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Le dispositif expérimental utilisé est celui présenté chapitre1(voir notamment le figure1.8

page27) et les mesures de délai d’ionisation ont été effectuées par la technique RABBIT (voir cha-pitre3). En pratique, 90 % de l’énergie du faisceau initial de 7 mJ sont focalisés sur une cellule de 10 mm de long (selon l’axe du faisceau) contenant du néon au moyen d’une lentille plano-convexe de longueur focale f = 2 m afin de générer un train d’impulsions attosecondes (appelée impulsion XUV dans ce qui suit). Les 10 % d’énergie restants sont utilisés pour le faisceau d’ha-billage.

Les impulsions XUV et d’habillage sont recombinées dans le MBES et interagissent avec un jet de gaz d’argon. Le peigne des différentes harmoniques composant l’impulsion XUV crée un paquet d’ondes électronique à partir des états 3s et 3p . L’ajout de l’infrarouge d’habillage va créer des répliques de ces paquets d’ondes qui vont pouvoir interférer, faisant apparaître des pics satellites (sidebands) au niveau des ordres harmoniques pairs et osciller à deux fois la fréquence laser fondamentale lorsque l’on scanne le retard entre XUV et habillage. La modulation du signal d’un pic satellite d’ordre n pour un canal d’ionisation i (3s ou 3p ) peut alors s’écrire comme (voir chapitre3) :

SBn ,i(τ) = An ,i+ Bn ,icos[2ω0τ − ∆φXUV

n − ∆φAn ,i], (4.8)

∆φXUV

n = Φn+1−Φn−1est la différence de phase entre deux harmoniques consécutives et∆φA

n ,i

est le terme de phase « atomique ». Comme indiqué au chapitre3, ce dernier se décompose en deux termes :∆φA

n ,i= ∆ηn ,i+ ∆ΦCC

n ,i avecηn ,ila phase de diffusion dépendante du canal i etΦCC

n ,i

le déphasage induit par l’ajout du champ d’habillage. À nouveau, ces termes de phase peuvent être exprimés sous forme de délais de groupe par la relation :

τ =∂ Φ ∂ E ∆Φ 2ω0 , (4.9) avec en particulierτW

n ,i = ∆ηn ,i/2ω0 le délai de Wigner. Étant donné que les photoélectrons 3s et 3p sont créés à partir des mêmes harmoniques, il est possible de s’affranchir de la contribu-tionτXUV = ∆φXUV

n /2ω0en calculant la différence entre les phases des pics satellites 3s et 3p pour un ordre harmonique donné, permettant ainsi d’obtenir directementτA

3s− τA

3p. Cet auto-référencement est une méthode très efficace pour extraire le terme de phase atomique en com-pensant exactement le terme de phase induit par la source XUV.

Photoioniser simultanément des électrons 3s et 3p signifie en pratique que le peigne har-monique va créer deux peignes de photoélectrons distincts (un peigne par canal) et l’ajout de l’IR d’habillage donnera finalement deux interférogrammes RABBIT superposés. Ceci présente deux difficultés :

— la section efficace de photoionisation est bien plus faible pour le canal 3s→ "p que pour le canal 3p → "s /"d , comme montré en figure4.3. Au niveau du minimum 3s , le rapport des sections efficaces est notamment d’un facteur 2000 environ ;

— la différence entre les énergies d’ionisation 3s et 3p vaut 13,48 eV= 9ω0 − 0,47 eV, ce qui signifie que les pics harmoniques 3s seront pratiquement noyés sous les pics satellites 3p , en étant légèrement décalés vers les énergies plus élevées. De même pour les pics satellites 3s avec les pics harmoniques 3p .

Pour pallier ces difficultés,Klünder et al.(2011) et Guénot et al.(2012) ont isolé spectra-lement les deux spectrogrammes RABBIT en sélectionnant une gamme spectrale harmonique étroite (H21–H27) à l’aide d’une combinaison de filtres métalliques en aluminium et en chrome. Les harmoniques étaient alors générées dans l’argon afin de maximiser le signal. L’inconvénient majeur de cette approche est qu’elle empêche toute mesure au-delà de∼40 eV d’énergie de pho-ton en contraignant la gamme d’énergie disponible.

Dans cette étude, le néon a été choisi comme gaz de génération pour les mêmes raisons que dans le chapitre2: section efficace plate, énergie de coupure relativement élevée permet-tant de générer des harmoniques couvrant effectivement les régions des minima de Cooper 3s

4.2. Mesures de délais d’ionisation au niveau des minima de Cooper 3s et 3p de l’argon

(∼43 eV) et 3p (∼49 eV). Pour compenser la plus faible efficacité de génération par rapport à l’argon et afin de maximiser le signal harmonique, une lentille de focale longue ( f = 2 m) a été choisie et confère un grand volume de génération. On note que cette longueur focale étant quatre fois plus grande que celle utilisée parGuénot et al.(2012), il en résulte un volume de génération seize fois plus grand (toutes conditions égales par ailleurs). Pour sélectionner la gamme spec-trale la plus large, tout en bloquant le faisceau infrarouge de génération, un filtre en aluminium simple d’épaisseur 200 nm a été choisi. Sa bande passante d’environ 20–72 eV permet d’obtenir un spectre s’étendant alors des harmoniques H13 (E = 20,15 eV) à H45 (E = 69,75 eV). En re-vanche, les deux familles de photoélectrons sont alors pratiquement superposées. Le signal 3s se présente sous la forme d’épaulements sur le côté droit des pics du signal principal 3p , comme montré figure4.4(a) qui compare le spectre XUV+IR intégré en retard IR-XUV avec le spectre XUV seul. On observe effectivement un épaulement sur la partie droite des pics 3p , absent en l’absence d’IR, lorsqu’il n’y a pas de pics satellites. Sur la figure4.4(a), l’effet est le plus visible au niveau des pics harmoniques Hn , 3p, pour lequel l’épaulement qui apparaît est dû aux pics satellites SBn+9,3s. Ceci semble confirmer la présence des pics du canal 3s .

Afin de distinguer les contributions et extraire la phase spectrale des deux canaux, une ana-lyse du type Rainbow-RABBIT est effectuée : l’amplitude et la phase des oscillations à 2ω0sont extraites pour toutes les valeurs d’énergie sur l’ensemble de la gamme spectrale. Une illustration est montrée figures4.4(b) et (c), aux mêmes énergies que pour la figure4.4(a) soit entre 16 eV et 22 eV d’énergie de photoélectron.

Après chaque pic 3p , un saut de phase soudain se produit. En principe, on attend un saut de

π entre harmoniques et pics satellites consécutifs, qui s’explique par la conservation du nombre

total d’électrons. En effet, l’intégrale du spectre d’électrons étant constante avec ou sans IR, l’ap-parition de pics satellites entraîne une diminution du signal des pics harmoniques. À un retard correspondant au maximum d’amplitude des pics satellites, l’amplitude des pics harmoniques est donc minimale et inversement lorsque l’amplitude des pics satellites est minimale. Autre-ment dit, les pics harmoniques et satellites oscillent en opposition de phase (en première ap-proximation), d’où le saut deπ en passant des harmoniques aux pics satellites.

Néanmoins, les sauts de phase observés figure4.4(c) se produisent presque 1 eV avant les pics 3p , toujours sur la droite des pics précédents et sont d’une amplitude inférieure àπ, valeur

effectivement atteinte au niveau des pics. À ces sauts de phase deπ s’ajoutent des sauts

supplé-mentaires, plus faibles queπ et à un peu plus haute énergie que les pics 3p, résultant

visuelle-ment en une petite marche supplévisuelle-mentaire sur la figure4.4(c). Ces sauts ont pu être reproduits par une simulation simple (Alexandridi,2018) prenant en compte les canaux 3p et 3s et dont le résultat est également tracé sur la figure. De plus, la position de ces sauts correspond aux épau-lements montrés figure4.4(a). Ceci montre donc que la phase des oscillations du canal 3s peut effectivement être résolue et extraite, malgré les oscillations du canal 3p , très proches et beau-coup plus intenses. On note que ceci est rendu possible grâce à la haute résolution du MBES. Le fait que les pics 3s soient visibles en amplitude et phase à 2ω0est probablement plus convaincant que dans le cas du spectrogramme intégré en retard (panel (a)), car d’une certaine manière un filtrage spectral a été effectué. En effet, on ne voit que ce qui oscille à 2ω0, réduisant fortement la contribution du bruit. On observe également que les amplitudes à 2ω0des harmoniques et pics

FIGURE4.4 – (a) Spectre de photoélectrons XUV+IR (noir) obtenu par intégration en retard du spectro-gramme RABBIT, comparé au spectre XUV seul (gris), mettant en évidence les épaulements au niveau des pics 3p attribués au signal 3s . Les transitions à un et deux photons correspondantes sont représentées au-dessus pour les deux canaux. (b) Amplitude et (c) phase des oscillations à 2ω0extraites du spectrogramme RABBIT. Dans b), la phase expérimentale est comparée avec celle obtenue par une simulation décrite dans

Alexandridi(2018). La position des pics 3s est représentée avec des pointillés/surfaces rouges tandis que la position des pics 3p avec des surfaces bleues. Les harmoniques sont notées « H » et les pics satellites « SB ».

4.2. Mesures de délais d’ionisation au niveau des minima de Cooper 3s et 3p de l’argon

satellites sont comparables, ce qui est tout à fait normal et prévisible. En conséquence, mesurer la phase d’un pic satellite 3s à côté d’une harmonique 3p est similaire en termes de rapports d’amplitudes que de mesurer la phase d’une harmonique 3s à côté d’un pic satellite 3p . Ceci n’est pas vrai lorsque l’on observe le signal total comme sur la figure4.4(a) : les pics satellites étant moins intenses que les harmoniques, un pic satellite 3s à côté d’une harmonique 3p sera beaucoup moins visible que la situation inverse. Dit d’une autre manière encore, l’information à 2ω0ne possède pas d’arrière-plan parasite (en anglais background free).