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1.4 État de l’art sur la modélisation des procédés LCM

1.4.2 Modélisation du procédé à l’échelle macroscopique

La modélisation des procédés par infusion doit permettre de représenter plusieurs phénomènes physiques afin d’être représentatif des grandeurs caractéristiques (temps, di- mensions des pièces, santé matière). Pour des raisons d’outils de calcul et de capacité d’analyse, les premiers modèles développés étaient principalement phénoménologiques. Sur la base de constatations expérimentales, ces modèles visent à définir des relations empiriques ou semi-empiriques représentatifs des mécanismes et phénomènes observés à l’échelle macroscopique. Dans le procédé par infusion, le principal obstacle rencontré concerne l’écoulement du fluide, la résine, dans un milieu fibreux orthotrope, assimilé à un milieu poreux subissant de grandes déformations. En ce sens, l’étude et la caractérisa- tion de la perméabilité et de la déformation des produits est un enjeu majeur dans l’étude des milieux poreux.

La perméabilité des préformes

Issue des travaux de Henry Darcy [33] (Annexe A) sur l’écoulement de l’eau dans un milieu sableux, la perméabilité (ou l’imperméabilité) est aujourd’hui d’usage courant et caractérise la résistance d’un milieu à l’écoulement d’un fluide. Cette propriété caractéris- tique d’une représentation phénoménologique, est employée dans de nombreux domaines

1.4 État de l’art sur la modélisation des procédés LCM 17 tels que l’ingénierie des réservoirs, l’hydrogéologie, l’ingénierie du biomédical, l’hydro- métallurgie [34] mais encore l’industrie du moulage composite. La perméabilité réalise une synthèse d’un grand nombre d’informations relatives à l’organisation des fibres, à la fois à l’échelle microscopique et mésoscopique (taille et forme des pores, taux volu- mique de fibres, etc.). Principalement basés sur le modèle de Carman-Kozeny [35, 36], des modèles théoriques sont proprosés dans la littérature pour caractériser et prédire la perméabilité [37]. Ces modèles sont souvent limités à des configurations idéales (fibres parallèles, répartition homogène, etc.) et ne prennent pas en compte toute la complexité géométrique de la majorité des renforts. Jusqu’à maintenant, l’accès à ce paramètre a tou- jours été associé à des mesures expérimentales [38–40]. De nombreux enjeux sont encore associés à la définition et la caractérisation de ce paramètre et seront abordés dans le cadre de la caractérisation des préformes pour la simulation.

Le comportement mécanique des préformes

Que ce soit pour évacuer un excédent de résine, pour le préformage de renforts sur un moule ou encore l’étape d’imprégnation du renfort en LRI, la déformation du renfort fibreux intervient dans de nombreux procédés composites. La difficulté à caractériser le comportement des préformes réside dans la représentativité du comportement sec pour le préformage, mais également humide pendant ou après l’imprégnation de la résine (pré- imprégnés ou procédés directs). Dans la littérature, la caractérisation du comportement des préformes est naturellement adaptée aux conditions et sollicitations rencontrées dans les différents procédés. De ce fait, la caractérisation du comportement dans le plan des préformes est souvent associée aux procédés de formage [41], tandis que la caractéri- sation du comportement transverse est associée aux procédés directs de type RTM et LRI [42–44] mais également à la consolidation des pré-imprégnés [45]. Pour l’ensemble des sollicitations subies par une préforme, les études montrent que le comportement est nettement modifié par la présence de résine [43,46]. La présence de cette dernière modifie la réponse mécanique ou l’épaisseur de la préforme par le biais de deux phénomènes :

— par son action mécanique sur les préformes telles que la pression hydrostatique, ou encore une transition fluide-solide (primordiale pour les procédés de thermofor- mage).

— par un phénomène de lubrification modifiant les contacts entre fibres.

La complexité du renfort fibreux aux échelles inférieures ainsi que la forte interaction avec la résine, rendent difficile la caractérisation du comportement des préformes avec des approches phénoménologiques. Expérimentalement, le comportement transverse des préformes montre un comportement fortement non-linéaire [44]. Le renfort se comprime d’abord très facilement puis sa rigidité augmente lorsque les vides entre les fibres se comblent [20]. Associé à des approches unidimensionnelles, plusieurs auteurs utilisent le taux volumique de fibre comme mesure de déformation. La réponse mécanique de la préforme est alors modélisée par des lois polynomiales [47], puissance [48] ou encore de type "Gutowski" [45].

Le comportement humide des préformes est complexe car il fait intervenir le com- portement mécanique sec ainsi que des problématiques de mécanique des fluides, avec l’écoulement de la résine. Expérimentalement, le comportement humide des préformes

présente une réponse visco-élastique pouvant être modélisé par un modèle de type Kelvin- Voigt (système ressort-amortisseur) [42, 43, 47, 49]. Toutefois, cette représentation est dé- pendante du volume de matériau considéré sur les l’éprouvettes (donc des pièces réali- sées) ainsi que des conditions imposées aux bords [43]. Le phénomène déterminant ici est le couplage entre l’écoulement du fluide et la déformation de la préforme. Une modifica- tion de l’épaisseur de la préforme saturée entraîne une migration du fluide dans son plan et la génération d’une pression motrice.

Couplage avec l’écoulement de la résine

La réponse mécanique des préformes humides met en avant une compétition entre la contrainte mécanique reprise par le renfort fibreux et la contrainte mécanique reprise par la pression fluide. Afin de découpler les phénomènes, la littérature [45, 50] préconise rapidement l’utilisation de la loi de Terzaghi [34] dans laquelle la contrainte appliquée par la partie liquide sur la partie solide est prise en compte par sa pression hydrosta- tique. L’utilisation de cette loi est notamment la base des travaux réalisés par Gutowski et al.[45] dans leurs travaux portant sur la définition de lois de comportement transverse de pré-imprégnés. Sur la base d’un modèle de Darcy et de la loi de Therzaghi, ils pro- posent une loi de comportement reliant la contrainte mécanique à la fraction volumique de fibre (ou du taux de variation du tv f en dynamique) en fonction de la perméabilité du renfort. Toutefois, le terme de perméabilité est aujourd’hui caché dans des paramètres empiriques expérimentaux. Au contraire, Dave et al. proposent des solutions analytiques (sous la formes d’abaques) permettant de rendre compte de l’évolution de l’épaisseur to- tale de la pièce en fonction des dimensions caractéristiques de la pièce et du temps [50]. De manière similaire, d’autres auteurs ont développé des modèles unidimensionnels. Ces modèles sont alors appliqués à la prédiction de la déformation des mousses réalisant l’âme de pièces sandwichs [51], ou encore à l’évolution de l’épaisseur d’un empilement alterné de fibres et de résine [52].

De manière générale l’utilisation de solutions analytiques unidimensionnelles ne peut être appliquée à la prédiction de pièces de géométries complexes et sont donc difficile- ment applicables à des problématiques industrielles. Aujourd’hui, alors que la déforma- tion des préformes pendant l’infusion a été démontrée expérimentalement [53, 54], très peu d’études traitent de sa modélisation et les codes industriels ne permettent actuelle- ment pas de prendre en compte ce phénomène. Enfin, pour la simulation du procédé par infusion, une problématique supplémentaire concerne la modélisation du drainant. La très grande perméabilité de ce milieu engendre des problématiques numériques pour être cou- plés à des milieux de très faibles perméabilités [30, 55–57]. Ces aspects seront abordés plus précisément dans le chapitre 3.