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4.3 Cas tests de validation

5.2.1 Enjeux associés à la caractérisation du comportement des préformes

La majorité des procédés de fabrication de pièces en composite implique des déforma- tions du renfort fibreux utilisé. Pour certains procédés ou certaines étapes du procédé, la précision des prédictions est directement dépendante de la connaissance du comportement des matériaux. Les enjeux associés à la caractérisation du comportement des préformes sont alors en lien avec l’environnement (la nature du fluide, la température par exemple), les sollicitations imposées mais également avec l’échelle d’observation et de modélisa- tion sélectionnée. Concernant ce dernier point, c’est une échelle macroscopique qui a été adoptée dans ces travaux et qui sera développée dans cette section.

Enjeux associés aux procédés

La réponse mécanique d’un matériau est fonction des sollicitations extérieures, mais également de l’histoire des déformations et contraintes subies au cours de son élabora- tion. Dans le contexte des procédés LCM, différentes méthodes ou technologies peuvent être utilisées pour concevoir les préformes. Les principales méthodes évoquées dans le

chapitre 1 sont la conception de préforme par préformage et les méthodes par drapage sur moule (notamment par drapage automatique).

Le préformage consiste à draper la séquence du stratifié sur un support plat, et à uti- liser ce semi produit sur des moules de formes diverses (figure 5.2) [168]. Cette méthode est très utilisée pour les procédés de type RTM, car la mise en forme est réalisée par des méthodes rapides de type emboutissage. Néanmoins, la mise en forme du stratifié en- gendre des déformations et des efforts importants pour faire épouser la forme du moule à la préforme. Pendant cette étape, des contraintes résiduelles sont introduites dans les préformes. Ces contraintes résiduelles se manifestent notamment par des phénomènes de retours élastiques appelés « spring-back ». Ces contraintes résiduelles participent au com- portement mécanique des préformes et devraient donc être caractérisées par des voies expérimentales ou numériques.

Figure 5.2: Principale différence entre la déformation subie par un renfort pendant l’étape de (pré-)formage (a) et pendant une mise sous vide (b).

Au contraire, les préformes réalisées par drapage sur moule (par drapage manuel ou automatique) mettent en œuvre les fils de fibres (constituant le renfort) en prenant en compte les courbures et singularités des géométries. Il en résulte que cette méthode gé- nère moins de contraintes-résiduelles et l’histoire mécanique associée peut être négligée. Ainsi, lors de la mise sous vide associée à l’étape d’infusion, les forces suiveuses liées à la pression atmosphérique restent orientées suivant la direction transverse au plan des préformes (figure 5.2 (b)) et une large part de la littérature [43, 44, 71, 169–171] se limite à la caractérisation unique du comportement transverse des préformes.

Il est également possible de mentionner que pour du drapage sur moule, le temps d’im- mobilisation de ce dernier est plus long (donc plus coûteux) que pour des méthodes par emboutissage. Cette méthode est donc principalement utilisée dans des applications spé- cifiques hautes performances, tandis que le pré-formage est plutôt associé à des grandes séries.

Dans cette étude, le cadre expérimental associé aux infusions se veut « simple » et ce sont des plaques qui ont été réalisées. La caractérisation du comportement des pré- formes ne vise pas à définir le comportement complet du renfort (qui serait nécessaire pour un préformage), mais sera limitée au comportement hors plan des préformes afin de représenter la compaction puis le gonflement des renforts au cours de l’infusion. Les enjeux résident dans la définition d’un essai représentatif ou caractéristique vis à vis des matériaux et du procédé.

5.2 Caractérisation du comportement mécanique des préformes 117

Difficultés associées aux matériaux et à la présence de résine

Conceptuellement, la caractérisation du comportement transverse d’une préforme est « simple » car nécessite uniquement l’utilisation d’un banc de test dans lequel on contrôle la relation force/déplacement entre deux plans parallèles contenant la préforme à carac- tériser [171]. En pratique, la caractérisation n’est pas directe du fait de la dépendance significative au temps et au fluide présent dans la préforme. Dans la littérature, les rela- tions contrainte/déformation observées montrent des caractéristiques classiques de com- portements visco-élastiques incluant des phénomènes de relaxation, une dépendance aux vitesses de sollicitations (pour les préformes humides principalement) ainsi que des phé- nomènes d’hystérésis. La figure 5.3 [171] schématise ces comportements pour différentes sollicitations pour :

a) un phénomène de relaxation de contrainte

b) un comportement dépendant de la vitesse de sollicitation c) un phénomène d’hystérésis.

Figure 5.3: Représentation schématique des différents comportements viscoélastiques ob- servés dans la littérature selon Bickerton et al. [171].

Sur des essais de compaction, de nombreux auteurs ont montré des phénomènes d’hys- térésis et de relaxation lorsque les préformes sont imprégnées [171, 172], mais également sur des préformes sèches [169]. Une partie des essais réalisés dans la littérature a été synthétisée et étudiée par Robitaille et Gauvin dans [42, 46, 172]. Les résultats recueillis montrent que l’influence de la vitesse de sollicitation et des phénomènes de relaxation sur des préformes sèches est de l’ordre de grandeur, voire supérieure, aux temps caractéris- tiques des procédés LCM [171]. De ce fait, la dépendance à la vitesse de sollicitation est rarement considérée dans les modèles. Par contre, l’influence d’un cyclage et l’application répétée d’une contrainte paraissent être très influants sur le comportement des préformes. Sur des préformes humides, le fluide génère dans les préformes un comportement sen- siblement différent au comportement sec. Du fait du déplacement du fluide imposé par la réduction des cavités de la préforme, le comportement d’une préforme humide est alors

très influencée par la vitesse de déformation [43]. La réalisation d’essais en conditions hu- mides génère des problématiques supplémentaires concernant les conditions aux limites à adopter sur les bords de la préforme. Enfin, comme cela a déjà été évoqué, les essais sur préformes humides présentent des tv f plus importants à contrainte imposée identique (ce phénomène étant lié à la lubrification des fibres par le fluide, augmentant la mobilité de ces dernières).

Une large variété de modèles a été développée dans la littérature pour rendre compte du comportement des préformes. Notamment, Gutowski & al. [45] présentent un mo- dèle pseudo-analytique pour modéliser la déformation des pré-imprégnés. Ce modèle a ensuite été repris et adapté dans de nombreux travaux afin de représenter d’autres effets telle que la lubrification sur la déformation du renfort [173]. Des travaux ont également été réalisés dans le but de modéliser l’influence de la géométrie des fils (induite par le tissage) [174, 175] sur la réponse du renfort. Ces modèles sont le plus souvent établis par dissociation empirique des influences au fluide, au cyclage ou encore la dépendance au temps [42, 176]. Les essais sont alors réalisés à vitesse de charge ou de déformation imposée, et malgré une polyvalence apparente ces modèles ne permettent pas d’être repré- sentatifs de l’ensemble des chemins de déformation subis par les préformes (mécanismes différents durant la phase de compaction, d’imprégnation et de post-filling).

Dans ces travaux, l’objectif est d’apporter une modélisation du comportement des pré- formes sèches afin de quantifier leur compaction initiale, puis d’approcher le gonflement de la préforme pendant l’infusion. Dans ce but, des travaux [54, 169] montrent que la ca- ractérisation d’un comportement sec permet, en première approximation, de représenter convenablement ces phénomènes pour prédire les temps de remplissage. Compte tenu des problématiques de caractérisation évoquées, ces travaux ce sont également orientés vers une caractérisation du comportement transverse sec des renforts. La revue bibliographique réalisée permet alors d’appréhender l’ampleur du travail à réaliser pour caractériser un comportement plus réaliste et plus précis des préformes.

5.2.2 Banc expérimental et protocole d’essai

Sur la base des résultats et observations issus de la littérature, cette partie présente le banc d’essai ainsi que le protocole utilisés pour caractériser les comportements secs des préformes.

Banc expérimental de compaction

Le banc d’essai de compaction utilisé est relativement simple et très similaire à ceux observés dans la littérature [105,170,171,177,178]. Ce banc est composé de deux plateaux parallèles montés sur une presse. La préforme à caractériser est placée entre ces deux pla- teaux (figure 5.4). Sur le banc d’essai, le parallélisme des plateaux est assuré via une rotule verrouillable. Le parallélisme des plateaux est ainsi obtenu par une mise en contact des plateaux puis la rotule est verrouillée pour les essais. L’épaisseur des préformes est mesurée au centre des plateaux via la position du vérin, ainsi qu’au moyen d’un com- parateur de type LVDT (Linear Variable Differential Transformer) à mesure optique. Le capteur LVDT utilisé est positionné sur la périphérie des plateaux afin d’effectuer un point de contrôle du parallélisme des plateaux pendant l’essai. Pour les essais de compactions,

5.2 Caractérisation du comportement mécanique des préformes 119 l’ensemble des appareils est initialisé avec les deux plateaux en contact. L’étalonnage des appareils est alors vérifié à l’aide de cales étalons d’épaisseurs calibrées.

Figure 5.4: Photographie (a) et schéma (b) du banc de montage de compaction.

Protocole d’essai

Les caractérisations ont été réalisées sur l’ensemble des configurations du plan d’ex- périence présenté au chapitre 2 (tableau 2.2 page 32). Le protocole d’essai réside princi- palement dans le cycle d’effort ou de déplacement imposé.

La figure 5.5 représente le cycle mis en place pour les préformes de l’étude. Afin d’évaluer l’influence de l’histoire du matériau associé à une éventuelle mise sous vide multiple du système, une succession de 5 cycles de charge/décharge est réalisée. La ré- ponse d’une préforme étant très souple aux faibles tv f , puis fortement rigidifiante quand la compacité croît, le cycle d’essais ne peut être réalisé à force imposée. Par conséquent, l’essai est accompli à vitesse de déplacement imposée avec toutefois des limites définies en forces (pour ne pas imposer une pression équivalente supérieure à la pression de la bâche dans le procédé). Ainsi, ces deux limites sont imposées à une force supérieure de 3200 N, correspondant à une pression équivalente de 1 atmosphère sur la préforme, et une limite inférieure de 70 N imposée par la cellule de force. Les essais étant réalisés sur des préformes sèches, la vitesse de déplacement influe peu sur le résultat de la mesure [171]. Une vitesse de 1 mm/min est utilisée.

Pour cette phase de caractérisation, une seule préforme par configuration a été testée. Ici encore, les caractérisations sont réalisées sur les mêmes drapages que ceux infusés, permettant de s’affranchir d’un effet d’échelle associé au drapage et au nombre de plis caractérisés [42]. Le cycle d’essais est démarré après la mise à la précharge de la préforme à 70 N. Enfin, la fréquence d’acquisition des données est de 1Hz.

Figure 5.5: Définition du cycle d’essais pour la compaction des préformes.