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3 Le système aquifère de l’Albien du Bassin de Paris choisi comme cas d’étude

3.3 CONTEXTE HYDROGEOLOGIQUE /HYDROCHIMIQUE DE L’ALBIEN

3.3.6 Les modèles conceptuels d’écoulement

Très longtemps, il a été admis que l’alimentation ne pouvait se faire que par les affleurements des sables albiens à la périphérie Est et Sud-Est du Bassin (Lemoine, 1939). Une étude chimique et isotopique réalisée en 1971 (Vuillaume, 1971) a conclu que l’alimentation par les affleurements ne pouvait être exclusive, mais contributive, et qu’ainsi, l’alimentation était essentiellement réalisée par drainance verticale. La confrontation des différentes études a permis de cibler plusieurs zones de connections hydrogéologiques ou bassins hydrogéologiques sur l’ensemble de la superficie de la nappe de l’Albien à partir des lignes de partage des eaux (Figure 3-3) (Vernoux et al., 1997):

3.3.6.1 Le bassin hydrogéologique principal

Secteur de Paris

Le pompage intensif semble modifier les lignes d’écoulement convergeant vers le secteur de Paris. Dans ce secteur l’activité du carbone-14 est faible (Raoult, 1999). Pour comprendre ces activités autour de Paris, il faudrait qu’il y ait différentes composantes de mélange : des eaux provenant de zones à plus faible taux de renouvellement comme à l’Est, ou bien des eaux relativement plus vieilles provenant d’aquifère sous-jacent comme le Néocomien. En effet, les prélèvements dans la région parisienne ont une influence importante sur la drainance verticale ascendante du Néocomien, puisque la charge de la nappe de l’Albien est inférieure à la charge du Néocomien. La communication avec la nappe du Néocomien n’est pas le seul apport. Dans ce secteur, les eaux de l’Albien seraient constituées d’un mélange de 64% d’une eau albienne provenant du Sud-Est, de 24% d’une eau de l’aquifère du Néocomien du Sud de Paris, de 11% d’une eau albienne provenant de l’est de la région parisienne et d’une quantité inférieure à 4% d’une eau albienne provenant du Sud-Ouest de la région parisienne (Raoult, 1997 ; Raoult 1999).

Ecoulement selon un axe Sud-Est et Nord-Ouest

Le bassin couvrant toute la partie Est du bassin de Paris montre des lignes de courants qui convergent des bordures Est et Sud-Est vers Paris, ce qui suggère un écoulement préférentiel horizontal dans ce secteur. Cette hypothèse est formulée explicitement par Raoult (1999) et implicitement par Vuillaume (1971). Les hypothèses d’alimentation de la nappe dans cette zone sont controversées. En effet, l’interprétation analytique des outils chimiques (chlorure) et isotopiques (14C) a permis de mettre en évidence l’existence de cette circulation dans l’aquifère captif. La vitesse d’écoulement de l’eau peut être estimée à 3 à 4 m/an mais peut également être modifiée en régime transitoire. Une autre interprétation des cartes du radiocarbone souligne que l’augmentation

irrégulière de l’âge de l’eau, du Sud-Est au Nord-Ouest selon l’axe Yonne-Seine, ne peut être justifiée uniquement par l’apport des affleurements (Evin et Vuillaume, 1970 ; Vuillaume, 1971).

Zone de transition libre-captif

Les affleurements des sables de l’Albien qui participent à la recharge sont très ponctuels, comme certaines zones au Sud ou encore le pays de Bray qui est également une zone de recharge. L’interprétation des cartes de radiocarbone montrent des anomalies, particulièrement dans les zones de proches captivités. En effet, aux affleurements de l’Yonne, les âges observés sont très anciens ou encore en Bourgogne à proximité des affleurements, la nappe captive s’écoule en direction des affleurements. Certains affleurements sont donc des exutoires pour la partie captive, notamment au Nord d’Auxerre en Bourgogne, ce qui expliquerait les faibles activités en 14C. Pour les points situés sur les zones d’affleurement albien, leur position hydrogéologique est particulière puisqu’ils sont dans la partie libre de la nappe.

Secteur Est

Les très faibles gradients de charge dans le secteur Est impliquent une zone de circulation très réduite en accord avec la lithologie argileuse de l’Albien dans ce secteur qui expliquerait les activités en 14C faibles ; ou encore, le δ13C des eaux indique probablement un contact avec une roche carbonatée qui diminue l’activité du 14C (Raoult, 1999).

3.3.6.2 Le bassin de la basse Seine

Le bassin de la basse Seine est alimenté par les affleurements du Pays de Bray au Nord et au Sud-Ouest et par drainance des aquifères sus et sous-jacents. Les lignes de courants convergent vers l’exutoire de la Seine. L’approche isotopique apporte des informations supplémentaires sur l’alimentation de la nappe de l’Albien dans ce secteur. Les activités en 14C autour de Paris sont plus faibles que celles de Rouen. Deux hypothèses expliqueraient cette observation : l’influence des zones d’alimentation proches du secteur de Rouen, ou, la conséquence du pompage intensif dans la région parisienne qui modifie les écoulements se traduisant par une anomalie d’activité 14C. De plus, il existe de nombreuses failles, Nord Nord-Ouest et Sud Sud-Est, qui peuvent jouer un rôle dans l’hydrodynamisme de cette région. La basse vallée de la Seine présente un hydrodynamisme complexe.

3.3.6.3 Le bassin de la Somme

La recharge de la nappe de l’Albien est faible à partir des affleurements de l’Est. Les eaux de l’Albien circulent très lentement dans cette partie du Bassin, comme décrit précédemment. Considérant les cartes piézométriques avant 1930 comme représentatives du régime permanent (absence de dépression piézométrique), les isopièzes montrent que l’exutoire principal de cet écoulement est la vallée de la Somme (Raoult 1999). Le bassin de la Somme est alimenté par les affleurements du pays de Bray au sud et par la nappe du Néocomien à l’est avec des lignes de courant qui convergent vers l’exutoire de la Somme.

3.3.6.4 Le bassin de la Loire

Dans la zone captive Sud-Ouest et Ouest, les âges observés dans l’aquifère sont parmi les plus récents alors que la formation de l’Albien dans ce secteur n’affleure pas. Il existe ainsi une recharge par drainance possible à partir des sables du Cénomanien sableux à l’Ouest des aquifères de l’Albien et du Néocomien.

3.3.6.5 Bilan des flux

Un double modèle de gestion de la nappe de l’Albien-Néocomien (Raoult, 1999 ; Hydroexpert, 1999 et 2000) dans le Bassin de Paris, a permis d’émettre des hypothèses sur les bilans de flux en régime permanent et transitoire (Figure 3-5). Le modèle HYDROEXPERT prend en compte les cinq unités géologiques : la formation de la Craie, le toit semi-perméable de l’Albien, l’Albien ; la formation argileuse de l’Aptien-Barrémien et le Néocomien. Le modèle de Raoult (1999) tient compte des mêmes unités mais intègre en plus le Portlandien. En régime permanent, l’Albien reçoit, par recharge sur les affleurements, la majorité de son bilan total exprimé en flux. Une partie des apports provient des aquifères sus et sous-jacents par drainance (selon le modèle de Hydroexpert et de Raoult). La Manche, les affleurements en zone basse de l’Est ainsi que ceux du Pays de Bray et la formation de la Craie, quand elle est au niveau bas, définissent les exutoires possibles de la nappe de l’Albien (Vernoux, 1997 ; Raoult, 1999 ; Vuillaume, 1971 ; Hydroexpert, 2000). Raoult (1999) quantifie la répartition du flux sortant global à hauteur de 13% par les affleurements, 33% par la Manche et 54% qui constituent la drainance ascendante vers la Craie. Pour le Néocomien plus de la moitié des flux transitent vers l’Albien, le reste est recyclé au niveau des affleurements de la bordure Est. La répartition des flux de drainance entre l’Albien et la Craie est globalement ascendante, sauf au niveau des vallées. Les sables du Cénomanien permettent une recharge de l’Albien au Sud-Ouest. La drainance du Néocomien vers l’Albien est très importante dans la partie Centre-Est et le Néocomien est lui-même rechargé en partie par le Portlandien dans cette zone où les écoulements sont très lents. La recharge de la partie captive de l’Albien par l’aquifère de la Craie peut être considérée comme négligeable (modèle de Raoult) à importante (modèle de Hydroexpert) sur l’ensemble du Bassin. La partie Est des affleurements n’alimente pas la région parisienne, ces eaux susceptibles de s’infiltrer à l’Est ont pour exutoire principal la vallée de la Somme (Raoult, 1999 ; Vernoux et al., 1997).

Le régime transitoire modélisé entraîne une diminution des flux ascendants au travers du toit de l’Albien, liée à la baisse des pressions dans les aquifères Albien et Néocomien (HYDROEXPERT, 2000). Une augmentation des apports par les zones d’affleurement est alors induite. De plus, le régime transitoire engendre une libération de l’eau de l’emmagasinement (ou déstockage) des sables de l’Albien qui est importante vis-à-vis du bilan total des flux de la couche.

L’approche multidisciplinaire entre l’hydrochimie, la géochimie isotopique et l’hydrogéologie permet de mettre en évidence un mécanisme d’alimentation et d’écoulement dans l’aquifère de l’Albien suivant deux composantes de flux principales :

1) la nappe est alimentée par les affleurements du réservoir essentiellement au Sud-Est et coule vers le Nord-Ouest, en suivant un axe sensiblement parallèle à l’Yonne puis la Seine,

2) la nappe ne s’alimente pas forcément par ses affleurements mais à partir des aquifères sus (la Craie) et sous-jacents (Néocomien-Barrémien) ; cela implique un passage à travers les argiles (de Gault et de l’Aptien respectivement). D’autre part, selon le rapport de charge entre la nappe de l’Albien et les formations sus ou sous-jacentes, la drainance peut s’effectuer dans un sens ou dans un autre.

Figure 3-5 : Bilan des flux en régime permanent et transitoire d’après les modèles de Raoult (1999) et Hydroexpert (2000).

Ainsi, la nappe de l’Albien n’est pas fossile et se réalimente en différentes zones. Le mécanisme d’alimentation ne se fait pas seulement en la présence d’affleurement mais également au travers de sa couche argileuse par une importante drainance verticale ascendante à partir des aquifères sous-jacents à l’Albien. Il existe également une communication avec les aquifères sus- jacents à l’Albien par drainance verticale descendante au travers d’une couche argileuse. La variation du faciès albien engendre des épaisseurs variables de la couche argileuse (toit et mur) de l’Albien et ainsi facilite la communication et les circulations d’eaux entre les formations sus et sous-jacentes.

3.4 INVESTIGATION CHIMIQUE ET MINERALOGIQUE DE LA GLAUCONITE DES SABLES DE