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Les modèles rhéologiques à spectre de relaxation discret sont des modèles qui possèdent un nombre discret d’éléments ayant chacun une valeur de module 𝐸𝑖 correspondant à un temps de relaxation 𝜏𝑖. Cette section est consacrée à une présentation des principaux modèles rhéologiques qui permettent de modéliser la réponse des matériaux bitumineux dans le domaine viscoélastique linéaire.

NB: Deux outils numériques largement utilisés dans ce domaine sont la transformation de Laplace et celle de Laplace-Carson. La transformée d’une fonction 𝑓(𝑡) – définie dans le domaine temporel – dans l’espace de Laplace Carson (𝐿𝐶) est donnée par :

𝐿𝐶{𝑓(𝑡)} = 𝑓̃(𝑠) = 𝑠𝑓̅(𝑠) = 𝑠 ∫ 𝑒−𝑠𝑡

0

𝑓(𝑡)𝑑𝑡 (I-20)

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I.4.1.1 Modèle de Maxwell généralisé

Le modèle de maxwell généralisé (Figure I-17) est formé d’un assemblage en parallèle d’un nombre fini des modèles de maxwell (un ressort en série avec un amortisseur linéaire). L’importance de ce modèle est qu’il permet de simuler le comportement des matériaux bitumineux en utilisant un nombre (𝑁) suffisant des branches de Maxwell. Selon DI BENEDETTO , le nombre minimal des branches de Maxwell pour être représentatif d’un comportement réel des EB est égal à 8 (EUROBITUME 1996) (Lee 1996) (Di Benedetto et al. 2001a).

Figure I-17: Modèle rhéologique de Maxwell généralisé.

La fonction de relaxation de ce modèle est :

𝑅(𝑡) = 𝐸+ ∑ 𝐸𝑖𝑒−𝑡/𝜏𝑖 𝑁

𝑖=1

(I-21) où 𝜏𝑖 = 𝜂𝑖/𝐸𝑖 est le temps de relaxation de la branche 𝑖.

Dans l’espace de Laplace-Carson (𝐿𝐶), la fonction de relaxation de ce modèle s’écrit : 𝑅̃(𝑠) = 𝐸+ ∑ 𝐸𝑖 𝑠

𝑠 + 1/𝜏𝑖 𝑁

𝑖=1

(I-22) Le module complexe est obtenu après remplacement de la variable (𝑠) par (𝑖𝜔), où 𝑖 est le nombre complexe et 𝜔 = 2𝜋𝑓 la pulsation harmonique. Ainsi le module complexe du modèle prend la forme : 𝐸(𝑖𝜔) = 𝐸+ ∑ 𝑖𝜔𝐸𝑖 1 𝜏𝑖 + 𝑖𝜔 𝑁 𝑖=1 = 𝐸+ ∑ 𝐸𝑖 𝑖𝜔𝜏𝑖 1 + 𝑖𝜔𝜏𝑖 𝑁 𝑖=1 (I-23) Autrement dit, le module complexe est égal à la transformation de LC au point 𝑖𝜔 de la fonction de relaxation du modèle choisi. Ce passage entre le domaine temporel et fréquentiel est possible dans le cadre de la théorie de la viscoélasticité linéaire (Mandel 1955) (Linder et al. 1986)(Piau and Heck 1996). La loi de comportement de ce modèle est donnée par le produit de convolution 𝜎 =𝑅⊗ 𝜀̇ défini par l’équation (I-14) .

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I.4.1.2 Modèle de Kelvin-Voigt généralisé

Le modèle de Kelvin-Voigt généralisé est constitué d’un ressort monté en série avec un nombre fini (N) des modèles de Kelvin-Voigt (Figure I-18).

Figure I-18: Modèle de Kelvin-Voigt généralisé.

La fonction de fluage de ce modèle est : 𝐹(𝑡) = 1 𝐸+ ∑ 1 𝐸𝑖 𝑁 𝑖=1 (1 − 𝑒−𝑡/𝜏𝑖) (I-24)

et le module complexe s’écrit :

𝐸(𝑖𝜔) = (∑ 1 𝐸+ 1 𝐸𝑖+ 𝑖𝜔𝜂𝑖 𝑁 𝑖=1 ) (I-25)

Ce modèle permet de décrire correctement le comportement des matériaux viscoélastiques comme le bitume et les EB pour un nombre suffisant de branche de Kelvin-Voigt.

La loi de comportement de ce modèle est donnée par le produit de convolution 𝐹⊗ 𝜎̇ (voir l’équation (I-13) en 1D). Une autre forme de la loi de comportement est donnée par l’équation suivante : 𝜀(𝑡) = ( 1 𝐸+ ∑ 1 𝐸𝑖+ 𝜂𝑖𝜕𝑡𝜕 𝑁 𝑖=1 ) 𝜎(𝑡) (I-26)

Dans cette dernière équation l’opérateur différentiel (𝜕

𝜕𝑡) est traité comme une entité algébrique (Severino P. C. Marques and Creus 2012).

I.4.1.3 Modèles de type Solide Linéaire Standard (SLS)

Les deux modèles de base du type SLS à trois éléments sont les modèles 3V et SLS-3M. Le premier est obtenu en montant un ressort en série avec une unité de Kelvin-Voigt (Figure I-20). Dans ce cas les fonctions de fluage de l’unité de Kelvin-Voigt et du ressort isolé s’additionnent (loi en série), alors que pour le modèle SLS-3M, ce dernier est obtenu en plaçant un ressort en parallèle avec un modèle de Maxwell (Figure I-23). Dans ce cas les fonctions de relaxation s’ajoutent (loi en parallèle). Ces modèles permettent de représenter le comportement des solides avec un nombre minimum d’éléments (ressort, amortisseur).

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I.4.1.3.1 Modèle de Poynting-Thomson (PT)

Le modèle de PT – également dit Solide Linéaire Standard de Voigt à trois éléments (𝑆𝐿𝑆3𝑉)– est obtenu en montant un ressort de rigidité 𝐸0 en série avec un modèle de Kelvin-Voigt (Figure I-19).

Figure I-19: Modèle rhéologique de Poynting-Thomson (SLS3V).

La fonction de fluage du modèle dans le domaine temporel est donnée par : 𝐹(𝑡) = 1

𝐸1(1 − 𝑒 𝜏𝑡

1) + 1

𝐸0 (I-27)

et la fonction de relaxation s’écrit : 𝑅(𝑡) = 𝐸0

𝐸0+ 𝐸1(𝐸1+ 𝐸0𝑒

−𝑡(𝐸0+𝐸1

𝐸1𝜏 )) (I-28)

Le comportement « aux limites » du modèle de PT est déduit de cette fonction de relaxation tel que :

 Pour les très grandes vitesses de chargement : on cherche la réponse instantanée de ce modèle (𝑡 → 0), alors on obtient : 𝑅(𝑡 → 0) = 𝐸0. Le modèle dans ce cas est équivalent à un ressort de rigidité 𝐸0.

 Pour les très faibles vitesses de chargement : on cherche dans ce cas la réponse du modèle à l’infini (𝑡 → ∞). On obtient dans ce cas un module qui est équivalent à deux ressorts montés en série tel que : 𝑅(𝑡 → ∞) = 𝐸0𝐸1

𝐸0+𝐸1 .

En appliquant une contrainte constante 𝜎 = 𝜎0𝐻(𝑡), on obtient : 𝜀(𝑡) = 𝜎0(1

𝐸0+ 1

𝐸1(1 − 𝑒

𝑡𝜏)) (I-29)

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Figure I-20: Réponse du modèle SLS à une contrainte constante.

avec 𝜀0=𝜎0

𝐸0 , 𝜀𝑒= 𝜎0

𝐸𝑅 . 𝐸𝑅 est le module relaxé, il est égal à 𝐸0𝐸1 𝐸0+𝐸1 .

En appliquant une déformation constante 𝜀 = 𝜀0𝐻(𝑡), l’évolution de la contrainte est donnée par : 𝜎(𝑡) = 𝜀0( 𝐸0𝐸1 𝐸0+ 𝐸1+ ( 𝐸0 𝐸1) 𝐸0𝐸1 𝐸0+ 𝐸1𝑒 𝑡 𝜏′) = 𝜎𝑒+ 𝜎𝑒𝜏𝑡 (I-30) tel que 𝜏 = 𝜏 𝐸1

𝐸0+𝐸1 . Cette évolution est présentée sur la Figure I-21 :

Figure I-21: Réponse du modèle SLS à une déformation constante.

avec 𝜎(𝑡 = 0) = 𝜎0 = 𝜎𝑒+ 𝜎 = 𝐸0𝜀0 et 𝜎(𝑡 = ∞) = 𝜎𝑒 = 𝜀0(𝐸0𝐸1 𝐸0+𝐸1). La loi de comportement du modèle est :

(𝐸0+ 𝐸1)𝜎 + 𝜂𝜎̇ = 𝐸0(𝐸1𝜀 + 𝜂𝜀̇ ) (I-31) et le module complexe s’écrit :

𝐸(𝑖𝜔) = 𝐸1 + 𝜏1𝜏𝜔 2

1 + (𝜏𝜔)2+ 𝑖𝐸(𝜏1− 𝜏)𝜔

1 + (𝜏𝜔)2 (I-32)

où 𝜏 et 𝜏1 = 𝜂/𝐸1 sont le temps à l’équilibre et le temps caractéristique de relaxation, respectivement et i est l’unité imaginaire. Le ressort de rigidité 𝐸0 représente le module élastique instantané du modèle.

26 Notons que les modèles de Kelvin-Voigt et de Maxwell sont des cas particuliers du modèle de PT. Le premier est obtenu quand 𝐸0 tend vers zéro, et le deuxième est obtenu quand le module 𝐸1 tend vers zéro.

La Figure I-22 montre la réponse du modèle de Kelvin-Voigt, de Maxwell et de Zener (ou de PT) à un essai de fluage et de relaxation :

Figure I-22: Fluage et relaxation du modèle de Maxwell, Kelvin-Voigt et Zener (ou Poynting-Thomson).

On voit que le modèle de PT est capable de prendre en compte le phénomène de relaxation des contraintes. En revanche un seul temps de relaxation n’est pas suffisant pour être représentatif du comportement réel des matériaux bitumineux.

I.4.1.3.2 Modèle de Zener (SLS-3M)

Le modèle de Maxwell standard à trois éléments, nommé Zener (SLS3M), est obtenu en montant un ressort de rigidité 𝐸0 en parallèle avec un modèle de Maxwell (Figure I-23).

Figure I-23: Modèle de Zener (SLS3M).

La loi de comportement du modèle est : 𝜎 + 𝜂

𝐸1𝜎̇ = 𝐸0𝜀 + 𝜂

𝐸1(𝐸0+ 𝐸1)𝜀̇ (I-33)

La réponse de ce modèle à une contrainte constante est identique à la réponse présentée sur la Figure I-20. Sous une déformation constante, la réponse du modèle est identique à celle de la Figure I-21. Les deux modèles SLS de Maxwell et de Voigt sont des modèles conjugués. Dans la section suivante on présente la procédure de construction d’un modèle conjugué et la méthode de calcul des paramètres de celui-ci.

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I.4.1.4 Construction d’un modèle conjugué

Un modèle conjugué est un modèle qui permet, après un choix convenable des paramètres de ce modèle, de trouver la même réponse que celle du modèle de base. La construction d’un tel modèle conjugué est réalisée en appliquant les règles d’ALFREY suivantes (Tschoegl 1989) :

 Une combinaison en série de deux éléments de types différents est remplacée par une combinaison en parallèle de ces deux éléments dans le modèle conjugué et inversement.  Le nombre de chaque type d’élément (ressort et amortisseur) reste le même dans le modèle

conjugué.

 La présence (resp. absence) d’un élément isolé dans le modèle de base nécessite l’absence (resp. présence) d’un élément conjugué (Ressort ↔ Amortisseur) et isolé dans le modèle conjugué.

Calcul des paramètres du modèle conjugué

Prenons par exemple le modèle de Poynting-Thomson (SLS-3V). Le modèle conjugué à ce dernier est le modèle de Zener (SLS-3M) présenté sur la Figure I-23.

Dans la suite, les exposants M et V représentant les modules 𝐸1et 𝐸0 sont adoptés pour distinguer les modules de ces deux modèles.

La réponse de ces deux modèles pour un échelon de contrainte (ou de déformation) est identique. Ainsi, on peut calculer les paramètres du modèle conjugué en comparant l’expression de la déformation trouvée dans le plan de Laplace pour les deux modèles. La même stratégie est valable dans le domaine temporel :

𝜀̅𝑉(𝑠) =𝜎0 𝑠 ( 1 𝐸0𝑉+ 1 𝐸1𝑉+ 𝜂𝑉𝑠) (I-34) 𝜀̅𝑀(𝑠) =𝜎0 𝑠 ( 1 + 𝜏𝑠 𝐸0𝑀+ (𝐸0𝑀+ 𝐸1𝑀)𝜏𝑠) = 𝜎0( 1 (𝐸0𝑀+ 𝐸1𝑀)𝑠+ 𝐸1𝑀 (𝐸0𝑀+ 𝐸1𝑀)𝐸0𝑀 1 𝑠(1 + 𝜏𝑠)) (I-35) L’égalité entre les termes de ces deux équations conduit aux relations suivantes :

𝐸1𝑀 = (𝐸0 𝑉)2 𝐸1𝑉(1 +𝐸0𝑉 𝐸1𝑉) , 𝐸0𝑀= 𝐸0𝑉− 𝐸1𝑀 ; 𝜂𝑀= 𝜂𝑉 (𝐸1𝑀)2 (𝐸0𝑀+ 𝐸1𝑀)2 (I-36) Application numérique

Considérons un modèle de PT dont les paramètres sont donnés dans le Tableau I-4. (𝐸0𝑉(𝐾𝑁/𝑚𝑚2) 22.58

𝐸1𝑉(𝐾𝑁/𝑚𝑚2) 11 𝜂 (𝐾𝑁. 𝑗/𝑚𝑚2) 500

Tableau I-4: Paramètres du modèle de PT (SLS-3V).

En appliquant les équations (I-36), on obtient les paramètres du modèle rhéologique conjugué de Zener (SLS3M). Ces paramètres sont listés dans le Tableau I-5.

28 𝐸0(𝐾𝑁/𝑚𝑚2) 7.4

𝐸1(𝐾𝑁/𝑚𝑚2) 15.2 𝜂 (𝐾𝑁. 𝑗/𝑚𝑚2) 226

Tableau I-5: Paramètres du modèle conjugué de Zener (SLS3M).

Pour quatre vitesses de déformations imposées (𝜀̇ = 𝑎), les réponses du modèle de PT et de Zener conjugué sont présentées sur la figure suivante :

Figure I-24: Réponse des modèles standards conjugués (PT et Zener) sous différentes vitesses de déformations imposées.

I.4.2 Modèles à spectre de relaxation continu et amortisseur parabolique