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Mise au point des conditions de culture en excès de cuivre

2. Caractérisation de l’homéostasie du cuivre chez Bordetella

2.2. Article: Streamlining of defenses against copper makes host-

2.4.1. Mise au point des conditions de culture en excès de cuivre

2.4.1.1. Tests de survie ou suivi de croissance

Etudier l’impact du cuivre chez B. pertussis n’est pas simple à cause de ses conditions de culture in vitro. En effet, cette bactérie se développe sur un milieu solide très riche, le Bordet-Gengou agar, qui se compose d’une infusion de pomme de terre supplémentée avec 10% de sang de mouton defibriné. Ce milieu ne permet pas d’ajouter du cuivre à la gélose. Même à faible concentration, le cuivre entraine une hémolyse qui semble impacter la viabilité des bactéries. Il est possible que ce soit l’acidité induite par le cuivre qui influence cette viabilité et cause l’hémolyse. Nous avons à notre disposition deux milieux de culture liquides, les milieux Stainer-Scholte (Stainer and Scholte, 1970) et Thijs (Thalen et al., 1999).

Figure 45 : Photos des tests de survie au cuivre. Les deux photos supérieures représentent le test réalisé en milieu Thijs et les photos inférieures représentent le test en milieu SS. Les bactéries ont été cultivées dans leurs milieux respectifs jusqu’à DO600 = 2 puis exposées aux différentes concentrations en cuivre.

147 Par conséquent, pour faire des tests de survie nous avons exposé les bactéries au cuivre dans des milieux de culture liquides durant 4 heures (temps de doublement de B. pertussis en milieu liquide). Après exposition, des dilutions sérielles ont été déposées sur gélose afin d’estimer l’impact du cuivre (figure 45).

Au travers des images précédentes et de nombreuses autres non présentées ici, nous avons pu conclure que B. pertussis présente une sensibilité extrême au cuivre dans le milieu Thijs, qui est un milieu beaucoup moins riche que le SS. Les différents tests ont montré qu’en milieu SS, c’est davantage la baisse du pH liée à de fortes concentration en cuivre qui induit cette sensibilité plutôt que le cuivre lui-même. Le tampon assurant la stabilité du pH dans le milieu SS est le Tris-base. Ce tampon fort présente l’inconvénient de former des complexes avec le cuivre. Cette propriété fait qu’il est impossible de connaitre la quantité de cuivre libre dans le milieu. Néanmoins il n’a pas été possible de substituer ce tampon par d’autres. Nous avons testé le MOPS, HEPES, phosphate, etc., malheureusement aucune de ces alternatives n’a été à la fois compatible avec le cuivre (précipitation) et la gamme des pH tolérés par B.

pertussis. Nous avons choisi de poursuivre avec le Tris en cherchant des conditions de culture

permettant d’observer des phénotypes (figure 46).

Après de nombreuses tentatives nous avons trouvé des conditions permettant de maintenir le pH du milieu de culture tout en obtenant une bactéricidie sur B. pertussis. Néanmoins, nous avons constaté qu’au-delà de 20 mM le Tris-base altère la croissance de B.

pertussis. De plus, la bactéricidie n’était pas facilement reproductible entre les manipulations.

En revanche, lors des différents tests nous avons constaté qu’en culture liquide en présence de cuivre, on observe une bactériostase dépendante de la concentration en cuivre dès l’inoculum. Notre milieu contient de l’ascorbate qui est un agent réducteur (figure 47).

Figure 46 : Avant dépôt les bactéries ont été cultivées dans du milieu SS standard, puis à DO = 2 les bactéries ont été exposées 4 heures au cuivre supplémenté en Tris base. 1 : SS + 25 mM de tris. 2: SS + 20 mM de tris. 3: SS + 8 mM CuSO4 + 25 mM tris. 4: SS + 5 mM CuSO4 + 20 mM tris. 5: SS standard.

148 Il est probable que l’ascorbate réduise le cuivre sous sa forme Cu1+ la plus toxique et entraine donc ce retard de développement. Les cultures se faisant sous agitation, l’oxygénation va permettre d’oxyder progressivement le cuivre et donc les bactéries pourront commencer à se multiplier, expliquant le retard de croissance au départ.

Ce phénotype étant beaucoup plus reproductible, nous avons choisi d’utiliser les suivis de croissance pour tester la sensibilité au cuivre des différents mutants réalisés au cours de ces travaux (figure 47).

Dans le but de standardiser le plus possible ces suivis de croissance (en particulier pour les études transcriptomiques) nous avons utilisé des solutions stocks de CuSO4 à 62 mM dans la fraction A du milieu SS (ne contenant pas d’agent réducteur) contenant 100 mM de Tris base. Cette solution stock a un pH de 5.5, de cette manière l’ajout de différentes concentrations de cuivre dans les milieux de culture finaux n’altère pas le pH de ces derniers. De plus, cette solution permet d’utiliser du cuivre jusqu’à 5 mM sans dépasser les 20 mM de Tris, afin de ne pas avoir les effets délétères de ce dernier. Enfin nous avons mis au point une solution stock « témoin » ne contenant pas de cuivre mais seulement 100 mM de Tris base, auquel de l’HCl est ajouté pour obtenir un pH de 5.5 comme celui de la solution stock de cuivre. Grâce à ces solutions, nous avons été en mesure d’obtenir des résultats très reproductibles ainsi que d’observer dans nos analyses transcriptomiques uniquement les effets du cuivre et pas ceux de l’acidité ou de l’excès de Tris.

Figure 47 :Courbes de croissances réalisées en utilisant l’appareil Elocheck à différentes concentrations en cuivre dans du milieu SS dont le pH initial est maintenu à 7.2 par une augmentation de la concentration de Tris base.

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2.4.1.2. Impact des sources de soufre dans la croissance et la tolérance au cuivre

Le métabolisme du soufre est décrit dans la littérature comme important dans l’homéostasie du cuivre. Les composés soufrés sont des cibles de la toxicité du cuivre mais également des tampons conférant une certaine tolérance à ce métal. Le glutathion est décrit comme un acteur majeur dans la relation entre les bactéries et le cuivre. Il sert de tampon dans le cytoplasme permettant de diminuer la concentration de cuivre libre. Néanmoins la

formation de ce complexe entre le glutathion et le cuivre Cu1+ entraine la diminution du

glutathion disponible dans cette même cellule. Il se trouve que notre milieu de culture SS contient du glutathion car B. pertussis possède seulement une des deux enzymes nécessaires à sa biosynthèse. La bactérie importe le glutathion du milieu extérieur pour maintenir ainsi son stock cytoplasmique et régénère son stock interne via des glutathion réductases. Nous nous sommes donc intéressés à l’impact du glutathion sur la tolérance au cuivre.

Le glutathion a deux rôles : source de cystéines et maintien du potentiel réducteur dans le cytoplasme. Nous avons vu lors de nos analyses transcriptomiques que le métabolisme des acides aminés soufrés est up régulé en présence de cuivre. La littérature parle également d’augmentation de la synthèse de cystéine en réponse au cuivre. Nous avons donc cherché à savoir si le glutathion joue un rôle dans la tolérance au cuivre et si oui, par quel mécanisme.

Nous avons effectué 3 types de cultures, dans du SS normal contenant du glutathion, dans du SS sans glutathion et dans du SS sans glutathion où la source de soufre que représente le glutathion a été compensée par l’ajout de cystéine (Figure 48).

Figure 48 :Suivi de croissance avec (Ø) ou sans glutathion (-GSH) ou sans glutathion avec ajout de cystéine (-GSH + Cy). Les DO sont mesurées avec un Ultraspec 10. Les barres verticales représentent des déviations standard.

150 En absence de cuivre, il n’y a pas de différence significative entre les différentes cultures. Plus intéressant, à 500 µM de cuivre les deux cultures sans glutathion accusent un léger retard de croissance alors qu’en présence de glutathion le cuivre semble accélérer la croissance bactérienne (vu en comparant les panels de gauche et du milieu). Enfin, en présence d’un large excès de cuivre, dans tous les cas on observe le retard de démarrage d’une vingtaine d’heures décrit précédemment. Néanmoins les deux cultures sans glutathion montrent une sensibilité extrême au cuivre.

D’après ces résultats il est possible de supposer que le cuivre favorise la croissance de la bactérie, mais seulement en présence de glutathion et à faible concentration en métal. La culture à forte concentration en cuivre confirme ces hypothèses. De plus, le glutathion semble essentiel à la tolérance au cuivre et la cystéine ne compense pas son activité. Il est donc probable que ce soit les capacités de chélation ou le potentiel réducteur du glutathion qui confèrent cette tolérance.

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