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Les modèles systémiques dédiés aux systèmes socio-environnementaux permettent de simuler le comportement réel du système considéré afin d’établir ses états futurs possibles. Ses réponses possibles sont fournies en fonction de variables d’entrées à la fois nombreuses, interdépendantes et ayant de grandes variabilités, le système réel évoluant continuellement. Plus spécifiquement, dans le domaine de l’agriculture, il existe de nombreux outils dédiés à la simulation et/ou à l’évaluation d’exploitations agricoles, qui se distinguent entre eux par leur application à des contextes d'utilisation différents : le type de production (cultures, animaux, maraîchage, etc.), l'échelle d'analyse (exploitation, parcelle, etc.), le coût et la durée de mise en œuvre (quelques heures à plusieurs jours), le public visé (agriculteur, technicien, conseiller, chercheur, etc.). Au centre de l’exploitation agricole se situe l’agrosystème, qui correspond à l’ensemble « sol – culture – atmosphère (dont les organismes vivants) ». Il comporte de nombreuses interactions de natures chimiques (e.g. le cycle de l’azote, les transferts sol/plante), physiques (e.g. la gestion de l’eau, la structure et le travail du sol), et biologiques (e.g. les bioagresseurs, la fertilisation, les organismes vivants). L’agrosystème est en évolution permanente de par les effets de facteurs externes (e.g. le climat) ou internes (e.g. les techniques agronomiques appliquées). L’agrosystème est également lié à des enjeux économiques, environnementaux et sociaux. Afin d’évaluer la globalité du système, on utilise des outils d’évaluation multicritères. L’agent qui agit sur ce système complexe de par ses décisions est l’agriculteur exploitant, d’où la nécessité d’outils d’aide à la décision ainsi que de simulations permettant d’évaluer les réponses possibles en sortie du système en fonction des entrées sur lesquelles l’agriculteur a agi. En effet, un des buts principaux de l’agriculteur est de trouver le système qui optimise son revenu, qui est fonction de nombreux facteurs comme les prix du marché, les coûts, la quantité, la production, etc. De plus, l’agrosystème est amené à évoluer : les variables d’entrée sur lesquelles l’agriculteur peut agir peuvent être ajustées en fonction des variables de sortie voulues. Enfin, la quasi-totalité des variables sont interdépendantes. En effet, le revenu peut être modifié en fonction de nombreux facteurs comme les prix du marché, les coûts, la quantité, la production, etc. Il existe de nombreuses modélisations des concepts d’agrosystème [Meynard et al., 2001] [Doré et al., 2006]. Ceux-ci sont souvent représentés sous forme de schémas ne représentant qu’un seul aspect du système

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(en général l’aspect fonctionnel), sans standard de représentation dans un objectif d’automatisation et de portabilité.

Certains modèles ont été implémentés sous forme de logiciel. Parmi les outils existants, Olympe [Attonaty, 2010] [Penot et Deheuvels, 2007] est à la fois un simulateur technico-économique et un outil d’aide à la décision fournissant des indicateurs technico-économiques tels que le bilan, la trésorerie, des graphiques et états de sortie paramétrés par l’utilisateur, à partir de données d’entrée telles que la production, des règles de calcul, des incertitudes sur les prix, certaines caractéristiques du cheptel, l’assolement, etc. Il est donc possible de simuler plusieurs cas possibles en fixant des paramètres d’entrée (météo, modification du système de production ou de la réglementation) afin de tester des hypothèses et d’en mesurer les conséquences économiques. Cet outil spécifique ne permet ainsi de simuler que l’aspect économique de l’exploitation agricole.

L’outil STICS8 [Brisson et al., 1998] [Brisson et al., 2002] [Brisson et al., 2003] est un simulateur d’agrosystèmes au cours d’une année, à pas de temps journalier. Il est développé, depuis 1996, à l’unité de bioclimatologie de l’INRA d’Avignon, avec la participation d’autres instituts tels que l’unité d’agronomie de l’INRA de Laon, le CIRAD, le CEMAGREF, etc. La plupart des modèles agronomiques simulés sont issus de modèles existants. Il est adaptable à de nombreux types de cultures (blé, maïs, soja, sorgho, lin, prairies, tomate, betterave, tournesol, pois, colza, fraisier, carotte, laitue, etc.). Les paramètres d’entrée décrivent l’atmosphère (climat, rayonnement solaire, température, pluie, évapotranspiration de référence, vent et humidité), le sol (considéré comme une succession de couches caractérisées par leur réserve en eau, en azote minéral et en azote organique), les cultures (biomasse aérienne, teneur en azote, indice foliaire, nombre, biomasse et teneur en azote des organes récoltés, les pratiques culturales et leurs interactions (densité racinaire dans le sol, etc.). Les paramètres de sortie sont relatifs à la production (en termes de quantité et de qualité), à l’environnement et à l’évolution des caractéristiques du sol sous l’effet de la culture. Les principaux processus simulés sont la croissance et le développement des cultures ainsi que les bilans hydrique et azoté. La croissance de la culture est pilotée par le bilan de carbone : interception du rayonnement solaire par le feuillage puis transformation en biomasse aérienne qui est orientée vers les organes de récolte pendant la phase finale du cycle. Le bilan azoté de

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la culture est simulé parallèlement au bilan de carbone, dont il dépend en partie. Selon le type de plante, le développement de la culture est piloté soit par un indice thermique (en degrés-jours), soit par un indice photothermique (exigences photopériodiques) ou vernalo-photothermique (besoins en froid de la plante dans le cas du blé). Le modèle de développement est utilisé pour (1) faire évoluer l’indice foliaire et (2) définir la phase de remplissage des organes récoltés. L’existence éventuelle de stress (déficits hydrique ou azoté, températures gélives ou échaudantes, excès d’eau) est prise en compte au travers d’indices qui peuvent réduire la croissance végétative et celle des organes de stockage. Ces indices sont calculés dans les bilans hydrique, azoté ou énergétique. L’effet des techniques culturales (itinéraires techniques appliqués) sur le fonctionnement du système sol-culture-atmosphère doit également être pris en compte.

Figure 2 : principe de fonctionnement de STICS9

Ces modèles systémiques comportent plusieurs limites. Tout d’abord, ils ont l’inconvénient majeur d’être d’autant plus complexes que le modèle se rapproche de la réalité. Ainsi, la difficulté de modélisation peut dépasser l’enjeu. Il n’y aurait en conséquence aucun intérêt pratique à passer plusieurs années de projet pour modéliser, simuler et optimiser une unique exploitation agricole. De plus, de tels modèles manquent de souplesse puisqu’ils sont en

9 Source : http://www6.paca.inra.fr/stics/Qui-sommes-nous/Presentation-du-modele-Stics/Les-principes-de-fonctionnement (page consultée le 01/03/2016).

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général spécifiques à un domaine précis tout en s’appuyant en général sur des modèles de données statiques comme par exemple des modèles relationnels [Dantan et al., 2012 (2)]. L’ajout ou la modification de variables ou d’objets simulés peuvent alors entraîner des profondes modifications dans les résultats des modèles simulés, qui ne peuvent être réalisées que par des experts en informatique et du métier. Ce manque de souplesse peut également être souligné par l’aspect « boite noire » des différents modèles : les modèles simulés, complexes, sont en général imposés à l’expert du domaine. Il faudrait donc modéliser les différents aspects du même système avec un langage unifié de modélisation des systèmes, ce que nous allons présenter dans le prochain paragraphe.