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4. Evaluation de la méthode de désagrégation de l’albédo de surface

5.2. L’albédo du sol

Malgré cette sensibilité au paramètre d’inflation et aux valeurs a priori, les produits désagrégés PL-17 ont montré une bonne cohérence spatio-temporelle, avec des variabilités inter- et intra-annuelles. L’albédo du sol, qui a été évalué de manière directe et indirecte à l’échelle locale et nationale, a montré une réponse cohérente vis-à-vis de l’humidité du sol. Sur la période d’étude 2001-2013, dans 68% des cas, le mois où l’albédo du sol est maximal a été retrouvé au travers des dates où la pluviométrie est minimale, témoignant de la relation entre ces deux variables. Cependant dans 32% des cas, le mois où l’albédo du sol est maximal n’est pas retrouvé au travers de la date de pluviométrie minimale. Deux éléments peuvent limiter la corrélation entre la date de pluviométrie minimale et la date d’albédo du sol maximal. Premièrement, à certaines dates, sur certains sites, l’albédo du sol nu est difficilement observable. En effet dans les cas où le FCOVER est très élevé la quasi-totalité des variations de l’albédo de surface seront assimilées à des variations de l’albédo de la végétation. Deuxièmement, il a été montré dans la littérature scientifique que l’albédo du sol est directement corrélé à l’humidité, mais le lien entre albédo et pluviométrie est plus indirect. En effet, l’humidité des sols dépend principalement des précipitations, mais également de leur composition, de la vitesse du vent et de la température. Corréler l’albédo du sol et la pluviométrie permet de donner une première idée de la cohérence temporelle du produit désagrégé mais, pour évaluer correctement le produit sol issu de la désagrégation, il est nécessaire de montrer la cohérence entre l’albédo et l’humidité du sol.

Dans un deuxième temps, j’ai donc cherché à montrer cette cohérence au travers d’un indice d’humidité superficielle du sol (SWI1). Une relation exponentielle a été retrouvée entre le SWI et l’albédo du sol SW PL-17. Ce type de relation a été mis en évidence a plusieurs reprises dans la littérature scientifique (Lobell et Asner, 2002 ; Wang et al., 2005 ; Gascoin et al., 2009 ; Roxy et al., 2010 ; Liu et al., 2014 ; Carrer et al., 2014 ; ect.). Toutefois, il a été mis en évidence que les SWI présentaient une faible dispersion. Ces SWI très regroupés s’expliquent par le fait que l’albédo de surface MODIS utilisé, et par conséquent les albédos désagrégés qui en découlent, est un produit distribué tous les 8 jours et un composite de 16 jours. Afin d’évaluer la relation existante entre l’albédo du sol et l’humidité, le SWI a dû être moyenné sur une période de 16 jours. L’humidité des sols peut varier très rapidement suite à des évènements pluvieux. En moyennant les humidités du sol sur une période de 16 jours, une perte importante d’information est faite. Ainsi, les produits d’albédo du sol estimés à partir d’albédos de surface issus de satellites polaires tels que Terra et

Aqua, avec une fréquence bimensuelle, ne semblent pas adaptés au suivi de l’humidité du sol. Afin d’étudier la relation entre humidité et albédo du sol, l’utilisation de produits quotidiens semble plus appropriée. Les satellites géostationnaires tels que SEVIRI et MSG, eux, ont cette capacité (Cedilnik et al., 2012 ; Carrer et al., 2014). La mise en place de la méthode PL-17 sur les albédos de surface issus du satellite MSG, dans le cadre du projet SAF Land, a montré de bons résultats pour le suivi de la relation humidité-albédo du sol (R2 = 0.88). Avec un pas de temps quotidien, la palette de SWI obtenue est plus large et permet de mettre en évidence une relation plus nette avec l’albédo du sol nu SW. Cependant, entre le point de flétrissement et la capacité au champ, la relation entre albédo du sol et le SWI semble plus assimilée à une régression linéaire qu’à une loi exponentielle. Au delà on note une saturation du signal puis une ré-augmentation de celui-ci. Ces évolutions de l’albédo du sol estimé semblent cohérentes vis-à-vis du comportement de l’albédo du sol observé dans la nature et rapporté par plusieurs travaux scientifiques (Patel, 1979 ; Neema et al., 1987 ; Weidong et al., 2002).

Par rapport aux autres méthodes existantes (RE-08 et CA-14), la méthode PL-17 a permis de fournir des albédos désagrégés, et notamment des albédos du sol, présentant une dynamique inter et intra-annuelle importante. Cette dynamique permet de rendre compte des différences climatiques entre les années, contrairement aux deux anciennes versions (Figure IV-11(a)). Ainsi, comparé aux deux autres méthodes, le nouvel algorithme (PL-17) permet de fournir des données plus réalistes dans leurs évolutions. Ce changement de dynamique entre les trois versions n’a pas entaché l’intégrité spatiale de l’albédo du sol. En effet, tout comme dans la version RE-08, les dispersions spatiales pour chaque type de sol sont faibles et très proches des valeurs réalistes de RE-08 (Figure IV-12). Il est important de noter que la version RE-08 a ses points forts et ses points faibles. L’albédo du sol RE-08 est statique (limite) dans le temps, cependant cette méthode permet d’obtenir des valeurs d’albédo du sol pour des valeurs nulles de FAPAR et donc d’obtenir des valeurs d’albédo du sol nu réalistes (avantage) qui font de Rechid et al. (2008) une référence. En confrontant les produits désagrégées PL-17 (moyennes) aux produits désagrégés RE-08, il a été mis en évidence que l’albédo du sol nu (moyen) issu de ces deux méthodes présentaient des valeurs similaires (0.090 et 0.099 respectivement pour RE-08 et PL-17). Ainsi, les valeurs d’albédo du sol nu PL-17 présentent des valeurs supérieures de 10% par rapport à RE-08. Par comparaison les albédos du sol CA-14 ont montré une valeur moyenne inférieure de 17% (0.075) par rapport à l’albédo du sol de référence RE- 08. La méthode PL-17 a donc permis de diminuer l’incertitude de 60% sur l’estimation de l’albédo du sol moyen en France (écart entre PL-17 et RE-08 par rapport à l’écart entre CA-14 et RE-08). Pour les albédos de la végétation, la différence entre les trois méthodes est moindre, comme mentionné précédemment, avec des valeurs moyennes de 0.186, 0.183 et 0.180, respectivement pour RE-08, PL- 17, CA-14. Ainsi le produit d’albédo de la végétation CA-14 est sous-estimé de 3% par rapport à RE-08 (référence) tandis que l’albédo de la végétation PL-17 est sous-estimé de 2%. Toutefois, il est

important de souligner que les albédos de la végétation issus de ces méthodes de désagrégation ne représentent pas la même chose. En effet, alors que Rechid et al. (2008) utilisait le FAPAR pour réaliser sa désagrégation, les deux méthodes internes au CNRM (CA-14 et PL-17) s’appuient sur le FCOVER. Le FAPAR représente la quantité de rayonnement absorbée dans le domaine spectral où la végétation (feuilles de la canopée) est active photosynthétiquement. Par conséquent, la méthode permet de correctement séparer l’albédo du sol de l’albédo de la canopée. Dans la méthode PL-17, et dans la version précédente CA-14, la composante « sol » est isolée de la composante « végétation » à l’aide de la fraction du pixel couvert par une canopée (FCOVER). Par conséquent l’albédo de la végétation reste encore en partie influencé par l’albédo du sol sous-jacent et n’est pas un produit « pur ».

A l’échelle d’un site d’étude (Corbières), les dynamiques temporelles de l’albédo du sol PL-17 (« white-sky ») ont également pu être validées. Des mesures directes sur le terrain de l’albédo du sol ont permis de valider la dynamique temporelle de l’albédo du sol PL-17 (MODIS). Toutefois, il est important de rappeler qu’afin de comparer les valeurs d’albédo du sol issues du modèle PL-17 et des mesures terrain, l’étude a été menée de manière relative. En effet, les valeurs mesurées sur le terrain présentaient des valeurs plus de quatre fois supérieures à celles estimées à partir des données d’albédo de surface MODIS. Une première hypothèse d’erreur de mesures a été suggérée. Mais les albédos mesurés semblent en accord avec les valeurs d’albédo du sol retrouvées dans la littérature pour les sols clairs (voir Tableau I-1 du Chapitre I). Une deuxième hypothèse d’erreur dans la méthode de désagrégation a été proposée par la suite. Mais cette hypothèse a rapidement été écartée. En effet, d’une part toutes les méthodes de désagrégation (Rechid et al., 2008 ; Carrer et al., 2014) semblent en accord sur les valeurs moyennes, d’autre part l’albédo du sol dans le méthode PL- 17 ne peut être de 0.32 en moyenne sur cette période. Etant donné que l’albédo de surface non désagrégé (MODIS) oscille entre 0.053 et 0.097 entre 2001 et 2013, fixer l’albédo du sol à 0.32 entraîne nécessairement l’albédo de la végétation dans des valeurs négatives, ce qui n’est pas concevable. Cet écart entre les valeurs est très certainement dû à un problème de représentativité des données MODIS sur ce site. En effet, sur la zone des Corbières où les mesures ont été réalisées, le terrain est très vallonné. Ainsi, durant une grande partie de la journée le site se trouve dans l’ombre. Durant la campagne de terrain, les mesures ont été réalisées durant la période d’ensoleillement du site entre 12h et 13h30, heure UTC. Cependant, cette période d’éclairement est limitée dans le temps de par la topographie du terrain. Les produits satellitaires d’albédo « white- sky » MODIS sont le résultat d’une intégration sous tous les angles solaires. Par conséquent ces albédos intègrent des périodes ombrées où l’albédo de surface est très faible. Ainsi, sur les zones accidentées telles que celle des Corbières, la topographie participe à la diminution de l’albédo de surface due à des effets d’ombrage. Schaaf et al. (1994) mentionnaient les effets d’ombrages dus à la

topographie sur l’albédo de surface. Les trois méthodes de désagrégation présentées dans ce manuscrit sont toutes développées à partir de produits satellitaires MODIS ce qui expliquerait l’accord des méthodes de désagrégation sur les valeurs d’albédo du sol (moyen) SW « white-sky », et ceux malgré le problème de représentativité.

A l’échelle local du site des Corbières, l’albédo du sol obtenu à partir de la méthode PL-17 a été confronté aux relevés de précipitations quotidiennes de Carcassonne (site de relevé pluviométrique le plus proche), entre 2001 et 2013. Il a été mis en évidence grâce à ces données que la fréquence des pluies, et pas seulement la quantité, est un facteur clé pour l’estimation de l’albédo du sol. Ces résultats tendent à aller dans le sens des travaux de Carrer et al. (2014). En effet Carrer et al. (2014) ont mis en évidence, à partir de données SEVIRI, que le changement d’albédo de surface était linéairement lié au nombre de jours sans pluie.