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Chapitre 4. Amélioration multicritère d'options : pilotage de la négociation dans

2.2 Modèles de comportements qualitatifs

Un système complexe peut être caractérisé par des paramètres (ou actions) d’entrée, par exemple la définition précise de toutes les composantes et l’organisation d’une force militaire, ou les paramètres de pilotage d’un système industriel. Le concepteur, l’industriel ou l’exploitant utilise un modèle de préférence basé sur plusieurs critères pour insuffler sa stratégie dans sa politique d’amélioration. Ces critères correspondent souvent à un raffinement des exigences sur les caractéristiques ou attributs du système. Pour l’architecture militaire, ces attributs sont les observables sur le déroulement de la mission opérationnelle et sont en général obtenus par le biais de nombreuses simulations sur des expérimentations d’architectures (Pignon and Labreuche, 2007). Pour le procédé industriel, ces attributs sont des mesures relevées sur le procédé (pureté, concentration, etc.) (Berrah, Mauris and Montmain, 2008).

Une question épineuse lors de la conception de l'amélioration d'un système concerne l’identification de la transformation qui fournit les valeurs des attributs (caractéristiques ou observables) du système obtenues à partir d'un vecteur de paramètres d'entrée. Cette identification requiert de nombreuses simulations ou expériences, et par conséquent est coûteuse et pose vite de sérieux problèmes combinatoires. Pour ces raisons, on doit plus souvent se contenter d’un modèle d’influence qualitatif qui relie paramètres ou actions aux caractéristiques attendues (Felix, 1994) (Felix, 2008) (Chung et al., 2000) (Giorgini et al., 2002) (Gonzalez-Baixaul, do Prado Leite and Mylopoulos, 2004) (Kazman et al., 1994) (Kazman, Klein and Clements, 2000). Par exemple, pour un service de protection radionucléaire, mieux former les agents a une répercussion positive sur le taux d’accidents dans l’industrie nucléaire. Il s’agit là d’une règle d’influence qualitative et non certaine, il serait bien difficile de quantifier le gain en fonction du nombre d’accidents relatif à un personnel mieux formé et un autre moins formé.

Il existe une abondante littérature sur les digraphes de causalité pour décrire les relations entre les variables dans les systèmes complexes. Ce sont des modèles qui ont des objectifs cognitifs et explicatifs. Les cartes cognitives (CM : Cognitive Maps) sont l'une de ces tendances. Une CM est un graphe (digraphe) orienté qui explicite les relations de cause à effet entre les grandeurs d’une structure complexe. Cet outil vise à prédire l'évolution d'un système à l’aide d’inférences causales. Ce type d'inférence estime qualitativement la contribution de la variation d’une de ces grandeurs à l’évolution du système.

Les auteurs de (Pena, Sosso and Guttierez, 2008) fournissent une revue des approches CM et expliquent les différences entre les versions de CM qualitative, floue, probabiliste, bipolaire. Les liens de causes à effets entre les actions et les performances peuvent être interprétés

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comme un modèle d’influence possibiliste comme décrit dans (Montmain and Labreuche, 2009), ou comme un modèle d’influence ordinale floue comme proposé dans (Montmain et al., 2010). Les modèles d'influence causale ont également été largement pris en considération à des fins de diagnostic en automatique et en intelligence artificielle (Gentil, Montmain and Combastel, 2004). L’auteur de (Davis, 1983) a écrit qu'un aspect significatif de la connaissance nécessaire pour analyser les régimes perturbés dans les systèmes complexes est une simple compréhension des mécanismes en termes de causalité. Une structure causale fournit alors un outil conceptuel pour le raisonnement sur la façon dont les changements normaux ou anormaux se propagent dans un système. Dans les approches de diagnostic causal, les nœuds sont les variables et les arcs symbolisent les relations entre eux : les relations peuvent être paramétrées par des gains qualitatifs/quantitatifs ou des paramètres temporels plus complexes (délai, temps de réponse, etc.), ainsi les liens de causalité sont alors étroitement liés aux fonctions de transfert de l’automatique (Montmain and Gentil, 2000). Plus précisément, soit a un ensemble non vide et fini d’actions et

g

un ensemble non vide et fini d’objectifs. Soient g

g

et aa , respectivement un objectif et une action. Les gains entre les actions d’amélioration et les objectifs ne peuvent, généralement, être identifiés quantitativement quand le système est complexe (Montmain and Labreuche, 2009) ; (Montmain et al., 2010). Le modèle de relation action-objectif peut être purement qualitatif : un arc ― a g

‖ (respectivement, ― a g

 ―) indique que l’action a améliore (respectivement, dégrade) l’objectif g. Quand l’influence d’une action peut être caractérisée plus précisément,

un modèle de relation flou entre actions et objectifs est introduit dans (Felix, 1994) (Felix, 2008). Ce modèle introduit deux sous-ensembles flous pour distinguer les actions ayant une influence positive ou négative sur un objectif g : l’ensemble flou des actions qui supportent

une amélioration de l’objectif g est noté Sg, et l’ensemble flou des actions qui dégradent

l’objectif g est noté Dg. Les deux sous-ensembles flous Sg et Dg sont définis par leur fonction d’appartenance :

La fonction d’impact positif de l’objectif g :

( )

g

S a  si l’action a affecte positivement l’objectif g avec le degré  ,

( ) 0

g

S a  , sinon.

La fonction d’impact négatif de l’objectif g :

( )

g

D a  si l’action a affecte positivement l’objectif g avec le degré  ,

( ) 0

g

D a  , sinon.

D’autres travaux que ceux de Felix (Felix, 1994) (Felix, 2008) en génie logiciel (goal oriented system management (Gonzalez-Baixaul, do Prado Leite and Mylopoulos, 2004) (Giorgini et al., 2002)) et en génie industriel (Adaptive Systems (Fleurey et al., 2008) (Fleurey and Solberg, 2009)) proposent aussi des modèles de comportement qualitatifs de systèmes complexes. Par exemple, des contraintes de configuration logique peuvent être ajoutées aux contraintes des actions pour qu’elles soient réalisées conjointement comme proposé dans

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(Fleurey et al., 2008). Dans (Chung et al., 2000), (Giorgini et al., 2002) et (Gonzalez-Baixaul, do Prado Leite and Mylopoulos, 2004) les auteurs présentent les variantes (paramètres, actions) et les objectifs par un arbre ET/OU (les relations entre les variantes (les paramètres d’action dans notre approche) sont représentées par un graphe biparti dans (Chung et al., 2000)). Dans ces travaux un lien entre une variante a et un objectif g peut être de quatre types :

  : si a est réalisée alors g est complètement insatisfait (cas d’une cassure) ;

  : si a est réalisée alors il y a certaines preuves que g soit en partie insatisfait (cas d’endommagement) ;

  : si a est réalisée alors il y a certaines preuves que g soit en partie satisfait (cas d’assistance) ;

   : si a est réalisée alors g est complètement satisfait (cas de production).

Il s’agit de relations d’influences qualitatives permettant de propager la totalité ou une partie des preuves d’une variante a sur un objectif g. Dans (Giorgini et al., 2002), pour chaque objectif g, les preuves de satisfaction et de déni sont modélisées sous la forme d’un couple de valeurs Sat Deng, g . Cette idée semble proche de celle proposée dans (Montmain and Labreuche, 2009) et (Montmain et al., 2010) où les auteurs ont repris le modèle de Félix (Felix, 1994) (Felix, 2008) et la philosophie du modèle de (Fleurey and Solberg, 2009) pour les systèmes adaptatifs en Génie Industriel. En effet, (Montmain and Labreuche, 2009) et (Montmain et al., 2010) ont proposé un modèle qui permet de calculer le degré d’impact sg

d’un sous-ensemble d’actions A sur un objectif g à partir des impacts élémentaires de chaque action aA sur g de la façon suivante :

{ min: ( ) 0} ( ) si { min: ( ) 0} ( ) >{ max: ( ) 0} ( )

( ) 0, sinon g g g g g g a A S a a A S a a A D a g S a S a D a s A          ( 4.1) En posant { : ( ) 0} ( ) min ( ) g g g a A S a Sat A S a    (resp. { : ( ) 0} ( ) max ( ) g g g a A D a Den A D a    ) le degré de

satisfaction (resp. déni ou dégradation) de l’objectif g par le sous-ensemble d’actions A

trouve une même inteprétation dans les deux approches. Ainsi, avec les nouvelles notations, l’équation ( 4.1) est équivalente à :

( ) si ( ) > Den ( ) ( ) 0, sinon g g g g Sat A Sat A A s A    ( 4.2)

Le choix de l’opération « min/max » dans l’inégalité Satg( ) >A Deng( )A est une contrainte de propagation des influences très dure (il faut que la plus petite valeur des impacts positifs soit plus conséquente que la pire des impacts négatifs), de plus chaque impact positif a un droit de veto à travers l’opérateur d’agrégation

{ min: g( ) 0} ( )

g

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elle un point de vue très prudent étant donné le manque de connaissances sur l'importance de chaque objectif dans l’objectif global, le comportement du décideur marque une sérieuse aversion au risque. D’autres combinaisons des impacts élémentaires des actions plus tolérantes peuvent être envisagées comme cela sera discuté dans ce chapitre.