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Classification des eaux et corrélation inter-éléments

5 Caractérisation des phases solide et liquide de la formation des sables de l’Albien, choisies pour

5.2 CARACTERISATION DE L’EAU DE L’ALBIEN

5.2.2 Classification des eaux et corrélation inter-éléments

De la même façon que pour le matériel solide, il est indispensable pour choisir un échantillon liquide représentatif de la formation de l’Albien pour cette étude, de se renseigner sur les différents types d’eaux présentes dans l’aquifère et de faire un choix éclairé. Afin de situer l’hydrochimisme de cet aquifère de l’Albien, les analyses chimiques des points de prélèvement de cette étude sont superposées avec celles de la littérature.

Cet aquifère multicouche, constitué par l’alternance de niveaux sableux et argileux, va se traduire par une composition chimique caractéristique de l’eau de ces forages. Les Tableaux 5-4 et 5- 5 récapitulent la chimie de l’eau de différents ouvrages sur l’ensemble du bassin parisien (avec des valeurs moyennes). Les données chimiques antérieures à la campagne de prélèvement de cette étude sont recueillies dans la banque de données « Accès aux Données sur les Eaux souterraines » (ADES) ainsi que dans les données de Raoult (1999). Les échantillons d’eau annotés de « Exp » ou « terrains » sont issus de la campagne d’échantillons des eaux réalisée dans le cadre de cette étude.

Figure 5-13 : Classification des eaux de l’Albien selon le diagramme trilinéaire de Piper. Les données chimiques proviennent de la littérature Raoult (1999) et de la base de données sur l’eau ADES ; les points notés « exp »

Le Tableau 5-4 et la Figure 5-13 montrent les caractéristiques chimiques des eaux de l’Albien. Le diagramme ternaire de Piper considère des valeurs relatives des éléments majeurs, ramenées en % du total des anions et des cations respectivement ; il est ainsi possible de comparer des minéralisations de valeurs très différentes. En remplaçant chaque analyse par un point, il est possible d’examiner simultanément un grand nombre d’échantillons et de mettre en évidence des évolutions géochimiques. Ces eaux appartiennent donc à la famille des eaux bicarbonatées alcalino-terreuses. Elles sont de plus faiblement minéralisées, tièdes, avec un pH de 7 à 6,6. Il semble se dessiner une évolution géochimique des eaux du Sud du Bassin de Paris vers l’Ile de France.

Les compositions chimiques se regroupent en deux pôles : l’un bicarbonaté calcique correspondant aux zones d’alimentation, l’autre bicarbonaté sodique correspondant aux exutoires (chapitre 3). Plusieurs hypothèses peuvent expliquer cette distinction chimique (Figure 5-14):

- par effet d’échange de base (fixation du Ca2+ dans les argiles et libération du Na+ en compensation) ;

- l’excès de calcium proviendrait d’échange par drainance avec des roches carbonatées, notamment pour les points au Sud-Est du Bassin ;

- les plus fortes concentrations en sodium de la région parisienne par rapport à celles du centre- Sud s’expliqueraient par drainance et mélange avec les aquifères sous-jacents (Néocomien) dont les concentrations en sodium sont relativement plus fortes ; il peut donc s’agir d’un résidu d’eaux marines anciennes, donc salées (cf. partie 3.3),

- l’enrichissement en sodium ne peut provenir de l’altération de silicates (e.g. minéraux sodiques comme le plagioclase) car il n’y en a pratiquement plus dans les phases silicatées de ces sables (section 5.1.1).

Libellé T°C pH Ca mg/L Mg mg/L Na mg/L K mg/L Fe mg/L HCO3 mg/L F mg/L Cl mg/L SO4 mg/L SiO2 mg/L NO3 mg/L Secteur Centre-Sud : Bougligny (77) BSS : 03292X0038/F3 26,0 7,00 20,50 3,58 3,20 4,30 6,08 65,73 0,13 4,70 15,60 12,10 0,55 Montbouy (45) BSS : 04004X0132/F 22,7 6,73 27,01 4,00 4,07 2,83 7,17 108,81 0,29 6,29 9,18 11,10 0,375 Saint Martin d'Abbat (45)

BSS : 03992X0268/F3 26,4 6,95 43,50 4,90 4,90 5,90 2,00 138,00 0,14 7,50 21,10 15,60 / Ste Geneviève (45) BSS :04004X0147/FAEP 21,5 6,80 26,33 3,48 3,33 2,89 7,19 88,58 0,13 6,41 7,81 12,01 Bougligny (exp)* 22,0 6,65 18,64 3,46 3,25 4,28 5,16 75,64 0,20 3,84 14,67 12,50 <<

St Martin d'Abbat (exp) 27,0 7,25 39,73 3,79 4,87 5,72 1,40 135,42 0,20 5,74 20,46 11,00 <<

Ste Geneviève (exp) 24,8 6,61 23,23 3,31 3,25 2,79 6,87 92,72 0,20 5,24 6,99 13,10 <<

Montbouy (exp) 21,9 6,54 21,07 2,98 3,40 2,34 7,83 104,92 0,20 5,46 6,67 13,10 << Région parisienne : Maison de la Radio (75) BSS : 01836A0032 26,1 7,64 29,40 8,60 10,80 10,50 0,49 160,00 0,60 9,20 10,90 13,80 0,55 Maisons-Lafitte (78) BSS : 01824X0031/F3 / 7,73 29,24 8,48 16,28 12,03 0,24 164,76 0,53 6,24 10,81 10,05 0,8 Neuilly s/ Seine (92) BSS : 01832C0336/B1 / 7,70 27,01 7,94 12,14 10,62 0,25 144,64 0,40 5,22 10,50 12,60 << Orsay (91) BSS : 02191X0003/F / 7,57 29,96 6,58 5,65 8,87 0,21 125,68 0,19 4,89 11,49 13,88 << Lamartine (exp) (75) BSS : 01836A0039 29,0 7,55 29,10 8,40 12,20 10,50 0,52 117,12 0,60 5,80 10,40 12,90 << Queuille (exp) (75) 27,7 7,74 37,90 11,20 22,40 12,20 0,21 218,38 1,10 7,50 4,10 13,60 << Maison de la Radio (exp) 27,1 7,48 31,50 8,90 14,40 10,70 0,35 164,70 0,60 8,50 10,10 14,00 <<

Secteur Est-en limite de zone captive Vitry en Perthois (51) BSS : 02254X001/FAEP / 7,54 70,53 20,74 5,10 6,18 0,49 286,25 0,28 3,26 40,08 7,97 0,75 Dompremy (51) BSS : 02261X0033/FAEP / 7,80 56,00 32,30 6,80 9,50 0,50 304,00 0,74 4,00 39,20 7,80 / Thiéblemont-Farémont (51) BSS :02261X0060/FAEP / 7,47 87,87 24,91 4,97 6,64 0,81 361,29 0,26 4,00 28,84 8,57 0,3

Secteur Sud- en limite de zone captive

Laroche-Saint-Cydroine (89)

BSS : 03673X0007/F

Tableau 5-4 : Concentration des ions majeurs dans les eaux de l’Albien dans l’ensemble du Bassin, localisation (département) et code BSS associé (donnée source : Raoult 1999, ADES, campagne d’échantillonnage - notation « exp » et surligné en gris- dans le cadre de ce travail) (les cations majeurs sont analysés par ICP/AES, les anions par chromatographie ionique et les traces par ICP/MS).

Secteur Ile-de-France Secteur Centre-Sud

Element LQ Unité Mais. Radio

(07/06/2010) Lamartine (25/05/2010) Queuille (25/05/2010) Montbouy (13/04/2010) Ste Geneviève (13/04/2010) Bougligny* (13/04/2010) St Martin d'Abbat (14/04/2010) Al 0,5 µg/l 0,66 35 15 16,1 16,5 15,2 12,1 As 0,05 µg/l 0,24 0.20 0.38 0,67 0,95 1,56 1,96 B 0,5 µg/l 66,68 64 250 27,3 12,2 15,2 12,1 Ba 0,05 µg/l 32,4 29 47 21,6 22,6 45,9 15,4 Be 0,01 µg/l < LQ < LQ 0.01 0,02 0,01 0,02 < LQ Cd 0,01 µg/l < LQ 0.26 0.03 < LQ 0,01 0,04 < LQ Co 0,05 µg/l < LQ < LQ < LQ 0,5 0,31 0,19 < LQ Cr 0,1 µg/l < LQ < LQ < LQ < LQ < LQ < LQ 0,17 Cu 0,1 µg/l 0,18 0.29 0.28 0,35 0,22 0,46 0,12 F 0,1 mg/l 0,6 0.6 1.1 0,2 0,2 0,2 0,2 Fe 0,02 mg/l 0,345 0.521 0.209 6,45 5,6 5,25 1,38 Li 0,1 µg/l 9,2 11 9.2 12 12,7 13,2 13 Mn 0,1 µg/l 43,7 44 33 125 75,4 48 38,7 Ni 0,1 µg/l 0,75 0.10 0.12 1,42 0,96 0,45 0,43 Pb 0,05 µg/l < LQ 0.05 0.07 < LQ 0,06 0,09 < LQ Sr 0,1 µg/l 776,09 794 1178 182 160 241 381 Zn 0,5 µg/l 3,92 0.94 3.91 7,76 5,3 4,92 1,63

* L’eau de Bougligny a fait l’objet de plusieurs campagnes d’échantillonnage et d’analyses chimiques qui indiquent une constance chimique et isotopique de cette eau (voir Tableau 6-2 et 6-3, Figure 5-20

Tableau 5-5 : Récapitulatif des teneurs en éléments traces des eaux de l’Albien prélevées dans le cadre de cette étude (LQ : Limite de Quantification) (les cations majeurs sont analysés par ICP/AES, les anions par chromatographie ionique et les traces par ICP/MS).

Migennes (89) BSS : 03674X0004/F / 7,32 115,25 1,76 5,31 1,70 0,00 269,63 0,10 22,67 24,93 7,15 41,444 Ormoy (89) BSS : 03678X0056/FAEP / 7,74 50,65 7,30 5,98 5,05 0,00 165,70 0,19 7,11 32,50 8,60 6 Neocomien (91) BSS : 02571X0027 / 7,50 38,63 14,55 27,47 8,50 / 192,15 0,54 13,20 31,49 7,80 <<

* L’eau de Bougligny a fait l’objet de plusieurs campagnes d’échantillonnage et d’analyses chimiques qui indiquent une constance chimique et isotopique de cette eau (voir Tableau 6-2 et 6-3, Figure 5-20

Figure 5-14 : Corrélation calcium versus sodium dans les eaux de l’Albien et mise en évidence des zones d’alimentation et pôle de mélange (notation « exp » correspond aux échantillons analysés pour cette étude).

D’autres corrélations élémentaires et diagrammes binaires permettent d’appréhender la signature géochimique de l’eau. Le chlorure est un élément non réactif qui ne participe pas à la formation de minéraux, hors contexte évaporitique. Toute variation de concentration en chlorure proviendrait alors, dans ce contexte, d’un apport d’un aquifère sus ou sous-jacent, ou d’un apport anthropique. La Figure 5-15 met en avant trois pôles; le premier concerne l’ensemble des points d’eau en limite de zone captive dans le secteur vaste du Centre-Sud et Est avec de faibles concentrations en sodium et chlorure. Aussi vaste soit ce secteur, la valeur relativement constante en chlorure suppose qu’il n’y ait pas d’apport sus et sous-jacent. Le deuxième pôle se limite à un point dans le secteur de Migennes avec une valeur de concentration en chlorure maximale. Ce point correspond à une zone où, très localement, les sables de l’Albien peuvent être en contact avec un aquifère sous-jacent, ou bien résulte d’une contamination anthropique compte tenu de la forte teneur en nitrate (41 mg/L, Tableau 5-4) associé à cette forte valeur en chlorure (Kloppmann, 1995). L’apport anthropique de la nappe libre de « la Craie », marquée également par de fortes teneurs en chlorures et nitrates, pourrait dès lors contaminer la nappe de l’Albien par drainance descendante (Raoult, 1999 ; Vuillaume, 1971). Le troisième pôle regroupe les points de la région parisienne où la teneur en sodium et chlorure augmente. Cette augmentation de teneur serait expliquée par le phénomène de drainance verticale ascendante d’un aquifère sous-jacent comme le Néocomien. En effet, les prélèvements dans le Néocomien montrent pour une même zone, des concentrations plus élevées que dans l’Albien en Cl, Na et F notamment ; l’évolution chimique des eaux dans la région parisienne traduirait un mélange (Raoult,1999 ; Vernoux et al., 1997).

Figure 5-15 : Corrélation élémentaire du sodium vs. Chlorure dans les eaux de l’Albien.

Deux types d’eau se distinguent dans la Figure 5-16 ; les eaux en contact avec des roches carbonatées imposant un fort ratio Ca/Na (cas des eaux dans le secteur Est) et les eaux avec un plus faible ratio Ca/Na (inférieur à 5) qui signifie que la roche est moins carbonatée. Ces eaux montrent une progression dans la minéralisation des eaux qui tend vers un faciès Néocomien dans le secteur Ile-de-France. Raoult (1999) a montré qu’il existait une ligne d’écoulement préférentielle du Sud (proche des affleurements) vers le centre du Bassin ; cette hypothèse justifierait cette corrélation. L’interaction eau-roche serait plus prononcée avec un temps plus long de résidence dans le centre du bassin que dans le Sud.

Figure 5-16 : Corrélation entre les ions bicarbonates et le ratio Ca/Na dans les eaux de l’Albien (Raoult 1999 ; faciès d’après Meybech 1986).

La Figure 5-17 montre que les points d’eau à l’échelle régionale s’alignent sur la droite de dissolution de la dolomite. Les eaux de l’Est sont globalement sursaturées (calcul PHREEQC, Parkurst and Appelo, 1999) vis-à-vis de la calcite et de la dolomite, ce qui n’est pas surprenant car ces eaux peuvent être en contact avec des roches carbonatées. Par contre dans le Sud, l’Ouest et le Nord- Ouest, les eaux de l’Albien sont sous-saturées vis-à-vis de la calcite mais aussi, pour le Sud, vis-à-vis de la dolomite.

Les eaux sont plus acides particulièrement dans les zones d’alimentation et en limite de zone captive. Si ces eaux sont en même temps plus acides, cette sous-saturation vis-à-vis des minéraux carbonatés pourrait s’expliquer par l’acidification résultant de l’oxydation des sulfures au front rédox qui doit être voisin de la limite aquifère libre/aquifère captif.

Figure 5-17 : Corrélation magnésium-calcium et bicarbonate dans les eaux albiennes carbonatées ; droite de dissolution de la dolomite.

La teneur en fer dans l’eau est une caractéristique de la nappe de l’Albien. La Figure 5-18 illustre une teneur en fer très variable géographiquement. Les teneurs les plus importantes sont observées pour le sud du Bassin de Paris où l’élément fer atteint une concentration de 8 mg/L (sous forme ferreuse) pour le forage de Montbouy. En Ile-de-France ces valeurs sont très inférieures (autour de 1 mg/L). Cette très nette variation en fer a déjà été soulignée par Vernoux (1997). Des puits de fer par l’intermédiaire de carbonates (e.g. sidérite) peuvent exister en accord avec les indices de saturation. Le fer dissous (Fe2+) résulte de l’oxydation des sulfures dans la partie libre de la nappe ; les variations en fer et en acidité reflètent les zones alimentées par les eaux ayant traversé le front rédox.

Figure 5-18 : Discontinuité de la teneur en fer dans les eaux de l’Albien.