sol. Enfin le troisième type consiste à estimer le rayonnement réfléchi après avoir interagi avec la végétation et le sol. Le schéma de transfert radiatif dans une canopée « unicouche » de Pinty et al. (2006) a été conçu afin de représenter les interactions se produisant à l’échelle d’un paysage, c’est-à-dire dans une dimension

3D, dans un schéma 1D utilisable par les modèles GCM. Pour cela ce schéma tente de mettre à profit les produits satellitaires. Les LAI satellitaires, tels que ceux dérivés des satellites MODIS et MISR, ne pouvant être utilisés directement sans entraîner une erreur significative sur la fraction de rayonnement réfléchi (Pinty et al., 2004), le modèle fait appel à la notion de LAI efficace. Le LAI efficace (Black et al., 1991) est le LAI apparent pour le rayonnement solaire et important à la restitution de son comportement. Il diffère du LAI « vrai », classiquement défini comme la surface en feuille par surface au sol, de par un facteur de réduction, analogue à la notion de « clumping factor » (Nilson, 1971 ; Chen et al., 1997). Dans cette représentation des milieux turbides non uniformes proposée par Pinty et al. (2006), en conditions d’illumination diffuse et directe, l’hypothèse d’une distribution sphérique de l’orientation des feuilles est considérée.

c) Les variables biophysiques importantes pour l’estimation de l’albédo de surface

Au travers de l’état de l’art sur les différentes manières d’estimer l’albédo de surface dans les